Intervention de Lionel Lemoine

Réunion du 17 octobre 2012 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Lionel Lemoine, directeur du département Ressources physiques de l'Institut Carnot Edrome :

Tout le monde est conscient de ce que représentent les ressources minérales des grands fonds. Les métaux stratégiques et les terres rares sont l'objet d'une forte compétition internationale. La Chine, la Russie, l'Inde, la Corée du Sud ont obtenu des permis pour exploiter les nodules et les amas sulfurés dans les eaux internationales.

Les minéralisations les plus intéressantes à nos yeux sont les nodules polymétalliques des eaux internationales. La France, par le biais d'Ifremer, a obtenu un permis qui lui permet d'effectuer depuis dix ans des recherches dans la zone de Clarion-Clipperton. Ces minéraux sont présents sur les encroûtements cobaltifères qui se développent sur les fonds océaniques, sur les substrats durs et dans les zones de faible sédimentation riches en cobalt et en platine. Une chance pour la France : les zones les plus riches se trouvent en Polynésie.

Les matériaux qui suscitent l'intérêt le plus vif sont les sulfures hydrothermaux, qui peuvent présenter des concentrations diverses en métaux – nickel, cobalt, cuivre, terres rares – ainsi que les métaux nobles comme l'or et le platine présents dans des zones volcaniques ou des zones inactives dont la taille va de quelques milliers à quelques millions de tonnes. Eu égard aux ressources minérales, l'outre-mer français présente donc un intérêt évident.

Le Conseil interministériel de la mer nous a permis d'engager un partenariat dans la zone de Wallis-et-Futuna avec l'Agence des aires marines protégées, le BRGM et Areva. Du fait d'un certain nombre de difficultés, c'est avec Technip et Eramet que nous poursuivons l'exploration préalable de la zone. Nous avons trouvé des indices intéressants et nous allons entrer dans la phase d'analyse des écosystèmes profonds.

L'Ifremer a apporté son concours scientifique à l'initiative prise par le Comité pour les métaux stratégiques (COMES) d'établir une stratégie nationale d'exploration à la suite du programme Extraplac. Nous espérons que cette ambition se concrétisera.

L'Institut participe également à une expertise collective, à l'initiative du ministère de l'environnement et avec la coopération du CNRS, visant à parfaire notre connaissance de la biodiversité, du fonctionnement des écosystèmes et de leur impact potentiel. Mais l'exploration exige beaucoup de moyens, en particulier navals. Il faudra sans doute engager des campagnes si nous voulons recueillir des moyens significatifs.

Les énergies marines renouvelables pourraient devenir un élément important du bouquet énergétique outre-mer. Leur part n'est pas encore significative et un effort est en cours pour développer la filière. L'éolien, mais également l'énergie éolienne flottante et l'énergie hydrolienne pourraient intéresser. Des projets sont en cours à la Martinique, en Polynésie et à La Réunion pour utiliser l'énergie thermique des mers. La filière de la climatisation en eau froide doit parvenir à abaisser ses coûts de production, qui vont de 200 à 400 euros le MWh. L'Europe, la Grande-Bretagne et la France se sont engagées pour lever les verrous technologiques. La priorité pour l'outre-mer est d'appréhender le gisement d'énergie pour adapter les structures en mer à des conditions cycloniques. Les acteurs privés sont impliqués et proposent d'ores et déjà des prototypes, dont certains actuellement testés à La Réunion.

Au sein de l'ANCRE, j'anime le groupe chargé des énergies marines renouvelables. Plusieurs consortiums industriels se sont engagés à développer les filières éolienne et hydrolienne pour les amener à maturité à l'horizon 2015.

L'outre-mer doit s'attacher à bien identifier ses ressources pour aider les développeurs à s'implanter, en tenant compte des particularités insulaires, des usages et du stockage de l'énergie. L'institut d'excellence en énergies décarbonées France Énergies Marines aidera la filière à progresser dans des conditions respectueuses de l'environnement.

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