Intervention de Catherine Coutelle

Séance en hémicycle du 29 octobre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Débat sur l’égalité entre les femmes et les hommes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, présidente de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes :

Quels sont, madame la ministre, les domaines qui vous paraissent prioritaires à cause de leur retard préoccupant ?

Le troisième sujet que je souhaite aborder ici est la lutte contre les violences faites aux femmes. La délégation a travaillé sur ce sujet dès le début de l’année, dans la perspective du projet de loi relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes – je salue d’ailleurs le travail de Monique Orphé et d’Édith Gueugneau, pour la délégation. Je peux d’ores et déjà faire un constat : les mesures proposées par le projet de loi égalité correspondent bel et bien aux améliorations que nous avions recommandées. La question des moyens est cependant cruciale, certes comme dans de nombreux cas, mais particulièrement pour ce sujet : aussi mes questions seront-elles très concrètes. Quelle est l’évolution des crédits destinés aux associations nationales de lutte contre les violences sexistes ? Quelle est celle des crédits destinés à l’accueil et à l’hébergement d’urgence des femmes victimes de violences ? Il me semble que la loi Duflot a proposé des avancées dans ce domaine. Pouvez-vous également détailler les moyens et préciser les perspectives de la plate-forme d’écoute 3919 spécialisée pour répondre à ces situations ?

Un second aspect nous intéresse également, celui de la prostitution. Nous avons mené cette année, avec Maud Olivier, des travaux approfondis sur cette violence particulière faite aux femmes et une proposition de loi issue de ce travail de la délégation est actuellement examinée par une commission spéciale, mise en place aujourd’hui même, avec Guy Geoffroy comme président et Maud Olivier comme rapporteure. J’ose croire que ce travail aboutira bientôt à une loi protectrice pour les victimes de la prostitution et qu’il instaurera une sanction pour ceux qui contribuent à pérenniser cette violence. Nous ne croyons pas que la prostitution disparaîtra facilement, mais nous croyons que l’information et la sensibilisation des citoyennes et des citoyens ainsi que le renforcement de la lutte contre les trafics pourront conduire à une diminution de ces situations de violence. Je souligne que le budget présenté cette année commence à tenir compte des actions qu’il faudra mener pour lutter efficacement contre celles-ci. Pouvez-vous nous assurer que l’évolution des crédits permettra de mener les actions nécessaires tant au niveau national que local ?

Enfin, je veux attirer votre attention sur un point transversal : la question des informations et des moyens. Consciente du besoin crucial en la matière, vous avez appelé de vos souhaits la production systématique d’études d’impact, relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes, pour chaque projet de loi. Cette exigence a mis en lumière le caractère parfois obsolète de certaines statistiques sexuées voire leur inexistence. C’est pourquoi, madame la ministre, vous avez lancé la réalisation de la grande enquête Virage II sur les violences et les rapports de genre, la première enquête remontant à l’an 2000. Ses résultats nous seront très précieux. Je sais que nos collègues de La Réunion plaident, à chaque fois, pour une extension de ces enquêtes dans les DOM-TOM. Je m’inquiète toutefois de son financement, car si votre ministère prend une part importante dans son financement, plusieurs ministères sollicités n’ont pas encore répondu. J’ai écrit à Mme la garde des sceaux, au ministre de l’intérieur, au ministre du travail et à la ministre de la santé, afin que ces grands ministères, qui sont à mon sens concernés par les violences faites aux femmes, puissent compléter la part manquante de crédits. Pourriez-vous, madame la ministre, rassurer toutes celles et tous ceux qui attendent avec impatience ces données capitales ? Nous l’avions déjà dit en 2000 : la prise de conscience, ressentie comme un choc par l’ensemble de la nation, qu’une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint a permis qu’une loi globale sur les violence soit adoptée.

Pour finir, je voudrais saluer le travail effectué par les déléguées régionales et départementales aux droits des femmes et savoir si tous les postes sont aujourd’hui pourvus – je leur avais consacré le premier rapport annuel de la délégation, que je vous avais transmis.

Ces constats faits et ces questions posées, je conclus en relevant que, comme vous l’aviez annoncé l’année dernière, un document de politique transversale renforcée nous est présenté aujourd’hui. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir tenu votre engagement. En outre, je me réjouis de voir que votre budget progresse de 3,4 %, provoquant, du fait même de sa progression, un effet de levier vertueux : ce qui est bon pour les droits des femmes est bon pour l’égalité et l’est donc aussi pour la société. La délégation aux droits des femmes continuera de vous apporter son soutien. Comptez également sur notre force de proposition et notre exigence, lors de l’examen de votre ambitieux projet de loi. Je veux enfin m’associer à la citation de Marie-Jo Zimmermann. Nous espérons en effet toutes et tous ici – comme le souhaite une pétition qui circule actuellement – qu’Olympe de Gouges entrera au Panthéon, elle qui a dit à son procès que, puisque la femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune.

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