Intervention de Marietta Karamanli

Séance en hémicycle du 30 octobre 2013 à 21h30
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière-procureur de la république financier — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Les deux projets de lois que nous examinons visent, d’une part, à lutter contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et, d’autre part, à créer un procureur de la République financier si nécessaire.

Je resterai brève, car beaucoup de choses ont été très bien dites. J’insisterai sur les objectifs de ces projets, les raisons d’un nouvel examen par l’Assemblée et les enjeux des réformes proposées.

Le présent texte rétablit certaines dispositions du texte initial, notamment les articles 13 à 15 et 17 à 20 bis, qui redéfinissent l’architecture de la justice économique et financière en supprimant les juridictions régionales spécialisées, en clarifiant les compétences des juridictions interrégionales spécialisées et en créant un procureur de la République financier.

Le parquet financier que le projet de loi entend créer fait ainsi partie d’un ensemble. Celui-ci a pour objectif de renforcer l’information et les prérogatives des administrations fiscale et douanière pour mieux cibler les contrôles, de déceler les fraudes, cela me paraît nécessaire au vu des propos qui ont été tenus tout à l’heure, et bien entendu de faire en sorte que les grands délinquants soient sanctionnés.

Concernant la création même du parquet financier, il s’agit de mettre en place un organe spécialisé d’enquête et de poursuite à compétence nationale bénéficiant de moyens dédiés et s’appuyant sur des magistrats au profil déterminé. Il aura pour objet de traiter exclusivement des atteintes à la probité, de la fraude fiscale complexe à dimension internationale, des délits boursiers mais aussi des infractions à la taxe sur la valeur ajoutée. Comme l’a dit à plusieurs reprises Mme la garde des sceaux, l’institution judiciaire doit être active pour repérer et poursuivre les infractions relevant de ces contentieux.

Si l’architecture de ce texte est a priori cohérente, elle a pourtant été rejetée. N’ayant pu obtenir toutes les garanties concernant la place et le rôle du procureur financier, son indépendance et ses moyens, et prenant appui sur le fait que les procédures judiciaires resteraient conditionnées aux diligences des services du ministère du budget, nos collègues du Sénat ont en effet supprimé l’institution. Ils ont ensuite délibéré, pour la forme, sur le projet de loi organique qui visait justement à assurer audit procureur un traitement au moins équivalent à celui des autres magistrats.

Ils ont fait valoir l’absence de réforme constitutionnelle du Conseil supérieur de la magistrature. Cette réforme n’a pas été adoptée, mais l’intention du Gouvernement est bien d’y parvenir et il n’a cessé d’oeuvrer dans ce sens. Certains ont feint et feignent encore de considérer qu’une réunion du Congrès pour adopter la réforme du CSM est disproportionnée pour mettre en place une parité entre magistrats et personnalités extérieures au sein du conseil.

Vouloir répondre simultanément à toutes les questions posées par un problème complexe, c’est assurément prendre le risque de ne répondre à aucune. Notre volonté est au contraire d’adopter une première réponse.

Pour ce faire, je voudrais revenir aux enjeux de ce texte. Les paradis fiscaux abritent entre 20 et 30 billions, c’est-à-dire de vingt à trente fois 1 000 milliards de dollars d’actifs financiers. Ce manque à gagner est important et conduit certains États au bord de la faillite.

Il est erroné de penser que les assemblées politiques ne peuvent et ne veulent rien faire contre des pratiques délictueuses de très grande portée et portant sur des montants considérables. Pendant des décennies, le secret bancaire a fait de la Suisse une place forte imprenable. Or il a suffi que le gouvernement américain menace de retirer aux banques helvétiques leur licence aux États-Unis pour que celles-ci acceptent de fournir des données bancaires secrètes aux services fiscaux américains. Certains auteurs ont pu évoquer « la force de frappe combinée des grandes nations industrialisées », capable de faire plier n’importe quel paradis fiscal, mafia ou filière délinquante organisée.

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