Intervention de Françoise Descamps-Crosnier

Séance en hémicycle du 30 octobre 2013 à 21h30
Simplification des relations entre l'administration et les citoyens — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Descamps-Crosnier :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues – peu nombreux à cette heure –, le projet de loi qui nous est soumis à l’issue de la commission mixte paritaire ambitionne d’engager un vaste chantier, cela a déjà été maintes fois rappelé : celui de la simplification des relations entre l’administration et les citoyens. Dans un pays comme le nôtre où l’État de droit et son bras armé, l’administration, ont pris, de par l’histoire, une place considérable, simplifier leurs relations avec le corps social peut parfois sembler une gageure. Pourtant, depuis la décision du Président de la République d’engager notre pays dans un choc de simplification, indispensable au salut de sa compétitivité et à la confiance du corps social dans ses institutions, il faut saluer les efforts continus et répétés du Gouvernement pour concrétiser de manière opérationnelle cette volonté de la majorité. À cet égard, ce projet de loi d’habilitation doit permettre de répondre à ce qui est pour les citoyens une exigence. Il fait écho au projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises voté en première lecture par notre assemblée au début du mois, notre excellent collègue Jean-Michel Clément en sait quelque chose pour s’être particulièrement investi sur le sujet.

Le Parlement prend toute sa part de ce travail de simplification normative et administrative, avec un certain consensus dont nous pouvons nous féliciter. C’est donc toute la République qui est tendue vers l’objectif de rationalisation et de simplification de la règle. Notre travail participe de la nécessaire intelligibilité et accessibilité de la loi, objectifs à valeur constitutionnelle. Notre assemblée est donc amenée à permettre au Gouvernement, par ce projet de loi, de procéder par voie d’ordonnances pour faire avancer un certain nombre de sujets, dont la plus grande dématérialisation des procédures administratives n’est pas le moindre. Il s’agit de mettre l’administration en conformité avec les capacités technologiques et les exigences de notre temps. En effet, la façon de vivre et, partant, les attentes de nos concitoyens ont profondément changé ces deux dernières décennies. Ils sont entrés dans l’ère numérique bien plus vite que nos administrations n’ont pu le faire et, chemin faisant, ils sont devenus l’aiguillon de la réforme administrative : le pouvoir central tend moins à indiquer à nos concitoyens le chemin à suivre qu’il ne répond aux nouvelles demandes que le corps social lui adresse.

Le coeur nucléaire du projet de loi en est l’illustration : la transition du régime de refus tacite des administrations vers un régime d’accord tacite en cas de silence des administrations au-delà d’un délai de deux mois lorsque celles-ci sont saisies sur une demande individuelle des citoyens, représente une petite révolution dont je ne suis pas sûre que nous appréhendions encore toute la portée. Alain Richard l’a rappelé lors de l’examen du texte au Sénat : le renversement que nous nous apprêtons à voter consiste à accorder une priorité de principe à l’intérêt particulier sur l’intérêt général, une priorité mais non une supériorité. Il n’en demeure pas moins que réside là un risque que des décisions irrégulières du point de vue du droit puissent passer, ce qui représenterait un manquement inacceptable. Aussi, l’encadrement strict de ce renversement dans le texte apporte des garanties bienvenues.

Mais notre vigilance ne doit pas seulement se borner au droit : celui-ci vit à travers les administrations qui ont la charge de le mettre en oeuvre. À n’en pas douter, cette modification induit pour elles et pour leurs agents un renversement des méthodes de travail. Il s’agit pour le pouvoir central d’accompagner au mieux non seulement ses propres agents dans cette réforme, mais également les agents des autres acteurs publics, je pense tout particulièrement aux collectivités territoriales. Je n’ai pas de doutes sur leurs capacités d’adaptation : s’adapter, c’est un maître mot de nos administrations. Le Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique, en 2008, avait érigé l’adaptabilité au rang de valeur professionnelle de la fonction publique, et les agents qui auront à mettre en oeuvre les mesures prévues par le futur code relatif aux relations entre le public et les administrations auront à coeur de participer à l’amélioration des relations des services publics dont ils ont la charge avec les citoyens-usagers.

Mais il est indispensable, pour éviter les écueils que j’évoquais un peu plus tôt, d’accompagner au mieux le changement. J’appelle particulièrement l’attention du Gouvernement sur cette question essentielle et je me réjouis que vous ayez, madame la ministre, indiqué que les parlementaires, ainsi que les collectivités territoriales, seraient associés aux travaux. Il faut faire oeuvre et vigilance communes sur un tel sujet !

« L’abondance est le fruit d’une bonne administration », nous rappelle Jean Jaurès ; puisse cette idée guider notre action dans la mise en oeuvre de la future loi.

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