Monsieur le président, mes chers collègues, ce traité engage la France dans la réalisation d’un grand tunnel ferroviaire, maillon essentiel du projet Lyon-Turin, pour au moins 2,5 milliards d’euros dès à présent et 20 milliards à terme. À ces prix-là, le grand tunnel et le Lyon-Turin sont-ils vraiment prioritaires ? Pendant longtemps, je l’ai cru, j’ai tenu les mêmes discours et utilisé les mêmes arguments que la plupart d’entre vous : ambition européenne, report modal, partenariat avec l’Italie, créations d’emplois, subventions européennes à hauteur de 40 %… Aujourd’hui, j’en doute sérieusement : je veux donc vous faire part de mes doutes, qui reposent sur des faits.
Le Lyon-Turin est un projet des années quatre-vingt. À l’époque, il était stratégique, en effet, car de nombreux centres de production étaient localisés en Europe où les perspectives de croissance étaient fortes : il fallait donc concevoir un nouvel axe est-ouest, sous peine de prendre le risque que nos routes et notre ligne ferroviaire existante soient saturées. Mais trente ans plus tard, le paysage industriel a été totalement bouleversé : il s’est largement délocalisé, notamment vers l’Asie. Le Lyon-Turin n’a plus le même caractère stratégique car la route qu’empruntent les marchandises s’est déportée.