Intervention de Franck Reynier

Séance en hémicycle du 5 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFranck Reynier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je m’étais inquiété l’année dernière du ralentissement de l’effort financier en faveur de la recherche. Le projet de loi de finances que vous nous présentez aujourd’hui en constitue une nouvelle illustration.

En effet, alors que la recherche semble placée au coeur du débat politique depuis 2012 avec d’abord les assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, puis l’adoption de la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et la recherche, alors que l’innovation est au premier plan des trente-quatre mesures pour réindustrialiser la France et des sept ambitions pour la France de la commission Innovation 2030, force est de reconnaître, à la lecture du projet de loi de finances pour 2014, que vous n’avez pas été en mesure de concrétiser votre ambition.

Non seulement les crédits de paiement dédiés à la recherche, d’un montant de 7,77 milliards d’euros, diminuent de 1 % par rapport à l’année dernière, qui, je le rappelle, connaissait déjà une situation de réduction, mais ce budget risque à nouveau de désorganiser le système de financement sur projet, puisque la subvention de l’Agence nationale de la recherche subit, pour la deuxième année consécutive, une baisse de près de 12 %, d’un montant de 82 millions d’euros, ce qui correspond à la disparition d’une centaine de projets.

Si l’objectif de rééquilibrage des financements en faveur des organismes de recherche peut être partagé, il n’en va pas de même de la méthode retenue. Alors que la Cour des comptes, dans son rapport sur le financement public de la recherche de juin dernier, soulignait qu’il fallait amplifier le financement sur projets en France, qui connaît un retard grandissant par rapport à celui de partenaires étrangers, vous réduisez drastiquement les crédits de l’opérateur chargé de sa mise en oeuvre.

Comment, alors que vous amputez de sa capacité d’action l’un des leviers de la compétitivité en France, notre pays peut-il continuer à établir efficacement des priorités dans ses recherches dans un monde concurrentiel qui demande souplesse et réactivité ?

De même, le taux de sélection des appels à projets de l’ANR, de 18 % seulement en 2013, contraint également de plus en plus les industriels à renoncer à y participer. Il est donc indispensable d’endiguer cette désaffection des industriels vis-à-vis des projets de l’ANR, qui sont l’outil privilégié de la recherche partenariale, secteur dans lequel la France éprouve déjà des difficultés.

Au-delà de ces questions fondamentales pour l’équilibre de la recherche française, je souhaiterais, madame la ministre, appeler votre attention sur certaines difficultés rencontrées plus globalement par les organismes de recherche.

En premier lieu, je souhaiterais aborder la question récurrente de la réserve de précaution. Alors que des efforts substantiels sont demandés aux établissements, le retour aux taux de 0,5 % de la masse salariale et de 7 % des dépenses de fonctionnement et d’investissement, les contraindra à réduire la dotation affectée à leurs unités de recherche. Par conséquent il est vital que les établissements publics scientifiques et technologiques, l’ANR et les établissements publics industriels et commerciaux continuent à bénéficier du taux réduit de mise en réserve.

En deuxième lieu, je voudrais revenir sur les difficultés liées aux modalités de calcul des coûts de gestion induits pour les établissements hébergeurs des projets, par les contrats conclus avec l’ANR. Les organismes de recherche apprécieraient une augmentation de la part des frais généraux de gestion, notamment par référence aux taux qui seront mis en oeuvre par l’Union européenne, ainsi qu’une augmentation du préciput.

En troisième lieu, les règles de recrutement des personnels en contrats à durée déterminée des établissements publics de recherche, en forte progression du fait de l’augmentation des financements sur projets, mériteraient d’être modifiées.

En quatrième lieu, l’absence de connaissance globale par les tutelles des moyens affectés à leurs unités mixtes de recherche et l’inexistence d’une procédure budgétaire impliquant l’ensemble des partenaires de l’unité, empêche le système de financement d’être efficace du point de vue de la puissance publique. Je souhaiterais que soient mis en place, madame la ministre, des outils pour améliorer en priorité cette situation fort préjudiciable à la bonne gestion des ressources publiques.

Enfin, le rapport qui est présenté met en évidence la situation préoccupante du Centre national des études spatiales, d’IFP-Energies nouvelles et du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives.

Malgré une diminution modérée des crédits du CNES entre 2013 et 2014, leur montant reste toujours très en deçà de celui prévu dans le contrat État-CNES et il diminue régulièrement depuis 2011. Des annulations de crédits et une réserve de précaution importante, à hauteur de 28 millions d’euros, contraignent le CNES à ralentir une partie de ses projets, alors que le secteur spatial est moteur pour notre innovation et notre économie.

IFP-Energies nouvelles, acteur majeur de la recherche et développement en matière d’hydrocarbures et en faveur de la transition énergétique, connaît une dégradation de sa dotation le conduisant à présenter un budget en déficit.

Des licenciements, y compris de chercheurs, sont à craindre puisque la dotation pour 2014 est encore en baisse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion