Intervention de Philippe Plisson

Séance en hémicycle du 5 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Plisson, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Dans le contexte budgétaire tendu que nous connaissons actuellement, je ne peux que me réjouir du sort relativement préservé réservé à la MIRES dont le budget augmente pour les crédits de paiement et décroît très légèrement – de 0,77 % – pour les autorisations d’engagement.

La préservation des moyens alloués à cette mission interministérielle traduit bien la priorité accordée par le Gouvernement à la recherche, et c’est pour cette raison que j’ai proposé à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission à la suite de la commission élargie du 24 octobre dernier. Concernant plus particulièrement le programme 190, le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une baisse contenue de 2 % des autorisations d’engagement et une hausse de 1,4 % des crédits de paiement. J’estime que cette évolution est satisfaisante, compte tenu des efforts budgétaires actuels.

Je souhaite néanmoins appeler votre attention sur quelques points qui me semblent préoccupants et qui concernent essentiellement les opérateurs du programme. À l’exception notable du CEA qui bénéficie d’une hausse de 7 % de sa subvention et de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, dont la dotation est stable, ces derniers contribuent tous, bien que diversement, aux nécessaires efforts budgétaires souhaités par le Gouvernement. En effet, les subventions de tous les autres opérateurs sont en baisse. Le moins touché, l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux, l’IFSTTAR, accuse un repli de 1,3 % tandis que le plus affecté, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, l’INERIS, subit une diminution de 17,1 %.

C’est donc ce dernier qui paye le tribut le plus lourd. L’INERIS va devoir supprimer quinze emplois de chercheur par an au cours des trois prochaines années, ce qui semble assez peu cohérent avec l’obligation qui lui est faite, par le contrat d’objectifs signé avec l’État, de consacrer 20 % de son activité à la recherche. Je nourrirais quelques doutes sur le maintien à court terme de la capacité de recherche de cet institut si cette baisse était assortie par la suite des mêmes diminutions – 500 000 euros de mise en réserve et de surgel – qu’en 2013.

Je souhaite aussi vous faire part de mon inquiétude quant à la diminution de 7 % de la dotation budgétaire allouée à l’ADEME au titre du programme 190. Certes, je n’oublie pas que les subventions allouées au titre de ce programme ne correspondent qu’à une partie des activités de recherche de l’ADEME puisque le fonds démonstrateur et les investissements d’avenir financent également de nombreux programmes. Néanmoins, j’appelle votre attention sur le fait qu’un tel resserrement budgétaire, s’inscrivant, qui plus est, dans un contexte d’étiolement continu depuis quatre ans – la dotation au titre du programme 190 a baissé de 43 % par rapport à 2010 –, risque sérieusement d’affaiblir la capacité de l’ADEME à impulser les programmes de recherche et d’innovation nécessaires à la mise en oeuvre de la transition écologique.

Abordons aussi, rapidement, la situation de l’IRSN, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. La diminution de vingt millions d’euros de sa subvention a eu il y a quelques semaines un retentissement médiatique important. Après avoir auditionné les responsables de l’IRSN, il m’apparaît que cet effort n’affectera pas durablement ses capacités de recherche, ce dont je ne peux que me réjouir. Je souhaite néanmoins insister sur le fait que si l’IRSN devait subir à nouveau une baisse d’une telle ampleur, cela l’obligerait à remettre significativement en cause ses programmes de recherche, ce qui obérerait à terme sa capacité d’expertise.

Abordons, enfin, la situation de IFP Énergies nouvelles, ou IFPEN, qui, en l’espace de dix ans, a subi une baisse de 34 % de sa dotation. Depuis trois ans, l’IFPEN présente un budget déficitaire. Cette année, le déficit d’exploitation s’élève à 14 millions d’euros. Pour 2014, la subvention allouée au titre du programme 190 sera en baisse de 2 % et le déficit devrait être de 3 millions d’euros. Les mesures de restructuration drastiques qui ont été mises en place ont entraîné la première grève de l’institut depuis sa création. Les responsables de l’IFPEN estiment avoir atteint un seuil critique. Ils affirment que, si l’institut devait subir d’autres baisses budgétaires, il serait dans l’incapacité de remplir ses missions d’intérêt général. De plus, chaque baisse de 1 % de la dotation entraînerait la suppression de vingt postes. Je ne peux donc que m’inquiéter de cette situation particulièrement tendue. Il m’apparaît souhaitable de relâcher la tension budgétaire imposée depuis plusieurs années à l’IFPEN afin de ne pas mettre en péril son rôle d’innovateur technologique en matière de transports et d’énergie, deux domaines cruciaux pour la transition énergétique.

Je n’ignore, madame la ministre, ni les difficultés du moment, ni l’impérieuse nécessité qui est la nôtre d’oeuvrer au rétablissement budgétaire de notre pays. Cependant, si ces coupes budgétaires devaient perdurer, la démarche devrait faire l’objet d’un audit précis et d’une réflexion politique préalable afin que ce ne soit pas l’impératif budgétaire qui au bout du compte définisse la stratégie, car les coupes financières généralisées risqueraient alors, à court terme, d’asphyxier complètement l’ensemble des organismes concernés.

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