Intervention de Isabelle Attard

Séance en hémicycle du 5 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre délégué, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, une fois encore, le budget de la Mission « Recherche et enseignement supérieur » est en légère augmentation. Le groupe écologiste s’en réjouit. Ce budget fait partie des rares budgets préservés par l’austérité générale du PLF 2014.

Madame la ministre, nous vous remercions surtout d’avoir tenu votre engagement de revalorisation des bourses universitaires. Vous avez créé un échelon 0 bis et un échelon 7. Nous regrettons cependant que cette aide directe aux étudiants les plus démunis soit apportée au détriment des aides indirectes. Je pense notamment à la restauration universitaire et au logement étudiant, ainsi qu’aux crédits destinés à l’action « Santé des étudiants et activités associatives, culturelles et sportives ». La dotation du CNOUS, est en effet en diminution et ces aides indirectes concernent, elles, tous les étudiants.

Pour évaluer l’investissement dans l’enseignement supérieur on utilise la DIE, dépense intérieure d’éducation. Cet indicateur révèle de profondes disparités : la DIE est de 10 940 euros pour un étudiant d’université contre 15 020 euros pour un étudiant en classe préparatoire aux grandes écoles. Ce choix politique délibéré d’investir énormément plus dans les classes préparatoires nous pose, à nous écologistes, un grave problème. Le système français est bien assez élitiste sans que l’on cherche à aggraver la situation. Or nos universités sont dans une situation catastrophique : six pourraient être en déficit en 2013, et quatorze avoir un fonds de roulement inférieur à quinze jours. Avec de telles conditions d’études, je ne vois pas, madame la ministre, comment redorer l’image des universités françaises.

Malgré les problèmes financiers que je viens d’évoquer, nous estimons que les avancées concernant les formations et la vie étudiante vont dans le bon sens, même si elles ne sont pas à la hauteur des besoins exprimés. Il n’en est bien évidemment pas de même pour la recherche.

Les assises de l’enseignement supérieur et de la recherche ont clairement exprimé les besoins en dotations pérennes. Pourtant, la quasi-totalité des organismes de recherche devront encore une fois passer leur temps à chercher des financements complémentaires et néanmoins essentiels. Le budget du CNRS diminue de 0,5 %. Le budget recherche de l’INERIS, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, diminue de 17 %.

L’activité de recherche de l’INERIS est essentielle pour mettre au point des technologies appliquées lui permettant d’assurer ses missions dans le monde industriel. Une grande partie de sa recherche est liée à la mise en oeuvre de la transition écologique : batteries, hydrogène, méthanisation, risques émergents, toxicologie, notamment perturbateurs endocriniens. L’institut mène également des recherches pour mieux connaître les dangers auxquels le recours aux nanoparticules expose la santé humaine.

L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie voit son budget recherche, dans le cadre de la MIRES, diminuer de 7 %. Même s’il ne s’agit que d’une petite partie du budget total de l’ADEME, cette baisse signifie que l’agence s’impliquera moins dans les domaines de recherche que sont l’environnement et la maîtrise de l’énergie, alors que de grandes infrastructures comme la recherche spatiale, le CEA, ou la recherche duale se portent très bien.

Le budget du CEA, déjà en augmentation de 7 % l’an dernier, est à nouveau en hausse de 7, 4 % cette année. Il équivaut, je l’ai déjà dit, à 58 % du budget du CNRS ! Nous nous demandons donc si vous souhaitez réellement encourager le CNRS dans ses missions de recherche publique. La politique d’appels à projets et de mise en concurrence généralisée n’a pas été stoppée, bien au contraire. Le choix de créer les écosystèmes d’excellence marque une fois de plus que la politique menée en matière d’enseignement supérieur et de recherche est dans la droite ligne de celle menée par le précédent gouvernement.

Le système à deux vitesses est maintenu. Les organismes de recherche voient leurs budgets structurels baisser, alors que les crédits supplémentaires sont attribués à des appels à projets. La Cour des comptes a pourtant montré que la mise en concurrence des chercheurs et des organismes était contre-productive.

Enfin, madame la ministre, les parlementaires de la majorité ont amendé votre projet de loi afin de lutter contre la précarité des étudiants. C’est ainsi que nous avons rendu obligatoires les gratifications pour les stages de deux mois et plus. Il nous paraissait important de permettre aux stagiaires de vivre dignement. Depuis l’adoption de cette loi, certaines administrations ont menacé de ne plus prendre de stagiaires si elles doivent les rémunérer. Madame la ministre, vous avez diffusé le 25 octobre dernier une circulaire aux préfets, indiquant que « les conventions de stages prévues pour l’année scolaire 2013-2014 peuvent être conclues sans obligation nouvelle de gratification. »

Nous pensons que la solution aux problèmes posés aux administrations par cette nouvelle obligation est à chercher du côté du financement. L’accueil de stagiaires est une chance pour toute organisation : c’est à la fois l’opportunité de transmettre son savoir et l’occasion de découvrir, au contact du terrain, de nouvelles recrues potentielles. J’aimerais savoir, madame la ministre, pourquoi vous imposez un délai avant d’appliquer cette mesure juste de lutte contre la précarité étudiante.

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