Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 6 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Sport jeunesse et vie associative

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, il faut nous garder, en examinant ce budget de l’action extérieure de l’État, de mesurer le volontarisme de nos politiques à l’aune des moyens qui leur sont consacrés. Ce n’est pas en effet parce que l’on diminue les crédits qu’il y a nécessairement une dégradation de notre politique. Après tout, le baron Louis, qui fut d’ailleurs aussi diplomate et qui avait même été pressenti pour le ministère des relations extérieures, disait : « Faites-moi de bonne politique, je vous ferai de bonnes finances ».

Cependant, si la qualité de notre politique extérieure n’est pas fonction directe du budget qui lui est consacré, il existe tout de même des seuils en deçà desquels il ne reste plus beaucoup de place pour l’action et pour la politique. Nous n’en sommes pas encore là, et nous en sommes même assez loin ; mais pour parler crûment, nous ne sommes plus très loin de l’os, après avoir éliminé tout le gras et taillé assez profond dans la chair du ministère des affaires étrangères.

Je voudrais brièvement évoquer trois points : le redéploiement, les organisations internationales et ce que l’on appelle maintenant la diplomatie d’influence.

Le redéploiement commence à devenir réalité mais, au regard des efforts colossaux de restructuration qu’il nous faudrait entreprendre, cela reste modeste. Un seul exemple : nous avons aujourd’hui 93 agents au Togo et 81 au Nigeria, c’est-à-dire nettement plus d’agents au Togo qu’au Nigeria, ce qui ne correspond pas à une appréciation de l’importance spécifique de ces pays. La qualité l’emporte parfois peut-être : autrefois, M. Myard était en poste au Nigeria. Avec de tels diplomates, la France était certainement fort bien représentée, mais enfin il n’y est plus, et je ne sais pas s’il reste des diplomates de cet acabit au Nigeria.

Par ailleurs, à l’ère des voyages aériens et des télécommunications, le concept des représentations permanentes mérite évidemment d’être revisité. Nombre de nations, non négligeables, ont parfois ce que l’on appelle des laptop ambassadors – pardonnez-moi cette expression : il n’existe pas de traduction française –, c’est-à-dire des gens de grande qualité, qui agissent seuls, descendent à l’hôtel, sont compétents pour plusieurs pays et font un travail qui n’est pas nécessairement mauvais. Je me demande si ce concept ne mérite pas d’être étudié, voire expérimenté.

En outre, plusieurs collègues de la commission des affaires étrangères ont fait remarquer qu’il existait dans certains pays, notamment les États-Unis d’Amérique, plusieurs secrétaires d’État, au nombre de trois ou quatre, auprès du ministre des affaires étrangères, qui parcourent le monde et pourraient nous représenter à bon niveau, en s’appuyant sans cabinet particulier sur l’infrastructure du Quai d’Orsay. Cela nous permettrait, à moindres frais, de démultiplier notre présence ministérielle en coûtant infiniment moins cher qu’une représentation de quatre personnes – parfois relativement médiocres, pardonnez-moi de le dire –, qui n’a pas beaucoup d’influence pour le rayonnement de la France dans un pays donné.

S’agissant des organisations internationales, je ne me réjouis que très relativement de ce que notre contribution baisse, puisqu’elle traduit finalement le recul relatif de la France au titre de sa capacité contributive. On ne doit pas s’en faire une gloire, mais simplement remarquer que l’on recule.

J’insiste sur la nécessité d’être actifs, plus que nous ne le sommes, dans le contrôle de l’utilisation des fonds que nous versons à des organisations internationales, qui restent des modèles de mauvaise gestion et parfois de corruption, y compris du reste dans leurs tâches internationales les plus « régaliennes ». Je vise en particulier les opérations de maintien de la paix, qui peuvent donner lieu à des remarques extrêmement graves et qui, normalement, pourraient envoyer en correctionnelle – si ce n’est pire – un certain nombre d’agents. Il faut que l’on cesse de nous dire que l’argent mis dans les organisations internationales est sanctifié : il est parfois blanchi.

S’agissant de la diplomatie d’influence, le recul des bourses pour les étudiants étrangers en raison d’une raréfaction des crédits est malheureusement dans l’air du temps. Je m’inquiète surtout de savoir si nous avançons dans l’idée de constituer un véritable réseau, connu et entretenu, des étrangers qui ont étudié en France, boursiers ou non.

Cela n’existait pas jusqu’à présent ; Campus France en est aujourd’hui chargé. Il est tout à fait essentiel de disposer d’un outil précis et fiable, opérant un recensement rigoureux par pays de tous ceux qui ont étudié en France – en particulier les boursiers, mais pas seulement –, et animant ce réseau des alumni français de telle ou telle institution universitaire et éducative française. Cela doit devenir un outil d’influence et un outil pratique de relations publiques pour la diplomatie française.

Pour conclure, le ministre des affaires étrangères n’est pas là, mais un ministre qui connaît Cognocoli-Monticchi est évidemment qualifié pour la diplomatie, cela va de soi ! S’il était là, j’aurais dit au ministre des affaires étrangères que si la réduction des moyens n’empêche pas de faire progresser notre diplomatie, il en est au fond un excellent exemple puisqu’il fait progresser la diplomatie française avec des moyens en baisse. Voilà pourquoi notre groupe apportera son soutien à ce budget.

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