La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Sylvain Berrios, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
Les anciens combattants et les retraités sont en colère ! Les sages-femmes sont en colère ! Les commerçants et les professions libérales sont en colère ! Les policiers et les militaires sont en colère ! Même les vétérinaires sont dans la rue, pour la première fois depuis cinquante ans ! C’est toute la France qui est en colère !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Les Français sont en colère, car vous les avez trompés.
Vous leur avez promis l’emploi, mais le chômage n’a jamais été aussi élevé.
Vous leur avez promis le pouvoir d’achat, mais ils sont matraqués d’impôts.
Vous leur avez promis la maîtrise de la dette publique, mais celle-ci atteindra 96 % du PIB en 2015.
Aujourd’hui, dix-huit mois après votre prise de fonctions, l’heure de vérité a sonné ! Vous avez pris l’engagement de ramener le déficit public à 3,6 % du PIB en 2014 et à 3 % en 2015. Le budget que vous proposez au Parlement français n’est pas conforme à un tel engagement. La Commission européenne vient de vous rappeler à l’ordre avec sévérité. Or, depuis cette année, celle-ci peut exiger des changements si le budget de la France n’est pas conforme aux objectifs fixés.
Ce n’est plus seulement la crédibilité de votre gouvernement qui est en cause, c’est aussi la crédibilité et la souveraineté de la nation ! La France, monsieur le Premier ministre, est au bord du chaos !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Quand prendrez-vous conscience de la situation ? Quand changerez-vous enfin de politique ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Je laisse de côté, monsieur le député Sylvain Berrios, le procédé oratoire dont vous faites usage, car tout ce qui est excessif est en réalité assez insignifiant.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Vous n’êtes pas le porte-parole des Français,
Protestations sur les mêmes bancs
qui ont légitimement désigné, lors de l’élection présidentielle, ceux qu’ils souhaitaient voir diriger le pays.
Quant aux prévisions de la Commission européenne, ce que vous en dites est absolument mensonger.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Tout d’abord, celle-ci a validé les prévisions de croissance du Gouvernement : 0,2 % en 2013, au sein d’une zone euro en récession, 0,9 % en 2014 et 1,7 % en 2015.
Cela montre non seulement que nous sommes sortis de la récession, mais aussi que la reprise qui s’amorce est solide et crédible. La Commission européenne a également reconnu le sérieux de notre politique budgétaire. Dois-je rappeler qu’à notre arrivée aux responsabilités, les déficits publics se montaient à 5,3 % du PIB ? Aurai-je la cruauté de rappeler qu’il en aurait été de même en 2012 si nous n’avions pas agi ?
Ils se sont élevés à 4,8 % en 2012. Ils s’élèveront à 4,1 % en 2013, chiffre validé par la Commission européenne, à 3,6 % en 2014 et seront inférieurs à 3 % en 2015. Voilà la vérité ! Tout cela est dû à l’effort réalisé par les Français et à la politique menée par le Gouvernement avec le soutien de la majorité, afin de redresser la situation des finances publiques ainsi que l’appareil productif français et de réparer les dégâts de votre politique d’échec et d’injustice ! Voilà la vérité !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe RRDP.
Il y a un an, M. Louis Gallois remettait son rapport sur la compétitivité de la France. Il dressait un constat très sévère de l’état dans lequel nous avons trouvé notre pays : montée du chômage, explosion du déficit du commerce extérieur, disparition de 750 000 emplois industriels entre 2002 et 2012, investissement en berne.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Il soulignait aussi les atouts extraordinaires de notre pays.
À la suite de ce rapport, le Gouvernement a lancé le pacte pour la croissance, la compétitivité et l’emploi. Avec la Banque publique d’investissement et l’accord sur l’emploi, ce pacte traduit la volonté forte du Président de la République, de son Gouvernement et de sa majorité : la bataille pour l’emploi, la modernisation en profondeur de notre économie, de notre dialogue social, de nos entreprises.
Mêmes mouvements.
Ce pacte, qui s’adresse directement aux entreprises et aux salariés – y compris aux PME, qui ont trop souvent été les grandes oubliées des politiques publiques au cours des dernières années –, comporte des mesures concrètes et pragmatiques pour répondre à l’urgence et définir la stratégie de la France dans la mondialisation. C’est le sens du crédit d’impôt compétitivité emploi, de la structuration des filières industrielles, de la montée en gamme, des stratégies d’innovation, de la nouvelle France industrielle.
Certains démagogues voudraient aujourd’hui enfermer la France derrière de nouvelles lignes Maginot, mais l’histoire nous a montré ce que devenait notre pays lorsqu’il suivait les apôtres du repli. Nous, nous sommes à l’offensive pour aider nos entreprises à être dynamiques et à redevenir conquérantes.
Mêmes mouvements.
Monsieur le ministre, pouvez-vous dresser devant la représentation nationale un bilan des premiers résultats de ce pacte ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le député, j’avoue que je préfère le ton de votre question à celui de la précédente.
Rires et exclamations sur divers bancs.
Votre question va en effet me permettre d’exposer positivement et objectivement ce que fait le Gouvernement.
Le 5 novembre 2012 – il y a exactement un an – M. Louis Gallois dressait un diagnostic dans son rapport et montrait à quel point les dix années de droite avaient dégradé la compétitivité de l’économie française
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Au problème qui se posait à nous, nous avons choisi de répondre, non par l’austérité, l’inégalité ou l’injustice, mais, vous l’avez dit, par la montée en gamme, par l’innovation, par le renforcement de notre offre productive et de notre industrie, qui se trouvaient dégradées.
Présenté il y a un an par le Premier ministre, le pacte de compétitivité constitue une approche globale, notamment par les coûts, parce que nous avons besoin de reconstituer les marges des entreprises, qui avaient elles aussi été dégradées, afin de leur permettre d’investir à nouveau. Un an après l’entrée en vigueur de ce pacte comportant 35 mesures, quel bilan peut-on en faire ?
Le premier constat, c’est que les 35 mesures sont toutes, sans exception, en passe d’être engagées. En ce qui concerne le CICE, je veux dire à quel point cette mesure est nécessaire : elle a d’ores et déjà permis d’éviter la destruction – ou permis la création – de 30 000 emplois.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
D’autres mesures relatives au financement de l’économie – je pense notamment à la Banque publique d’investissement et à la création du PEA-PME – permettent d’éviter que notre pays cesse de perdre des parts de marché à l’export
Mêmes mouvements.
La France se redresse en même temps que son offre productive – et ce n’est pas fini, puisque le Premier ministre a annoncé avant-hier, à Saint-Étienne, un plan pour l’innovation. Voilà le sens du pacte de compétitivité : c’est une oeuvre s’inscrivant dans la durée pour redresser le pays, et ça marche !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Avant de poser ma question, monsieur le président, je voudrais commencer par dénoncer les attaques dont a fait l’objet Mme Taubira, ministre de la République. À travers elle, ce sont tous les ultramarins qui se sentent concernés – et aujourd’hui, nous tenons à lui dire notre solidarité.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC, écologiste,GDR, sur de nombreux bancs du groupe UDI et sur plusieurs sur les bancs du groupe UMP.
Ma question s’adresse à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, et porte sur la drépanocytose, la maladie génétique la plus répandue au monde et en France. Elle touche probablement plus de 20 000 patients connus et 400 nouveau-nés sont atteints chaque année, dont la moitié en Île-de-France. C’est une maladie très invalidante, fréquente, mais pourtant très méconnue. Sa prévalence dans notre archipel de la Guadeloupe a été l’occasion pour différentes équipes de chercheurs du Centre caribéen de la drépanocytose Guy Mérault, en lien avec l’INSERM et divers centres de recherches de référence, de mettre en place un système très efficace de dépistage néonatal, systématique depuis 1984, et un programme global de contrôle et de suivi des drépanocytaires.
Les excellents résultats obtenus, non sans mal, dans la prévention et la lutte contre la maladie, ont été possibles grâce à l’abnégation des chercheurs. En dépit du contexte contraint de réduction des dépenses de santé, il convient de soutenir la lutte entamée par le centre, de sorte qu’il puisse continuer de mener à bien sa mission de dépistage et de prise en charge de cette pathologie reconnue comme une priorité de santé publique.
Par ailleurs, comme dans les départements français d’Amérique, la maladie est endémique dans les pays avoisinants. Un réseau caribéen de chercheurs de la drépanocytose, le CAREST, vient d’être créé en vue d’une plus grande efficacité, par une mutualisation des moyens comme des connaissances et une coopération régionale et professionnelle, entre chercheurs et praticiens des territoires de la Caraïbe.
Madame la ministre, quels moyens supplémentaires pourriez-vous dégager afin d’accompagner ces professionnels dans l’accomplissement de l’indispensable mission de service public qu’ils sont appelés à assumer, afin de permettre à de nombreuses familles d’espérer un avenir meilleur ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.
Monsieur le député, vous avez raison d’insister sur l’enjeu majeur de santé publique que représente la drépanocytose, en particulier aux Antilles. C’est une maladie génétique grave, héréditaire, qui se manifeste par des anomalies des globules rouges. C’est à juste titre que vous en soulignez l’importance : ce sont en effet 10 000 malades qui sont connus et suivis en France, et 400 nouveau-nés qui sont atteints chaque année, en particulier aux Antilles et en région parisienne.
Outre-mer, les nouveau-nés font l’objet d’un dépistage systématique, tant cet enjeu de santé publique est important. Vous avez souligné que des mesures ont d’ores et déjà été prises pour appuyer le centre de référence guadeloupéen, d’une importance essentielle aux Antilles. Ces mesures ont permis de financer des appareils d’exploration fonctionnelle, ainsi que des médecins et des professionnels paramédicaux.
Je veux qu’ensemble, nous allions plus loin. Le développement de la télémédecine, auquel j’accorde une importance particulière dans le cadre de la stratégie nationale de santé, doit permettre de faire face à l’éloignement des centres de référence et de compétence dans le traitement de la drépanocytose. Outre-mer, nous devons également mettre l’accent sur l’éducation thérapeutique, qui permettra aux parents de mieux accompagner leurs enfants et aux adultes de mieux se prendre en charge. Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour lutter contre le développement de la drépanocytose et offrir à tous nos compatriotes, partout sur le territoire national, une prise en charge de qualité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s’adresse à Mme Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’y associe les députés Bruno Nestor Azerot et Jean-Philippe Nilor.
La baisse des universités françaises dans les classements internationaux a conduit au vote de la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, qui porte votre nom, madame la ministre. Pour retrouver son rang, la France vise, à travers cette loi, à créer des ensembles universitaires plus attractifs en termes de capacités et de qualité. Quoi de plus juste et de plus naturel ?
Ce qui étonne et désole, c’est que, dans le même temps, vous participez au démantèlement en pièces détachées de l’université Antilles-Guyane, sans consulter toutes les parties prenantes fondatrices. C’est un parti pris antidémocratique !
Je rappelle que j’ai plaidé en vain, dans le passé, pour une autonomie renforcée des trois pôles de cette université et le maintien des liens qui les unissent et ce, dans le respect et l’équité. J’ai plaidé en vain pour une présidence tournante. Je plaiderai toujours en ce sens, quel que soit le statut politique, présent et à venir, des territoires concernés. À cet égard, l’université des West Indies, étalée sur trois pôles principaux – Barbades, Jamaïque et Trinidad – constitue un modèle.
Madame la ministre, prenez l’initiative de réunir les communautés des trois pôles, les responsables de l’université, les présidents des collectivités et les parlementaires des territoires concernés pour préserver ce legs commun, qui représente, comme vous le dites, une formidable opportunité de développement dans nos zones géographiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Monsieur le député Alfred Marie-Jeanne, ma collègue Geneviève Fioraso vous prie de bien vouloir l’excuser : elle se trouve au CNRS, à l’occasion de la visite du président équatorien.
Il n’y a ni démantèlement, ni procédure antidémocratique, ni décision précipitée. Nous avons dû répondre à une situation d’urgence sur le pôle guyanais. Un gouvernement doit décider : nous l’avons fait, en définissant une feuille de route bienveillante et large, offrant toutes les possibilités. Le pôle guyanais, vous le savez, souffre de retards et de handicaps. Il fallait y remédier avant de répondre aux revendications exprimées depuis de longues semaines et qui ont conduit au blocage de ce pôle universitaire. Les solutions qui seront trouvées ne préemptent en aucune manière celles qui seront définies en faveur des pôles martiniquais et guadeloupéen.
D’autres parlementaires ont déjà exprimé une demande similaire. La ministre Geneviève Fioraso a exprimé le souhait de recevoir tous les élus, tous les parlementaires, préalablement à la prise de décision. Aucune décision, j’y insiste, ne sera prise sans l’accord préalable des élus, des collectivités territoriales et de la communauté académique : rien de plus démocratique !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question, à laquelle s’associent toutes mes collègues députées UMP, s’adresse à M. le Premier ministre.
Je vais vous parler de personnes qui nous aident à donner la vie et auxquelles nous avons recours à un moment très important de notre existence : je veux parler des sages-femmes. Elles assurent avec conscience et dévouement une mission noble pour notre santé, pour nos grossesses et pour notre bien-être.
Mes collègues députés UMP et moi-même les recevons actuellement dans nos circonscriptions.
Monsieur le Premier ministre, les sages-femmes sont en grande souffrance. Leurs compétences se sont accrues ces dernières années, en matière de prévention et de dépistage, dans l’intérêt des femmes. C’est pourquoi la Cour des comptes, dans son rapport, a recommandé une meilleure valorisation de leurs compétences, ce qui en ferait des professionnelles de premier recours pour la grossesse, le suivi gynécologique de prévention et la contraception.
Les sages-femmes sont en grève depuis le 16 octobre. Le mouvement national gagne du terrain et, demain, soutenues par des chefs de service de maternités, plus de 20 000 d’entre elles manifesteront.
Les sages-femmes ont deux revendications : être reconnues, d’une part, comme intervenant en premier recours des femmes en bonne santé et, d’autre part, comme personnel médical hospitalier. Elles méritent d’être écoutées.
Pourtant, à ce stade, Mme la ministre de la santé et des affaires sociales n’a pas daigné les recevoir personnellement.
« Hou ! » sur les bancs du groupe UMP.
Comment interpréter l’absence totale de réaction de sa part ? Pourquoi ce défaut d’écoute ? S’agit-il de mépris ? Que doivent-elles faire pour être entendues ? S’habiller en footballeur, comme l’ont fait en vain celles de Chambéry, le jour où le Président de la République a reçu les footballeurs ? Ou encore se déguiser en Leonarda pour retenir l’attention (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI) –M. Valls appréciera ? Ou mettre un bonnet rouge, à l’instar des Bretonnes ? Demandez l’avis de M. Le Foll !
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous demander à Mme Touraine de recevoir personnellement les sages-femmes, ou allez-vous le faire vous-même ? Quelle est votre position sur leurs légitimes revendications ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)
Madame Louwagie, les sages-femmes jouent un rôle essentiel dans notre système de soins…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
…et méritent mieux que les caricatures que vous présentez.
Protestations sur les mêmes bancs.
Elles ont été longuement reçues par la commission des affaires sociales et la délégation aux droits des femmes. Mon ministère est en contact avec elles, et nous sommes en train d’engager des discussions.
La politique de santé du Gouvernement repose sur la mise en oeuvre d’une stratégie nationale de santé
Mêmes mouvements
qui reconnaît la nécessité d’une coopération entre l’ensemble des professionnels de santé autour du patient ou de la patiente. Les sages-femmes ont évidemment un rôle majeur à jouer en ce domaine, et je souhaite qu’il soit pleinement reconnu.
C’est ce que je leur ai dit le jour où j’ai annoncé les orientations de la stratégie nationale de santé. Les sages-femmes jouent un rôle lors de la naissance, avant la naissance, pour accompagner la maternité, et après la naissance.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Mes chers collègues, je vous en prie. Quelle image donnez-vous de notre assemblée !
Elles jouent aussi, plus généralement, un rôle majeur auprès des femmes.
Je veux vous rappeler, madame la députée, que lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, nous avons débattu du renforcement des prérogatives des sages-femmes, à l’initiative du Gouvernement, notamment pour favoriser l’aide à la contraception des femmes et le sevrage tabagique. Aujourd’hui, les sages-femmes se mobilisent pour une meilleure reconnaissance de leur travail.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Le 13 novembre prochain, elles seront reçues au ministère pour que puisse s’engager la concertation sur la revalorisation de leur métier, qu’elles demandent. Cette concertation sera menée dans un esprit d’ouverture, et il en sera de même pour l’évolution de leur statut.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Huées sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le Premier ministre, le tissu économique breton souffre. Plans sociaux après plans sociaux, les salariés sont victimes de stratégies auxquelles ils sont étrangers. Face à cette situation, qui est aussi une réalité pour toutes les régions de France, une colère s’est exprimée. Elle a pris pour cible la taxe poids lourds, qui n’est que le bouc émissaire de difficultés qui existent depuis plusieurs années.
Le Gouvernement a fait des gestes exceptionnels…
…pour créer les conditions du dialogue et de l’apaisement en suspendant la taxe poids lourds puis en faisant procéder au démontage d’un portique par les services de l’État.
Dans cette voie de l’apaisement et du dialogue, monsieur le Premier ministre, nous vous avons soutenu. Cela doit permettre de définir ensemble des solutions durables tant pour la crise bretonne que pour la mise en oeuvre d’une taxe poids lourds dont tout le pays, et singulièrement la Bretagne, a besoin pour financer les infrastructures ferroviaires tant attendues.
Mais une nouvelle étape a été franchie hier avec cet ahurissant ultimatum. Le comble, c’est de voir qu’un mouvement qui se revendique comme une mobilisation de défense des contribuables se traduit par des centaines de milliers d’euros d’argent public qui partent en fumée dans des incendies de portiques. C’est insupportable. Les Français, et particulièrement les Bretons, n’acceptent pas cette dérive qui n’a plus rien à voir avec le droit de manifester.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et RRDP.
Il est particulièrement choquant que des élus, y compris sur ces bancs, refusent de condamner de tels actes.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Porter un bonnet rouge n’autorise pas tout !
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour mettre en oeuvre tout à la fois le dialogue et le respect de la loi ?
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur de Rugy, nous sommes dans une démocratie et c’est une chance, car ce n’est pas le cas partout dans le monde. Et une démocratie, cela se défend et se respecte. Le droit de manifester est un des droits fondamentaux des citoyens, mais l’application de la loi, le refus de la violence font aussi partie des principes républicains que je souhaite voir respecter par tous et partout.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.
Monsieur de Rugy, samedi dernier, une grande manifestation a eu lieu à Quimper.
Celle-ci représente précisément le droit des citoyens à exprimer ce qu’ils ressentent et ce qu’ils attendent. Cette manifestation, qui a rassemblé de nombreuses personnes, s’est déroulée globalement sans heurts, l’appel au calme ayant été compris par les organisateurs. Force est cependant de constater que, malgré cela, il y a eu des dégradations et que des agents de la force publique ont subi des outrages et des violences. Je dois saluer ici, et toute la représentation nationale devrait également le faire, le sang-froid, le professionnalisme des forces de l’ordre. Leur travail est difficile, ils le font dans le respect de la loi votée par le Parlement.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP ainsi que sur de nombreux bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Je sais que ces violences sont le fait d’une minorité, de groupes extrémistes. Pour autant, elles sont inacceptables. C’est pourquoi toutes les informations utiles ont été transmises au parquet. Les personnes identifiées dans le cadre de ces violences font actuellement l’objet de convocations devant le tribunal correctionnel de Quimper.
Plusieurs procédures ont également été ouvertes après des dégradations sur des biens publics, vous l’avez évoqué à l’instant, monsieur de Rugy.
Quel que soit le bien public – un portique, un radar –, que ce soit une école ou un équipement sportif, qu’il dépende d’une région, d’un département, d’une ville ou d’un quartier, ce n’est pas acceptable et c’est contraire aux lois de la République.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
J’appelle chacun à la responsabilité.
Une fois encore, je fais la différence entre cette minorité et l’immense majorité des citoyens qui, en Bretagne comme ailleurs, quand ils expriment une angoisse ou une protestation, souhaitent que les choses se mettent en marche, en mouvement. Il n’y a qu’un moyen d’y parvenir : le dialogue ; telle est la volonté du Gouvernement.
En dépit du fait que quelques-uns expriment des ultimatums qui n’ont pas lieu d’être, au moment où je vous parle le préfet de région rencontre heure par heure, conformément à ma demande, tous les partenaires qui veulent que les choses avancent, qui veulent le dialogue : les responsables économiques, les représentants des organisations syndicales, les élus des territoires, les parlementaires. Ces rencontres ont commencé hier. Tous sont aujourd’hui au travail pour répondre à la proposition que j’ai faite au nom du Gouvernement : préparer le plan pour sauver et rénover l’agroalimentaire en Bretagne, préparer le pacte d’avenir.
Pour ma part, je suis tout à fait confiant s’agissant du pacte d’avenir, car j’ai bien vu qui venait.
Et ceux qui ne viennent pas ont tort. Ceux qui n’étaient pas venus la semaine dernière ont compris leur erreur et sont maintenant eux aussi autour de la table. Je veux vous dire ici que le Gouvernement est prêt à aller vite. Il a pris une mesure d’apaisement courageuse : la suspension de l’écotaxe, à l’échelle non pas seulement de la Bretagne mais de toute la France. Je souhaite que d’ici à la fin du mois de novembre nous soyons en mesure de signer le pacte d’avenir,…
…notamment les mesures en faveur des entreprises agroalimentaires. Je souhaite que toutes les forces s’y mettent. Et si c’est le cas, alors j’irai signer ce contrat en personne avec ceux qui l’auront préparé.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
Telle est la volonté du Gouvernement, mesdames messieurs les députés, une volonté forte et claire : le dialogue, le respect de la loi républicaine, le refus de la violence, l’ambition partagée pour la Bretagne et pour la France.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.
La parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à vous, monsieur le Premier ministre : entendez-vous les nombreux maires de France, quelle que soit la taille de leur commune, qui expriment leur mécontentement et leur découragement, quand ce n’est pas un sentiment de révolte ? Je ne parlerai pas du découpage des cantons et des atteintes portées à la représentation des territoires ruraux
Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.
, ni de votre volonté d’exclure de cette assemblée les maires, tous les maires, qui sont pourtant au coeur de l’action, comme si vous vouliez opposer la France d’en haut à la France d’en bas. Pauvre France !
L’État baisse fortement les dotations des communes et la Cour des comptes attaque leur gestion et leurs dépenses sans se préoccuper des conséquences sur l’investissement et l’emploi, alors qu’elles doivent offrir des services publics de qualité à leurs concitoyens, faire face aux conséquences sociales du chômage qui s’accroît et se doter des moyens pour lutter contre la délinquance et l’insécurité car l’État n’assume plus aujourd’hui ses responsabilités et se décharge sur les collectivités locales.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Pauvre France !
Que penser justement de la réforme des rythmes scolaires, qui constitue un nouveau transfert de responsabilité aux maires alors qu’elle ne prouve pas son efficacité pour l’enfant, qu’elle crée des inégalités d’une commune à l’autre, qu’elle nécessite des moyens humains et matériels considérables et qu’elle va coûter cher, dans le temps, aux contribuables ?
Êtes-vous prêt à reporter son application, car la réussite fondée sur le consensus vaut mieux que l’échec dans la précipitation ? Et surtout, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous rassurer les élus locaux qui s’interrogent sur l’avenir de leurs communes, leur capacité à agir et leurs moyens, malgré tous leurs efforts de gestion rigoureuse ? Ils ne veulent pas, et vous le savez, s’associer à votre matraquage fiscal et augmenter les impôts locaux !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la décentralisation.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur Perrut, je vais essayer dans mon intervention de vous apporter la preuve que le Gouvernement a entendu les préoccupations de nos parlementaires.
Je souhaite tout d’abord vous indiquer que, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2014, deux objectifs ont été recherchés. Le premier est de réparer et de réduire les difficultés auxquelles les collectivités territoriales ont été confrontées.
Le second objectif est de participer au redressement de la France en demandant des efforts tant à l’État que, il est vrai, aux collectivités territoriales. Cet effort a été demandé à l’issue d’un long travail avec l’ensemble de nos partenaires, lequel nous a permis de conclure un pacte de confiance et de responsabilité.
Concernant en particulier les communes, j’insiste sur le fait que si l’effort demandé s’est élevé à 840 millions d’euros, j’en suis bien consciente, des compensations ont été apportées, en matière de péréquation tant horizontale que verticale.
Les conditions de la péréquation ont d’ailleurs été améliorées, puisque les calculs tiennent compte désormais du revenu par habitant et de l’effort fiscal des ménages.
Par ailleurs, un ensemble de mesures a été pris pour résoudre les difficultés que nous avions connues notamment avec la suppression de la taxe professionnelle. Ces mesures ont toutes été acceptées lors des débats que nous avons eus. Je suis sûre qu’elles participeront au bon maintien de l’activité de nos communes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC. - Quelques députés du groupe SRC se lèvent.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.
Au moment où le Gouvernement a engagé le redressement des comptes publics et la réduction des déficits dont il a hérité de la précédente majorité,… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
…au moment où l’État demande une participation importante aux citoyens pour s’acquitter de l’impôt, il est logique de s’attaquer à l’évasion fiscale, qui représente entre 40 et 80 milliards d’euros, soit presque 20 % de nos recettes publiques.
La fraude fiscale est un sport international qui n’est pas lié au niveau des impôts dans le pays qui en est victime. C’est un fléau qui nourrit le sentiment d’inégalité des citoyens devant l’impôt. Cet argent qui est soustrait à l’État manque au fonctionnement de tous nos services publics ; il prive nos collectivités de ressources, alors qu’il permettrait de financer, entre autres, les retraites et les hôpitaux.
C’est l’équivalent du budget de l’éducation nationale qui s’évapore. Les contribuables honnêtes et ayant l’esprit citoyen doivent compenser cette perte.
Je salue le travail des parlementaires qui ont largement contribué au texte sur la fraude fiscale que nous avons examiné. L’Assemblée nationale a définitivement adopté hier le projet de loi contre la fraude et la grande délinquance économique et financière par 358 voix contre 198. L’UMP a voté contre ce texte, malgré les déclarations de leur porte-parole en séance hier. Il est vrai qu’un député de leurs rangs déclarait en août dernier que les délinquants financiers n’avaient rien à faire en prison.
Pour notre part, nous avons voté cette loi qui renforce considérablement les moyens des administrations fiscales et douanières, de la police et de la justice dans la lutte contre les fraudeurs. Ce texte alourdit les sanctions encourues par les contribuables qui se sont soustraits à leurs obligations. C’est une avancée considérable pour la France, une première étape capitale qui est franchie contre l’évasion fiscale des particuliers. Certes, il reste du chemin à parcourir pour arrêter ce que Yann Galut, rapporteur du projet de loi, appelle le « pillage de l’État ».
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, quels résultats vous attendez de ces dispositions qui viennent s’ajouter aux mesures que vous avez déjà prises ? Quelles sont les étapes suivantes pour mettre en place des dispositifs efficaces au niveau européen ? Quelle politique comptez-vous mener contre l’optimisation fiscale ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Madame la députée, vous nous interrogez sur les résultats que nous attendons de la lutte contre la fraude fiscale pour le budget 2014. Nous comptons récupérer près de 2 milliards de recettes.
Je veux indiquer à la représentation nationale que chaque euro que nous récupérons auprès de Français qui fraudent est un euro de moins prélevé sur ceux qui acquittent l’impôt depuis longtemps.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs des groupes écologiste et RRDP.
Vous avez raison, c’est une mesure de justice. En effet, dans un contexte où tous les Français et toutes les administrations sont appelés à l’effort, lutter contre la fraude fiscale est une manière de dire que le redressement des comptes publics passe par un respect des principes de la République et de la justice.
Nous avons pris une cinquantaine de mesures depuis 2012 à travers la loi de finances rectificative de la fin de l’année et la loi de finances pour 2013, sans oublier la loi que vous venez de voter, laquelle institue des dispositifs nouveaux pour lutter contre la fraude fiscale.
D’abord, nous avons décidé de lutter contre l’optimisation fiscale à laquelle se livre un certain nombre d’entreprises. Cela passe par une inversion de la charge de la preuve pour le transfert de bénéfices à l’étranger,…
…mais aussi par un durcissement des conditions de déduction des intérêts des bénéfices, de manière à ce que les entreprises ne soient pas tentées d’optimiser leur impôt en minimisant leurs bénéfices en France, par exemple en en transférant une partie à l’étranger.
Nous avons aussi décidé – je veux saluer, à cet égard, le travail du rapporteur, Yann Galut, et de Mme Mazetier – d’aller plus loin, dans la loi de lutte contre la fraude fiscale, en renforçant les peines encourues par les contribuables ayant depuis longtemps oublié d’acquitter leurs impôts. Nous voulons également mieux articuler l’action de l’administration de Bercy et celle de l’administration fiscale. Enfin, une circulaire a été prise qui a conduit 4 000 Français en contravention avec le droit à se présenter devant l’administration pour régulariser leur situation.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Édouard Fritch, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la garde des sceaux, en préambule, face aux attaques injustes et indignes dont vous êtes la victime et qui nous blessent tous ici,
Murmures sur quelques bancs du groupe UMP
je veux vous dire que ce n’est pas là l’image que nous avons de notre République et vous exprimer la totale solidarité du groupe UDI et de son président, Jean-Louis Borloo.
De nombreux députés des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur certains bancs du groupe UMP.
Le drame qui s’est déroulé ce week-end à la prison de Baie-Mahault en Guadeloupe vient une nouvelle fois mettre en lumière le problème de la surpopulation carcérale.
Vous n’ignorez pas qu’en la matière la prison de Nuutania, en Polynésie française, détient la triste palme nationale, avec une surpopulation supérieure à 328 %, selon des données d’août 2012. Bientôt, en moyenne, cinq détenus devront se partager les onze mètres carrés d’une cellule.
Des travaux ont été engagés pour la construction d’un nouveau centre pénitentiaire à Tahiti, ce dont je vous remercie. Mais des crédits étaient inscrits pour la rénovation et la modernisation de l’actuel centre de Nuutania. Il faut dire que l’état sanitaire de cet établissement n’est plus tolérable et que les conditions climatiques tropicales, que vous connaissez bien, ne nous sont pas favorables. Or il semble que ces travaux ne soient plus à l’ordre du jour. Pouvez-vous me confirmer que les crédits destinés à la rénovation ont été retirés ? Si c’est bien le cas, pouvez-vous nous en donner la raison ?
Parallèlement au sureffectif chronique des détenus, le taux d’encadrement, notamment par les officiers, n’est que de 60 %. Nous souhaitons connaître les solutions que vous entendez proposer pour combler ce retard.
Plus généralement, madame la garde des sceaux, nous sollicitons auprès de vous l’envoi d’une mission pour évaluer les vrais besoins au sein de la future prison de Papeari, mais également pour traiter la question du tribunal foncier, dont j’ai déjà eu l’occasion de vous saisir. En d’autres termes, venez en Polynésie pour mieux vous rendre compte de nos problèmes !
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés,
De très nombreux députés des groupes des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP se lèvent et applaudissent longuement
je vous remercie très chaleureusement. Je veux prendre quelques secondes pour vous remercier du fond du coeur pour le soutien que vous m’avez toujours manifesté.
Je remercie Jean Glavany pour la très belle question qu’il a posée la semaine dernière. Il a trouvé à la fois l’amble, le ton et les mots qui convenaient.
Je redis également ma profonde gratitude à M. le Premier ministre qui, dès la première minute, m’a manifesté son soutien sans faille. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
J’ai été témoin de son émotion vive lorsque les déclarations en question ont été proférées.
Je veux saluer également, même si ce n’est pas le lieu de le faire, le Président de la République qui, lui aussi, dès la première minute, puis à deux reprises en Conseil des ministres, a fait des déclarations solennelles, évoquant une agression contre le pacte républicain.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.
Je remercie tous les députés – je dis bien tous – qui ont manifesté d’une façon ou d’une autre leur réprobation à l’égard de telles pratiques et de tels propos.
Monsieur Fritch, je viendrai très volontiers en Polynésie, mais vous savez qu’il faut dégager du temps pour arriver jusque chez vous, pour y rester un peu et pour y revenir. Dès que ce sera possible, je le ferai, bien entendu.
En ce qui concerne l’établissement de Faa’a Nuuatania, vous avez raison : sa capacité d’accueil est de 165 places, alors qu’il héberge 401 détenus, ce qui représente une surpopulation de 243 %. Nous construisons un établissement à Papeari qui aura une capacité de 390 places et qui coûtera 118 millions d’euros, intégralement financés par le ministère de la justice ; la livraison en est prévue en 2016. En attendant, nous avons entamé des travaux à Faa’a ; 590 000 euros ont été engagés pour construire une station d’épuration et 120 000 euros pour améliorer les conditions de détention et de travail. Nous avons également lancé des travaux de mise aux normes en matière d’électricité. Mais je constate, monsieur le député, que mon temps est écoulé. Je vais donc vous écrire très précisément sur ces questions. Je vous ai déjà fourni, d’ailleurs, un certain nombre de réponses sur ce sujet comme sur les deux autres, notamment celui des effectifs.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur certains bancs du groupe UDI.
La parole est à Mme Valérie Lacroute, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre Marisol Touraine, vous n’avez pas répondu à la question de Mme Louwagie. J’espère que vous prendrez le temps de recevoir les sages-femmes et que vous témoignerez un peu de considération à ces personnes qui ont donné la vie !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Protestations sur les bancs du groupe SRC.
J’en viens à ma question. Monsieur le Premier ministre, plusieurs semaines après la rentrée des classes, les parents sont plus que jamais mobilisés contre la réforme des rythmes scolaires.
Les appels à manifester se multiplient et, quand ce ne sont pas les parents qui grognent, ce sont les enseignants, les personnels et, désormais, les syndicats. Les maires, quelle que soit la taille de leur commune, expriment également leur mécontentement.
Je suis maire de Nemours et députée d’une circonscription plutôt rurale, où la plupart des maires sont sans étiquette politique.
« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.
Je sais que le travail mené actuellement pour la mise en oeuvre de votre réforme conduit à une situation désastreuse : des activités mal ou pas organisées ;…
Protestations sur les bancs du groupe SRC.
À vouloir aller trop vite, la réforme se prend les pieds dans le tapis. Les maires sont inquiets et en colère. Vous imposez de nouvelles dépenses aux communes, alors que les dotations de l’État baissent, que les subventions des régions et des départements s’amenuisent. Pour obéir au ministre de l’éducation nationale, les communes devront faire des choix, supprimer des actions municipales ou tout simplement faire payer ces activités. Les familles apprécieront !
L’heure n’est plus à l’augmentation de la dépense publique locale sans concertation. Laissez les maires gérer leur commune et leur programme ! Ils ont été élus par leurs administrés, non par un ministre. Vous le savez, la concertation s’organise : une grève nationale est annoncée le 14 novembre pour dénoncer cette réforme. Monsieur le Premier ministre, suspendez cette réforme, comme vous l’avez fait pour l’écotaxe !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée, vous avez raison : il faut faire des choix. J’ai eu le bonheur de me rendre lundi en Seine-et-Marne. Votre département avait fait l’objet de ma première visite ministérielle après ma nomination, car il est celui qui a le plus souffert pendant les dix ans où la droite était au gouvernement, avec les plus bas taux d’encadrement.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Vous avez grévé le pays d’une dette publique mais aussi une d’une dette éducative considérable.
Nouvelles protestations sur les bancs du groupe UMP.
Je voudrais simplement vous donner les chiffres qui concernent votre académie.
« Répondez à la question ! » sur les bancs du groupe UMP.
En 2011, 546 postes ont été supprimés, suivis par 555 postes en 2012.
Nouvelles protestations et bruit sur les bancs du groupe UMP.
Pour la rentrée 2013, ce gouvernement crée 835 postes.
Mêmes mouvements. - Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous avons fait le choix de la réussite des élèves de France : pour cela, nous créons des postes, nous formons à nouveau les enseignants, nous allons chercher les décrocheurs, nous modifions les cycles, nous révisons les programmes. (Mêmes mouvements.)
Nous vous demandons de faire, vous aussi, un choix et un effort : faites en sorte que tous les enfants de France bénéficient d’un bon temps scolaire. Lundi, j’étais à Torcy : cette commune est passée aux quatre jours et demi. J’ai rencontré les parents, les élus locaux, les enseignants. Les uns et les autres se félicitent de cette réforme, même si des aménagements restent à faire.
Protestations sur les bancs du groupe UMP.
Vous avez tort de politiser, vous avez tort de vous contredire, vous avez tort de ne jamais choisir le point de vue des enfants et de l’avenir !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le président, ma question, à laquelle j’associe Mme Lagarde, s’adresse au ministre de l’intérieur. Hier, à Dumbéa, une balle a traversé un bus transportant une quinzaine de passagers. Bilan : un blessé. Il y a trois semaines, dans le quartier de Kaméré, à Nouméa, sur fond de beuverie et de violences conjugales, un homme a tiré sur un groupe de personnes. Bilan : un mort et deux blessés.
Il y a un mois, à la tribu de Ba, sur la commune de Houaïlou, une dispute entre frères a dégénéré. L’aîné, ivre, a tiré sur le cadet et retourné l’arme contre lui. Bilan : deux morts. Ces douze derniers mois, on dénombre huit homicides par arme à feu en Nouvelle-Calédonie, soit le triple de la moyenne nationale.
Les raisons de cet état de fait sont nombreuses. L’alcool joue trop souvent un rôle majeur dans ces drames qui endeuillent notre pays ; pour autant, l’État dispose d’une compétence importante en la matière. La réglementation applicable en matière d’armes et de munitions a été considérablement simplifiée par un décret d’avril 2009. Depuis lors, les ventes d’armes et de munitions ont été multipliées par trois. Les Calédoniens sont légitimement inquiets. Le Haut commissaire de la République et la procureure de la République ont indiqué publiquement leurs réserves sur cette libéralisation.
Un nouveau décret doit être pris prochainement, comme cela a été le cas dans l’Hexagone et dans les départements d’outre-mer en juillet 2013. Monsieur le ministre de l’intérieur, dans quel délai ce décret réglementant les armes et les munitions en Nouvelle-Calédonie sera-t-il publié ? Vous engagez-vous à ce que les conditions applicables en la matière soient beaucoup plus restrictives que celles que nous connaissons aujourd’hui ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Monsieur le président, monsieur le député, mon collègue Manuel Valls regrette de ne pouvoir vous répondre. Il est retenu en Espagne par un exercice européen de sécurité civile.
Vous me permettrez de m’exprimer au nom du Gouvernement et de dire mon émotion après le décès, hier soir, d’une jeune femme sapeur-pompier. Elle a trouvé la mort alors qu’elle partait en intervention. Que sa famille, ses collègues et l’ensemble du corps des sapeurs-pompiers soient assurés de notre soutien.
Le régime de détention, d’acquisition et de transport des armes spécifique à la Nouvelle-Calédonie date de 1982. Sa modification par un décret de 2009, entré en vigueur en 2011 a donné, vous avez raison, le sentiment d’une libéralisation.
Entre-temps, un texte a été adopté le 6 mars 2012 à l’unanimité. Il n’est pas encore entré en application en Nouvelle-Calédonie. Un décret est en préparation et le Gouvernement envisage d’être beaucoup plus restrictif dans le régime spécifique qui sera appliqué à la Nouvelle-Calédonie. Cela devrait intervenir avant la fin de l’année : nous souhaitons aboutir très rapidement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Yves Nicolin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, permettez-moi de vous lire la lettre d’un de mes administrés, chef d’entreprise à Roanne.
« Enfant sans diplôme, c’est à force de travail et de sacrifices que j’ai pu devenir un entrepreneur reconnu dans le monde du chocolat où j’emploie cinquante salariés.
Roanne, ma ville, fut longtemps une ville paisible. Je ne la reconnais plus aujourd’hui !
Je fais désormais partie du lot banal des victimes de violence en tous genres : maison cambriolée une première fois, vandalisée quelques jours plus tard, entreprise cambriolée à six reprises malgré les innombrables mesures de sécurité, et enfin il y a quelques jours, secourant un automobiliste pris à partie par cinq voyous, je suis tabassé et aspergé de gaz lacrymogène.
De récents faits divers montrent que de courageux citoyens ont eu, hélas, il y a quelques semaines moins de chance, puisque leur assistance à personne en danger leur a valu la mort.
Mes enfants ? Régulièrement insultés, battus pour un simple regard ou une cigarette refusée, petites misères en comparaison de cette jeune Roannaise violée et torturée au bord du canal qui depuis s’est suicidée cet été…
Ces faits parlent-ils à quelqu’un dans cette assemblée ou sont-ils d’une terrifiante banalité ?
Notre pays court un grave danger car si vous, dirigeants, ne prenez pas conscience de l’abîme dans lequel nous nous enfonçons, c’est que vous êtes aussi sourds et aveugles que cette noblesse qui faisait la fête quand le peuple mourait de faim.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Aucun signe annonciateur de la révolte qui grondait ne fut pris en compte mais le 14 juillet 1789 résonna comme un coup de tonnerre dans le royaume de France.
Pour le pouvoir en place, il était trop tard.
Mesdames et messieurs les ministres, mesdames et messieurs les députés, pour l’instant les Français encaissent,…
…courbent l’échine, travaillent quand ils le peuvent, et souffrent en silence…
Mais attention, le ressort se comprime, il sera bientôt au taquet.
Nous avons fait du film Orange mécanique, qui nous avait horrifiés en son temps, un cauchemar quotidien.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Rappelez-vous cette phrase des Templiers : "La force n’est rien sans la justice, mais la justice n’est rien sans la force" ». Cette lettre est signée : François Pralus, entrepreneur.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.
Monsieur le député, s’agissant de la délinquance – et le témoignage que vous venez de lire peut être entendu –, le Gouvernement ne cherche pas à nier la réalité ni à dresser d’élogieux bilans à partir de statistiques plus ou moins manipulées.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
La réalité est là, partagée et attestée par des chiffres : entre 2002 et 2012, les violences contre les personnes ont augmenté de 27 % !
La question est double. Il s’agit tout d’abord d’avoir une connaissance objective de la réalité, sans essayer de la nier, ce que nous reprocheraient à juste titre les Français. À cette fin, le Gouvernement a choisi la voie de la transparence, en publiant par exemple les chiffres de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. Même quand ces chiffres ne sont pas bons, parce que le logiciel a changé ou qu’il a enregistré des faits qui n’étaient pas pris en compte auparavant – vous le savez parfaitement, pour connaître ces dossiers, notamment en zones de gendarmerie –, nous les assumons. Nous assumons cette situation parce que c’est à cette seule condition que nous pourrons apporter des réponses et c’est là, sans doute, que nous n’allons pas être d’accord.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Le Gouvernement, en effet, ne se contente pas de commenter des statistiques : il lutte contre la délinquance, ce qui suppose, avant tout, d’engager les moyens nécessaires. En la matière, je ne pense pas que vous puissiez vous poser en donneurs de leçons après avoir supprimé 13 700 postes entre 2007 et 2012.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Aujourd’hui, le Gouvernement a créé des postes, répondant ainsi aux attentes des Français. Nous sommes transparents, responsables et déterminés à lutter contre la délinquance.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, les Français ont pu être troublés en apprenant hier le rejet de la réforme des retraites par le Sénat.
« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Ce débat était pourtant très intéressant, car il a permis de mettre en évidence les positions dogmatiques de la droite qui, plus que jamais, s’est évertuée à dépecer toutes les avancées sociales contenues dans ce texte.
Trois amendements de la droite suffisent à éclairer leur position : remise en cause de la progressivité de la retraite – avec eux, c’est soixante-cinq ans tout de suite, et pour tout le monde –, remise en cause du système par répartition – c’est-à-dire des fondements de notre modèle social, hérité du Conseil national de la Résistance, ce qui conduirait à une baisse des pensions –, suppression de la prise en compte de la pénibilité au travail.
La réforme des retraites que vous avez négociée avec les partenaires sociaux comporte de nombreuses avancées. Pour la première fois, la pénibilité, les temps partiels et le travail précaire sont réellement pris en compte, les inégalités entre les femmes et les hommes réduites, un effort a été réalisé en direction du monde agricole, mais aussi de la jeunesse avec la considération des années d’études.
Les débats sur le compte pénibilité, qui doit bénéficier aux 300 000 travailleurs victimes d’inégalité dans l’accès à la retraite en bonne santé, révèlent à quel point le progrès social gêne encore la droite.
Oui, l’intégration de la pénibilité dans la durée de cotisation, promise par tous les gouvernements depuis vingt ans, est essentielle. Notre majorité tiendra bon sur cet engagement et le compte pénibilité verra bien le jour le 1er janvier 2015.
Madame la ministre, la réforme des retraites reviendra prochainement dans notre assemblée. Une fois de plus, nous soutiendrons votre projet, qui concilie pérennisation financière du système par répartition et réduction des inégalités. Pouvez-vous nous redire la détermination du Gouvernement à avancer sur cette question ?
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Madame Poumirol, vous avez parfaitement résumé la situation de ces six jours de débats au Sénat. Oui, les sénateurs socialistes ont voté contre le texte issu des débats
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Ce vote était non seulement inévitable et attendu, mais il était nécessaire. En effet, au bout de six jours de débats, nous nous sommes retrouvés avec un texte qui n’avait ni queue ni tête, un texte dévoyé, un texte dénaturé
Exclamations sur les bancs du groupe UMP..
Oui, mesdames et messieurs de l’opposition, au Sénat, l’UMP a montré le vrai visage de la réforme qu’elle voudrait porter.
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe UMP.
Au Sénat, l’UMP a défendu le régime par capitalisation, alors que le Gouvernement défend l’avenir de nos régimes de retraite par répartition.
Au Sénat, l’UMP a bataillé contre la pénibilité parce qu’elle ne peut pas admettre que l’on prenne en compte la diversité des parcours professionnels. Au Sénat, comme ici, l’UMP a bataillé contre les droits des jeunes, les droits des femmes, les droits des apprentis, les droits de toutes celles et tous ceux qui doivent se reconnaître dans nos systèmes de retraite. (Mêmes mouvements.)
Évidemment, il était impensable de voir adopté un texte qui n’avait plus de financement et ne comportait plus de mesure de justice, plus de mesures de pilotage.
Avec vous, ici, nous allons pouvoir travailler – et je remercie la majorité de son soutien – pour engager une belle et grande réforme pour l’avenir de nos retraites, qui nous permette de consolider financièrement nos régimes par répartition, d’en finir avec le pilotage à vue grâce à un comité de suivi pérenne et responsable, et d’offrir de nouveaux droits à celles et ceux qui ont connu des carrières professionnelles plus difficiles.
Oui, une réforme des retraites juste et responsable est possible, et le Gouvernement y travaille avec la majorité.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Dans toute la France, monsieur le Premier ministre, vous êtes en train de redécouper les cantons en vue de l’élection des conseillers départementaux en mars 2015.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.
Au lieu de lutter contre l’insécurité et la délinquance, votre ministre de l’intérieur consacre toute son énergie et son inventivité à ce qui n’est qu’un charcutage partisan.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
En premier lieu, tout le monde sait que la nouvelle carte des cantons a été dessinée par le cabinet du ministre et par les responsables socialistes de chaque département.
« Exact ! » sur les bancs du groupe UMP.
La consultation des conseils généraux a été purement formelle, de même que celle du Conseil d’État, puisque le Gouvernement n’est pas obligé de suivre son avis.
En deuxième lieu, la nouvelle carte est incohérente : vous ne respectez ni les bassins de vie, ni les limites des intercommunalités, alors que c’est vous qui venez de les remodeler.
Applaudissements les bancs du groupe UMP.
C’est la mort programmée des territoires ruraux, ces territoires qui ont déjà tant de mal, monsieur Peillon, avec la réforme catastrophique des rythmes scolaires.
Enfin, votre travail n’est guidé que par des calculs politiciens. Vous savez bien que les Français vont sanctionner votre politique dans les urnes.
Dès lors, ce nouveau découpage cherche à limiter les dégâts. Dans mon département, par exemple, il faudra beaucoup plus de voix pour élire un conseiller départemental de droite que pour en élire un de gauche.
« Mais non ! » sur les bancs du groupe SRC.
L’égalité des citoyens devant le suffrage est bafouée. Allez-vous, monsieur le Premier ministre, cesser ce hold-up sur les départements et vous consacrer aux problèmes des Français ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.
Vous le savez, monsieur le député : le redécoupage en cours
« Scandale ! » sur les bancs du groupe UMP.
est le résultat d’une loi que vous avez combattue, mais qui n’en est pas moins désormais la loi de la République et dont l’un des grands acquis consiste à prévoir pour les départements un scrutin binominal afin d’instaurer enfin la parité entre conseillers généraux.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Vous avez combattu cette loi et c’est votre droit, mais je le répète : elle est désormais la loi de la République.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.
Le Conseil constitutionnel a été saisi. Le juriste que vous êtes, monsieur le député, sait bien que le Conseil a été très précis s’agissant des critères applicables au redécoupage, particulièrement pour l’un d’entre eux.
Votre Assemblée avait énuméré un certain nombre de critères auxquels le Gouvernement s’était associé, et le Conseil constitutionnel les a hiérarchisés en rappelant sa jurisprudence : le critère principal consiste à ce que chaque voix soit traitée de manière égalitaire.
À partir de là, le projet de redécoupage a été élaboré selon une procédure que le Gouvernement n’a pas inventée, puisqu’elle a été utilisée par d’autres gouvernements.
Il me semble d’ailleurs que votre bord politique a une grande expérience en la matière !
Ce projet a été soumis aux conseils généraux puis au Conseil d’État, dont l’avis sera naturellement publié. Toute la procédure est contrôlée. Cessez de dire que les critères auraient été inventés par le Gouvernement : ils ont été fixés par le Conseil constitutionnel et sont appliqués dans votre département comme ailleurs, monsieur de la Verpillière. J’ajoute, même si ce n’était peut-être pas là votre objectif, que le nombre d’électeurs par canton dans votre département pouvait varier de un à dix avant le redécoupage, et que cet écart est de 1 à 1,5 désormais.
Il y aura donc non seulement la parité, mais aussi la démocratie !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Conformément aux engagements du Président de la République, le Gouvernement a fait de la lutte contre la vie chère en outre-mer l’une de ses priorités. Dès le début de cette législature, nous avons voté la loi de régulation économique, dont les premiers résultats se font déjà sentir, notamment grâce aux boucliers qualité-prix qui ont entraîné une baisse de 10 % à 13 % du prix des produits de grande consommation, ce qui favorise un pan non négligeable de la production locale.
Toutefois, le prix des carburants pèse encore lourdement dans le pouvoir d’achat des ménages. Suite à la crise sociale de 2009, le précédent Gouvernement avait décidé de réglementer le prix des carburants selon un mode de calcul établi par le décret du 10 novembre 2010. L’objectif initial était de compenser le manque à gagner des compagnies pétrolières locales, filiales de Total. Entre 2011 et 2012, cette formule de calcul a abouti au résultat inverse : l’augmentation considérable des revenus de ces sociétés. Le Gouvernement actuel s’est donc engagé à le modifier.
Ce sujet, dont vous vous êtes emparé, monsieur le ministre des outre-mer, depuis décembre 2012, impliquait des phases de discussion et d’arbitrage. Aussi, pouvez-vous nous informer du contenu de la réforme et nous rassurer sur son calendrier de mise en oeuvre ?
Je comprends votre impatience, madame la députée, mais croyez-moi : les choses avancent. Le Premier ministre a arbitré le contenu, le périmètre et le calendrier de sortie de ce décret. Vous avez raison : le précédent décret de 2010 n’a pas rempli ses objectifs, puisqu’il s’agissait de compenser des marges qui nous semblaient trop importantes.
Notre objectif est de publier ce décret avant la fin de l’année, pour une entrée en vigueur à compter du 1er janvier 2014. Le 28 octobre dernier, nous en avons adressé le projet à l’Autorité de la concurrence, dont l’avis préalable est obligatoire et qui devrait le rendre avant la fin du mois de novembre. Les cinq départements et les quatre régions d’outre-mer ont d’ores et déjà été saisis de ce projet de décret et les préfets ont reçu pour instruction de les communiquer pour information à l’ensemble des opérateurs concernés. Enfin, le Conseil d’État est en cours de saisine, et nous espérons que cette grande institution pourra rendre son avis dans les meilleurs délais.
Vous le voyez : le train est bien parti, et le décret sera publié prochainement. Je précise que les gérants de stations-service ne sont plus inclus dans le périmètre concerné. Il s’agit de permettre aux entreprises de dégager des marges raisonnables et équitables, et de garantir le juste prix au consommateur !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Décret sur les carburants en outre-mer
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Christophe Sirugue.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs au sport, à la jeunesse et à la vie associative (no 1428, annexe 46 ; no 1429, tome X).
La parole est à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.
Monsieur le président, monsieur et madame les rapporteurs, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, mesdames, messieurs les députés, si 2013 a été l’année des efforts structurels pour le ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, 2014 est celle des premiers résultats au service du cap que j’ai fixé depuis plus d’un an.
En 2014, le budget total de ce ministère s’établit à 833 millions d’euros hors fonctions supports, soit 1,3 milliard d’euros en les comptant. Il connaît une hausse de 14 %.
Cette hausse résulte du deuxième volet du Programme d’investissements d’avenir : 100 millions d’euros seront alloués au ministère dont j’ai la responsabilité pour financer des programmes de soutien à l’autonomie des jeunes portés par les territoires.
Cet effort budgétaire sans précédent est la traduction en actes de la priorité pour la jeunesse du Gouvernement, mobilisé au travers du Comité interministériel de la jeunesse qui sera désormais réuni chaque année. En février 2013, il a établi une feuille de route autour de quarante-sept mesures. Trois exemples : la garantie jeunes pour l’insertion des plus en difficulté, la garantie universelle des loyers, le développement de la mobilité internationale.
Les dépenses que l’ensemble de l’État consacrera en 2014 à la jeunesse témoignent de cet engagement. Elles s’établissent à 81 milliards d’euros, en hausse de 1 % par rapport à 2013 et de 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2012.
S’agissant spécifiquement de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », les crédits sont, hors PIA, stabilisés en 2014. Cette stabilité des dotations, dans un contexte de redressement des comptes publics, permet la mise en oeuvre des priorités que j’ai fixées à ce ministère.
En matière sportive, le cap est clair : l’accès au sport pour tous, le sport comme outil de santé publique, le rayonnement de la France sur la scène internationale, l’accompagnement individualisé des sportifs de haut niveau, la préservation de l’éthique du sport.
Cette feuille de route trouvera son aboutissement dans la loi de modernisation du sport qui sera présentée en 2014 pour renouveler le modèle français de partenariat entre l’État, les fédérations sportives et les collectivités.
Mais cette stabilité des dotations résulte aussi de profondes réformes structurelles. Elles concernent notamment des dossiers qui menaçaient l’avenir de ce ministère et que j’ai sécurisés. Deux exemples : la gestion du Stade de France, qui a pesé à hauteur de 114 millions d’euros sur le budget de la mission – c’est désormais fini – et le Centre national pour le développement du sport, dont nous construisons l’avenir en concertation avec les élus locaux et le mouvement sportif.
Après le redressement financier en 2013, l’année 2014 sera celle du retour aux missions d’origine, avec des principes partagés : simplifier les procédures, renforcer l’autonomie des commissions territoriales, mieux cibler ses interventions vers l’emploi sportif et la construction d’équipements de proximité…
Le ministère s’engage aussi pleinement dans la bataille pour l’emploi. Sur les 70 000 emplois d’avenir concrétisés au 1er novembre, plus de 12 000 s’exercent dans les métiers de la jeunesse et du sport. Nous avons déjà atteint les deux tiers de l’objectif, fixé à 10 % des 150 000 emplois d’avenir. Nous le dépasserons en 2014, au bénéfice des jeunes, des clubs sportifs, des associations de jeunesse et d’éducation populaire.
Le succès de cette bataille pour l’emploi repose également sur les associations. Pour la deuxième année consécutive, il n’y a pas de baisse des dotations nationales qui leur sont dédiées – FONJEP, FDVA, conventions nationales… Les fédérations sportives voient également leurs crédits globalement stabilisés après une année d’efforts.
Sur le plan fiscal, nous avons contribué, avec le ministre du budget, à la mise en place de l’abattement de la taxe sur les salaires, adopté en même temps que le crédit d’impôt compétitivité emploi. Cela représente 314 millions d’euros d’allégements de charges pour les associations au 1er janvier 2014.
Sans associations enfin, pas de réussite de la montée en charge du service civique : 149 millions d’euros lui seront consacrés en 2014. C’est, avec la mobilité internationale et la promotion du bénévolat, une priorité de mon action au service de l’engagement des jeunes.
J’en termine avec les personnels du ministère ou des établissements. Les chantiers qui mobilisent nos agents sur les territoires sont nombreux : le développement du sport pour tous, la montée en charge du service civique, la réforme des rythmes scolaires, l’accompagnement des parcours de formation des jeunes dans le champ de la jeunesse et des sports… Je veux ici saluer leur engagement, leur professionnalisme et leur passion. C’est l’un des traits marquants de ce ministère.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Régis Juanico, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Si l’on ajoute aux 560,4 millions d’euros de la mission « Sport, Jeunesse et vie associative » les 481,1 millions d’euros déversés vers elle à partir de programmes d’autres missions afin de couvrir les dépenses de fonctionnement et de personnel du ministère, on constate que le total des moyens dont l’État disposera pour mener ses politiques de développement du sport, de soutien à la jeunesse et d’encouragement à la vie associative atteindra l’an prochain 1,04 milliard d’euros. Sans tenir compte des 272 millions d’euros du Centre national pour le développement du sport, cela représente 11 % de plus qu’en 2013.
À périmètre constant, si l’on retranche le programme exceptionnel 411, lié aux investissements d’avenir, qui s’élève à 100 millions d’euros, les crédits de la mission sont stables pour 2014. Il n’y a donc pas de diminution en ce qui concerne le budget du sport, de la jeunesse et de la vie associative.
Les crédits de 231,2 millions d’euros prévus pour le programme « Sport » sont globalement stables. Les crédits du programme « Jeunesse et vie associative », eux, sont presque intégralement reconduits, avec une enveloppe de 229,3 millions d’euros.
La sanctuarisation des ressources du CNDS était un engagement que vous aviez pris l’an dernier, madame la ministre. Je constate qu’il est tenu, car les ressources du CNDS seront entièrement préservées l’an prochain, alors même que tous les opérateurs de l’État sont mis à contribution pour redresser nos comptes publics, de l’ordre de 4 % en moyenne.
Au-delà des crédits de la mission, je tiens à souligner trois mesures fortes de soutien aux associations et à l’emploi associatif. La première est le maintien de plus de 2 milliards d’euros de dépenses fiscales liées à la réduction d’impôt pour les dons aux associations. La deuxième est l’élargissement de l’abattement de la taxe sur les salaires de 6 000 à 20 000 euros pour les associations, grâce auquel 70 % des associations employeuses ne paieront plus de taxe sur les salaires à partir de 2014 : c’est un effort financier supplémentaire de l’État de 300 millions d’euros pour soutenir la vie associative. Enfin, 51 millions d’euros sont directement dédiés à l’emploi associatif : 26 millions au titre du FONJEP, le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, qui se voit conforté dans son rôle d’accompagnement de 3 700 emplois qualifiés, et 25 millions au titre du budget du CNDS, pour financer 3 000 emplois sportifs. Cette somme devrait d’ailleurs augmenter si le conseil d’administration du CNDS en décide ainsi d’ici à deux semaines.
Plus largement, en ce qui concerne l’emploi associatif, je veux rappeler la création de 15 000 emplois d’avenir dans le domaine de la jeunesse et du sport, dont deux tiers sont d’ores et déjà signés, la consolidation de 340 000 contrats aidés, dont la durée moyenne sera portée à douze mois en 2014, comme cela m’a été confirmé par le ministre de l’emploi Michel Sapin en commission élargie la semaine dernière, et la perspective de création de plusieurs centaines de milliers d’emplois qualifiés dans le secteur de l’éducation populaire, à l’occasion de la réforme des rythmes éducatifs et de la mise en place des projets éducatifs de territoire.
Les crédits destinés à l’Agence du service civique seront portés à 149 millions d’euros, dont 3 millions exceptionnels au titre du Fonds d’expérimentation pour la jeunesse. Cette évolution, combinée à un abaissement de 1 000 à 800 euros par mois du coût unitaire du service civique, permettra sa montée en charge effective, avec l’accueil de plus de 31 000 volontaires en 2014 et une durée moyenne d’engagement proche de huit mois.
Si l’on veut parvenir à l’objectif de 100 000 jeunes en service civique à l’horizon 2017, il conviendra toutefois d’éviter les gels et surgels de crédits en cours d’année, qui se sont traduits en 2013 par des refus de demandes de missions et des durées moyennes plus faibles. Ces gels ont rendu plus difficile l’engagement des structures associatives qui accueillent les volontaires.
Si le programme 163 doit demeurer le socle du financement du service civique et si l’on veut assurer sa montée en charge financière sans remettre en cause les autres politiques relevant de la jeunesse et de la vie associative, je suggère qu’une réflexion soit menée dans la perspective du Comité interministériel de la jeunesse sur la diversification du financement de l’Agence du service civique, avec la participation d’autres ministères comme l’éducation nationale ou l’emploi.
Le principal changement de ce budget est la création, au sein de la mission, d’un programme 411 intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse » et doté de 100 millions d’euros. Cette enveloppe exceptionnelle, disponible dans le cadre du Programme des investissements d’avenir, permettra de financer à partir de l’an prochain des projets innovants en faveur de la jeunesse sur les territoires, autour de quatre axes : l’information et l’orientation, l’employabilité et le décrochage scolaire, les offres éducatives, culturelles et sportives innovantes, ainsi que l’entreprenariat des jeunes.
Par ailleurs, le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse devrait pouvoir utiliser jusqu’en 2015 des crédits non consommés des précédentes lois de finances, pour un montant de 12,4 millions d’euros, qui financeront cinq axes : les plates-formes nationales et régionales de mobilité, le service public régional d’orientation, la lutte contre les discriminations, les outils d’éducation populaire pour les jeunes et le développement des organisations de jeunes dirigées par les jeunes.
Enfin, la convention conclue entre le ministère et Total en juin 2013 pour une durée de trois ans, qui représente un montant de 17 millions d’euros, permettra de financer des actions dans les domaines suivants : les activités éducatives et culturelles en dehors du temps scolaire, les parcours d’insertion, l’encadrement et la qualification des jeunes en emplois d’avenir et la mobilité professionnelle des jeunes.
À propos de ces trois dispositifs exceptionnels, qui sont bienvenus, je rejoins les réticences de Marie-George Buffet concernant la logique du « tout appel à projets ». Il faudra veiller à ce que les projets sélectionnés s’articulent de manière cohérente entre eux et ne soient pas redondants avec les actions du ministère ni avec les autres PIA relevant de l’éducation nationale et de l’emploi.
Ces différentes actions mériteraient à mon sens un meilleur ciblage autour de trois grandes priorités pour les jeunes : l’information-orientation, les dispositifs de seconde chance et de validation des compétences et enfin l’accès à l’autonomie et la mobilité. En tout état de cause, ces actions devront être mises en oeuvre par des partenaires aux responsabilités clairement définies, et faire l’objet d’un contrôle et d’une évaluation attentive du Parlement.
Enfin, madame la ministre, au-delà du seul examen des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2014, je souhaite, en tant que rapporteur spécial, qu’une suite favorable soit donnée aux propositions émises dans le cadre des excellents rapports de l’Assemblée nationale rendus publics au mois de juillet dernier, concernant la politique de soutien au sport professionnel et les solidarités avec le sport amateur, le modèle économique des clubs de football professionnels français ou encore l’accès des jeunes aux séjours collectifs et de loisirs, à propos en particulier du statut du volontariat de l’animation.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Votre ministère, madame la ministre, est l’un des beaux vecteurs de la République. Son champ de compétence vise l’épanouissement de chacune et chacun et l’engagement collectif. Ses missions en témoignent : l’accès de toutes et tous à la pratique sportive dans tous les territoires, dans toutes les disciplines et à tous les niveaux, le développement de la vie associative dans le respect des objectifs propres à chaque association d’éducation populaire et une politique en faveur de la jeunesse.
Mais ce budget, sur lequel notre commission a donné un avis favorable n’est de l’avis de votre rapporteure pas au niveau de cette ambition humaniste que vous impulsez. Ce constat n’est pas nouveau. Cela fait longtemps en effet que l’on demande au sport et aux associations de pallier tous les problèmes, toutes les dérives de notre société sans donner à leur ministère de tutelle les moyens tout simplement d’assurer ses missions.
Si l’on peut se féliciter que les crédits de la mission augmentent de 19 % par rapport à 2013, à travers un nouveau programme « Projets innovants en faveur de la jeunesse » doté de 100 millions d’euros, il faut noter que cette somme est en fait un pécule utilisable par appels à projet innovants sur la période 2014-2017. Nous aurons à évaluer sur la durée l’efficacité de ce nouveau dispositif et veiller à ce que votre ministère en garde la maîtrise.
En vérité, à périmètre constant, les deux programmes « Sport » et « Jeunesse et vie associative » du ministère régressent respectivement de 2,9 % et 1,1 %. La lente érosion des moyens du MJS se poursuit depuis des années. Le montant de la mission interroge sur le sens ou l’avenir d’un ministère de plein exercice. Dit autrement, si l’érosion se poursuit, quel sera demain le rôle de l’État en matière de sport et de vie associative ?
Si, comme vous l’affirmez, madame la ministre, ce rôle est essentiel, il faut donner à votre ministère les moyens de relever plusieurs défis et d’ouvrir des chantiers.
Il faut d’abord redonner au ministère la maîtrise de ses personnels. Ce ministère atypique repose sur un personnel porteur de métiers tels que conseiller technique ou conseiller d’éducation populaire et de jeunesse, un personnel apte à travailler en partenariat avec le monde associatif et les collectivités. À coup de RGPP et de disparition des directions déconcentrées, la majorité précédente a amputé ce potentiel. Il faudra donc, dans les années à venir, rouvrir des postes et un portail MJS au niveau des départements. Cela demande que les formations dispensées par les CREPS gardent un contenu national.
Il faut ensuite attribuer au ministère un socle de moyens lui permettant d’assurer ses missions premières pour le sport. Le financement du sport ne peut dépendre du seul CNDS, basé sur les jeux, les paris en ligne ou les droits télé. La situation dont vous avez hérité montre en effet la fragilité de ce financement. De même, comme l’a dit le rapporteur spécial, il faut en finir avec le tout appel à projets sur des publics ciblés. Ce ministère n’a pas, à mon avis, à justifier ses actions sur le sport ou la vie associative par des objectifs extérieurs à son champ de compétence. Bercy doit reconnaître que c’est par le développement des clubs et du nombre de licenciés, par la formation des bénévoles, par l’impulsion du haut niveau et de son encadrement, par la réalisation des infrastructures nécessaires, par l’organisation de grands événements sportifs internationaux que ce ministère contribuera à la cohésion sociale, à l’aménagement du territoire, à l’emploi et bien sûr à la santé – et non l’inverse.
Enfin, l’on doit se féliciter de l’avancée que constitue la mise en place du Comité interministériel de la jeunesse, qui replace le MJS en coordinateur et pilote de l’action gouvernementale en direction des jeunes. Cette avancée devrait permettre au ministère de consacrer plus de moyens à la valorisation des associations de jeunesse et d’éducation populaire.
Le service civique, qui aujourd’hui consomme deux tiers du programme « Jeunesse », sera, au vu de son succès, de plus en plus budgétivore et je partage la proposition qui consiste à diversifier son financement. En effet, les autres formes d’engagement portant sur le bénévolat associatif ne peuvent en pâtir.
Votre loi-cadre, madame la ministre, annoncée pour 2014, est très attendue. Elle traitera certainement des évolutions du modèle sportif français. Ce modèle repose sur une idée simple : le sport est un droit, il appelle donc des politiques publiques. Certes, ce modèle est ébranlé, d’abord par la nature de son financement, l’affaiblissement de la part de l’État, le rôle accru des collectivités, la transformation du sport professionnel et des clubs professionnels en entreprises réclamant des retours sur investissement. Ce modèle est ébranlé ensuite par la diversification des pratiques à l’intérieur des fédérations comme par les enjeux financiers liés à la médiatisation du sport.
À ceux qui voudraient détruire ce modèle sportif, nous devons rappeler que c’est l’État qui est garant de l’égalité d’accès, de la régulation et du maintien de toutes les disciplines. Si le sport est un droit, l’engagement public est nécessaire, au même titre que pour l’éducation ou la santé.
Madame la ministre, sur tous les bancs de cette assemblée s’exprime un attachement au sport et à la vie associative. Encore faut-il le crédibiliser en exigeant des moyens pour votre action. C’était le sens de mon appel à l’abstention. La commission des affaires culturelles en a décidé autrement en approuvant votre budget, mais pour ma part, je maintiendrai cette alerte.
Nous en venons aux porte-parole des groupes.
La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre, nous abordons aujourd’hui l’examen final des crédits de votre ministère, qui s’élèvent pour 2014 à 833 millions d’euros, avec une dotation exceptionnelle de 100 millions issue du Programme d’investissements d’avenir.
Malgré les marges de manoeuvre étroites qui sont les vôtres dans un contexte budgétaire restreint et un périmètre ministériel vaste, vous avez prouvé, comme l’ont souligné mes collègues en commission, qu’il était possible malgré tout de tenir ses engagements et de maintenir des ambitions pour la jeunesse, le sport et la vie associative.
J’ai également entendu les différentes critiques de nos détracteurs. Bien sûr, nous souhaiterions tous des augmentations significatives sur tous les crédits. Mais nous vivons des temps difficiles, avec des choix difficiles et avec une contrainte incontournable qui consiste à épurer l’accroissement de 600 milliards d’euros de la dette pendant le dernier quinquennat.
Et pourtant, à travers ce budget pour 2014, nous continuons à nous inscrire dans les engagements du Gouvernement et à affirmer nos priorités, à savoir l’emploi, la croissance et la jeunesse, associées à une maîtrise des dépenses publiques et à l’effort global demandé à l’ensemble de la nation.
Je ne rappellerai pas l’ensemble des données budgétaires, exposées longuement et en détail par les différents rapporteurs. Je citerai seulement quelques chiffres qui me semblent représentatifs de l’action menée et des efforts entrepris. En matière d’emploi, ce budget, c’est 15 000 emplois d’avenirs, dont les deux tiers sont déjà signés, soit 10 % du total prévu, qui seront tournés vers le sport et le monde associatif pour soutenir le travail des bénévoles et permettre à notre jeunesse de s’inscrire davantage dans l’avenir. C’est 340 000 emplois aidés indispensables à la vie associative qui seront consolidés et 51 millions d’euros qui seront directement dédiés à l’emploi associatif via le FONJEP et le CNDS. C’est aussi l’exemption pour les associations employeuses de taxe sur les salaires à partir du 1er janvier 2014. C’est une politique de soutien au sport de haut niveau, dont les crédits augmenteront de 2,5 % cette année. C’est favoriser l’engagement de la jeunesse, avec la montée en charge du service civique qui devrait accueillir plus de 31 000 volontaires en 2014 et qui mobilise 149 millions d’euros, soit près des deux tiers du budget du ministère. C’est une gestion intelligente visant à solder les dossiers trop lourds budgétairement, comme la suppression du versement de l’indemnité pour absence de club résident au Consortium Stade de France, qui représentera une économie de 64 millions sur quatre ans, dont 16 millions pour 2014. Enfin, c’est 100 millions d’euros pour les projets innovants en faveur de la jeunesse, des projets permettant de lutter efficacement contre les inégalités sociales et territoriales et, comme vous le soulignez, madame la ministre, de faire émerger des politiques de la jeunesse à la fois globales et innovantes.
Pierre de Coubertin disait : « Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre ». Je dirais que c’est exactement la définition de l’exercice que nous avons à accomplir et l’objectif que nous devons atteindre.
Ce budget est un bon outil pour réaliser les missions prioritaires du ministère : le sport comme objectif d’intérêt général avec la priorité donnée à l’accès de toutes et de tous aux pratiques sportives quels que soient leur condition sociale ou leur territoire ; le sport comme outil de santé publique ; l’accompagnement et la préparation des sportifs de haut niveau performants, exemplaires et bien insérés dans la vie sociale et professionnelle ; le respect de l’éthique sportive et la lutte contre les dérives qui la menacent ; la jeunesse au coeur du dispositif et la réalisation de dix-neuf mesures sur les quarante-sept arrêtées lors du premier Comité interministériel de la jeunesse de février dernier ; le soutien au mouvement associatif, acteur essentiel de la mise en oeuvre des politiques publiques du sport et de la jeunesse.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste et républicain votera les crédits pour 2014 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre, lors de la présentation des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » devant la commission élargie, vous aviez dit que ce budget était marqué par l’ambition et la solidité retrouvées. La loi de finances pour 2013 ayant sérieusement malmené cette mission, on ne pouvait a priori que prévoir ou en tout cas espérer une nette amélioration pour l’exercice 2014. Or le budget qui nous est proposé ne permet en rien de confirmer l’optimisme ministériel – et je vous le dis en saluant votre engagement personnel.
Ainsi que l’a souligné Mme la rapporteure pour avis, les crédits du programme « Sport » ont diminué de 2,8 % en autorisations d’engagement et de 2,9 % en crédits de paiement par rapport à 2013. Ceux du programme « Jeunesse et vie associative » ont, pour leur part, diminué de 1,1 % et seul le changement de périmètre de la mission, avec l’adjonction d’un nouveau programme « Projets innovants en faveur de la jeunesse », permet de sauver les apparences. Cependant, la dotation de 100 millions d’euros affectée à ce nouveau programme devra s’étaler sur quatre ans et faire l’objet d’une procédure sur appel d’offres, ce qui, il faut bien le reconnaître, en réduit singulièrement la portée.
En réalité, on assiste bien, et malheureusement pour la deuxième année consécutive, à une érosion, légère il est vrai, mais une érosion tout de même des crédits consacrés à la mission. L’on ne peut que s’en inquiéter, en raison d’une part de l’utilité publique diversifiée que revêtent les activités sportives et d’autre part du contexte de compétition exacerbée entre les principales nations sportives.
Ainsi, au sein du programme « Sport », les crédits affectés au sport pour le plus grand nombre baissent, hors réserve parlementaire, de 51,7 %, alors même que vous affirmez, madame la ministre, qu’il s’agit de l’une de vos priorités. De la même manière, les crédits alloués aux fédérations sportives diminuent de 2,8 %, passant de 85 à 83 millions d’euros, avec de surcroît des interrogations qui se font jour sur l’évolution du nombre de conseillers techniques mis à disposition des fédérations.
La seule augmentation que l’on trouve dans ce budget est relative au sport de haut niveau, dont les crédits de paiement progressent de 2,8 %. Cependant, une incertitude subsiste sur la volonté du Gouvernement d’accueillir et d’organiser sur notre territoire de grandes manifestations sportives internationales. Mis à part l’euro 2016 qui résulte de l’engagement personnel du précédent président de la République et de son gouvernement, il n’y a en effet guère de visibilité sur les intentions de votre ministère en ce domaine. Or l’organisation de grands événements sportifs est importante à de nombreux égards, économiques, touristiques et diplomatiques, et chacun sait qu’elle apporte du crédit et de la notoriété au pays organisateur.
Les crédits consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs baissent de 1,6 %, alors même que le rapport sénatorial rendu public en juillet dernier montre qu’il reste encore beaucoup à faire en ce domaine, toutes disciplines confondues.
Sur ces différents sujets, madame la ministre, votre projet de budget n’apporte pas d’éléments suffisants et satisfaisants et nous attendons le projet de loi d’orientation que vous avez prévu de présenter l’an prochain. Nous espérons simplement que vous saurez tenir compte, dans ce texte, des travaux parlementaires qui ont été réalisés ces derniers mois sur des sujets tels que le financement du sport professionnel, ses relations avec le sport amateur ou encore la lutte contre le dopage.
Pour en revenir au budget que vous venez de nous présenter, et compte tenu des insuffisances que j’ai soulignées, le groupe UMP ne le votera pas.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Tout d’abord, permettez-moi d’associer à mes propos François Rochebloine, habituel porte-parole de notre groupe sur ce sujet, mais qui est absent pour des raisons de santé et à qui je souhaite un prompt rétablissement.
On l’a compris, madame la ministre, les crédits de la mission augmentent, mais ils ne croissent pas. Est-ce vraiment le moment de tels jeux d’écritures ? Et plus fondamentalement, est-ce vraiment le moment d’affaiblir ce cordon sanitaire et civique que constitue le sport dans tous nos territoires, frappés par la crise économique et sociale ?
Sur l’ensemble du territoire national, métropole et outre-mer, le sport fédère le réseau associatif le plus important, animé par plus de deux millions de cadres bénévoles. Et cette vie sportive est totalement ancrée dans la société, à laquelle elle apporte des vertus : insertion, réinsertion, intégration, égalité des chances, santé… La société a besoin du sport pour lutter contre ses dérives : discriminations, violences, incivilités, obésité, sédentarité.
De son côté, le sport doit faire face à ses propres dérives : violence, dopage, tricherie, surentraînement… Il a, à son tour, besoin de la société pour les combattre.
Le sport n’est donc pas l’apanage des seuls sportifs. C’est un fait social qui doit être, plus que jamais, facteur de lien social. C’est un impératif catégorique aujourd’hui que le Gouvernement ne peut pas négliger.
Nous comprenons bien que chaque mission et chaque ministère doive contribuer au redressement de nos finances publiques. Mais alors, madame la ministre, il faut dire les choses clairement.
Disons donc simplement qu’à périmètre constant, les deux programmes « Sport » et « Jeunesse et vie associative » régressent respectivement de 2,9 % et de 1,1 %. Et vous aurez beau nous dire que la jeunesse, c’est l’affaire de tout le Gouvernement, nous aurions tendance à vous répondre que charité bien ordonnée commence par soi-même.
Alors que vous avez cité le sport pour tous parmi vos priorités, les crédits de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » sont divisés par deux, passant de près de 15 millions à 7 millions d’euros.
De la même façon, l’action « Développement de la vie associative » est en baisse de 4,8 % et celle en faveur de l’éducation populaire de 4 %. L’action « Prévention par le sport et protection des sportifs » connaît elle aussi une érosion régulière : alors qu’elle représentait plus de 19 millions d’euros en 2011, elle n’atteint plus que 18,7 millions pour 2014.
Nous étions en droit d’attendre de ce budget qu’il traduise les orientations du Comité interministériel de la jeunesse qui s’est tenu en février 2013. Quarante-sept mesures avaient été arrêtées. Où est leur traduction identifiée dans ce budget en matière d’éducation, d’insertion professionnelle, d’orientation, de logement, de santé, ou encore d’engagement dans la vie citoyenne ?
De façon très évidente, vous consentez un effort particulier du côté du service civique, avec l’objectif d’accueillir un minimum de 31 000 volontaires en 2014. Cela se chiffre à 149 millions d’euros, soit pratiquement les deux tiers du programme « Jeunesse et vie associative ». Nous saluons, madame la ministre, cet effort.
Mais l’objectif des 100 000 volontaires avant la fin du quinquennat est-il bien réaliste, sans porter préjudice aux dispositifs consacrés au secteur associatif ? Peut-on imaginer, comme vous l’a demandé Marie-George Buffet en commission élargie, la possibilité de modifier la durée du service et les indemnités, notamment en matière de décrochage scolaire ?
Nous appelons aussi votre attention, madame la ministre, sur l’article 78 du projet de loi de finances, qui révise l’exonération de charges relative à l’embauche de salariés au sein d’organismes à but non lucratif, associations sportives et culturelles par exemple, dont le siège social se situe dans les zones de revitalisation rurale. Cette mesure va diminuer de 25 % les aides permanentes à ces emplois en zone rurale. C’est une perte de 30 millions d’euros qui porte ainsi atteinte à des associations qui créent pourtant du lien social, notamment dans les territoires ruraux. C’est de nouveau un mauvais signal adressé au monde rural.
L’enfer est pavé de bonnes intentions. Je ne mésestime donc pas vos bonnes intentions. Mais, s’il vous plaît, n’ignorez pas les réalités.
Quant au programme 411 « Projets innovants en faveur de la jeunesse », il nous semble bien improbable qu’il produise des effets dès 2014, d’abord parce qu’il est pluriannuel, mais aussi parce qu’il est partagé, notamment avec le ministère de l’éducation nationale. Il s’agit de favoriser les innovations, mais sur quels critères ? Avec quel pilotage ? Pour quelles priorités ? Nous espérons en tout cas qu’il ne s’agira pas là d’un leurre budgétaire.
Autre paradoxe, un effort est visiblement consenti en faveur du sport de haut niveau, qui représente 76,2 % des crédits du programme « Sport », contre 74,1 % en 2013. Cette augmentation intervient alors que l’an passé, le budget enregistrait une réduction. Mais dans le même temps, le projet de loi de finances instaure une taxe à 75 % sur les hauts salaires des sportifs qui risque de mettre en danger les clubs les plus fragiles et de nuire fortement à la stabilité des clubs aux budgets les plus importants, et cela contrairement à la promesse du candidat Hollande. Vous avez, concernant les clubs, une politique en zigzag, comme dans bien d’autres domaines. Nous attendrons donc l’année prochaine pour nous faire une opinion définitive sur ce sujet.
Voilà donc le bilan que nous dressons de cette mission budgétaire en demi teinte. Tout n’y est évidemment pas contestable, notamment les efforts réalisés en direction des publics handicapés, mais le sens n’est pas là, la traduction d’une grande ambition nationale n’est pas visible et la capacité à irriguer l’ensemble du territoire à travers une démarche puissante, humaniste et profondément républicaine n’est pas plus discernable. Voilà pourquoi le groupe UDI se prononcera contre l’adoption de votre budget, madame la ministre.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Je tiens tout d’abord à saluer la mobilisation en faveur de la jeunesse. Aujourd’hui, dans un contexte de crise économique et d’accentuation des inégalités, la jeunesse se met en effet à douter du présent et de son avenir. Ce doute ne doit en aucun cas se transformer en crise plus profonde, car ce serait alors l’ensemble de la nation qui verrait son pacte républicain s’affaiblir.
C’est pourquoi redonner aux jeunes des perspectives, leur redonner confiance, est prioritaire. Et votre ministère, madame la ministre, est l’un des premiers concernés.
À cet égard, le service civique est le principal levier de votre politique en faveur de la jeunesse. Il s’agit de lutter contre le décrochage scolaire, de faciliter la réorientation ou l’insertion professionnelle et, bien sûr, de contribuer à la diffusion d’une appétence pour l’engagement citoyen et donc pour le vivre ensemble.
Ces défis sont ambitieux et c’est une bonne chose. Mais avant la montée en puissance de ce dispositif, il conviendrait d’en faire un premier bilan. Nous sommes nombreux à vous avoir indiqué nos craintes de voir la montée en puissance du service civique se faire au détriment des autres moyens consacrés à la vie associative, et la faiblesse des niveaux de rémunération de ces contrats pose question.
Pour en revenir à la jeunesse, la grande nouveauté de ce budget est le programme consacré aux projets innovants en faveur de la jeunesse. S’agissant du Programme des investissements d’avenir, nous souhaiterions que les projets retenus fassent l’objet d’une discussion, pour être validés par la représentation nationale. Et ce programme d’appels à projets ne remplace pas une politique de soutien pérenne.
Les associations contribuent en effet à la construction des politiques publiques et ont pour ce faire besoin de pouvoir s’engager dans le temps, ce que ne permettent pas les appels d’offres ou les procédures de marché public qui nient leur utilité publique et leur fonction sociale, tendant à considérer les associations comme de simples prestataires de services.
La future loi sur l’économie sociale et solidaire devra être rassurante sur ce point. Vous nous l’avez confirmé, madame la ministre, et nous serons vigilants.
Sécuriser le recours des collectivités locales à la subvention et à la convention pluriannuelle est en effet essentiel. Cela devrait d’ailleurs contribuer à restaurer la confiance entre l’État et le tissu associatif qui a connu, sous la précédente majorité, des temps très difficiles. La nouvelle charte des engagements réciproques est à cet égard un très bon signal.
Permettez-moi par ailleurs de revenir sur certains points qui nous tiennent particulièrement à coeur. Comme je l’ai indiqué hier à Vincent Peillon, la diminution des crédits aux structures de l’éducation populaire nous inquiète, car ce sont des acteurs essentiels pour la mise en place de la réforme des rythmes.
Nous souhaiterions aussi que l’engagement citoyen soit davantage encouragé. Il s’agit par exemple de mieux reconnaître le travail des bénévoles, mais aussi de le faciliter, par la mise en place par exemple d’un congé engagement, par la simplification administrative ou par un meilleur accompagnement. Renforcer la formation des bénévoles est en effet essentiel pour qu’ils soient mieux armés face aux responsabilités qu’ils assument.
Il est aussi nécessaire de former les jeunes occupant un emploi d’avenir, ainsi que leurs tuteurs.
Par ailleurs, la société inclusive que nous souhaitons requiert qu’une attention spécifique soit accordée à l’engagement associatif des personnes en situation de handicap.
Enfin, nous ne devons pas oublier que nombre d’innovations sociales sont dues au secteur associatif, capable de proposer des réponses nouvelles aux problèmes de notre société. C’est pourquoi il convient de mieux soutenir financièrement les expérimentations.
Je tiens également à soulever le problème de la précarisation des salariés de nos associations : CDD, faiblesse des rémunérations, conditions de travail difficiles… En Picardie par exemple, où le tissu associatif comprend environ 41 600 salariés, l’ensemble des acteurs constate une baisse de la qualité de l’emploi, avec un turn-over important.
Enfin, concernant le sport, je souhaite tout d’abord souligner que le recentrage du CNDS sur les territoires et les publics subissant les plus grandes inégalités d’accès aux sports est une très bonne chose. Car le sport pour tous contribue au vivre ensemble dont nous avons tant besoin en ce moment.
Vous connaissez à cet égard notre attachement au soutien des clubs amateurs, au sport féminin et au handisport, qui ont besoin d’un effort budgétaire plus important.
Il conviendrait également de renforcer la lutte contre l’homophobie en milieu sportif. Les chartes de bonnes intentions ne suffisent pas, malheureusement. À cet égard, si l’organisation des Gay Games à Paris est une très bonne nouvelle, la situation en Russie où les futurs Jeux olympiques vont se dérouler est inquiétante, qu’il s’agisse de la liberté de la presse ou des lois homophobes récemment adoptées. Comme je l’ai déjà indiqué, rester silencieux pourrait être interprété comme un signe de complicité.
Pour conclure, les écologistes voteront évidemment ce budget, dont les priorités vont dans le bon sens : promouvoir le sport pour tous, agir pour la jeunesse, mais aussi restaurer la confiance dans les relations avec le tissu associatif en général, véritable partenaire de nos politiques publiques. Et, bien sûr, madame la ministre, nous comptons sur votre écoute pour que nos différentes remarques puissent améliorer encore les politiques menées.
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.
La parole est à Mme Annick Girardin, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
En commission élargie, Thierry Braillard, au nom des radicaux de gauche et apparentés, a exprimé sa satisfaction concernant le programme « Sport ». Le groupe RRDP vous félicite également d’avoir trouvé la bonne méthode pour sauver le CNDS, laissé par la droite dans une situation financière catastrophique.
Ce sont des paroles justes !
Mon propos portera plutôt sur le programme « Jeunesse et vie associative ». Ce budget s’inscrit dans un cadre économique contraint et difficile qui pourrait expliquer, sans les justifier, des diminutions de crédits. À ce titre, il nous faut donc nous réjouir que pour l’essentiel, les moyens de ce programme soient préservés. La lecture du budget apporte en effet un soulagement. Il n’y a ni grandes coupes, ni diminution drastique. Le projet de loi de finances pour 2013 affichait environ 232 millions d’euros et avait finalement été abondé de 15 millions supplémentaires ; le projet de loi de finances pour 2014, avant débat, comporte un peu plus de 229 millions, soit une baisse de 7 %.
Plus difficiles à lire, puisque noyées dans le budget des ministères sociaux et regroupées avec le sport, les prévisions de postes devraient être maintenues dans la situation actuelle. Là aussi, on peut être partiellement rassuré.
Mais, à défaut de moyens supplémentaires, un budget doit être l’occasion de présenter des orientations politiques fortes et assumées, l’occasion de s’appuyer sur ses forces – compétences de ses personnels, habitudes de travail en partenariat, réseaux – et enfin l’occasion de mettre en évidence son utilité et sa plus-value. Difficile de trouver cela dans ce projet de loi de finances pour 2014.
Si le budget de 2013 était en augmentation de 7 à 8 %, en cohérence avec la double priorité du Gouvernement, les jeunes et l’éducation, le budget pour 2014 affiche une baisse d’un niveau équivalent. Est-ce à dire, et j’espère que non, qu’il en est terminé des priorités proposées l’an dernier ? D’autant que les deux actions en baisse concernent à nouveau la vie associative et la jeunesse et l’éducation populaire, qui sont le coeur même de ce programme.
Nous trouvons ici deux problèmes majeurs du budget, et plus largement de la politique menée dans ce secteur. On ne peut réduire l’action éducative de l’État à la seule éducation nationale, quelle que soit son importance, indiscutable. La logique même de la refondation de notre système d’éducation voulu par le Président de la République et le Gouvernement conduit justement à une meilleure synergie entre les temps, les actions et les acteurs éducatifs, dans l’école et en dehors. Nous venons de voter une loi équilibrée, modernisant notre système scolaire – mais, hélas, que notre système scolaire ! L’absence d’un grand pôle éducatif gouvernemental n’a pas rendu possible une approche autre que « scolaro-centrée ». Le ministère dont vous avez la charge a été trop attentiste sur ce dossier. Or, davantage que la dimension d’insertion et de développement économique, le levier des politiques éducatives et de leur globalisation dans le cadre de cette loi aurait pu utilement être activé comme préfiguration de ces actions co-construites entre les services de l’État, les collectivités territoriales et les acteurs associatifs. Sinon y faire rapidement référence, rien dans le projet de loi de finances ne vient appuyer cette démarche ni l’inscrire comme une priorité du programme.
L’inscription de l’éducation populaire dans l’intitulé du ministère a suscité pourtant un immense espoir. Bien entendu, il y avait là un symbole, mais aussi un signe. L’inscription d’une valeur forte que la gauche allait porter comme une mission structurante, une réaffirmation du rôle de l’État dans une politique d’éducation populaire permettant la formation des citoyens et la construction de démarches pour mieux vivre ensemble.
Et en ce moment, nous tous, la classe politique, aspirons à un meilleur vivre ensemble. Cela aurait redonné un axe fort à la mission. Mais, là encore, rien dans le budget ne vient suffisamment étayer cette orientation.
Venons-en à présent à la politique en faveur de la jeunesse. L’essentiel du budget qui lui est consacré, d’autres l’ont dit, est consommé par le service civique : 121 millions sur 146.
L’innovation de ce budget réside dans l’ouverture du Programme d’investissements d’avenir à la dimension de la jeunesse, avec un programme « Projets innovants en faveur de la jeunesse » doté de 100 millions. Là encore, d’autres l’ont dit.
Si l’on ne peut évidemment que saluer l’importance de cette enveloppe financière, sans faire preuve de mauvaise foi, l’on peut tout de même légitimement s’interroger sur cette mode qui consiste à recourir aux appels à projets à tout va. Que garantissent-ils, si ce n’est une mise en concurrence accrue des projets et la privation, pour l’État, de tout levier d’action directe ?
Vous allez financer par appels à projet, et de manière très parcellaire, ce qui constitue la mission prioritaire de l’État dans le domaine de la jeunesse. Sa gestion étant confiée à l’ANRU, le programme sera fortement teinté d’une coloration « politique de la ville » et sera donc majoritairement axé sur les territoires urbains. Mais si ceux-ci ont des besoins importants, ils bénéficient déjà d’accompagnements spécifiques, ce qui n’est pas le cas d’autres zones comme la campagne, la montagne ou l’outre-mer. Comment garantir qu’une fois de plus ces dernières ne seront pas les oubliées de cette politique ?
La redynamisation des services déconcentrés, la mobilisation des CEPJ sur leur mission et une politique de recrutement en cohérence auraient certainement permis de mettre en oeuvre cette priorité sur l’ensemble du territoire et je suis sûre que cela n’aurait coûté pas plus d’un million par département.
Entendez nos inquiétudes, madame la ministre, et rassurez-nous sur la suite de ce programme interministériel en termes d’évaluation, d’association des services à son suivi, de généralisations possibles et de financement partagé avec l’éducation nationale et de financements non pérennes !
Oui, monsieur le président.
Dispersez nos craintes que ne s’ouvre là un grand appel libéral à la marchandisation des politiques de jeunesse, dont l’État ne serait plus que le bailleur de fonds !
Sans grandes dépressions ni pics prioritaires, le budget consacré à ce programme, s’il reste rassurant pour la pérennisation des actions traditionnelles, nous semble cependant sans relief en termes d’ambition et de nouvelles dynamiques. Or, c’est justement de ces dynamiques dont nous avons urgemment besoin.
Malgré ces avis contrastés entre les programmes 219 et 163, le groupe RRDP votera les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Le deuxième budget de cette législature est l’occasion pour votre ministère, madame la ministre, d’affirmer son ambition de donner à nouveau la priorité à ses missions fondamentales. Mais ce retour aux sources, que nous saluons, a lieu dans des conditions budgétaires difficiles, si bien que nous examinons aujourd’hui un budget qui ne reflète pas forcément la volonté affichée.
Globalement, les crédits de la mission augmentent, mais cette hausse est due à la création d’un programme 411, doté d’une enveloppe de 100 millions répartis sur trois ans et dont la gestion sera déléguée à l’ANRU. En fait, à périmètre constant, le budget diminue, même si le recul est moindre que l’année dernière.
Nous savons, madame la ministre, que le sport pour tous est au coeur de votre action et nous avons bien conscience de toute la détermination dont vous avez dû faire preuve non seulement pour sauver le Centre national pour le développement du sport, qui en est le principal opérateur, mais encore pour sanctuariser ses ressources.
Que le CNDS ne soit plus détourné de ses missions premières et qu’il ne finance plus les stades de l’Euro 2016 constitue une décision salutaire. Mais il y a cette diminution de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre ». Même en tenant compte des effets de la réserve parlementaire et des derniers Jeux de la francophonie, le recul est de 12 % par rapport à 2013. Nous le regrettons.
Le sauvetage du CNDS est assorti d’un plan de redressement douloureux. Pour la Réunion, il se traduit par une diminution des deux tiers de l’enveloppe attribuée au titre de la part nationale à l’organisation de la 9ème édition des Jeux des îles de l’Océan indien.
Cette grande manifestation sportive, créée il y a bientôt quarante ans – Marie-George Buffet assistait à Madagascar à celle qui s’est déroulée lors de la législature 1997-2002 – avec l’aval du Comité international olympique concerne La Réunion et Mayotte mais aussi Madagascar, Les Comores, Maurice, Les Seychelles et les Maldives.
Unanimement appréciés, rassemblant plus de 2 000 athlètes pour 14 disciplines, ces jeux se dérouleront pour la troisième fois depuis leur création à La Réunion. À n’en pas douter, ils contribueront au rayonnement de la France sur la scène sportive internationale et correspondent donc à l’une des orientations prioritaires du ministère.
Les crédits attribués aux fédérations sportives diminuent globalement de 2 %. Pour mieux appréhender les conséquences de cette évolution, nous aimerions avoir des précisions sur ses modalités d’application selon les fédérations.
Même si elle est plus faible pour 2014, la diminution continue des moyens budgétaires octroyés au sport pour tous suscite l’inquiétude des associations sportives, qui ont de plus en plus de mal à remplir leurs missions et à répondre favorablement aux sollicitations des jeunes.
Avec plus de 150 000 licenciés, près de 1 700 clubs et plus de 60 disciplines, le sport est déjà très présent dans la vie des Réunionnais mais le renforcement des réalisations existantes comme la volonté de développer de nouvelles pratiques sportives pour de nouveaux publics sont suspendus à la question des financements que les collectivités locales ont de plus en plus de mal à assumer seules. C’est pourquoi nous suivons avec beaucoup d’attention la réforme en cours des critères d’intervention du CNDS et, singulièrement, de sa « part territoriale ».
Par sa diversité et sa forte présence territoriale, le tissu associatif sportif est le socle du mouvement sportif et doit à ce titre être structuré et soutenu, surtout lorsque l’on se rappelle, avec vous madame la ministre, à quel point le sport peut être un puissant vecteur d’insertion sociale et d’apprentissage de la citoyenneté.
Contrairement aux autres lignes du programme « Sport », les crédits en faveur du sport de haut niveau progressent en vue notamment de consolider les structures de formation mises à mal ces dernières années. Dans l’attente de la future loi sur la modernisation du sport, je souhaite d’ores et déjà attirer votre attention sur la nécessité d’accompagner les parcours d’excellence des jeunes Réunionnais.
Le programme « Jeunesse et vie associative » est surtout marqué par la forte progression du service civique qui représente à lui seul les deux tiers de ses crédits. Cette forte augmentation, qui répond à l’engouement suscité par ce dispositif auprès des jeunes, est liée à l’objectif des 100 000 volontaires d’ici 2017.
Mais une réorientation aussi importante des crédits de ce programme oblige à la plus grande vigilance aussi bien quant au respect de la vocation de ce dispositif que s’agissant du profil des volontaires.
Sa prééminence conduit aussi à s’interroger sur la place que le service civique est appelé à occuper dans la politique des pouvoirs publics pour encourager la participation citoyenne et l’éducation populaire, d’autant plus que, parallèlement, les moyens consacrés au financement de la vie associative diminuent.
Le groupe GDR approuve les priorités affichées par votre ministère mais, soucieux de les voir se traduire dans les faits grâce à des crédits correspondants, il s’abstiendra lors du vote du budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Nous en arrivons aux questions. Je vous rappelle que leur durée, ainsi que celle des réponses, est fixée à deux minutes.
La parole est à M. Pascal Deguilhem, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la ministre, ma question sera centrée sur le programme « Sport », qui concerne des millions de licenciés et de bénévoles. Vous en avez rappelé les priorités et cela est d’autant plus utile que l’espace médiatique est accaparé par d’autres.
Je répondrai à M. Favennec, qui a rappelé ses inquiétudes quant à la taxation des clubs professionnels, que la précédente majorité avait déjà imaginé un même dispositif au mois d’octobre 2011. Vous demandiez alors aux entreprises et aux consommateurs de faire un effort et vous aviez fait symboliquement de même auprès des clubs, tant les sommes qui sont en jeu choquent nos concitoyens. À l’époque, vous souscriviez à cette démarche.
Madame la ministre, votre budget est bien entendu modeste, ce que nous pouvons déplorer, mais vous avez su le préserver. L’exercice n’était pas simple puisque vous avez dû également contribuer au redressement des comptes publics et régler plusieurs dossiers que vos prédécesseurs avaient laissés en souffrance, voire à la dérive.
Je souhaite aborder quelques-uns d’entre eux. Comme Patrick Hetzel a réagi lorsqu’il a été question de l’état dans lequel se trouve le CNDS, je lui rappelle les engagements déraisonnables et irresponsables qui avaient été pris, puisque la somme en jeu était de 485 millions, ce qui était mortifère pour l’opérateur.
Vous avez souhaité et obtenu un plan de redressement financier, madame la ministre, ainsi qu’une stabilisation des recettes, ce qui était indispensable.
Plus modestement mais significativement, vous avez permis à l’État d’économiser plus de 4 millions sur la réalisation du Musée national du sport, à Nice, ce qui est une bonne chose, et cela sans modifier le périmètre, ni le délai, ni la réalisation.
Au nombre des dossiers oubliés figuraient également les primes olympiques. Le budget n’en est guère élevé mais cet oubli n’en demeure pas moins indécent, choquant et emblématique.
Autre dossier trouvé dans les tiroirs du ministère, vous l’avez évoqué : le contrat de concession liant le Consortium Stade de France et l’État, contrat coûteux, originellement illégal et pourtant non dénoncé, les années passant, malgré un risque juridique évident.
J’en termine, monsieur le président.
L’État a apporté sa garantie sur le chiffre d’affaires, les matchs réservés aux fédérations et l’indemnisation pour absence de club résident, ce qui représente 114 millions. En tout, les dépenses publiques s’élèvent à 300 millions environ.
Le Conseil constitutionnel a annulé cette loi de validation et votre action a permis de créer les conditions nécessaires à la signature d’un avenant au mois de septembre, à la satisfaction de toutes les parties.
Pourriez-vous, madame la ministre, préciser ses contours et nous indiquer dans quelles conditions l’État, propriétaire de l’installation, mènera à bien la réalisation de cet avenant ?
Mes chers collègues, et vous aussi, madame la ministre, je vous demande de bien vouloir respecter votre temps de parole de deux minutes.
La parole est à Mme la ministre.
Il est vrai que j’ai identifié très tôt le dossier du Stade de France comme prioritaire. Ce sont en effet 114 millions qui ont été versés depuis l’origine par le ministère des sports dans le cadre de cette concession.
J’ai donc souhaité reprendre ce dossier et mettre autour de la table l’ensemble des parties prenantes, qui ne se parlaient plus depuis de longs mois, afin que chacun se retrouve face à ses responsabilités et que, sans qu’il y ait un « gagnant », hors le budget du sport, la sécurisation de ce contrat soit effective jusqu’à la fin de la concession, soit 2025.
Tel est l’objet de l’avenant qui a été signé le 9 septembre dernier et qui lie l’État au concessionnaire afin de nous faire sortir des clauses illégales du contrat, identifiées par le Tribunal administratif de Paris dès 1996 et qui avaient fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité en 2011. Depuis, ce dossier n’avait malheureusement pas été traité.
Dans le budget 2014, l’économie s’élève à 16 millions et sera, pour les quatre années à venir, durant la convention avec les Fédérations françaises de football et de rugby, a minima de 64 millions.
Je remercie l’ensemble des services du ministère du budget, le ministre du budget et le Premier ministre pour avoir travaillé discrètement et dans un contexte difficile à ce résultat favorable à l’ensemble des contribuables et au budget du sport.
À l’issue de cette convention, nous nous retrouverons autour de la table en fonction des projets à venir des fédérations. En tout cas, la concession est aujourd’hui sécurisée, ce qui était également essentiel pour organiser l’Euro 2016 car la fragilité juridique pour accueillir la compétition était bien réelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Je profite de l’examen des crédits de cette mission pour vous interpeller, madame la ministre, sur une proposition que je défends depuis plusieurs années : la prise en compte du bénévolat associatif dans le calcul des retraites.
À ce jour, près de 14 millions de nos concitoyens mettent leur compétence et leur temps libre au service des autres et se mobilisent pour eux.
Premier creuset de la démocratie, la vie associative représente une richesse extraordinaire pour notre pays. Chacun sait que les activités des associations sont bien organisées et coûtent souvent moins cher, notamment à l’État.
La vie associative est un vecteur de cohésion sociale et territoriale et touche toutes les catégories socioprofessionnelles, toutes les tranches d’âge, tout le territoire. Les pouvoirs publics doivent conforter la place des structures associatives dans le fonctionnement de notre démocratie. Notre rôle d’élu est aussi de transmettre la valeur de l’engagement, car la société se doit de promouvoir celles et ceux qui se dévouent pour elle.
Madame la ministre, seriez-vous disposée à travailler sur ce dossier pour que le dévouement inlassable des bénévoles trouve une juste récompense et une légitime reconnaissance dans le cadre du calcul des retraites, ne serait-ce qu’à travers un crédit d’heures qui permettrait un départ à la retraite anticipée de quelques jours ? Cela constituerait un signe fort à l’endroit de celles et ceux qui savent donner aux autres sans compter.
Par ailleurs, vous avez initié un groupe de travail sur le « football durable », présidé par Jean Glavany, dans la perspective de la loi-cadre sur le sport. Madame la ministre, le football amateur est aujourd’hui inquiet. Le nombre de licenciés chute et près de 3 000 clubs ont disparu ces deux dernières années. Pouvez-vous assurer la représentation nationale que le football amateur, avec ses 2 millions de licenciés et ses 500 000 bénévoles, est bien représenté et considéré dans le cadre de ces travaux ? Ne laissez pas le football sur la touche !
Sourires.
Monsieur le député, vous avez raison de rappeler la force du bénévolat dans notre pays et la nécessité de le valoriser. Les bénévoles n’attendent pas un statut particulier, mais une véritable reconnaissance. Le Sénat entame aujourd’hui l’examen du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, qui marque, pour la première fois, la reconnaissance de la subvention dans la loi. C’est un élément extrêmement important pour tous les projets associatifs : de plus en plus d’associations consacrent beaucoup trop de leur temps à répondre à la commande publique, au détriment de leur engagement bénévole. Une façon de répondre à ce problème, mais ce n’est pas la seule, consiste à reconnaître la force de la subvention dans la relation entre les collectivités publiques et le secteur associatif.
Pour encourager le bénévolat, j’ai également rompu, dans ce budget, avec la logique des exercices budgétaires du précédent quinquennat. Beaucoup d’entre vous ont évoqué la montée en charge du service civique : jusqu’en 2012, elle s’est faite au détriment de l’ensemble des moyens qui soutenaient les bénévoles dans les réseaux d’éducation populaire…
…et notamment du Fonds pour le développement de la vie associative, qui a pour vocation de former et d’accompagner les bénévoles. Depuis deux ans, cette montée en charge du service civique ne se fait plus au détriment des moyens qui sont consacrés au bénévolat.
Dès ma prise de responsabilité, une réflexion a par ailleurs été menée avec le Haut conseil à la vie associative autour non pas de la prise en compte de trimestres de retraites, mais d’un congé d’engagement bénévole. Nous sommes en train d’analyser, avec les grands réseaux associatifs, la manière dont les différents dispositifs de congés sont aujourd’hui utilisés : il existe des congés de représentation, des initiatives dans le secteur salarié autour de la prise en compte de ces différents temps sociaux.
Pour aller plus loin, il faudra ouvrir un débat avec les partenaires sociaux, nous y sommes prêts, et travailler à un congé d’engagement bénévole pour les actifs. Il faudra également travailler à la valorisation du bénévolat. Un débat a déjà eu lieu sur ce sujet dans cet hémicycle, au terme duquel il a été proposé d’élargir la médaille de la jeunesse et des sports à l’engagement associatif. Après un long travail avec la Grande chancellerie, le décret est aujourd’hui en Conseil d’État et nous avons obtenu d’étendre cette médaille à l’ensemble du mouvement associatif.
J’appelle les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », inscrits à l’état B.
Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » sont adoptés.
Tout d’abord, monsieur le président, j’aurais souhaité que le président de la commission des finances soit présent : il aurait peut-être pu m’expliquer pourquoi plusieurs de mes amendements ont été jugés irrecevables alors qu’ils n’avaient aucune incidence financière. Ses services ont été dans l’incapacité de me fournir des explications.
J’en viens à mon amendement no 267 . Le premier objectif du programme 219 souligne le rôle essentiel de l’État en matière de développement des pratiques sportives et de développement des équipements sportifs des collectivités territoriales. Il est précisé que « le ministère, par le biais du CNDS, intervient en tant que co-financeur des équipements sportifs et défend, au sein des instances de cet établissement, une politique de rééquilibrage territorial ».
Or, la proportion des subventions d’équipement du CNDS attribuées aux départements sous-équipés s’élevait à 39 % au titre de l’exercice 2012 et 35 % au titre de 2013. Elle est de 38 % pour la prévision 2014 et retient une cible, pour 2015, de 40 %. Il est à mon sens indispensable, au regard de ces évolutions, que le Gouvernement puisse justifier d’objectifs aussi élevés alors que la situation financière du CNDS est extrêmement fragile. Je demande donc que le Gouvernement nous remette un rapport, au plus tard pour le 1er juin.
J’en suis désolé pour mon collègue ligérien Paul Salen, qui est un bon connaisseur des dossiers du sport, mais je dois émettre un avis défavorable. Je signale que si un certain nombre de ses amendements ont été considérés comme irrecevables par la commission des finances, c’est parce qu’ils n’avaient pas de caractère financier en lien avec le projet de loi de finances pour 2014 et qu’ils ont donc été considérés comme des cavaliers budgétaires.
La situation financière du CNDS, vous le savez, était très dégradée en 2012, et la ministre des sports, Valérie Fourneyron, a proposé un plan de redressement financier extrêmement courageux. Ces difficultés financières sont un héritage : elles sont dues à des décisions préjudiciables prises par le précédent gouvernement, qui avait fait financer par le CNDS un certain nombre d’opérations très éloignées de sa mission première, qui est de développer le sport pour le plus grand nombre et de financer des équipements sportifs dans les territoires.
La situation du CNDS devrait continuer à se redresser en 2014 grâce à la préservation de ses recettes et à une baisse de 15 % de ses dépenses de fonctionnement inscrite dans le plan pluriannuel de redressement adopté par le conseil d’administration en novembre 2012. Les capacités financières du CNDS devraient encore être confortées grâce à l’élargissement de l’assiette de la contribution de 5 % sur la cession aux chaînes de télévision des droits de manifestations ou de compétitions sportives, la taxe Buffet, qui pourrait être étendue aux détenteurs de droits étrangers. Ce dispositif sera examiné, sur proposition du Gouvernement, lors du projet de loi de finances rectificative. Je précise également que la ministre s’est dite favorable à notre proposition commune de prolonger le prélèvement exceptionnel de 0,3 % sur les mises de la Française des jeux au-delà de 2015. Ces dispositifs devraient permettre au CNDS d’avoir, à partir de 2015, des marges de manoeuvre suffisantes pour relancer ses investissements dans les équipements sportifs.
J’ajoute, monsieur Salen, qu’il existe déjà de nombreux rapports sur la situation du CNDS : je pense à celui de la Cour des comptes, mais aussi à celui que j’ai commis avec Guénhaël Huet au mois de juillet sur la solidarité financière entre le sport professionnel et le sport amateur. Ces rapports devraient suffire à nous éclairer.
La commission des affaires culturelles et de l’éducation n’a pas été saisie de ces amendements, et c’est donc à titre personnel que je m’exprime. Je tiens à insister sur le fait que le CNDS est géré de manière paritaire par le ministère de la jeunesse et des sports et par le mouvement sportif. Le plan de redressement mené par Mme la ministre a été construit en concertation avec le mouvement sportif, et ce n’est donc pas au Gouvernement de faire un rapport.
Je pense qu’il sera utile, d’ici quelques mois, d’entendre les partenaires du CNDS sur l’état d’avancement du plan de redressement et sur la manière dont s’appliquent les réformes de financement de la part territoriale. Mais nous avons déjà assez de rapports sur ce sujet.
Même avis, monsieur le président. Nous avons construit le plan de redressement en mettant autour de la table tous les partenaires du CNDS, qui est un établissement public : le mouvement sportif, les représentants des collectivités locales et plusieurs parlementaires. Nous avons construit ce plan de redressement avec un objectif majeur : maintenir et sécuriser les recettes du CNDS, dans le contexte actuel de redressement des dépenses publiques, mais aussi travailler collectivement pour mieux définir et cibler les secteurs où l’État doit avoir un rôle de levier dans l’utilisation des moyens du Centre.
Notre deuxième axe a consisté à mieux prendre en compte les territoires les plus fragiles en termes d’accès au sport et à faire en sorte que toute dépense consacrée à l’Euro 2016 soit gagée par une recette équivalente. C’est dans ce cadre que nous avons construit le plan de redressement du CNDS. Dans quelques jours, après de nombreuses réunions de concertation avec tous les partenaires, pas seulement l’État, nous aboutirons à de nouveaux critères de subvention. Ce plan de redressement, personne ne devra l’oublier, parce qu’il est difficile : en termes de moyens d’investissement annuel, nous sommes passés du rêve d’avoir plus de 100 millions d’euros, quand nous avions 50 millions de recettes, à une réalité de 50 millions d’euros par an !
Ce plan de redressement est difficile, et il le sera pour tous les territoires. C’est pourquoi il importe de cibler les subventions du CNDS sur les territoires les plus prioritaires. C’est ce travail collectif que nous venons de faire. Il devrait être voté au prochain conseil d’administration, au mois de novembre, et s’appliquera sur l’exercice 2014. Nous aurons à cette occasion la possibilité d’évaluer ensemble la façon dont ce plan sera mis en oeuvre sur les territoires. Mais en matière d’équipements de proximité, nous serons au rendez-vous des territoires les plus prioritaires.
L’amendement no 267 n’est pas adopté.
Le programme 411 du projet de loi de finances pour 2014 prévoit la création d’un programme d’investissements d’avenir d’un montant global de 100 millions d’euros, comme l’a confirmé tout à l’heure le rapporteur. Selon les propos de la ministre, ce programme a vocation à amorcer de nouveaux projets, en proposant des partenariats innovants, à grande échelle, entre acteurs publics et privés. La mise en oeuvre de ce programme passe par des appels à projets ciblés, dont les réponses obtenues sont analysées par un jury indépendant : les projets retenus pour leur caractère innovant pourront alors bénéficier d’un financement du PIA.
Ces projets devront traduire l’émergence de « politiques de jeunesse intégrées » ayant l’ambition de traiter de manière globale la problématique des jeunes à l’échelle d’un territoire. L’objectif affiché est d’inciter les acteurs locaux – associations, entreprises, services de l’État – à concevoir des politiques de jeunesses partenariales.
Or, concernant l’affectation de 100 millions d’euros au titre des investissements d’avenir, les axes de travail sont des domaines dans lesquels les régions sont déjà fortement engagées, compte tenu de leurs compétences. Ce programme est mis en place sans que le Gouvernement définisse l’utilisation rationnelle et effective de ces crédits. L’enjeu principal va donc être de mobiliser les entreprises sur des projets dans lesquels elles s’investissent très peu aujourd’hui.
Pour ces raisons, il apparaît essentiel que le Gouvernement remette un rapport permettant de mieux cadrer l’emploi des fonds prévus pour le programme d’investissements d’avenir, qui doit d’ailleurs faire l’objet d’un débat au niveau de la représentation nationale.
Il est défavorable sur cet amendement de Paul Salen, qui prévoit de dresser un bilan du Programme d’investissements d’avenir consacré à la jeunesse dans un rapport remis avant le mois de mai prochain. Ce calendrier ne me semble pas réaliste…
…puisque les investissements d’avenir vont s’étaler sur une période de trois ans. Comme je l’ai indiqué dans mon intervention et dans mon rapport spécial, et je crois d’ailleurs que cette opinion est très largement partagée sur l’ensemble de nos bancs, nous souhaitons, en tant que parlementaires, être étroitement associés au contrôle et à l’évaluation de ces futurs programmes d’investissements d’avenir. Et je crois que, de son côté, le ministère souhaite préserver la cohérence de ses programmes d’investissements d’avenir.
Lundi soir, lors du débat que nous avons eu ici même à l’Assemblée, j’ai interrogé Louis Gallois, commissaire général à l’investissement, chargé de la cohérence de l’ensemble des appels à projet et de la qualité des procédures, sur la manière dont le Parlement serait associé au Programme d’investissements d’avenir. Il s’est engagé, premièrement, à venir régulièrement présenter les projets d’investissements d’avenir devant nos différentes commissions. Je parle sous le contrôle de son président, mais je crois qu’il serait utile que la commission des affaires culturelles auditionne M. Gallois. Il a également indiqué qu’un rapport annuel serait remis au Parlement et que les commissions compétentes bénéficieraient chaque mois d’une information renforcée de la part du commissaire général à l’investissement. Enfin, toutes les conventions qui seront signées avec les opérateurs seront soumises à l’avis du Parlement.
Vous voyez donc qu’en aval, comme en amont, du Programme d’investissements d’avenir, deux logiques seront à l’oeuvre : l’association du Parlement et une totale transparence.
La commission des affaires culturelles et de l’éducation n’a pu être saisie de cet amendement. À titre personnel, j’estime que votre demande de rapport est satisfaite par cette obligation de rapport annuel sur le Programme d’investissements d’avenir qu’a évoquée le rapporteur spécial.
Ce qui doit surtout nous préoccuper, c’est de clarifier la définition du contenu de cet appel à projet, car on sent bien, au fil des discussions et des réponses que nous font les ministres de l’éducation nationale et de la jeunesse et des sports, un manque de clarté quant à la manière dont ces 100 millions seront utilisés. Le développement du projet risque d’être bloqué si aucune précision n’est apportée.
Même avis, monsieur le président. Tout ce qu’ont dit les deux rapporteurs montre bien que nous partageons le souhait de maintenir la cohérence des programmes d’investissements d’avenir, sous l’égide du Commissariat général à l’investissement. Nous avons aussi la volonté que les 100 millions du programme « Projets innovants en faveur de la jeunesse » soient utilisés de manière cohérente et que l’appel à projet soit géré par le ministère.
Et ce n’est pas parce que ces 100 millions seront gérés par l’ANRU pour des raisons de facilité financière que l’ensemble des projets seront consacrés à la politique de la ville. Ils peuvent intéresser l’ensemble des territoires et le fait de passer par l’ANRU ne répond qu’à un souci de facilité pour les projets d’investissements d’avenir pour la jeunesse.
Je voudrais faire part d’une double inquiétude concernant la gestion du Programme d’investissements d’avenir, et profiter de la présence du ministre du budget pour lui adresser une question.
À l’origine, le PIA fait suite au rapport Juppé-Rocard, qui faisait lui-même suite au plan de relance. L’idée était de préparer la croissance des vingt ou trente années à venir. Nous nous félicitons tous du lancement par le Premier ministre du PIA 2, avec 5 milliards d’euros de dotations nouvelles.
Ma première inquiétude est la suivante : sous le gouvernement précédent, le ministère du budget et Matignon avaient clairement fait savoir que le PIA ne se transformerait pas en troisième tour budgétaire. On sait qu’après les négociations budgétaires, tous les ministères essayent de recaser dans le plan de relance ce qu’ils n’ont pas réussi à inclure dans le budget… et qu’ensuite tout le monde essaie de réintroduire dans le PIA ce qui n’a pu passer ni dans le budget, ni dans le plan de relance ! Mais les consignes étaient très fermes sur ce point : le PIA n’est pas un troisième tour budgétaire. Je m’inquiète donc de constater que le PIA 2 est budgété dans les différents programmes que nous étudions aujourd’hui.
J’ai également peur que ne se mette en place une usine à gaz. Aujourd’hui, trois institutions se préoccupent déjà du PIA : chaque ministère est concerné, de même que l’opérateur principal, l’ANRU dans notre cas, et puis le Commissariat général à l’investissement. Cela fait déjà trois décisionnaires pour l’ensemble du plan d’investissements d’avenir. Et j’ai cru comprendre, à entendre à l’instant le rapporteur spécial, que le Parlement allait également s’en mêler. Je crains qu’avec l’intervention de quatre institutions, les procédures ne deviennent excessivement complexes, condamnant ce plan d’investissements d’avenir à l’inefficacité.
Les explications de Régis Juanico allaient dans le sens de mon intervention : j’ai senti qu’il avait lui aussi besoin d’explications sur la façon dont serait géré ce PIA. Quant à Mme Buffet, il m’a aussi semblé qu’elle nous disait aussi que ce projet manquait un peu de clarté et qu’elle était un peu inquiète. Dès lors, je ne comprends pas leurs conclusions : pourquoi donner un avis négatif à cet amendement puisque leurs argumentations y semblaient favorables ?
L’amendement no 271 n’est pas adopté.
Nous avons ainsi terminé l’examen des crédits relatifs au sport, à la jeunesse et à la vie associative.
La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’action extérieure de l’État (nos 1428, annexe 1 ; 1429, tome I ; 1431, tomes I et II).
La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.
Monsieur le président, madame la présidente de la commission, mesdames et messieurs les députés, l’exercice budgétaire auquel s’est livré le ministère des affaires étrangères pour 2014 était, comme pour beaucoup de ministères, extraordinairement contraint. Il fallait conjuguer l’effort de redressement des comptes publics tout en maintenant et en développant les moyens indispensables au bon fonctionnement de notre diplomatie.
C’était difficile, délicat, mais je crois que le défi a été relevé. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le budget de la mission « Action extérieure de l’État » que nous examinons aujourd’hui s’élève à 2 952 millions d’euros, masse salariale comprise, en simple diminution de 0,7 %.
C’est un bon budget car tout en prenant sa part de l’effort collectif – et je tiens, en ma qualité de ministre délégué au budget, à en remercier le ministre des affaires étrangères et l’ensemble de ses ministres délégués – il définit un cap clair pour l’action extérieure de l’État.
Il conserve d’abord la faculté de financer les priorités et des objectifs cohérents, comme le renforcement de la sécurité de nos ambassades ou encore un effort significatif au profit des bourses scolaires de nos compatriotes à l’étranger.
Dans le détail, les crédits du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », autrement dit notre diplomatie générale, s’élèvent à 1 852 millions d’euros, en légère baisse de 0,7 % par rapport à la loi de finances pour 2013. Cette diminution recouvre des évolutions contrastées. Sans être exhaustif, trois points méritent d’être mis en exergue : les économies réalisées sur les contributions internationales, la réorganisation stratégique de notre réseau diplomatique et la hausse des crédits de personnel, notamment pour les plus faibles salaires.
Les contributions internationales et européennes constituent une part très importante, presque la moitié, des crédits du programme 105. Ces dépenses sont prévues en baisse de 5 % dans le projet de loi de finances pour 2014. Cette baisse est principalement le résultat de la révision du barème des Nations unies en décembre 2012, qui a permis à la France de voir diminuer sa quote-part dans le financement de l’ensemble des organisations du système onusien : elle est passée de 6,123 % à 5,593 % pour la période 2013-2015. Si la France a ainsi obtenu une diminution de sa part, elle reste cependant le quatrième plus important contributeur au budget de l’ONU. De plus, d’ici 2015, la France a décidé de se retirer de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel, dont le programme était contesté pour son manque d’efficacité.
S’agissant maintenant de notre réseau diplomatique, les dotations qui y consacrées, hors dépenses de personnel, sont en augmentation de 5,5 % en 2014. Elles atteignent 220,8 millions d’euros soit une augmentation de 11,5 millions par rapport à la loi de finances pour 2013.
L’essentiel des moyens supplémentaires pour le réseau est affecté aux dépenses de sécurité pour nos implantations : il est proposé de les augmenter de 9,1 millions d’euros, ce qui les portera à 41,8 millions, soit une augmentation de près de 28 %. Cet effort s’inscrit dans la continuité des objectifs de sécurisation des implantations fixés l’année passée et répond à un besoin urgent, comme l’attentat de Tripoli l’a démontré cette année. Des travaux lourds de sécurisation seront engagés et des renforts de sécurité seront déployés dans les postes les plus exposés tels que Beyrouth, Bagdad, Kaboul, Tripoli ou Bamako.
Dans ce contexte, et à nombre d’emplois constant, notre réseau diplomatique, tout en conservant son universalité, est quant à lui adapté de façon stratégique, réorganisé, redéployé vers les zones géographiques prioritaires. Ainsi, des créations d’emplois ont été prévues en Chine, en Inde, en Afrique du Sud, en Indonésie, au Mali et en Birmanie. Sur la période 2013-2015, près de 300 emplois seront redéployés au bénéfice des pays émergents ou en sortie de crise. Les zones historiquement mieux dotées, comme l’Amérique du Nord ou l’Europe, participeront à cet effort stratégique.
Il convient de saluer le caractère novateur des réformes engagées pour y parvenir : expérimentations, mutualisation des moyens des différents services dans les grandes capitales étrangères et regroupement de sites, dématérialisation des procédures.
Un effort spécifique pour les personnels les plus modestes a été engagé. En effet, près de 2,4 millions d’euros seront consacrés au relèvement du minium de traitement dans la fonction publique et à la revalorisation indiciaire des corps d’agents les moins biens rémunérés. Des mesures sont également prises en faveur des volontaires internationaux et des agents de droit local, généralement faiblement rémunérés.
Le programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires » s’élève à 375,5 millions d’euros, en augmentation de 5,1 % par rapport au projet de loi de finances pour 2013, ce qui représente près de 18 millions supplémentaires. Si les crédits d’aide sociale pour nos compatriotes sont stables et maintenus à environ 19,8 millions d’euros, les moyens alloués pour les bourses scolaires augmentent quant à eux de 8,5 millions cette année. Conformément aux engagements pris l’année passée, un effort budgétaire important sera fait en 2014 pour les bourses scolaires versées à nos compatriotes résidant à l’étranger, avec une hausse de 7,7 %.
Enfin, je souhaite saluer une politique à la traduction budgétaire plus discrète, mais tout à fait novatrice : la diplomatie économique. Il a été décidé de renforcer l’implication du réseau diplomatique dans le redressement économique de la France, avec un plan d’action pour la diplomatie économique. Un an après la conférence des ambassadeurs et les Rencontres Quai d’Orsay-entreprises, à l’initiative du ministre des affaires étrangères, des structures ont été créées et des moyens humains mis à disposition.
Ainsi une direction des entreprises et de l’économie internationale a-t-elle été constituée le 1er mars 2013 et sept ambassadeurs pour les régions mis à disposition des présidents de région qui le souhaitent pour favoriser le rapprochement entre les collectivités et leurs entreprises d’une part et le réseau diplomatique d’autre part.
En outre, neuf représentants spéciaux ont été nommés pour favoriser le développement de la relation économique avec des pays stratégiques. Enfin, la rédaction de volets économiques dans les plans stratégiques des ambassades a été systématisée à partir du début de l’année 2013.
Dans un contexte budgétaire contraint, le projet de budget de la mission « Action extérieure de l’État » parvient à financer des priorités claires et stratégiques tout en maintenant les moyens indispensables à notre diplomatie et en préservant le rang de puissance d’influence de notre pays. Aussi, mesdames et messieurs les députés, je vous invite à voter sans réserve les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jérôme Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, mesdames et messieurs les députés, chers collègues, voici un peu plus d’un an que le Gouvernement dirige la politique de notre pays. Ce n’est pas très long, mais cela permet néanmoins d’esquisser un premier bilan dans le domaine qui nous intéresse aujourd’hui, celui de l’action extérieure de l’État.
En un an, deux réformes d’ampleur ont été accomplies : celle de l’aide à la scolarité des enfants français vivant à l’étranger et celle de l’Assemblée des Français de l’étranger. Ces deux réformes ne sont pas encore entièrement achevées mais sont largement engagées.
La première correspond au remplacement de la prise en charge des frais de scolarité, très onéreuse et inéquitable, par un système de bourses réformé, plus juste et dont le montant a été augmenté – il le sera encore en 2014 et en 2015. Il semblerait que le basculement d’un système à l’autre se soit bien passé, peut-être parce que les décisions finales d’attribution ne sont plus prises de manière centralisée à Paris mais ont été déléguées aux commissions locales des bourses.
La seconde réforme, celle de l’Assemblée des Français de l’étranger, vise à donner une plus grande représentativité à ses membres. Elle a été largement débattue et adoptée par le Parlement il y a quelques mois. Je n’y reviendrai donc pas.
À côté de ces deux réformes a été initiée une évolution peut-être moins visible mais dont certains observateurs ont souligné l’ampleur inégalée : le Gouvernement a commencé à rééquilibrer les moyens d’un certain nombre de nos postes. Certains d’entre eux, visiblement surdotés pour des raisons historiques, ont vu une partie de leurs moyens, financiers mais surtout humains, transférés vers des ambassades et consulats situés dans des pays émergents. La diplomatie doit s’adapter aux réalités du XXIe siècle : elle a commencé à le faire, et cette démarche sera poursuivie l’année prochaine. Le ministère des affaires étrangères a réussi à entamer ce rééquilibrage en préservant la quasi-universalité du réseau diplomatique de la France et en menant les travaux de sécurisation nécessaires des postes les plus exposés, ce qui constitue, à juste titre, une de ses priorités.
Troisième point : l’administration consulaire a réussi à faire face à la demande croissante de visas, en augmentation de 8 % par an depuis 2009, alors que les moyens des consulats, eux, ont tendance à diminuer. Pour ce faire, le réseau consulaire a dû innover : l’instruction des demandes de visas est le plus souvent externalisée, parfois en coopération avec nos partenaires de l’espace Schengen. Les premiers résultats sont encourageants. Ainsi, dans certains pays, des agences Schengen ont ouvert leurs portes dans des villes de province où la France ne dispose pas de consulat ; ce sont autant de touristes potentiels qui peuvent être attirés, avec les retombées économiques que nous connaissons.
Toutes ces réformes et actions ont été menées avec des moyens financiers et humains en diminution constante.
En 2014, les crédits de la diplomatie française continueront à baisser. Cette baisse sera de 3 % si l’on prend en considération l’ensemble du ministère des affaires étrangères, ou de 0,7 % si l’on considère le seul périmètre de la mission « Action extérieure de l’État ».
Cette réduction globale sera néanmoins facilitée par la diminution des contributions internationales, et notamment de la participation française au budget de l’ONU, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre. En effet, le nouveau barème de paiement entré en vigueur aux Nations unies en décembre 2012 a réduit la quote-part de la France, passée de 6,12 % à 5,59 %. En conséquence, le niveau réel des crédits disponibles reste à peu près satisfaisant pour l’ensemble des programmes de la mission.
Après déjà de nombreuses années de réduction, les effectifs globaux diminueront encore de près de 200 emplois, à l’exception notable du recrutement de 25 agents qui seront affectés à la délivrance des visas.
Le budget de la mission « Action extérieure de l’État » participe donc bien à l’effort de maîtrise de la dépense publique, nous devons le souligner. Pour autant, des sujets de préoccupation demeurent, et c’est sur ces points que je souhaite attirer l’attention de l’Assemblée.
D’abord, les crédits de fonctionnement et d’entretien des postes ont atteint un point d’étiage qui, souvent, ne permet plus l’entretien courant, d’autant que les contrats d’externalisation, qui ont été encouragés, sont imputés sur le budget de fonctionnement. Et lorsque des investissements sont réalisés, les contrats d’entretien ne peuvent pas être conclus, faute de crédits. Dans un poste consulaire que j’ai visité, j’ai pu mesurer la difficulté qu’avait le consul à assurer la révision périodique de son véhicule de fonction. Dans un autre consulat, les portes sécurisées ne fonctionnaient plus car les crédits manquaient pour les entretenir. En matière de fonctionnement, de nombreux postes semblent réellement être arrivés au bout des économies réalisables.
Enfin, je souhaite attirer votre attention sur la situation du personnel de droit local, qui représente désormais plus du tiers des emplois de la mission : 5 000 sur un total de 14 500 agents. Chacun s’accorde pour reconnaître que le ministère ne pourrait plus fonctionner sans eux. Ces agents, rémunérés en fonction des critères du marché du travail et du droit locaux, coûtent beaucoup moins cher que le personnel expatrié. Mais, dans certains pays, le coût de la vie augmente vite et pour ces personnels, la situation devient parfois difficile. Dans un pays émergent d’Asie, le SMIC local a récemment été revalorisé de 44 %, alors que les rémunérations versées aux agents de droit local n’ont pas évolué. De ce fait, les salaires des personnels les moins élevés sont maintenant inférieurs au SMIC, et certains doivent cumuler leur activité principale avec un second emploi. Il me semble qu’un geste de la France à l’égard de ces agents de droit local, qui sont généralement très dévoués, ne serait pas très onéreux et permettrait d’éviter de voir les plus qualifiés nous quitter.
Confiant dans la capacité du ministère des affaires étrangères à poursuivre son évolution et à s’adapter aux contraintes budgétaires du moment, j’ai l’honneur de formuler un avis favorable aux crédits de la mission « Action extérieure de l’État », que la commission des finances a adoptés il y a quelques jours.
La parole est à Mme Claudine Schmid, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour la diplomatie culturelle et d’influence.
Comment pourrais-je approuver les crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » ? Déjà modestes en 2013, ils subissent une baisse de 3,3 % en 2014, alors qu’ils sont censés appuyer une grande partie des politiques qui portent l’influence de notre pays, y compris celle relative à l’enseignement français à l’étranger. Le plafond d’emplois du programme est réduit de 62 emplois. Il s’établit à 911 emplois temps plein travaillés. Pour mémoire, il était de 1 048 emplois en 2012.
Des économies sont imposées à l’ensemble des instruments. S’agissant du réseau culturel, les dotations aux établissements à autonomie financière diminuent de 4 %, et les subventions aux alliances françaises de 4,3 %. Les crédits alloués aux bourses sont amputés de 2,5 millions d’euros dans les secteurs de l’attractivité et de la recherche, des biens publics mondiaux, de la culture et du français ; les programmes de bourses cofinancés, déjà réduits de 5 % en 2013, baissent à nouveau de 3 %.
Ces économies n’épargnent pas les opérateurs, incités à rechercher des financements extra-budgétaires et dont les subventions sont révisées à la baisse : moins 2,5 millions d’euros pour l’Institut français, moins 160 000 euros pour Campus France et moins 8,5 millions d’euros pour l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
Est-il judicieux d’asseoir trop largement la conduite des politiques publiques sur l’appel aux financements privés ? N’est-ce pas, à terme, contre-productif voire dangereux ? Permettez-moi de m’interroger, surtout en entendant les propos de la majorité sur un autre dossier qui, comme on dit, fait l’actualité.
En effet, la dégradation des moyens publics conduit à des abandons de missions et réduit l’effet de levier potentiel que génère l’engagement public pour les cofinancements et les partenariats locaux. Quant aux financements privés, ils sont soumis aux aléas des situations économiques locales ou des changements politiques. C’est du moins ce que souligne la Cour des comptes dans le rapport relatif au réseau culturel de la France à l’étranger qu’elle a établi à la demande du Président de l’Assemblée nationale.
Il est donc nécessaire de maintenir les crédits publics, y compris sur des petits programmes. Les résidences de créateurs, que j’ai choisies pour thème de mon avis budgétaire, sont un bon exemple : pilotés par l’Institut français, ces programmes mobilisent moins d’un million d’euros mais contribuent au rayonnement culturel de la France sur le long terme, par le développement des réseaux et des partenariats culturels mis en place à travers les échanges d’artistes.
Ce budget est important parce qu’il permet à notre pays et à nos concitoyens de s’ouvrir au monde qui vient à eux. Or les crédits que nous examinons aujourd’hui ne donnent pas à la diplomatie culturelle la priorité qu’elle devrait avoir. Je ne pourrai donc pas les voter, et surtout pas en qualité de rapporteure pour avis, malgré l’avis favorable de la commission des affaires culturelles.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. François Loncle, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour la diplomatie culturelle et d’influence.
Nous connaissons tous le contexte budgétaire de notre pays. Loin de moi l’idée de contester la nécessité de faire porter sur les dépenses une partie substantielle de l’effort nécessaire. Le programme 185, consacré à l’action culturelle et à l’éducation, présente la singularité trop souvent oubliée de subir depuis près de vingt ans et de manière quasiment ininterrompue, sauf sous le gouvernement Jospin, une diminution de ses moyens, pourtant déjà modestes si l’on considère le poids des crédits destinés au réseau d’enseignement français à l’étranger dans ce programme – environ 60 %.
Il est donc essentiel de s’assurer encore cette année que les baisses de crédits pourront être absorbées par l’optimisation de notre dispositif, et que l’effort nouveau demandé n’amputera pas la capacité de notre pays à exercer les missions qui lui confèrent un rayonnement extérieur.
L’influence de la France à l’étranger repose sur deux grands piliers : la diplomatie économique et la diplomatie culturelle. Il servirait à peu de chose de promouvoir la première, notamment au travers d’une meilleure appropriation de ses enjeux par les postes, si l’on affaiblissait la seconde dans le même temps.
La mutation de notre politique d’influence doit passer par la mise en ordre de ces deux volets, chacun renforcé, et le développement d’interactions fécondes. La mise en place prochaine, au sein de chaque poste, d’un conseil d’influence en charge de l’action culturelle, de l’éducation et de l’attractivité a pour objectif de renforcer l’articulation entre l’action culturelle et les autres dimensions de notre action, notamment économique.
Monsieur le ministre, vous avez le souci de la lisibilité, de la clarté et de la simplicité. Aussi, je vous demande pourquoi il faut rendre les politiques de diplomatie culturelle et d’influence si complexes et si enchevêtrées. Je souhaite davantage de clarté, de lisibilité et de simplicité dans la préparation du prochain budget. Il conviendrait, par exemple, que le programme 185 puisse donner une vision consolidée, si ce n’est des crédits, tout au moins des emplois du ministère dédiés aux actions de politique culturelle extérieure, car tel était l’objet de ce programme à sa création.
Sur le fond, le constat d’une baisse poursuivie des crédits, dans le cadre d’une trajectoire triennale, se trouve équilibré par la formidable capacité des personnels, à Paris et dans le réseau, à faire de nécessité vertu. Cela a permis jusqu’à présent de donner leur plein effet aux mesures de rationalisation du dispositif français, engagées il y a plusieurs années déjà. À cet égard, la capacité à lever des financements est tout à fait remarquable.
Un certain nombre de décisions stratégiques doivent désormais être arrêtées, particulièrement en matière de cartographie de notre diplomatie culturelle au sens large, y compris éducative et économique, d’adaptation de nos implantations et du rôle que doit jouer l’Institut français à la suite de l’expérimentation du rattachement du réseau à ce dernier.
Alors, il sera possible de donner des instructions claires aux opérateurs, d’ordonner l’ensemble des réformes de modernisation déjà conduites, de mettre un terme au chantier permanent, porteur de productivité mais déstabilisant, et de conforter in fine notre influence.
Car contrairement à d’autres pays avec lesquels on compare souvent notre dispositif, à commencer par le Royaume-Uni et l’Allemagne, notre action culturelle et de coopération est consubstantielle à notre action diplomatique. Elle se pense dans une acception large qui va bien au-delà des cours de langue et de l’attractivité universitaire. Elle s’inscrit pleinement comme un des éléments centraux de notre stratégie diplomatique, et non pas comme une politique complémentaire suivant sa propre logique.
Faciliter les synergies et trouver le subtil dosage entre toutes les composantes de la politique culturelle et d’influence, en les appréhendant comme autant de facettes de la présence française en interaction permanente, est l’approche qui doit guider la mise en oeuvre des actions relevant entre autres du programme 185 à compter de 2014. Pour toutes ces raisons, je vous invite mes chers collègues, avec notre commission des affaires étrangères, à voter ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Philippe Baumel, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour l’action de la France en Europe et dans le monde et les Français à l’étranger et les affaires consulaires.
L’exercice budgétaire auquel s’est livré le ministère des affaires étrangères pour 2014 était difficile, voire délicat : conjuguer le redressement des comptes publics et le maintien, voire parfois le développement des moyens indispensables au bon fonctionnement de notre diplomatie pouvait paraître comme peu conciliable. C’était osé, mais je crois que le défi a été relevé.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le budget de la mission « Action extérieure de l’État » s’élève à 2,953 milliards d’euros, masse salariale comprise, soit une simple diminution de 0,7 %. Ce budget conserve donc très clairement la faculté de financer des priorités et des objectifs cohérents comme le renforcement de la sécurité de nos ambassades, ou encore marque un effort significatif pour les bourses scolaires de nos compatriotes à l’étranger, j’y reviendrai.
Dans le détail, les crédits du programme 105, autrement dit de notre diplomatie générale, s’élèvent à 1,852 milliard d’euros, en légère baisse, de 0,7 %, par rapport à la loi de finances pour 2013. Cette diminution recouvre des évolutions contrastées. Pourtant, trois points me semblent devoir être soulignés : des économies sur les contributions internationales, la réorganisation stratégique de notre réseau diplomatique et la hausse des crédits de personnel, notamment pour les plus faibles salaires.
C’est peut-être à propos des contributions internationales et européennes que les évolutions de crédits sont les plus significatives. Ces contributions constituent une part très importante – près de la moitié – des crédits du programme 105. Ces dépenses sont prévues en diminution de 5 %. Cette baisse est principalement le résultat de la révision du barème des Nations unies en décembre 2012, qui a permis à la France de voir diminuer sa quote-part dans le financement de l’ensemble des organisations du système onusien : elle est passée de 6,1 % à 5,6 % pour la période 2013-2015. Par ailleurs, et d’ici à 2015, la France a décidé de se retirer de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel, un programme dont l’efficacité est apparue tout à fait relative, ce qui implique une économie d’environ 6 millions d’euros l’année prochaine. Cependant, la France reste le quatrième plus gros contributeur au budget de l’ONU.
S’agissant maintenant de notre réseau diplomatique, les dotations qui y consacrées, hors dépenses de personnel, sont en augmentation de 5,5 % en 2014, pour atteindre 220,8 millions d’euros, soit une augmentation de 11,5 millions par rapport à la loi de finances pour 2013.
L’essentiel des moyens supplémentaires pour le réseau est affecté aux dépenses de sécurité. Il est proposé de les augmenter en 2014 de 9,1 millions d’euros, ce qui les portera à 41,8 millions, soit une augmentation de près de 28 %. Cet effort répond à un besoin essentiel, l’attentat de Tripoli l’a malheureusement démontré. Des travaux lourds seront engagés dans de nombreux postes et des renforts humains seront déployés dans les postes les plus exposés, je pense à Beyrouth, Bagdad, Kaboul, Tripoli et Bamako.
Dans ce contexte et à nombre d’emplois constants, notre réseau diplomatique, tout en conservant son universalité, se voit adapté, réorganisé, redéployé stratégiquement vers nos géographies prioritaires. Ainsi, des créations d’emplois sont prévues en Chine, en Inde, en Afrique du Sud, en Indonésie, au Mali ou encore en Birmanie. Sur la période 2013-2015, près de 300 emplois seront redéployés au bénéfice des pays émergents ou en sortie de crise. Les zones historiquement mieux dotées comme l’Amérique du Nord ou l’Europe participeront à cet effort.
Au-delà, il est à noter qu’un effort spécifique pour les personnels les plus modestes a été initié. En effet, près de 2,4 millions d’euros seront fléchés vers le relèvement du minimum de traitement dans la fonction publique ainsi qu’à la revalorisation indiciaire des corps d’agents les moins bien rémunérés. Des mesures sont également prises en faveur des volontaires internationaux et des agents de droit local faiblement rémunérés.
Le programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires » s’élève quant à lui à 375,5 millions d’euros et augmente de 5,1 % par rapport à 2013, soit près de 18 millions supplémentaires.
Si les crédits d’aide sociale pour nos compatriotes sont stables et maintenus à environ 19,8 millions d’euros, les moyens alloués pour les bourses scolaires augmentent de 8,5 millions d’euros cette année. Conformément aux engagements pris l’année passée, un effort budgétaire conséquent sera fait en 2014 pour les bourses scolaires versées à nos compatriotes résidant à l’étranger avec une hausse de 7,7 %.
Enfin, je souhaiterais saluer une politique à la traduction budgétaire plus discrète, mais tout à fait novatrice : la diplomatie économique. Je ne rentrerai pas dans le détail de ce dispositif.
Pour conclure, le projet de budget de cette mission me paraît structuré et clair, avec des moyens confortés pour notre réseau diplomatique, +5 %, une sécurité renforcée pour nos postes, +28 %, des bas salaires revalorisés et une augmentation des crédits pour les bourses, de +7,7 %. Tous ces éléments m’incitent, chers collègues, à vous demander de voter sans réserve le budget « Action extérieure de l’État ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je n’ai malheureusement pas pu intervenir plus tôt, et je prie M. le ministre et Mme la présidente de la commission de m’en excuser. Je voudrais rappeler, et je n’ai rien contre le ministre du budget dont on connaît la ténacité et la compétence, que nous sommes dans un débat sur la politique étrangère. Or le ministre des affaires étrangères est absent. Certes, il s’agit d’une discussion financière, mais je trouve anormal que ce soit le ministre du budget qui défende le budget des affaires étrangères. Cela devrait revenir au ministre des affaires étrangères qui est la voix de la France au plan international. Je réitère mes protestations et je demande que la Conférence des présidents reprenne un vieux débat et que, comme dans le passé, le ministre des affaires étrangères vienne défendre son budget à l’Assemblée nationale.
Je rappelle que le Gouvernement choisit le ministre qui siège. Par ailleurs, sous la précédente législature, le ministre du budget représentait systématiquement le Gouvernement.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires étrangères.
Je voudrais dire à Jacques Myard que le ministre des affaires étrangères a défendu son budget devant notre commission, qui l’a approuvé.
Quant à Bernard Cazeneuve, nous sommes très heureux de l’avoir en face de nous, car il est un membre très important du Gouvernement. Enfin, le Gouvernement choisit celui qui vient en séance publique.
Le budget que vous nous soumettez, monsieur le ministre, montre bien que l’on peut concilier l’économie des deniers publics et l’efficacité. Certes, le ministère des affaires étrangères contribue, comme tous les autres, au désendettement de l’État avec une baisse de ses crédits de 0,7 % et de ses effectifs de plus de 1 %. Mais les priorités sont financées, en particulier la sécurité de nos ambassades et les bourses scolaires sur critères sociaux pour nos compatriotes à l’étranger, qui ont été réformées. Le Gouvernement tiendra l’engagement qui a été pris de reconvertir en dépenses de bourses les 32 millions d’euros économisés grâce à la suppression de la prise en charge des frais de scolarité pour les élèves français des lycées français, et je m’en réjouis.
Je voudrais cependant rappeler, monsieur le ministre, que le ministère des affaires étrangères contribue à la maîtrise des dépenses publiques depuis longtemps. De 2006 à 2013, François Loncle l’a rappelé, près de 1 900 emplois ont été supprimés, soit une baisse de plus de 12 %. Depuis 2009, dans certains pays européens où le réseau était très développé, comme l’Espagne, la baisse des effectifs rattachés au ministère peut approcher les 20 %. Quant aux dépenses immobilières, y compris une grande part des travaux d’entretien, elles sont financées par la cession d’éléments du patrimoine du ministère. Ce patrimoine est considérable et la rationalisation de nos implantations est évidemment légitime, non seulement pour des raisons budgétaires, mais pour que notre diplomatie soit plus visible et plus efficace. Il n’empêche que ce mode de financement atteindra nécessairement ses limites.
Le Gouvernement que vous représentez, monsieur le ministre, n’est évidemment pour rien dans les choix budgétaires faits avant 2012. Mais je voulais rappeler cet effort budgétaire durable et massif du ministère des affaires étrangères, car il faudra aussi en tenir compte pour les budgets ultérieurs. L’effort des différentes administrations doit être comparé sur le moyen terme.
Cet effort de maîtrise de la dépense s’accompagne d’un redéploiement significatif des moyens, car il nous faut nous adapter à l’évolution du monde aussi bien qu’à celle de nos priorités. Je salue à cet égard l’action qui est menée pour promouvoir la diplomatie économique. En un an, il y a eu un travail d’organisation très important : création d’une direction des entreprises et de l’économie internationale, nomination d’ambassadeurs pour les régions et de neuf représentants spéciaux dans des pays qui sont des partenaires économiques stratégiques, mise en place de conseils économiques autour de l’ambassadeur dans une centaine d’ambassades – je ne cite que quelques-unes des mesures qui ont été prises.
Cette priorité à la diplomatie économique a un effet de mobilisation de tous les acteurs concernés sur un même territoire. Les personnalités politiques qui ont été nommées viennent en appui et en complément de nos ambassadeurs, pour faciliter l’aboutissement des dossiers économiques.
Je veux aussi saluer les résultats déjà obtenus en matière de visas. Faciliter la délivrance des visas aux étudiants, chercheurs, artistes, hommes d’affaires et simples touristes est déterminant pour notre rayonnement économique et culturel. C’est un fait, l’accueil des demandeurs a été amélioré, les procédures ont été accélérées, les visas de circulation, qui permettent des entrées multiples, ont été multipliés. Cette action doit être poursuivie.
Les nouvelles priorités font qu’au total, il est prévu que, sur la période 2013-2015, près de 300 emplois soient redéployés vers les pays émergents ou en sortie de crise. Un tiers environ de ces redéploiements programmés portera sur la diplomatie d’influence, notamment la diplomatie économique. Cependant, grâce à la polyvalence des personnels du ministère, l’universalité de notre réseau diplomatique et consulaire est jusqu’à présent préservée. En dehors des regroupements des ambassades et des consulats dans certaines capitales, il n’y a quasiment pas de fermetures de sites.
La commission des affaires étrangères veillera à ce que les réformes se poursuivent, comme cela est le cas depuis un an, dans des conditions qui permettent de continuer à améliorer le rayonnement de notre pays et son influence. Je pense notamment à celles évoquées dans le rapport de la Cour des comptes sur le réseau consulaire ainsi qu’à celles envisagées dans notre réseau culturel. Notre commission accompagnera les efforts du ministre des affaires étrangères pour rationaliser encore l’action du ministère. Mais, après François Loncle, je veux rappeler qu’il arrivera un moment où nous aurons à coeur de comparer plus précisément les diminutions du budget de ce ministère avec d’autres. Je lance un message pour que, dans les années futures, une attention particulière soit accordée au budget des affaires étrangères, qui fournit un gros effort depuis maintenant 1994. Cet effort sera certainement poursuivi, pour rationaliser, mais nous aurons à coeur de comparer avec les autres ministères. Dans l’immédiat, je recommande l’approbation sans réserve du budget du ministère des affaires étrangères.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous allons maintenant entendre les porte-parole des groupes.
La parole est à M. André Schneider, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
L’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » est pour notre assemblée l’occasion d’évaluer et d’apprécier la capacité de notre pays à exister hors de ses frontières.
Ce budget doit nous permettre de faire vivre notre vision du monde. La vision d’une Europe politiquement cohérente, financièrement saine, soucieuse de ses intérêts, active pour la stabilité et la paix. La vision d’une relation rénovée avec l’Afrique – nous en parlions ce matin en commission, madame la présidente. La vision d’un dialogue renforcé avec des pays et des continents trop souvent oubliés tels que l’Amérique latine. Bref, la vision d’une France politique déterminée et diplomatiquement active qui représente une alternative à l’omniprésence américaine par exemple.
Le budget alloué à cette mission diminue malheureusement encore, passant de 2,83 milliards à 2,8 milliards. En outre, 150 emplois d’État sont supprimés. Je tiens à rappeler qu’en 2011 et 2012, la mission disposait de 100 millions de plus.
À l’inverse des deux autres programmes, la dotation du programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires » augmente, de plus de 8 % par rapport à l’année dernière. Cette évolution est toutefois due en grande partie à l’organisation des élections à l’Assemblée des Français de l’étranger. Ce programme contribue à animer un réseau de 230 consulats généraux et est essentiellement tourné vers les quelque 2 millions de Français résidant à l’étranger.
Comme M. Fabius l’a rappelé en commission élargie, le réseau diplomatique français est passé de la deuxième à la troisième place derrière la Chine. Nous reculons et j’ai bien peur que les crédits relativement faibles attribués à cette mission ne nous fassent continuer.
Par ailleurs, notons que la ligne budgétaire attribuée à la Maison des Français de l’étranger connaît une augmentation significative, de 34 %, notamment en raison de l’élargissement de ses activités. Je vous rappelle que la MFE a pour mission d’informer tous les Français envisageant de partir vivre ou travailler à l’étranger.
Pour le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », on constate une légère baisse dans l’ensemble, avec une diminution plus marquée pour l’action no 4 « Contributions internationales ».
Les crédits attribués aux opérations de maintien de la paix diminuent de plus de 26 millions. La France participe à neuf des seize opérations de maintien de la paix. Elle contribue également à des opérations sous mandat de l’ONU dans le cadre de l’Union européenne et de l’OTAN. Notre pays est présent sur de nombreux théâtres extérieurs : en Somalie, au Kosovo, en Afghanistan et bien entendu au Mali. La baisse des crédits destinés aux OMP et du budget de la défense nous obligera à revoir nos modes d’intervention. Nous ne pourrons plus intervenir sur plusieurs théâtres d’opération en même temps. Malheureusement, notre capacité d’intervention dans le monde s’en trouvera restreinte.
Concernant le financement de la politique immobilière dans le réseau, je déplore que certains biens prestigieux ou à forte dimension historique voire symbolique comme la Maison de France à Berlin soient cédés. Ils font partie intégrante de notre patrimoine, de notre histoire. Avons-nous réellement essayé de trouver une solution pour les conserver ?
Quant au programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » qui regroupe les moyens consacrés à la coopération culturelle et d’influence et au développement et à la promotion de la langue française, nous y tenons beaucoup, il baisse également de plus de 3 %. Cela risque, monsieur le ministre, de porter atteinte à l’efficacité de la diplomatie d’influence.
On peut également regretter que les crédits destinés à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger baissent de 8,5 millions d’euros. Ai-je besoin de rappeler l’importance de cette agence ? Elle est présente dans plus de 130 pays, dispose de 421 établissements et accueille plus de 316 000 élèves, français pour plus d’un tiers d’entre eux. Rappelons, monsieur le ministre, que la subvention à l’Agence avait été maintenue en 2013 pour traduire la volonté du Gouvernement de faire de l’éducation une priorité nationale. Qu’en est-il donc aujourd’hui ?
Ce budget ne permettra pas de mettre en oeuvre une réelle ambition et de faire de la France une nation influente au niveau diplomatique. La diplomatie française a besoin d’une nouvelle vision, d’un nouveau souffle. Elle doit être plus moderne, plus pro-active, elle doit avoir la capacité d’anticiper les changements de demain.
Pour y parvenir, la diplomatie française dispose d’un outil, un bel outil, fait d’hommes et de femmes de qualité et de conviction. Il serait important de leur apporter un réel soutien.
Monsieur le ministre, le monde, surtout l’Afrique, attend beaucoup de la France. Notre nation doit continuer à faire entendre sa voix, celle de la démocratie, de la liberté, des droits de l’homme, de la culture et de la paix. Les crédits alloués à cette mission n’impulsent aucun nouvel élan. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP ne votera pas ces crédits.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. Meyer Habib, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Nous sommes rassemblés aujourd’hui en une semaine bien triste pour la France et pour la liberté de la presse, qui nous rappelle cruellement l’importance que revêt l’action extérieure de l’État. Les corps de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, ont été ramenés en France hier : deux journalistes passionnés et courageux tués parce qu’ils étaient Français, tués parce qu’ils étaient journalistes, assassinés sauvagement par des terroristes, assassinés sauvagement par des islamistes. Leur mort nous rappelle les multiples dangers de ces zones de conflits.
Ces dangers, beaucoup de nos diplomates les vivent aussi. Ils mettent en oeuvre avec courage la politique étrangère audacieuse de la France, que le ministre des affaires étrangères orchestre avec un certain panache. Au nom du groupe UDI, je tiens donc à saluer l’action de tous nos diplomates et de nos agents qui oeuvrent au rayonnement de notre pays.
Ce réseau diplomatique et culturel extraordinaire dont nous disposons permet de faire porter la voix si forte et si particulière de la France. Il faut encourager son développement, notamment en redéployant les moyens vers les grands pays émergents.
Le groupe UDI approuve l’action du Gouvernement en ce sens.
Nos valeurs universelles sont aussi portées par notre culture. Nous nous inquiétons donc de la baisse des crédits de subventions versées à l’AEFE, à l’Institut français et à Campus France.
Dans le programme 151, vous augmentez le nombre de fonctionnaires affectés à la délivrance de visas. Certes, cette mesure repose sur un constat juste : dans le contexte de crise économique que nous connaissons, il faut faciliter l’arrivée des touristes, pour qu’ils viennent en nombre croissant. Toutefois, embaucher 75 fonctionnaires de plus ne procède pas d’une bonne allocation des ressources. Nous sommes en 2013. Ne pouvons-nous pas, dans l’esprit du choc de simplification, utiliser plus intelligemment internet et les nouvelles technologies pour la délivrance de visas ? Certains pays comme Singapour ou le Nigeria le font. Pourquoi pas nous ?
Le ministre des affaires étrangères a répondu lors de la réunion de la commission élargie que ses services réfléchissaient déjà à cette solution. Mais le choc de simplification doit avoir lieu maintenant ! Je suis issu de la société civile et je peux vous dire que si une entreprise doit réfléchir pendant deux ans avant de changer ses logiciels, c’est simple : elle meurt. Sur certains sujets, M. le ministre des affaires étrangères a montré qu’il savait décider de manière rapide et audacieuse. En ce domaine, il ne faut pas attendre, il faut agir aujourd’hui même. La France en a besoin.
Le programme 151 inclut une baisse des moyens affectés aux renouvellements de passeports. Or, si la production de ce document ne nécessite que onze jours, il faut en moyenne deux mois pour obtenir le rendez-vous au consulat qui permet d’enclencher le processus. C’est beaucoup trop long, sans compter que les ressortissants français doivent faire deux allers et retours au consulat. Par exemple, un étudiant français d’Ithaca, dans l’état de New York, devant se rendre au consulat à Manhattan aura douze heures de trajet aller et retour ; un Français habitant Eilat devant se rendre au consulat à Tel Aviv aura un trajet de dix heures de bus aller et retour ; une famille française habitant Brescia, deuxième ville de Lombardie, devant se rendre au consulat à Milan aura100 kilomètres à parcourir. Tout cela deux fois, et parfois avec des enfants, lorsqu’il faut renouveler leur passeport !
Pour les citoyens français de l’étranger, un passeport n’est pas un luxe, c’est une nécessité. C’est donc à ce poste surtout qu’il faut affecter des moyens modernes, pragmatiques et efficaces, permettant de gagner du temps et de limiter les déplacements.
Le groupe UDI s’oppose au nouveau mode de calcul des quotités attribuées aux familles dans le besoin issu de la réforme du système des bourses scolaires à l’étranger. De nombreuses familles en difficulté, notamment monoparentales, voient leurs bourses baisser alors que leur niveau de revenus ne change pas. Partout dans ma circonscription, notamment en Italie, j’ai été confronté à des mères qui ne peuvent plus faire face aux frais de scolarité de leurs enfants.
Aujourd’hui même a lieu la deuxième commission des bourses. Aujourd’hui, des familles vont apprendre qu’elles devront retirer leurs enfants de l’école de la République parce qu’elles n’ont pas assez d’argent pour payer. Ces enfants vont être séparés de leurs amis, de leurs professeurs, du système scolaire français, par manque de moyens. Ce qui se passe va à l’inverse du discours de justice sociale que votre majorité nous sert à toutes les sauces, la plupart du temps au détriment de l’efficacité et du bon sens.
Une partie de votre majorité s’insurge dès que l’on touche à l’enceinte sacrée de l’école de la République. Elle l’a montré récemment en attaquant à tort le ministre de l’intérieur. Mais elle est bien silencieuse quand on coupe les bourses des familles dans le besoin ! Cela s’appelle tout simplement avoir une morale à géométrie variable.
En commission élargie, le ministre des affaires étrangères nous a expliqué que les responsables d’établissements « sont des gens qui connaissent la réalité sociale, qui essaient de faire le maximum pour venir en aide aux familles. » Je partage son sentiment. J’ai parlé avec des responsables d’établissement de ma circonscription et c’est justement parce qu’ils connaissent la réalité sociale qu’ils sont inquiets ! Et c’est parce que les familles sont dans des situations délicates qu’elles sont inquiètes. Le groupe UDI, estimant que votre nouveau mode de calcul des quotités revient à mal partager la pénurie, s’inquiète lui aussi.
Mes chers collègues, pour toutes les raisons que j’ai exposées, après réflexion, le groupe UDI votera donc contre les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
En 2014, les moyens de la diplomatie française seront réduits de 3 % si l’on considère le périmètre du ministère des affaires étrangères, ou de 0,8 % si l’on prend celui de la mission « Action extérieure de l’État » dont les effectifs diminueront de près de 200 emplois. Tout cela a forcément des conséquences sur notre action extérieure, notamment en matière culturelle. Je pense aux alliances françaises, aux instituts culturels et aux établissements scolaires.
Cette rigueur a permis, et l’on ne s’en plaindra pas, de fermer de luxueuses résidences d’ambassadeurs à Hong Kong et Buenos Aires. Elle a aussi conduit la France à s’engager dans une politique de restriction dans ce que l’on appelle les « petits pays », à travers une expérience de réduction du nombre d’ambassades et du personnel diplomatique menée sur douze d’entre eux et destinée à être étendue à trente-deux autres. Je rappelle que M. Fabius, cet été sur Twitter, notait qu’il était difficile pour un poste de fonctionner avec quatre agents seulement. Or, nous sommes en train de passer de douze à quatre. Le rayonnement de la France dans ces petits pays s’en trouvera atteint.
Au moment où le Président de la République, le Gouvernement et le ministre des affaires étrangères se sont lancés dans ce qu’ils appellent la « diplomatie économique », il ne faudrait pas sacrifier notre influence culturelle au profit de l’économie.
À cet égard, je m’associe à Sergio Coronado pour soulever le problème des coupes de 8,5 millions d’euros dans le budget de l’Agence pour l’enseignement français de l’étranger. Ce budget est inadapté aux besoins ressentis par nos compatriotes. Le nombre d’élèves scolarisés augmente de 3 %. Le désengagement financier de l’État et la privatisation croissante du financement des établissements entrent dans la continuité de la politique du gouvernement précédent et conduisent à une dégradation. L’enseignement à l’étranger ne peut faire l’objet d’une telle dérogation aux principes fondateurs de l’enseignement sur notre territoire. Les requêtes des enseignants sont nombreuses, notamment quant aux indemnités spécifiques de vie locale ou aux conditions de rémunération et de titularisation des recrutés locaux. Le malaise est palpable ; plusieurs grèves ont été menées notamment en Argentine où 20 postes seulement ont été ouverts alors que 600 titulaires sont sous contrat local.
Comment comptez-vous prendre en compte les problèmes rencontrés sur le terrain ? Envisagez-vous une augmentation, voire une réforme, du financement de l’enseignement public à l’étranger pour le budget 2015 ?
Dans cet hémicycle, nous avons très peu l’occasion de débattre de politique étrangère, domaine réservé du Président de la République, et j’aimerais vous livrer deux réflexions.
Je voudrais mettre l’accent sur ce que l’on pourrait qualifier de dérive atlantiste de notre diplomatie. En effet, comme l’a dit notre collègue Baumel tout à l’heure, nous allons augmenter singulièrement la sécurité dans nos ambassades ; mais rien n’est dit sur la protection de nos ambassades contre l’espionnage de la NSA. Je remarque d’ailleurs que notre diplomatie s’est montrée bien dure avec le président Evo Morales, soupçonné d’emporter dans son avion M. Snowden, alors même que cet homme est un lanceur d’alerte, dans la tradition de ce qui a été inventé aux États-Unis au moment de la guerre de Sécession, et qu’il ne faisait que son travail au service du bien public.
Deuxième dérive atlantiste : on aurait pu penser que notre pays et notre diplomatie seraient en première ligne pour lutter contre le traité transatlantique – ce traité qui va ouvrir le marché européen et peut-être conduire à la levée du moratoire sur les OGM, à la remise en cause des services publics, voire à la privatisation du numérique.
Un très grand silence règne aujourd’hui sur ce traité transatlantique. Nous aurions pu imaginer que ce gouvernement de gauche le combattrait de la même manière et avec la même énergie que le gouvernement de Lionel Jospin s’était battu, il y a quelques années, contre l’Accord multilatéral sur l’investissement.
Je terminerai bien évidemment cette intervention en saluant la mémoire de mes deux confrères journalistes qui ont été lâchement assassinés. Nous étions bien rares à dire au début de l’intervention française au Mali que nous étions dans une situation extrêmement difficile, pour ne pas parler d’enlisement avec un renforcement des troupes françaises. Contrairement à ce qui a été annoncé, nous n’avons malheureusement pas éradiqué le terrorisme ; nous savons que l’irrédentisme du Nord-Mali se perpétue et que la région de Kidal reste une poudrière.
Est-on sorti de la Françafrique ? Je n’en suis pas sûr, puisque le Président de la République recevra au Sommet de l’Élysée les 5 et 6 décembre prochains tout ce que l’Afrique compte de crapules et de dictateurs. Je pense par exemple à M. Idriss Déby, dont nous sommes aujourd’hui les obligés à cause de notre intervention au Nord-Mali : il fallait bien que les troupes tchadiennes, qui sont les seules à savoir mener une guerre dans le désert, viennent nous aider. Je pense à M. Sassou NGuesso et à quelques autres, qui sont, je vous le rappelle, poursuivis par la justice française pour des biens mal acquis. Je ne suis donc pas sûr que la Françafrique soit terminée, et c’est sur cette note un peu pessimiste que je terminerai mon intervention, en indiquant toutefois que le groupe écologiste votera le budget du ministère des affaires étrangères, en dépit de toutes les préventions que j’ai formulées devant vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, il faut nous garder, en examinant ce budget de l’action extérieure de l’État, de mesurer le volontarisme de nos politiques à l’aune des moyens qui leur sont consacrés. Ce n’est pas en effet parce que l’on diminue les crédits qu’il y a nécessairement une dégradation de notre politique. Après tout, le baron Louis, qui fut d’ailleurs aussi diplomate et qui avait même été pressenti pour le ministère des relations extérieures, disait : « Faites-moi de bonne politique, je vous ferai de bonnes finances ».
Cependant, si la qualité de notre politique extérieure n’est pas fonction directe du budget qui lui est consacré, il existe tout de même des seuils en deçà desquels il ne reste plus beaucoup de place pour l’action et pour la politique. Nous n’en sommes pas encore là, et nous en sommes même assez loin ; mais pour parler crûment, nous ne sommes plus très loin de l’os, après avoir éliminé tout le gras et taillé assez profond dans la chair du ministère des affaires étrangères.
Je voudrais brièvement évoquer trois points : le redéploiement, les organisations internationales et ce que l’on appelle maintenant la diplomatie d’influence.
Le redéploiement commence à devenir réalité mais, au regard des efforts colossaux de restructuration qu’il nous faudrait entreprendre, cela reste modeste. Un seul exemple : nous avons aujourd’hui 93 agents au Togo et 81 au Nigeria, c’est-à-dire nettement plus d’agents au Togo qu’au Nigeria, ce qui ne correspond pas à une appréciation de l’importance spécifique de ces pays. La qualité l’emporte parfois peut-être : autrefois, M. Myard était en poste au Nigeria. Avec de tels diplomates, la France était certainement fort bien représentée, mais enfin il n’y est plus, et je ne sais pas s’il reste des diplomates de cet acabit au Nigeria.
Par ailleurs, à l’ère des voyages aériens et des télécommunications, le concept des représentations permanentes mérite évidemment d’être revisité. Nombre de nations, non négligeables, ont parfois ce que l’on appelle des laptop ambassadors – pardonnez-moi cette expression : il n’existe pas de traduction française –, c’est-à-dire des gens de grande qualité, qui agissent seuls, descendent à l’hôtel, sont compétents pour plusieurs pays et font un travail qui n’est pas nécessairement mauvais. Je me demande si ce concept ne mérite pas d’être étudié, voire expérimenté.
En outre, plusieurs collègues de la commission des affaires étrangères ont fait remarquer qu’il existait dans certains pays, notamment les États-Unis d’Amérique, plusieurs secrétaires d’État, au nombre de trois ou quatre, auprès du ministre des affaires étrangères, qui parcourent le monde et pourraient nous représenter à bon niveau, en s’appuyant sans cabinet particulier sur l’infrastructure du Quai d’Orsay. Cela nous permettrait, à moindres frais, de démultiplier notre présence ministérielle en coûtant infiniment moins cher qu’une représentation de quatre personnes – parfois relativement médiocres, pardonnez-moi de le dire –, qui n’a pas beaucoup d’influence pour le rayonnement de la France dans un pays donné.
S’agissant des organisations internationales, je ne me réjouis que très relativement de ce que notre contribution baisse, puisqu’elle traduit finalement le recul relatif de la France au titre de sa capacité contributive. On ne doit pas s’en faire une gloire, mais simplement remarquer que l’on recule.
J’insiste sur la nécessité d’être actifs, plus que nous ne le sommes, dans le contrôle de l’utilisation des fonds que nous versons à des organisations internationales, qui restent des modèles de mauvaise gestion et parfois de corruption, y compris du reste dans leurs tâches internationales les plus « régaliennes ». Je vise en particulier les opérations de maintien de la paix, qui peuvent donner lieu à des remarques extrêmement graves et qui, normalement, pourraient envoyer en correctionnelle – si ce n’est pire – un certain nombre d’agents. Il faut que l’on cesse de nous dire que l’argent mis dans les organisations internationales est sanctifié : il est parfois blanchi.
S’agissant de la diplomatie d’influence, le recul des bourses pour les étudiants étrangers en raison d’une raréfaction des crédits est malheureusement dans l’air du temps. Je m’inquiète surtout de savoir si nous avançons dans l’idée de constituer un véritable réseau, connu et entretenu, des étrangers qui ont étudié en France, boursiers ou non.
Cela n’existait pas jusqu’à présent ; Campus France en est aujourd’hui chargé. Il est tout à fait essentiel de disposer d’un outil précis et fiable, opérant un recensement rigoureux par pays de tous ceux qui ont étudié en France – en particulier les boursiers, mais pas seulement –, et animant ce réseau des alumni français de telle ou telle institution universitaire et éducative française. Cela doit devenir un outil d’influence et un outil pratique de relations publiques pour la diplomatie française.
Pour conclure, le ministre des affaires étrangères n’est pas là, mais un ministre qui connaît Cognocoli-Monticchi est évidemment qualifié pour la diplomatie, cela va de soi ! S’il était là, j’aurais dit au ministre des affaires étrangères que si la réduction des moyens n’empêche pas de faire progresser notre diplomatie, il en est au fond un excellent exemple puisqu’il fait progresser la diplomatie française avec des moyens en baisse. Voilà pourquoi notre groupe apportera son soutien à ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, la diplomatie française a toujours eu l’ambition de jouer un rôle majeur dans les relations internationales, en portant une voix à la fois éclairée et indépendante dans le concert des nations. L’importance et la qualité de notre réseau diplomatique à l’étranger, le deuxième au monde après celui des États-Unis, reflètent cette ambition. Mais paradoxalement, alors que la mondialisation s’accentue, le budget 2014 de la mission « Action extérieure de l’État » n’est pas épargné par l’austérité, avec une baisse des crédits de 20 millions d’euros pour cette mission. Cela représente deux cents suppressions d’emplois et un recours toujours plus important aux agents de droit local, dotés de contrats précaires.
La rigueur remet sérieusement en cause l’universalité de notre réseau à l’étranger. Plusieurs sites ont d’ores et déjà été regroupés, d’autres sont obligés de faire avec un personnel réduit au strict minimum, tandis que la vente de biens immobiliers historiques – la Maison de France à Berlin par exemple – se poursuit pour renflouer les caisses.
Le programme « Diplomatie culturelle et d’influence » poursuit son hémorragie avec une nouvelle diminution des crédits de 4 %, après celle de 7 % constatée en 2013. Nous craignons que l’action culturelle à l’étranger, essentielle au rayonnement de la France, soit progressivement supplantée par la promotion de la diplomatie économique, que vous présentez, monsieur le ministre, comme la défense des intérêts de quelques sociétés au patriotisme à mon avis très limité.
Il est pourtant essentiel que nous conservions un rayonnement culturel important partout dans le monde. Nous sommes donc particulièrement inquiets d’apprendre la diminution de 2 % des subventions en faveur de l’enseignement du français à l’étranger ainsi que le recul de 7 millions d’euros des subventions aux Alliances françaises, qui restent à ce jour un des principaux relais de notre influence. Ce budget en recul affaiblit la capacité de la France à peser sur la scène internationale. L’ambition de notre politique étrangère n’est pas au rendez-vous.
Par ailleurs, les orientations stratégiques affaiblissent le message de la France, en rupture avec la politique atlantiste du précédent gouvernement ; or cette rupture n’a pas eu lieu.
Le ministre des affaires étrangères est absent, cela est noté ; bienvenue donc à M. le ministre du budget. Je profiterai toutefois de cette intervention pour formuler quelques observations sur la politique internationale de la France.
Premièrement, les prises de position de l’exécutif sur la guerre en Syrie ont démontré l’alignement inadmissible de notre diplomatie sur celle des États-Unis. Nous l’avons répété : l’usage de la force en Syrie, de surcroît sans mandat de l’ONU, était une folie. Les populations civiles auraient été les premières victimes de cette intervention. Une nouvelle intervention occidentale dans le monde musulman aurait alimenté la thèse du choc des civilisations que nous tentons de combattre par tous les moyens. La France n’a pas su prendre les bonnes décisions sur la question syrienne, aussi bien sur le soutien militaire aux rebelles que sur la capacité du dictateur Bachar el-Assad à se maintenir au pouvoir. Résultat : notre diplomatie est aujourd’hui affaiblie dans le cadre des discussions préalables à la conférence Genève 2.
Deuxièmement, nous sommes convaincus que la France aurait dû avoir une attitude différente dans l’affaire Snowden, qui a révélé l’ampleur du système d’espionnage de la NSA, donc des États-Unis. Offrir l’asile politique à ce lanceur d’alerte, quel beau message pour tous les défenseurs de la liberté ! Mais au lieu de prendre cette décision courageuse, la France s’est soumise aux injonctions des Américains en faisant arrêter l’avion du président bolivien Evo Morales. Cet affront diplomatique a gravement nui à la crédibilité de la France au niveau international, notamment en Amérique latine. Par ailleurs, il est inadmissible que la France, alliée des États-Unis, soit sous la surveillance constante de Big Brother. La réaction de la France n’a pas été à la hauteur de la gravité des faits. La suspension de l’accord transatlantique était un impératif minimum.
Troisièmement, nous déplorons l’absence de prises de position fortes sur le conflit israélo-palestinien. La France doit faire preuve de fermeté sur la poursuite de la colonisation israélienne qui bloque l’espoir d’une paix juste. Nous attendons que la France reconnaisse enfin l’État palestinien. Ce message fort pour la liberté des peuples honorerait notre diplomatie. Enfin, il apparaît nécessaire de renouer les fils du dialogue avec l’Iran, tant ce pays est une clef dans la résolution des conflits au Moyen-Orient. Ce dialogue, qui doit se faire sans préjugés, n’exclut pas pour autant la fermeté sur la question de l’usage du nucléaire à des fins militaires.
Du retrait du commandement intégré de l’OTAN à la condamnation de la guerre du Vietnam par le général de Gaulle, jusqu’au refus de l’intervention en Irak par le président Jacques Chirac en 2003, la France a toujours su faire vivre l’idéal de liberté et d’indépendance dans le concert des nations. Le tropisme atlantiste de votre gouvernement est contraire à notre histoire et à nos valeurs. Monsieur le ministre, l’impression générale est que notre diplomatie s’aligne de plus en plus sur les États-Unis et contrevient au multilatéralisme. Parce que ce budget affaiblit le rayonnement de la France et le soutien aux forces progressistes et pacifiques, les députés du Front de Gauche et communistes voteront contre ce budget.
La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame et messieurs les rapporteurs, chers collègues, contrairement à M. Myard, je me réjouis de la présence du ministre du budget pour cette session budgétaire. Après tous les arguments qui ont été échangés sur le budget du ministère des affaires étrangères, je pense qu’il aura compris et entendu l’intérêt que chacun d’entre nous porte à ce budget ; par conséquent, sa présence est pour nous une marque d’intérêt pour le budget des affaires étrangères. Merci, monsieur le ministre, d’en tenir compte à l’avenir.
Le groupe socialiste, républicain et citoyen s’apprête à voter les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » ; nous confirmons ainsi et sans surprise l’approbation qui a été la nôtre en commission élargie – en présence, du reste, de M. Laurent Fabius, avec lequel nous avons eu un débat par définition élargi, profond, sur l’ensemble de la politique des affaires étrangères. Je crois que chacun ici reconnaîtra la disponibilité du ministre des affaires étrangères, sans qu’il soit besoin d’en rajouter.
Nous faisons ce choix tout en étant conscients que le budget n’est pas celui que nous souhaitions. C’est un choix de raison. Le redressement des finances publiques, sinistrées lors du quinquennat précédent, exige un effort qui sollicite hélas tous les portefeuilles ministériels. Cependant, nous ne bénéficierons pas chaque année d’une baisse de la participation financière de la France aux organismes internationaux. Le réseau consulaire de notre pays ainsi que l’enseignement du français, la diplomatie économique et les échanges universitaires et techniques sont essentiels à notre rayonnement et à notre influence. M. Giacobbi a eu raison d’évoquer les réseaux, en particulier d’anciens élèves qui ont étudié en France ou en langue française.
J’en ai débattu avec notre ambassadeur au Vietnam, qui est tout à fait disposé à mener une expérience pilote en la matière, afin de rendre de telles pratiques un peu plus systématiques. Il s’agit d’un facteur d’influence peu coûteux mais très efficace à condition de savoir le mettre en oeuvre.
Je ne développerai pas les arguments relatifs au budget contraint dans une conjoncture difficile et n’allongerai pas les débats, d’ailleurs remarquablement alimentés par nos collègues, Mme la présidente Élizabeth Guigou et MM. les rapporteurs Philippe Baumel, Jérôme Lambert et François Loncle, dont je partage les conclusions. Je salue l’innovation politique consistant à nommer des envoyés spéciaux en plus grand nombre, tels Martine Aubry auprès de la Chine, Jean-Pierre Chevènement auprès de la Russie et de Jean-Pierre Raffarin auprès de l’Algérie. Cela concrétise ce que l’on appelle la diplomatie économique. Personne n’a l’intention de négliger la diplomatie culturelle, mais on aurait tort de ne pas entrer véritablement dans l’ère de la diplomatie économique.
Comme vous, chers collègues, j’ai été marqué, au cours des derniers jours, par l’assassinat au Mali de deux journalistes de Radio France International, Ghislaine Dupont et Claude Verlon. Ce crime doit bien sûr être condamné. Nous avons un devoir de solidarité avec les familles de nos compatriotes exécutés ainsi qu’avec leurs collègues de RFI, qui effectue un travail d’information remarquable dans tous les pays, en particulier en Afrique. Mais la condamnation et la compassion ne doivent pas nous empêcher d’affronter les conséquences de l’instabilité du continent africain, au Mali mais aussi au Kenya, en Somalie, en Centrafrique et au Congo-Kinshasa. Ma question portera donc sur la paix et la sécurité en Afrique. Le Président de la République a invité les Africains à la réflexion et à l’action en mai dernier – à juste titre, n’en déplaise à certains – lors du cinquantième anniversaire de l’union africaine à Addis-Abeba.
Une conférence sur la paix et la sécurité en Afrique se tiendra donc à Paris, au palais de l’Élysée, la première semaine de décembre. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser la feuille de route de la France ? Si la France a des responsabilités historiques vis-à-vis de l’Afrique, l’Europe aurait tort de se désintéresser de ce continent, berceau de l’humanité. Les propositions préparées par la France en vue de la conférence seront-elles présentées au Conseil européen consacré aux questions de défense qui doit avoir lieu dans quelques semaines ? Je vous remercie, monsieur le ministre, des réponses que vous apporterez aux questions que je viens de formuler. Le groupe SRC votera les crédits 2014 de la mission « Action extérieure de l’État » et vous remercie de votre présence.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Nous en venons aux questions. Je vous rappelle, chers collègues, que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
Nous commençons par les questions du groupe UMP.
La parole est à M. Thierry Mariani.
Je voudrais, monsieur le ministre, et je crois que tous mes collègues élus des Français de l’étranger peuvent s’y associer, évoquer l’aide à la scolarité. Nous sommes aujourd’hui très loin des promesses de campagne de M. François Hollande, qui érigeait l’éducation en priorité et affirmait devant les Français de Londres le 10 juillet 2012 : « Les sommes économisées grâce à l’abandon de la règle de la gratuité dans les lycées seront entièrement investies dans le mécanisme des bourses. » Voici quelques chiffres relatifs à la situation de l’aide à la scolarité, que vous connaissez aussi bien que moi, monsieur le ministre. En 2012, dernière année du mandat du président Sarkozy, les bourses représentaient 95 millions d’euros et la prise en charge, la PEC, 30 millions, soit une aide à la scolarité de 125 millions d’euros.
On devrait donc disposer, si vos promesses de campagne avaient été tenues, de 125 millions d’euros pour les bourses des Français de l’étranger. L’année dernière, celles-ci ont bénéficié de 110,3 millions d’euros, soit une baisse de l’aide à la scolarité des Français de l’étranger de plus de 12 % ! Les promesses de M. Hollande n’ont pas été tenues. Cette année, le financement s’élève à 118,8 millions d’euros. Huit millions supplémentaires, c’est un grand progrès, me direz-vous. Mais le détail du budget révèle un micmac consistant à prévoir 8,5 millions d’euros supplémentaires pour les bourses, mais 8,8 millions en moins pour l’entretien des lycées par l’AEFE… Autrement dit, deux ans après l’arrivée de la gauche au pouvoir, l’aide des élèves français de l’étranger accuse toujours une baisse d’environ 8 %.
Ma question est donc la suivante : quand comptez-vous, monsieur le ministre, respecter la promesse de M. François Hollande ? Quand l’aide à la scolarité retrouvera-t-elle le niveau qui était le sien au cours de la dernière année du mandat de Nicolas Sarkozy, c’est-à-dire 125 millions d’euros ? Et j’espère que l’entretien des lycées n’en fera pas les frais. Dans ma seule circonscription, les lycées français de Moscou, Singapour, Shanghai ou Bangkok sont surchargés. Chacun convient que les lycées français à l’étranger constituent, pour nos compatriotes comme pour tous ceux qui suivent des études hors de France, un instrument de rayonnement et d’influence dont on aurait tort de se priver.
Le nouveau dispositif de bourses, qui a fait l’objet d’une large concertation avec les élus des Français de l’étranger, est entré en vigueur en septembre 2013 dans les pays du rythme Nord et entrera en vigueur en janvier 2014 dans les pays du rythme Sud. Afin de maîtriser la dépense, la mise en oeuvre des crédits d’aide à la scolarité s’inscrit désormais dans le strict respect de l’enveloppe budgétaire allouée à cet effet. En outre, le nouveau dispositif de bourses scolaires repose sur un barème et des critères d’attribution révisés en vue d’une plus grande justice sociale dans l’octroi des aides. La première commission nationale des bourses pour le rythme Nord a attribué à ce jour 21 405 bourses, soit un chiffre stable par rapport à 2012, pour un montant de près de 81 millions d’euros. La quotité moyenne de bourses accordées s’élève à 88,5 %. Nous avons par ailleurs validé l’ajournement de 1 889 demandes.
Quant au Président de la République, il appelle de ses voeux un système d’aide à la scolarité plus juste et plus équitable, fondé sur les ressources des familles. Tel n’était pas le cas de la prise en charge supprimée à la rentrée 2012. Le nouveau dispositif doit également faire la preuve de sa soutenabilité budgétaire. La dépense relative à l’aide à la scolarité a en effet augmenté en moyenne de 17 % chaque année depuis 2007. En dépit d’un budget en constante augmentation, le système de financement des bourses scolaires était devenu insoutenable.
La réforme des bourses, fondée sur les ressources réelles des familles, a été mise en place à la rentrée 2013. Il est encore trop tôt pour en dresser un bilan complet, mais vous avez reçu, monsieur le député, les résultats de la première commission nationale des bourses. Les premiers enseignements peuvent en être tirés. Le nouveau dispositif a rencontré l’adhésion des acteurs, car il est juste. Les commissions locales ont joué un rôle substantiel de modulation des quotités de bourses en tenant compte des réalités sociales des familles, qu’elles connaissent. À ce stade, 153 familles supplémentaires bénéficient d’une bourse, parmi lesquelles on compte moins de familles biparentales mais 344 familles monoparentales supplémentaires. Les quotités sont lissées et davantage de familles bénéficient d’une quotité intermédiaire, ce qui est exactement le but que nous voulions atteindre. La répartition géographique n’est pas très différente, contrairement à ce que certains avaient prétendu, et l’objectif de maîtrise de la dépense est respecté. Nous tirerons un bilan de la réforme au début de l’année 2014 pour déterminer si des ajustements à la marge sont nécessaires. Il reste à couvrir un certain nombre de besoins, car beaucoup de dossiers ont été reportés, mais nous veillerons à un traitement équitable des dossiers qui nous ont été présentés.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, j’insiste sur la question de l’éducation. Pour la France, monsieur le ministre, investir dans l’éducation des jeunes Français à l’étranger, c’est investir dans son l’avenir dans l’internationalisation. La réponse que vous venez de faire à l’instant est intéressante, mais pour gagner du temps à propos du bilan, permettez-moi de vous dire qu’il faudra rapidement corriger le tir. La prise en charge, la PEC, a été un élément de la campagne présidentielle. L’actuel Président de la République y était opposé, c’est un fait et je sais que je ne vais pas vous convaincre. Il n’en reste pas moins qu’un engagement a été pris, selon lequel le financement de 32 millions d’euros serait reversé dans le système des bourses.
Malheureusement, il ne l’est pas. Je vais vous en donner des exemples très concrets, monsieur le ministre, assortis de chiffres. Vous en avez donné, je vais moi aussi vous en donner quelques-uns. On compte aux États-Unis 242 boursiers en moins par rapport à 2012, soit 1 134 au lieu de 1 376. Le budget alloué aux bourses scolaires est en recul de 14,6 %, soit 1,9 million d’euros, passant de 13,6 millions d’euros à 11,7 millions. Pire, le nombre de boursiers est en recul de 20 %. Je vais vous lire quelques extraits d’un entretien que j’ai eu avec une famille de Toronto, au Canada. Ce couple aux revenus modestes, 50 000 dollars brut cumulés, voit en raison de la réforme des bourses scolaires celle de son enfant réduite de 85 % à 65 %.
Voici ce qu’ils disent : « On grattait, on économisait pour envoyer le petit au lycée. Cela revenait à près de 5 000 $ par an, somme incluant tous les faux frais que ne défrayent pas les bourses : les garderies après la classe, les fournitures scolaires, les camps pendant les vacances scolaires. Avec le nouveau système de bourses, la dépense dépassera 10 000 $. On ne peut pas. » Désabusé, ce Français de l’étranger renchérit : « C’est bien dommage, mais on va l’inscrire à l’école anglophone du quartier. Il perdra son français et jouera au base-ball. » Enfin, quelque chose m’inquiète, monsieur le ministre, d’autant plus que je l’ai constaté récemment sur le terrain, à Miami comme à San Francisco : le programme Jules Verne de détachement des professeurs commence à être remis en cause. Ce ne sont même plus les bourses mais tout simplement le système d’éducation qui serait remis en cause. Sur ce sujet important, j’espère que vous pourrez me donner des éléments précis, monsieur le ministre.
J’ai donné à l’instant à M. Mariani des éléments relatifs aux conditions dans lesquelles la réforme des bourses a été effectuée. Elle a été engagée avec l’objectif qu’aucun enfant ne soit déscolarisé en raison de la réforme et que les crédits transférés le soient intégralement et dans des conditions de transparence.
Ils le sont totalement, car le transfert des crédits de la prise en charge vers les bourses sera accompli en 2015. Par ailleurs, messieurs les députés, nous sommes soucieux de prendre en compte la totalité des cas problématiques que vous voudrez bien porter à notre connaissance, c’est-à-dire des enfants scolarisés à l’étranger qui ne seraient plus pris en charge ou déscolarisés en raison de la réforme.
Je vous demande très concrètement, et je sais que Laurent Fabius y prêtera une attention particulière, de bien vouloir nous faire parvenir ces éléments. Nous nous engageons à vous communiquer toutes les informations et à rectifier la situation de telle sorte que les enfants concernés puissent être scolarisés.
La parole est à M. Pierre-Yves Le Borgn’, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur l’avenir du service public consulaire français. Les Français à l’étranger y sont attachés. Sans galvauder la comparaison, le consulat est souvent pour eux comme une mairie d’outre-frontière. Or cette mairie s’éloigne peu à peu, tant par la géographie que par les services offerts. Ici et là, les consulats ferment. Les tournées consulaires se font de plus en plus rares. Certaines activités, notariale par exemple, disparaissent. Je n’ignore rien des contraintes budgétaires et suis animé comme vous, monsieur le ministre, par la préoccupation des nécessaires économies. Mais mon devoir, en tant que député d’une vaste circonscription couvrant seize États en Europe centrale, est aussi de vous dire ici l’inquiétude de nos compatriotes face au sentiment de retrait de l’État. Dès lors, mes questions sont les suivantes : quelles sont vos priorités pour la modernisation de l’action consulaire ? Êtes-vous prêt, au cours du processus, à consulter les usagers du service public consulaire que sont les Français à l’étranger ?
Le bilan d’une décennie d’innovations, avec les consulats à gestion simplifiée, les pôles consulaires régionaux et la dématérialisation de certaines démarches, sera-t-il dressé ? Envisagez-vous de densifier le réseau de consuls honoraires et de leur donner, juridiquement comme budgétairement, les moyens les autorisant à rendre des services comme la délivrance des cartes d’identité et des passeports ? Équiperez-vous les consulats à gestion simplifiée et certains consuls honoraires de la fameuse valise Itinera, qui permettrait de recueillir les données biométriques de nos compatriotes sans les exposer à deux voyages coûteux et parfois lointains vers le consulat ? Enfin, seriez-vous disposés, avec nos amis allemands, à mettre en place un projet pilote qui verrait les administrations communales de nos deux pays remettre les cartes d’identité et les passeports préalablement demandés à nos consulats respectifs ?
Monsieur le député, je vous remercie pour ces questions qui correspondent parfaitement aux matières que je traite tous les jours, et auxquelles je vais donc répondre avec plaisir.
Sourires.
Vous m’avez demandé quelles étaient nos priorités pour la modernisation de l’action consulaire. La sécurité et la mobilité de nos compatriotes sont, vous le savez, au coeur de l’action du ministère des affaires étrangères, qui s’attache à renforcer la productivité des postes consulaires et à adapter la carte de nos implantations, le tout en fonction du développement des communautés. Ainsi, nous renforçons notre implantation là où les communautés sont les plus nombreuses, par exemple en Chine, en multipliant les outils et les partenariats afin de faciliter l’accessibilité des services – je pense notamment aux consuls honoraires.
Vous souhaitez également savoir si nous sommes disposés à consulter les usagers du service public consulaire que sont les Français de l’étranger, et vous m’interrogez sur le bilan d’une décennie d’innovation, avec les consulats à gestion simplifiée, les pôles consulaires régionaux et la dématérialisation de certaines démarches. Sur ces deux questions, dans le cadre du plan d’amélioration et de modernisation de l’administration consulaire, dix-neuf postes pilotes participent à une enquête sur les possibilités d’amélioration du service public, notamment des conditions d’accueil. Ce travail est mené dans le cadre de la modernisation de l’action publique.
Pour ce qui est de la densification du réseau de consuls honoraires et la possibilité de leur donner, juridiquement et budgétairement, les moyens les autorisant à rendre des services tels que la délivrance des cartes d’identité et des passeports, la densification évoquée est effectivement l’un des axes d’évolution du réseau consulaire. C’est la bonne réponse pour préserver un service public de proximité. Les consuls honoraires peuvent remettre les passeports aux demandeurs habitant à proximité et y sont habilités par le chef de poste. Nous travaillons à augmenter la densité de ce réseau, notamment dans les points de concentration de Français, en lien avec les ambassadeurs et les consuls qui, localement, sont à l’initiative des propositions dans ce domaine. Le réseau constitué de quelque 500 agences consulaires de proximité réparties à travers le monde, assurant une présence là où aucune autre structure officielle n’est généralement implantée, joue un rôle démultiplicateur essentiel pour notre action, insuffisamment reconnue. Ce réseau de relais bénévoles se verra renforcé, notamment à Madagascar, à Hambourg et dans l’ouest canadien – et, d’une manière générale, partout où les besoins de nos communautés se font sentir.
Le ministère des affaires étrangères s’attache à faciliter l’accès au service public consulaire des communautés éloignées des consulats, mais trop peu nombreuses pour justifier la création d’un poste consulaire. À cette fin, nous avons déployé des dispositifs mobiles de recueil des empreintes biométriques – il s’agit de la valise Itinera que vous avez évoquée. Un bilan est un cours, qui permettra d’affiner la doctrine d’emploi de cette valise. Les retours d’expérience montrent toute l’utilité de ce dispositif pour les communautés établies à grande distance des postes consulaires, par exemple au Canada.
Enfin, le département étudie les conditions dans lesquelles certains consuls honoraires pourraient être habilités à recueillir les empreintes biométriques en vue de l’établissement des passeports. Une telle évolution nécessite en effet l’accord du ministère de l’intérieur et la modification de plusieurs textes de niveau réglementaire, voire législatif.
J’appelle les crédits de la mission « Action extérieure de l’État », inscrits à l’état B.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 329 .
L’amendement no 329 , relatif aux moyens consulaires, me donne l’occasion d’évoquer un sujet essentiel. Alors que votre collègue Laurent Fabius a lui-même excellemment dit, monsieur le ministre, que notre pays avait besoin d’une diplomatie économique, il a malheureusement été décidé de procéder, fin août 2013, à la fermeture du consulat de France à Calgary. J’espère que le Gouvernement acceptera de reconsidérer une décision prise contre toute logique. En effet, l’ouest du Canada est une région connaissant une très forte croissance, où les intérêts français ne cessent de se développer. Les effectifs de la communauté française y ont augmenté de 6 % en un an, et 3 000 Français en difficulté avaient recours aux services du consulat avant que celui-ci ne ferme ses portes. Aujourd’hui, nos compatriotes établis en Alberta doivent parcourir 1 000 kilomètres, c’est-à-dire la distance les séparant de Vancouver, pour accéder au consulat général de France.
Sur un total de 550 entreprises françaises implantées au Canada, 60 le sont en Alberta. Chacun sait – et notamment nos services consulaires sur place – l’importance stratégique que revêt cette implantation française au Canada. À l’instar de Total, qui emploie aujourd’hui 350 salariés dans cette région et prévoit des investissements à hauteur de 15 milliards d’euros d’ici à 2020, de nombreuses autres entreprises françaises sont présentes – Air Liquide, Alstom, Technip, la BNP, la Société générale –, ainsi que l’Institut français du pétrole. Je le dis avec calme, mais avec force : veillons à ne pas pérenniser une erreur qui pourrait coûter cher à la stratégie économique de la France. Si mon amendement vise à modifier des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », chacun aura bien compris qu’en réalité, je souhaite avant tout que soit revue la décision de fermeture du consulat de France à Calgary qui, au-delà du clivage gauche-droite, relève de l’intérêt de notre pays.
Je comprends bien la préoccupation exprimée par notre collègue. Je suis toutefois au regret de lui dire qu’il ne paraît vraiment pas envisageable de retirer 15 millions d’euros au programme « Action de la France en Europe et dans le monde », les crédits de ce programme étant d’ailleurs déjà en diminution.
Je pensais avoir été clair quant au fait qu’il s’agit d’un amendement d’appel !
Dans ce cas, M. le ministre va pouvoir vous indiquer la position du Gouvernement à ce sujet. En tout état de cause, même si la question que vous évoquez mérite un débat, cher collègue, je pense qu’il n’était pas raisonnable de présenter un amendement visant à un transfert de crédits d’un tel montant. Par ailleurs, je rappelle que des mesures ont été prises dans le domaine consulaire qui ne sont pas dérisoires – je pense notamment à la création de 25 postes affectés à la délivrance des visas…
La question n’est pas là ! J’ai bien dit que je partageais l’objectif du ministre !
En résumé, vous avez été entendu, mais, pour ce qui est de l’amendement que vous avez présenté, je dois tout de même émettre un avis défavorable.
Toute la perfidie du député Lefebvre se fait sentir avec cet amendement, qu’il n’a présenté que pour avoir l’occasion d’évoquer la situation du consulat de France à Calgary, auquel il a des raisons de tenir particulièrement.
Sourires.
Ce sont surtout nos compatriotes qui y tiennent, monsieur le ministre !
Certes, mais avec la fermeture du consulat de Calgary, on revient en fait à une situation qui a fait ses preuves par le passé : le fait que tout soit concentré à Vancouver n’a jamais empêché les entreprises de fonctionner correctement – et à l’inverse, le consulat ouvert à Calgary n’a pas fonctionné autant qu’il l’aurait dû. Compte tenu, d’une part, de ce que permettent les moyens modernes de communication et, d’autre part, de votre souhait qu’il soit procédé à des économies rationnelles en dépenses – si j’en crois du moins les interventions réitérés des parlementaires de l’opposition en ce sens –, nous avons pris une décision de nature à permettre que soit rendu un service de qualité…
Mille kilomètres, monsieur le ministre ! Vous rendez-vous compte de ce qu’est une telle distance pour les Français en difficulté ?
…qui n’obère en rien la capacité des entreprises et des autres acteurs à fonctionner correctement. Au demeurant, comme je l’ai dit, le dispositif retenu fait écho à celui qui a fonctionné de manière satisfaisante par le passé…
J’ai l’impression qu’on ne tient pas compte de l’intérêt de la présence des Français !
…et il répond à notre volonté commune de rationaliser le réseau consulaire, afin de rendre son coût soutenable en termes de dépense publique. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, je ne peux pas être favorable à votre amendement, monsieur le député. Je vous demande donc, en toute amitié, de le retirer – à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Je suis tout à fait disposé à retirer mon amendement, monsieur le ministre, sous réserve que nous nous mettions au travail sur la question que j’ai évoquée – je suis sûr que François Loncle, qui connaît bien cette question, est d’accord avec moi. Vous nous dites que le système qui vient d’être instauré a déjà fonctionné par le passé. Certes, mais si un consulat avait été ouvert à Calgary en 2010, c’était pour répondre au considérable développement économique que connaît la région ! Aujourd’hui, ce développement attire de nombreuses entreprises françaises, ce qui augmente mécaniquement la présence de Français. Or, pour ceux de nos compatriotes qui se trouvent en difficulté, la distance de 1 000 kilomètres pour se rendre à Vancouver n’est pas acceptable.
J’accepte de retirer l’amendement n°329 , mais je souhaite vraiment que nous nous mettions autour d’une table afin de mettre au point, de manière consensuelle, une solution conforme à la stratégie définie par le ministre des affaires étrangères pour notre diplomatie – je veux parler de la mise en place d’une véritable diplomatie économique.
L’amendement no 329 est retiré.
Comme celui que vient de présenter M. Lefebvre, l’amendement n°92 est un amendement d’appel. Tout à l’heure, monsieur le ministre, vous avez répondu à ma question en expliquant de quelle manière était réparti le « gâteau » des bourses. Le problème est que, quelle que soit la répartition retenue, quand le gâteau est plus petit, il y a forcément des personnes lésées. Or, l’aide à la scolarité n’est toujours pas au niveau de ce qu’elle était du temps de Nicolas Sarkozy. Mon amendement vise donc à ce que vous rétablissiez simplement les crédits affectés à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger – l’AEFE – au niveau de l’année dernière. Vous avez en effet légèrement augmenté les bourses cette année, mais en prélevant des crédits sur la ligne de l’AEFE, ce qui n’est pas sans conséquences sur le réseau des lycées français à l’étranger : si vous ne rétablissez pas les 8,5 millions d’euros que vous avez pris aux lycées français à l’étranger, certains établissements vont forcément se trouver pénalisés.
La diminution des crédits alloués à l’AEFE n’a en réalité été que de deux millions d’euros, ce qui représente moins de 0,5 % du montant total de la subvention. Or, dans un contexte budgétaire aujourd’hui fortement contraint, il s’agit d’une baisse toute relative…
…qui représente, en tout état de cause, un effort bien moindre que ceux demandés à nombre d’autres administrations ou associations. Une baisse de deux millions d’euros, soit moins de 0,5 % de la subvention, me semble tout à fait acceptable dans un contexte où chacun doit faire des efforts.
Il ne s’agit pas de deux millions d’euros, mais de 8,5 millions d’euros!
Monsieur le député, vous savez que l’enseignement français à l’étranger est une priorité du Gouvernement, comme j’ai eu déjà eu l’occasion de le dire tout à l’heure au sujet de la question des bourses. Au-delà du service de l’éducation qu’elle offre aux enfants français, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger constitue un instrument extrêmement important de l’influence française à l’étranger.
Pour ces raisons, le nombre d’emplois autofinancés de l’AEFE augmente de 100 en 2014, comme en 2013, ce qui permet d’accompagner l’accroissement du nombre d’élèves de plus de 3 % à la prochaine rentrée. La subvention publique, pour sa part, diminue de 8,5 millions d’euros dans le PLF pour 2014. En 2013, nous avions anticipé, pour chaque année du budget triennal, une augmentation du taux de cotisation employeur pour les pensions civiles. Or, ce taux de cotisation est resté stable, ce qui conduit à une moindre dépense. Par ailleurs, et comme à chaque organisme public ou administration, je reconnais qu’il est demandé – mes fonctions me conduisent naturellement à le souhaiter – un effort au titre de la réduction de la dépense publique : 5,5 millions sont ainsi demandés à l’AEFE, soit moins de 1,3 % de sa subvention actuelle. Cet effort doit porter essentiellement sur les dépenses de fonctionnement et d’intervention de l’établissement et ne mettra pas en péril l’équilibre financier de l’opérateur, ni ne nuira à l’enseignement français à l’étranger, qui demeure une priorité gouvernementale.
Pour conclure, je veux dire un petit mot, strictement budgétaire, qui concerne, outre les opérateurs du ministère des affaires étrangères, l’ensemble des opérateurs de l’État. Au cours de chaque exercice du quinquennat précédent, le budget de fonctionnement des opérateurs de l’État a augmenté de 15 %, tandis que leurs effectifs et leurs frais de personnel se sont accrus de 6 %. Alors que la plupart des administrations centrales de l’État étaient soumises au régime de la révision générale des politiques publiques, les opérateurs y échappaient. Dans le budget présenté cette année par le Gouvernement à la représentation nationale, le budget de fonctionnement des opérateurs, là où il augmentait de 15 % en moyenne au cours des dernières années, diminuera de 4 %. Nous réduisons tout simplement les effectifs des opérateurs, parce que nous sommes engagés dans une stratégie de redressement des comptes publics. Comme il vous arrive, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, de douter que ce budget comporte des économies, vous constaterez qu’elles sont bien là. Quand elles sont là, d’ailleurs, vous proposez généralement que l’on revienne sur leur principe et leur montant.
Une fois n’est pas coutume, je m’associe à l’amendement présenté par l’UMP, même si, aujourd’hui, les représentants de l’actuelle opposition oublient la politique qu’ils ont menée pendant cinq ans. Je m’exprime ici au nom de mon collègue Sergio Coronado – député des Français de l’étranger, à l’instar des collègues qui viennent de s’exprimer – et je réitère les propos que j’avais tenus à la tribune : la baisse de 8,5 millions des crédits de l’AEFE aura pour conséquence une privatisation rampante de l’enseignement à l’étranger, dans la mesure où elle doit être rapportée à l’augmentation de 3 % du nombre d’élèves. Par ailleurs, elle mettra également en péril les recrutements locaux. Plusieurs grèves ont été menées par les enseignants, en particulier en Argentine, où il n’y a eu que 20 recrutements alors qu’il en faudrait près de 600. La question qui vous est posée, monsieur le ministre, si vous n’acceptez pas les amendements qui sont présentés, est de savoir quelle augmentation vous comptez appliquer dans le cadre du prochain budget, s’agissant en particulier de l’enseignement public à l’étranger. Nous savons, en effet, qu’il s’agit de l’un des éléments du rayonnement culturel de la France à l’étranger, dont elle a bien besoin.
Je veux dire à Jérôme Lambert que, si j’ai de l’estime pour son travail, nous sommes toutefois en désaccord sur les chiffres. Les crédits ouverts en 2013 s’élèvent à 425 millions et les crédits demandés pour 2014 sont de 416 millions : je maintiens que la différence atteint 8,5 millions, et non pas 2 millions. M. Noël Mamère dresse d’ailleurs un constat identique au mien.
Vous avez raison, monsieur le ministre, il est nécessaire de demander des économies aux opérateurs. Toutefois, le réseau français d’enseignement à l’étranger est fréquenté par un nombre croissant d’élèves. Je rejoins, pour une fois, Noël Mamère, pour constater que cette baisse de 8,5 millions va se traduire par une augmentation des frais de scolarité demandés aux familles. Comme le disait tout à l’heure Frédéric Lefebvre, on assiste – c’est le cas dans ma circonscription – à un certain nombre de déscolarisations au sein du réseau français d’enseignement. Les parents de trois enfants me disent qu’ils ne peuvent payer trois fois 7 000 ou 8 000 euros. S’ils disposent de revenus moyens, ils sont exclus du bénéfice des bourses et doivent retirer leurs enfants des écoles françaises. Ce n’est pas un bon service à rendre à la France. C’est pourquoi je demande simplement la stabilisation des crédits versés à l’AEFE par rapport à l’année dernière.
Je m’exprimerai en ma qualité de députée des Français de l’étranger. Je partage tout à fait la préoccupation de nos collègues. Cette diminution des crédits se traduira par le fait que l’agence enverra moins d’expatriés et aura besoin d’un surcroît de revenus : les frais de scolarité connaîtront donc un accroissement, ce qui justifiera une nouvelle augmentation des bourses scolaires. Il faut être très attentif à cela, car nous nous dirigeons vers une privatisation de notre enseignement, qui ne correspondra plus à rien. Enfin, je tiens à dire que je regrette l’absence de Mme Hélène Conway, ministre chargée des Français de l’étranger.
Monsieur le ministre, je vous confirme que, tout à l’heure, je m’associais à la réflexion pertinente de M. Lefebvre à propos du Canada, en particulier s’agissant du poste consulaire. Si, d’ailleurs, nous avions eu l’occasion d’entendre notre collègue Marie-Christine Dalloz, qui a déposé un amendement relatif aux ambassadeurs thématiques, mais qui n’est pas venue le défendre, j’aurais profité de l’occasion pour dire que cette réflexion n’a pas été menée jusqu’à son terme. Je crois avoir été l’un des premiers, avec le sénateur Richard Yung, à attirer l’attention du Gouvernement sur le nombre excessif d’ambassadeurs thématiques qui, mon cher collègue Frédéric Lefebvre, ont été créés par l’ancien gouvernement. On en a compté jusqu’à vingt-sept. Une première vague de réduction a été engagée par le gouvernement actuel, mais cela ne va pas assez loin. Voilà un sujet sur lequel on pourrait progresser et faire quelques économies.
S’agissant de l’AEFE, qui requiert toute notre attention, ainsi que celle du Gouvernement, je veux préciser, au-delà de la diminution des crédits, que l’agence bénéficie, grâce à ce budget, d’un traitement favorable en termes d’emplois : elle n’est en effet pas soumise à un abattement technique mais est au contraire autorisée, pour faire face à l’augmentation du nombre d’élèves, à recruter, en 2014, cent agents supplémentaires, hors plafond, au titre du réseau, soit 25 résidents et 75 personnes recrutées localement. La subvention globale est stable, si l’on inclut les montants affectés aux bourses scolaires, en augmentation de 8,5 millions d’euros sur le programme 105.
Il a été dit que ces baisses seraient intervenues sans une réflexion suffisante sur l’évolution du réseau. Je crois que ce n’est pas exact. Des réflexions sont menées sur la cartographie du réseau scolaire, qui impliquent des redéploiements. Le sort dévolu à l’Espagne, où une inspection est en cours, est notamment en question. Le plan Conway-Mouret a avalisé la diversification de l’offre d’enseignement français, ou en français, à l’image des filières bilingues, du programme FLAM ou du label FrancÉducation.
Ces amendements sont légitimes et devraient inciter à une réflexion pour l’élaboration du prochain budget, qui serait l’aboutissement de la préoccupation non partisane partagée par beaucoup d’entre nous.
Sur cette question, le clivage gauche-droite s’efface. Je veux revenir au discours tenu par le Président de la République à la conférence des ambassadeurs. Il expliquait que, dans les années à venir, on pouvait s’attendre à un accroissement d’un million du nombre de Français vivant à l’étranger, et il y voyait un bien pour la France. C’est en effet une richesse pour notre pays. À côté de cela, comme je l’expliquais à Laurent Fabius il y a une dizaine de jours, j’ai rencontré, en particulier à Rome mais également à Milan, en présence du personnel consulaire, des femmes élevant seules leurs enfants, qui vont être obligées de les retirer de l’école, parce qu’elles n’arrivent plus à payer la scolarité. Une famille détenant un patrimoine immobilier d’une valeur supérieure à 200 000 euros recevra une bourse d’un montant plus faible et devra retirer ses enfants de l’école française. Nous ne pouvons pas l’accepter. Je ne veux pas revenir sur le cas Leonarda, qui a donné l’occasion aux Français de s’émouvoir de la façon dont on a enlevé une jeune enfant de son école pour la renvoyer dans son pays. Il s’agit ici d’élèves français, qui sont scolarisés depuis des années avec leurs frères et soeurs dans des écoles françaises. On ne peut retirer ces enfants de l’école. Comme vous l’avez suggéré, monsieur le ministre, j’ai écrit à Mme Conway – présente à Rome presque en même temps que moi –, mais je n’ai pas encore reçu de réponse de sa part.
Telles sont les raisons pour lesquelles ces amendements sont si importants. Ils n’ont rien à voir avec la gauche et la droite. Ils concernent les moyens que l’on donne aux Français de l’étranger pour leur permettre de vivre dignement et de laisser leurs enfants à l’école.
Beaucoup de choses ont été dites par les parlementaires de tous bords, par le rapporteur et, à l’instant, par François Loncle, qui a rappelé les conditions dans lesquelles des emplois pourront être maintenus au sein de l’AEFE à un niveau relativement significatif, sans que cela nuise aux conditions d’enseignement, ce qui permettra d’accueillir des élèves dans de bonnes conditions.
Je veux vous communiquer des éléments précis sur les aspects budgétaires mais, au préalable, monsieur le député, je veux vous dire que j’ai apprécié le caractère non partisan et responsable de votre intervention. Nous nous trouvons dans une situation qui impose le rétablissement des comptes publics, par une économie sur les dépenses plus que par une hausse des prélèvements. De fait, le budget 2014 comporte une hausse de 0,05 % des prélèvements obligatoires, si l’on neutralise l’effet de la lutte contre la fraude fiscale – autrement dit, les deux milliards que nous comptons récupérer sur les entreprises et les particuliers qui fraudent –, là où, au cours des dernières années, tous gouvernements confondus, l’augmentation de la pression fiscale était de 0,5 %. Il s’agit donc d’une division par dix de l’augmentation de la pression fiscale. Il y a, aujourd’hui, dans notre pays, une prise de conscience de la nécessité d’ajuster les budgets exclusivement par des économies sur les dépenses.
Cette année, ces économies représenteront 80 % de l’effort et, l’an prochain, 100 %. Ces sujets doivent être abordés avec une grande rigueur et une absence totale de démagogie. En effet, monsieur le député Lefebvre, je constate que, depuis le début de notre débat budgétaire, à chaque fois que des économies sont proposées, il y a systématiquement des interventions et des amendements tendant à ce qu’il y soit renoncé. Il est de mon devoir de rappeler qu’il sera très difficile d’ajuster des budgets exclusivement par des économies en dépenses, si on les remet toutes en cause.
Monsieur Lefebvre, si ce n’est pas un rappel au règlement, je devrai vous retirer la parole.
J’entends parfaitement ce que vient de dire le ministre : il faut privilégier la réduction de la dépense publique.
Il ne s’agit pas d’un rappel au règlement. Dans ces conditions, nous passons au vote sur l’amendement no 92 .
L’amendement no 92 n’est pas adopté.
Monsieur Lefebvre, vous n’avez pas la délégation vous permettant de demander une suspension de séance.
Les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » sont adoptés.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’aide publique au développement (nos 1428, annexe 5, 1431, tome III).
Monsieur le président, je souhaite réagir à la réponse donnée tout à l’heure par le ministre…
Monsieur Lefebvre, je vous prie de cesser vos interruptions et de respecter la présidence. Cela suffit. À défaut, je ferai appliquer le règlement à la lettre.
Nous poursuivons maintenant l’examen des crédits.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du développement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voulais présenter ce soir le budget de l’aide publique au développement devant vous avec le logo endeuillé de Radio France International que vous connaissez tous. En effet, la cérémonie rendant hommage, au nom de la République française, aux journalistes assassinés samedi dernier a eu lieu aujourd’hui. Je tenais à mon tour à leur rendre hommage avant de présenter ce budget, qui couvre précisément les sujets qui les préoccupaient en tant que reporters de RFI.
La mission budgétaire de l’aide publique au développement évolue, comme toutes les autres, dans un contexte budgétaire que chacun sait contraint. Néanmoins, grâce à la mobilisation des financements innovants, nous avons préservé notre capacité d’engagement de crédits au service du développement des pays les plus pauvres.
Cette année, la baisse des crédits de la mission sera limitée à 100 millions d’euros. Elle est donc contenue. D’ailleurs, la part du budget de l’État consacrée à l’aide publique au développement, mesurée par l’indicateur transmis à l’OCDE et qui dépasse les seuls crédits de cette mission budgétaire, connaît une augmentation, puisqu’elle passe de 0,45 % en 2013 à 0,47 % du PIB en 2014. Si l’évolution est donc légèrement à la baisse s’agissant strictement des crédits de la mission, elle est légèrement à la hausse si l’on considère l’ensemble des dépenses que la France consacre au développement. Nous pouvons donc affirmer au minimum que nous préservons notre capacité d’engagement, ce qui constitue un choix politique volontariste dans le contexte budgétaire actuel.
Si nous faisons ce choix, c’est parce que c’est à la fois conforme à nos valeurs et dans notre intérêt. Je ne prendrai qu’un exemple : le Mali. Notre stratégie dans ce pays repose sur trois piliers : assurer la sécurité, accompagner la démocratie et la réconciliation politique, promouvoir le développement économique. On le sait : le développement ne peut se faire sans la sécurité, c’est une évidence, mais à l’inverse, la sécurité ne peut être assurée dans la durée que si elle peut s’appuyer sur le développement, en particulier le développement économique. C’est pourquoi, en consacrant des crédits à la solidarité internationale nous agissons conformément aux valeurs de la République, tout en défendant notre intérêt, car cela permet une plus grande stabilité du monde dans lequel nous évoluons.
La préservation des crédits dans un contexte contraint est possible grâce à la mobilisation des financements innovants : la taxe de solidarité sur les billets d’avion est rehaussée pour la première fois depuis sa création en 2006, et les produits de la taxe française sur les transactions financières seront affectés à hauteur non plus de 10 % mais de 15 % à la solidarité internationale. Cela peut paraître insuffisant, mais nous sommes aujourd’hui le seul pays au monde à affecter un pourcentage des produits de cette taxe au développement et à la solidarité internationale.
Dans ce contexte budgétaire, nous avons fait des choix qualitatifs, car un budget résume en effet une politique. Quelles sont nos priorités ?
Nous avons tout d’abord souhaité préserver l’aide projet, qui constitue le coeur des dons effectués dans le cadre de la solidarité internationale vers les pays qui en ont le plus besoin. Pour la deuxième année consécutive, les crédits qui y sont alloués sont ainsi intégralement reconduits, à l’euro près.
Nous avons, comme l’année dernière, augmenté le montant de l’aide qui passe par les ONG. Nous avions en effet un certain retard en la matière. Cette augmentation se poursuivra chaque année afin d’atteindre le doublement à la fin du quinquennat. C’était un engagement du Président de la République et il est tenu.
Nous avons fait le choix, un choix extrêmement fort et ambitieux, de maintenir à l’euro près la contribution de la France au Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, car celui-ci est le meilleur outil au monde pour lutter contre ces trois pandémies. Il est d’ailleurs reconnu comme tel à la fois par les ONG et par la communauté scientifique. Nous sommes du reste la première génération de responsables politiques qui peut mettre fin au sida, à la tuberculose et au paludisme. L’engagement de la France à verser plus d’un milliard d’euros en faveur du Fonds ces trois prochaines années a donc été maintenu.
Nous avons également reconduit, à l’euro près, les montants versés au Fonds africain de développement, détenu par la Banque africaine de développement. Nous avons en effet fait le choix de concentrer notre aide sur les pays qui en ont le plus besoin. Nous avons réussi à obtenir de cette institution multilatérale qu’est la Banque africaine de développement que 25 % de ces crédits soient dorénavant affectés aux pays en crise ; le Mali, la République Centrafricaine et d’autres. Ces pays concentrent en effet les difficultés et doivent être ciblés de manière prioritaire afin d’atteindre les objectifs du millénaire en matière de santé et d’éducation.
Cet engagement montre la capacité de la France à faire levier et à obtenir via les canaux multilatéraux des moyens que nous ne pourrions pas mobiliser seuls. Ces résultats nous confortent ainsi dans la stratégie que j’ai déjà évoquée à de nombreuses reprises devant vous et qui consiste à articuler au mieux les actions bilatérales et multilatérales.
J’évoquerai rapidement plusieurs autres priorités. L’aide alimentaire internationale sera elle aussi préservée, car il est impensable de couper les vivres à ceux qui en ont le plus besoin, l’enjeu étant ici celui de la survie immédiate.
Les montants alloués dans le cadre de la coopération décentralisée, qui permettent à l’État d’accompagner l’action des collectivités locales françaises dans ce domaine, sont également maintenus. Cela rejoint une priorité du Quai d’Orsay : démultiplier la diplomatie française pour que l’influence de la France soit diffusée non pas uniquement par l’État mais par l’ensemble des acteurs publics.
J’ai donc montré comment plusieurs enjeux prioritaires se traduisent sur le plan budgétaire et en termes qualitatifs. À cet égard, je vous renvoie à plusieurs décisions qui ont été prises au Comité interministériel de la coopération internationale et du développement, le CICID, lequel s’est réuni pour la première fois depuis cinq ans en juillet. Il a notamment acté le fait que 85 % de nos engagements financiers seraient destinés à l’Afrique ; nous allons en particulier concentrer notre aide dans les seize pays africains considérés comme prioritaires et qui en ont le plus besoin.
Tous ces engagements traduisent des valeurs et des intérêts qui peuvent faire consensus dans cette assemblée.
La parole est à M. Jean-François Mancel, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les prêts à des États étrangers.
Monsieur le ministre, depuis dix-huit mois vous faites preuve incontestablement de bonnes intentions.
Ce sont des décisions !
Vous en avez encore évoqué certaines. Le Président de la République avait pourtant annoncé que la part du revenu national brut affectée à l’aide publique au développement atteindrait 0,7 %. Vous avez, il est vrai, organisé les Assises du développement et de la solidarité internationale et réuni le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement. Vous avez augmenté les financements innovants. Il y a eu l’engagement au Mali, et à cet égard je m’associe bien sûr à l’hommage que vous avez rendu à nos deux compatriotes assassinés. Enfin, un projet de loi d’orientation et de programmation est en préparation et devrait être présenté le moment venu, vraisemblablement lors d’un conseil des ministres du mois de décembre, ainsi que vous nous l’avez indiqué récemment.
Hélas, et c’est le sujet du jour, les moyens budgétaires ne sont pas à la hauteur. Vous venez d’évoquer les crédits que vous êtes parvenus à sauvegarder, mais ils sont bien loin d’être suffisants au regard des intentions affichées.
Premièrement, il est clair aujourd’hui que l’objectif d’affecter 0,7 % du revenu national brut à l’aide publique au développement est désormais quasiment abandonné pour un avenir proche, voire même lointain.
Deuxièmement, et c’était déjà le cas en 2013, votre budget diminue. La baisse des crédits de paiement en 2014 est d’environ 6 %, ce qui n’est pas rien.
Troisièmement, le Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement s’est certes réuni, mais son relevé de décisions est rempli d’objectifs pléthoriques qui sont totalement irréalisables compte tenu des moyens dont vous disposez. Je reconnais que vous vous battez pour en obtenir, mais c’est plutôt vers M. le ministre délégué chargé du budget qu’il faut se tourner, car là réside le problème majeur de notre action en matière d’aide publique au développement.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué les financements innovants, qui ont été créés par Jacques Chirac s’agissant de la taxe sur les billets d’avion et par Nicolas Sarkozy s’agissant de la taxe sur les transactions financières. Toutefois, et vous en avez fait l’aveu vous-même en commençant votre intervention tout à l’heure, alors qu’ils avaient été pensés à l’origine comme des financements additionnels, ils sont devenus des financements de substitution pour remplacer la baisse des crédits publics alloués à votre ministère. Il faut bien le rappeler, et c’est certainement l’une des critiques les plus importantes que l’on puisse adresser à ce budget.
Par ailleurs, je souhaite revenir sur le problème de nos interventions bilatérales, dont les financements sont à nouveau en baisse dans le budget pour 2014. C’est très net : le montant des subventions versées aux pays qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire globalement aux vingt pays les plus pauvres de la planète, est de 200 millions d’euros, soit environ 10 millions d’euros par pays. Comment voulez-vous mener la politique ambitieuse que vous souhaiteriez concrétiser avec des moyens aussi faibles ?
Je prendrai l’exemple du Mali, où il faut non seulement maintenir la sécurité mais aussi redresser les institutions et l’économie d’un pays qui en a grand besoin. Je suis pour ma part très sceptique quant à la mobilisation financière internationale dans ce domaine. Si la France, qui a le savoir-faire, la compétence et qui peut s’appuyer sur l’AFD, l’Agence française de développement, qui joue un rôle excellent au service des intérêts français, n’a pas la capacité de mobiliser des crédits en matière bilatérale pour initier les opérations, les organiser, et entraîner ensuite les financements multilatéraux, on risque de se retrouver dans la pagaille générale de l’action multilatérale. J’en veux pour preuve le bilan des interventions en Afghanistan, où des milliards d’euros ont été gâchés pour financer des opérations multilatérales qui n’ont pas débouché sur grand chose.
Pour ces différentes raisons, nous devons progresser en matière de montant de crédits. Je répéterai ce soir en présence de M. le ministre délégué chargé du budget ce que je vous avais dit lors de la commission élargie : je suggère que sur les 600 millions d’euros attribués à l’aide médicale d’État dans le cadre de la mission « Santé », qui doit être examinée prochainement, 200 millions d’euros soient transférés à la mission « Aide publique au développement » au profit notamment du programme 209, c’est-à-dire au profit des subventions de l’aide bilatérale. Ce serait le moyen de bien répondre aux préoccupations qui sont les vôtres et que nous partageons, monsieur le ministre.
Je rappelle pour mémoire que la commission des finances a adopté les crédits de votre ministère.
La parole est à M. Hervé Gaymard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour l’aide publique au développement.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je ne vais pas revenir sur ce qu’a dit excellemment Jean-François Mancel ; je partage ses critiques.
Je commencerai par une remarque d’ordre général. Vous vous félicitez, monsieur le ministre, que la part de l’aide publique au développement augmente si on la rapporte à notre PIB. Mais je ne sais s’il faut s’en féliciter : cette augmentation est liée, non pas à une hausse des crédits, mais à un tassement de notre PIB. Ce n’est donc pas tout à fait une bonne nouvelle pour notre pays que le taux augmente alors que les crédits diminuent !
Cela posé, je voudrais saluer l’ardeur de votre action au service du développement. Sur les différents bancs de cet hémicycle, nous partageons la même volonté, à savoir que notre pays soit exemplaire, innovant et fédérateur en matière de politique d’aide au développement.
Je ferai deux observations.
La première concerne le caractère additionnel des financements innovants. Il faut appeler un chat un chat : cette année est importante, puisque l’on sait désormais que les financements innovants ne sont plus additionnels, au rebours de la doctrine qui avait présidé à leur création. À cet égard, il faudrait selon moi modifier les développements qui figurent toujours sur le site internet du Groupe pilote sur les financements innovants – je l’ai consulté tout à l’heure encore. En effet, il y est bien écrit noir sur blanc que les financements innovants sont additionnels. Dans la mesure où la France assure le secrétariat de ce groupe, il faut prendre acte de ce changement de doctrine ; nous le déplorons, bien que nous n’ignorions pas la situation budgétaire. Quoi qu’il en soit, parlons clairement : le caractère additionnel des financements innovants a vécu. Or je suis assez fier d’avoir contribué notamment, il y a quelques années, à la mise en place de la taxe sur les billets d’avion, avec Jacques Chirac, qui avait défendu cette innovation à Bruxelles.
Ma seconde remarque concerne la politique en matière de santé – je pense à la lutte contre le SIDA, la tuberculose, le paludisme, ou encore contre la mortalité infantile, dont on sait qu’elle est encore trop importante en Afrique. Au mois de juillet, on pouvait lire dans la revue médicale britannique The Lancet un éditorial très intéressant où il était expliqué que la France était l’un des pays faisant le plus en matière de politique sanitaire dans les pays en développement – bien plus que tous les autres si l’on rapporte la dépense au nombre d’habitants. Pourtant, nous n’arrivons pas à le faire savoir. Dans le débat traditionnel entre l’aide bilatérale et l’aide multilatérale, force est de reconnaître que notre pays doit faire un effort considérable pour faire connaître son action, car aujourd’hui les financements de la France sont trop noyés dans les interventions multilatérales.
Toujours à propos des politiques de santé publique, le Président de la République a décidé de sanctuariser à un niveau très élevé la contribution française au Fonds mondial de lutte contre le SIDA, en utilisant d’ailleurs les financements innovants à hauteur de 80 millions d’euros. Dans le même temps, pourtant, on diminue curieusement de 10 millions d’euros les crédits affectés à GAVI Alliance, dont nous savons le travail formidable qu’il accomplit en Afrique, notamment pour lutter contre la mortalité des enfants de moins de cinq ans. Par ailleurs, on ne fait pas assez pour les pays de la francophonie. Ne pourriez-vous pas, monsieur le ministre – sans augmenter globalement le niveau des crédits bien sûr, car nous connaissons les contraintes qui s’imposent à vous –, rétablir ces 10 millions d’euros ?
Je vous le dis très honnêtement : cela ne ferait pas boiter le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, cela ne décrédibiliserait pas la signature de la France au vu de notre très importante contribution et, grâce à cela, nous pourrions continuer à mener une politique de vaccination de grande ampleur en Afrique.
Voilà, monsieur le ministre, les quelques réflexions que je voulais faire, même si j’ai développé plus avant dans mon rapport pour avis de nombreux autres sujets. Pour les raisons que j’ai indiquées, à titre personnel, je m’abstiendrai lors du vote sur cette mission.
Nous en venons aux porte-parole des groupes.
La parole est à M. Meyer Habib, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le président, mes chers collègues, à l’heure où la crise économique et financière menace en divers points du globe les acquis de plusieurs années d’efforts et de solidarité en direction des pays les moins développés de la planète, l’aide publique au développement demeure une composante essentielle de notre politique étrangère.
Il s’agit en effet d’adapter notre politique internationale en matière d’aide publique au développement en tenant compte de facteurs essentiels tels que la différenciation des niveaux de développement des pays au sein de la mondialisation, l’émergence de nouvelles puissances étrangères, l’extension et la généralisation des aspirations démocratiques, mais aussi la globalisation de la question environnementale et des politiques qu’il convient de mener dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique et la protection des populations les plus exposées.
Les députés du groupe UDI se sont très fortement investis sur ces questions. Ils ont notamment proposé l’initiation d’un plan global de solidarité en faveur de l’Afrique, continent que nous jugeons prioritaire.
La mission « Aide publique au développement » accuse, dans le projet de loi de finances, une baisse de 178 millions d’euros. Alors que nous sommes à un an seulement de l’échéance de 2015, ce budget nous éloigne de plus en plus des 0,7 % fixés dans le cadre des objectifs du millénaire pour le développement. Hors allégement de la dette, la France ne consacre plus à ce poste budgétaire que 0,4 % du RNB. Indéniablement, les ambitions en matière d’aide au développement se heurtent à la réalité des faits.
Il aurait certes été illusoire de penser un instant que, dans le contexte budgétaire actuel, la mission « Aide publique au développement » puisse être exemptée de quelque façon que ce soit d’une participation à l’effort de maîtrise des dépenses publiques, mais, alors que cette mission ne représente que 1 % du budget pour 2014, reconnaissons que l’effort demandé cette année en fait une fois encore un budget sacrifié.
En outre, ce budget prévoit d’augmenter la part de la taxe sur les transactions financières affectée à l’aide au développement de 10 % à 15 %, mais nous ignorons de quelle façon, car, avec 600 millions d’euros au lieu des 1,6 milliard attendus initialement, les recettes sont bien maigres.
Plus généralement, il est indispensable de refonder la politique d’aide et de partenariat pour le développement en adoptant une nouvelle approche globale et en s’appuyant à la fois sur une véritable évaluation qualitative et sur une réflexion poussée sur la question de l’efficacité de l’aide. Malgré les importants progrès enregistrés, la situation demeure très alarmante pour 1 milliard d’êtres humains sur la planète, la faim restant, hélas ! un défi mondial majeur.
Notre devoir est de donner une nouvelle impulsion à la politique française en ce domaine en la rendant plus efficace, plus lisible et mieux ciblée. L’aide publique au développement souffre d’une trop grande opacité : de nombreux acteurs prennent en charge sa gestion, ce qui nuit à la fois à son efficacité et à la réalité des actions qu’elle finance.
Au demeurant, je ne peux que m’étonner de l’absence de réflexion concernant une possible centralisation des aides publiques au développement à l’échelle européenne, l’Union européenne étant elle-même un donateur majeur. Les moyens financiers et humains dont dispose la Commission européenne et les compétences juridiques accordées à l’Union semblent rendre propice une plus grande mutualisation des prises de décision et des moyens.
Nous devons, enfin, renforcer notre capacité d’action bilatérale, notamment au profit de l’Afrique subsaharienne, tout en maintenant notre aide multilatérale, qui nous permet de faire entendre nos priorités et partager notre vision du développement.
Aussi, nous saluons la volonté du Gouvernement de concentrer son action sur ces points particuliers dans le projet de loi de finances pour 2014, même s’il faudra attendre plusieurs années avant de voir si les résultats seront au rendez-vous.
Monsieur le ministre, de toute évidence, ce budget ne permettra pas, hélas ! de répondre aux nombreux défis qui sous-tendent cette mission. Cela dit, nous ne saurions nous opposer à une aide dont bien des régions ont cruellement besoin. C’est pourquoi le groupe UDI s’abstiendra lors du vote sur les crédits de la mission « Aide publique au développement ».
Monsieur le ministre, cher Pascal Canfin, vous poursuivez avec persévérance un travail cohérent pour une mondialisation solidaire et la protection des plus vulnérables, ceux que Frantz Fanon appelait les « damnés de la terre ». Mais, malgré vos efforts, le budget qui vous est alloué est en baisse pour la seconde année consécutive – cette fois de 6 %, avec les conséquences que cela suppose, notamment pour les pays les plus pauvres.
Les organisations non gouvernementales se plaignent de la réduction des crédits de l’aide au développement. De fait, cette diminution peut avoir des conséquences sur la vaccination de plusieurs centaines de milliers d’enfants ou d’adultes dans des pays très retirés. La baisse de quelque 30 millions d’euros risque de vous empêcher directement d’accomplir la mission qui vous est assignée. Comme l’ont dit certains collègues avant moi et comme le diront sans doute d’autres après, nous sommes loin de l’objectif de 0,7 % de notre richesse nationale. Votre ministère s’efforce de masquer cette faiblesse en intégrant dans son budget des éléments qui n’ont rien à y faire, par exemple la formation professionnelle à Wallis et Futuna, qui est pourtant un territoire français.
Il convient également de dire combien il est nécessaire d’engager une réforme de l’Agence française de développement, outil essentiel au service de l’aide publique au développement, notamment pour opérer un rééquilibrage entre les prêts et les subventions directes. Nous sommes assez éloignés aujourd’hui des objectifs du millénaire. Le montant des crédits alloués aux seize pays africains considérés comme prioritaires n’est que de 10 millions d’euros par an en aides directes ; il faut donc faire des efforts en ce sens. Je ne suis pas en train de dire que l’AFD ne doit pas accorder d’aides aux pays émergents, mais elle doit répondre, ainsi que le ministère chargé du développement, à sa vocation première, laquelle doit être de se tourner vers les pays prioritaires.
On peut noter aussi avec une grande satisfaction que les financements innovants, comme la taxe sur les billets d’avion et la taxe sur les transactions financières, commencent à jouer leur rôle. Rendons à César ce qui lui appartient : vous avez beaucoup oeuvré, monsieur le ministre, lorsque vous étiez membre du Parlement européen, à la mise en place de la taxation sur les transactions financières, laquelle n’a rien à voir avec le dispositif instauré par le gouvernement Sarkozy : il s’agissait d’une taxe sur les transactions bancaires qui n’avait pas les mêmes effets. Cela dit, ces financements innovants visent davantage aujourd’hui à rattraper un budget insuffisant qu’à aller directement vers ceux qui en ont le plus besoin.
Se pose également la question du rôle de la France en faveur de la mise en place d’une couverture sanitaire universelle. On sait bien, en effet, que les problèmes de santé sont essentiels dans un certain nombre de pays en développement. Aujourd’hui, le droit à la santé n’est pas une réalité pour plusieurs milliards d’êtres humains. Nous devons donc contribuer à lever les barrières financières qui contribuent à la mortalité très importante dans ces pays. Or le volet sanitaire de votre ministère ne représente que 0,05 % de l’aide en matière de santé. Nous considérons qu’il faut maintenant traduire vos discours dans les actes et aller un peu plus loin.
Nous nous félicitons qu’une loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement soit prochainement votée. Les écologistes, et tous ceux qui se sentent concernés par l’aide publique au développement, espèrent que ce texte facilitera la transparence, améliorera le suivi de la mise en oeuvre de notre politique de développement et contribuera à lutter contre ce que l’on pourrait appeler une forme de dumping. La PAC subventionne en effet des produits agricoles qui envahissent les pays d’Afrique, notamment, et y constituent une concurrence déloyale. Et au moment même où des manifestations se déroulent en Bretagne, nous savons que l’aide apportée à cette filière nuit à la souveraineté alimentaire des paysans africains.
Monsieur le ministre, vous portez le badge de RFI : nous nous inclinons devant la mémoire des deux journalistes de cette radio, qui ne faisaient que leur travail. Nous avons appris il y a quelques minutes que leur horrible assassinat est revendiqué par AQMI. Si ce meurtre constitue une atteinte à la liberté d’expression, il est aussi le signe d’un malaise dans cette partie de l’Afrique, qui fait l’objet d’une intervention et d’une aide militaire française plutôt que d’une véritable aide au développement.
Vous tiendrez le 5 décembre une grande réunion sur le développement avec l’AFD, où se trouveront tous ceux qui souhaitent une autre vision de l’Afrique. Mais le lendemain, un certain nombre de crapules et de dictateurs, dont certains sont poursuivis par la justice française pour des biens mal acquis, seront à l’Elysée, pour le sommet sur la sécurité. Malheureusement, la Françafrique se porte encore très bien !
Cela dit, le groupe écologiste votera le budget de votre ministère.
La parole est à Mme Annick Girardin, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mon collègue Paul Giacobbi a dû regagner sa circonscription. Il me revient donc d’interpréter – c’est le mot – son texte.
Il semble que l’aide publique au développement traduise une volonté politique de rénovation. J’en veux pour preuve les Assises du développement et de la solidarité internationale, qui ont nécessité pas moins de quatre mois de concertations et de tables rondes, pour aboutir à l’annonce d’une loi d’orientation et de programmation sur l’aide publique au développement et à l’institution d’un conseil du développement et de la solidarité internationale.
Je ne sais combien notre beau pays compte de lois de programmation et d’orientation ; elles sont à la législation budgétaire ce que l’état gazeux est à la physique des matériaux. Je ne connais pas davantage le nombre de nos conseils nationaux. Ils sont certainement plus d’une centaine ; un de plus n’aggravera guère notre incapacité à décider dans quelque domaine que ce soit... Autant vous dire mon très grand scepticisme face à ces perspectives de programmation stratégique et de concertation tous azimuts.
Par ailleurs, la France prévoit de dépenser en crédits de paiement plus de 635 millions d’euros pour toute une série d’actions économiques et financières multilatérales. Je ne doute pas de leur utilité et de leur efficacité : chacun peut se réjouir de la transparence, de la qualité de gestion, de la proximité du terrain de ces structures multilatérales, dont les pratiques ont été dénoncées depuis bien longtemps, chaque fois qu’un contrôle sérieux a été mené…
Il serait parfois utile que la représentation nationale soit informée du contenu réel des actions engagées. Malgré une étude attentive, je n’arrive pas à comprendre la signification du paragraphe suivant : « Ces crédits sont destinés à financer des actions permettant d’asseoir nos positions dans les instances internationales engagées dans la lutte contre les juridictions non coopératives, en cohérence avec le caractère prioritaire accordé à ce sujet par le G 20. Ces fonds permettent de contribuer, au-delà de notre implication dans ces enceintes, au fonctionnement des organismes régionaux de type GAFI, dont les moyens sont souvent très limités malgré les enjeux, de cofinancer des actions de formation et de participer à l’organisation de séminaires ou réunions sur ces sujets ».
Je crois comprendre qu’il s’agit de financer des causeries internationales sur le thème des pays non coopératifs en matière de lutte anti-blanchiment et de lutte contre le financement du terrorisme – en substance, les paradis fiscaux. Puisque nous souhaitons la transparence, nous pourrions faire l’effort d’un vocabulaire transparent qui soit autre chose qu’une traduction française très malheureuse et parfaitement erronée du terme anglais juridiction.
Pour en finir avec une chose sérieuse, je voudrais dire un mot de l’AFD, outil désormais majeur de financement de l’influence française. En dix ans, le volume de ses engagements a été multiplié par cinq et son champ d’intervention géographique s’est considérablement étendu, en Afrique tout d’abord, puis en direction des pays émergents. La députée d’outre-mer que je suis ajoute avec grande satisfaction à cette liste les territoires d’outre-mer, que l’AFD accompagne.
L’AFD est aujourd’hui un outil essentiel et il faudra veiller de près au renouvellement de son contrat d’objectifs et de moyens pour les années 2013-2015. En tout état de cause, l’idée qu’il faudrait lui interdire d’intervenir dans les pays émergents est le type même de la fausse bonne idée. Sur le fond, car c’est sans doute là que notre influence peut être la plus grande dans la lutte contre le réchauffement climatique et pour la préservation de la biodiversité. Ensuite, parce que se priver d’une influence économique dans les pays émergents et réduire ses exportations revient à se tirer une balle dans le pied.
La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je supplée avec grand plaisir mon collègue François Asensi, qui a dû repartir en urgence dans sa circonscription.
Face aux ravages de la crise du capitalisme financier jusque dans les pays pauvres, l’aide publique au développement est plus que jamais nécessaire pour promouvoir la réduction des inégalités NordSud. Ce n’est pas un geste de charité des pays les plus riches, mais la compensation, largement insuffisante, des effets d’une mondialisation néolibérale fondamentalement injuste.
Indéniablement, nous faisons crédit au ministre d’une volonté forte de relancer la politique de coopération. Depuis un an, des évolutions ont été engagées. Je pense aux Assises du développement, à la réunion du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement – le CICID –, à la loi d’orientation annoncée ou encore au rôle accru des ONG dans notre aide.
Néanmoins, à bien des égards, nous sommes restés au milieu du gué. J’y reviendrai au sujet de la transparence de notre aide, de la taxe Tobin, de la Françafrique. Je regrette que votre volonté politique ait trop souvent cédé le pas devant la logique absurde de l’austérité, qui pousse les pays développés à leur propre perte et entraîne avec eux les pays les plus pauvres, et devant les intérêts des multinationales françaises, trop souvent confondus avec nos intérêts nationaux, alors que les pratiques de ces groupes maintiennent parfois les pays du Sud sous une domination de nature néocoloniale.
L’austérité frappe de plein fouet le budget que nous examinons. Les coupes engagées sous le précédent gouvernement se poursuivent. Baisser de 7,65 % les crédits budgétaires pour le développement est inacceptable ! Que d’autres pays européens aillent plus loin encore dans l’égoïsme ne saurait nous servir d’excuse. Le Royaume-Uni, et bien d’autres, maintiennent leurs crédits malgré la crise.
En 1970, la France s’était engagée à consacrer 0,7 % de son PIB à la solidarité internationale. Quand respectera-t-elle enfin un engagement que la Suède remplit depuis quarante ans ?
La sincérité de l’aide publique a progressé, mais elle demeure largement insuffisante. Sur les 9,8 milliards d’euros annoncés pour 2014, seuls 4 milliards reviennent véritablement à l’aide aux pays pauvres, si l’on calcule selon la méthode de 1’ « aide-pays programmable » reconnue par l’OCDE.
En réalité, une forte part de notre aide se compose d’annulations de dettes. N’oublions pas que ces dettes sont bien souvent illégitimes, car contractés par des régimes corrompus qui n’en ont pas fait bénéficier leurs peuples. La responsabilité des banques et des États qui leur ont accordé ces prêts doit être engagée.
Par ailleurs, les populations ont déjà remboursé plusieurs fois le montant de ces prêts à travers le service de la dette. Comment supporter que le système financier de nos pays riches s’enrichisse plus encore sur le dos des plus pauvres ? Les annulations de dettes ne sont pas une aide au développement, mais le simple arrêt d’un système intrinsèquement immoral et financièrement insoutenable.
Comment comprendre que notre aide au développement bénéficie avant tout aux pays émergents ? Selon le même rapport de l’OCDE, moins de 10 % de notre aide bilatérale est destinée aux 17 pays les plus pauvres. L’AFD préfère prêter à la Chine, au Maroc, à la Turquie, afin que de juteux contrats bénéficient en retour aux multinationales françaises.
Un mot sur le Mali. Ce pays, parmi les plus déshérités de la planète, n’a bénéficié que de 8 millions d’euros de subventions de l’AFD en 2011, à comparer aux 400 millions de l’opération militaire Serval. Le peuple malien, en lutte contre les pires terroristes, mérite un soutien plus fort. Malgré ces insuffisances, le CICID a décidé en juillet dernier de ne plus concentrer l’aide sur le sub-Sahel, mais de diluer à moyens constants sur l’ensemble de l’Afrique et du Moyen-Orient.
Enfin, la taxe Tobin, portée un temps par la France, se trouve progressivement dévoyée. Seuls 10% de son rendement financent le développement ! De plus, comme nous le redoutions, ces financements ne sont plus additionnels, puisqu’ils servent à masquer un désengagement budgétaire de l’État.
Nous sommes choqués de constater que le Gouvernement s’est rangé dans le camp des fossoyeurs de la taxation des transactions financières proposée par la Commission européenne, le Gouverneur de la Banque de France ayant demandé qu’elle soit « entièrement revue », allant jusqu’à mettre en garde contre « la destruction de pans entiers de l’industrie financière française ».
Devant l’absence d’ambition budgétaire et les hésitations sur le cap politique imprimé, les députés du Front de gauche s’abstiendront.
La France doit porter une tout autre vision de la mondialisation, au service des peuples, de l’environnement et du développement. Nous devons interdire purement et simplement les transactions dans les paradis fiscaux. Nous devons instaurer une véritable taxe sur les transactions financières, ambitieuse dans son taux et son assiette. En plus de réduire la spéculation, elle pourrait rapporter jusqu’à 400 milliards de dollars par an, huit fois plus que la somme nécessaire selon la FAO pour éradiquer la faim sur la planète !
Les grandes puissances ont une dette envers les pays en développement, une dette historique, une dette économique, une dette politique.
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le groupe SRC votera les crédits de la mission « Aide publique au développement », qui contribuent à la mise en oeuvre des orientations de la France en matière de solidarité internationale.
Les crédits pour l’aide publique au développement pour 2014 s’inscrivent dans l’effort général d’économie. Chacun le comprend, compte tenu des déficits budgétaires accumulés depuis une décennie. Cependant, ces restrictions ne doivent pas être durables dans un domaine où il faudra au contraire consolider l’effort budgétaire.
Si l’on ajoute les annulations de dettes pour près de 1,6 milliard d’euros et les recettes nouvelles attendues des taxes sur les billets d’avions et sur les transactions financières, l’effort global de la France est amené à 9,6 milliards d’euros en 2014, soit 0,47 % du revenu national brut. Nous sommes encore loin de l’objectif de 0,7 %. Dans les années qui viennent, après assainissement du budget de la Nation, il sera nécessaire de renforcer cette contribution pour tendre vers cet objectif.
Les orientations d’une nouvelle politique du développement et de la solidarité internationale ont été définies par le CICID du 31 juillet 2013, présidé par le Premier ministre. Ce comité, qui ne s’était pas réuni depuis 2009, a abouti à vingt-huit décisions opérationnelles, faisant suite à une large concertation avec les ONG, les entreprises et les collectivités territoriales, qui a été saluée.
La loi sur le développement et la solidarité internationale – première loi d’orientation et de programmation – s’inscrit dans cette dynamique. Elle devrait permettre de partager des objectifs et des priorités avec l’ensemble de nos concitoyens et avec leurs représentants, aux niveaux local et national.
Nous sommes donc clairement dans une phase et un budget de transition.
Le programme 110 « Aide économique et financière au développement », mis en oeuvre par le ministère de l’économie et des finances, maintient un effort particulier en direction de l’Afrique, priorité réaffirmée à juste titre à travers le Fonds africain de développement et le Fonds international de développement agricole. Il traite également des bonifications de taux d’intérêt des prêts accordés par l’AFD.
Compte tenu des difficultés budgétaires particulièrement graves des pays les plus pauvres, et de leur encadrement par des règles internationales limitant leur possibilité de recourir aux emprunts, nous voyons bien que les interventions sous forme de prêts sont insuffisantes pour donner vraiment la priorité aux seize pays les plus pauvres.
La sous-nutrition et la malnutrition constituent également des handicaps majeurs pour le développement des pays les plus pauvres et de ceux dont une part importante de la population vit dans la misère. L’intervention au titre du développement agricole est une nécessité mais la lutte contre la sous-nutrition doit aussi être une priorité des politiques de santé.
De surcroît, les pays les plus pauvres souhaitent qu’au-delà des soutiens aux budgets des États et des aides d’urgence en cas de crises politiques, humanitaires ou alimentaires, les interventions visent particulièrement l’émergence d’activités économiques et d’entreprises sur leurs territoires. Il est donc souhaitable de renforcer les interventions de l’Agence française de développement en direction de la création d’entreprises et des apports en fonds propres.
Le programme 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement », géré par le ministère des affaires étrangères, met l’accent sur la coopération bilatérale. Il concrétise notamment l’engagement du Président de la République de doubler l’aide publique transitant par les ONG françaises entre 2012 et 2017, avec une hausse nette de 9 millions d’euros en 2014. Dans un contexte budgétaire contraint, il augmente aussi légèrement le soutien à la coopération décentralisée. Il continue à tenir compte des attentes de la francophonie à travers l’Organisation internationale de la francophonie et l’Agence universitaire de la francophonie. Ce programme maintient également les contributions au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme
Compte tenu des questions portées et relayées par les différents acteurs du développement et de la solidarité internationale, mais également par nombre de nos collègues parlementaires, nous aurons, dans les mois à venir, à traiter de nombreux sujets sur les thématiques de l’aide et sur les pays prioritaires, sur la gouvernance, les coordinations et l’efficience des interventions, sur la transparence et les évaluations, sur les stratégies bilatérales, européennes et multilatérales, sur l’usage des taxes sur les transactions financières et plus généralement les financements innovants.
Je crois que nos concitoyens tiennent également à mieux distinguer les objectifs qui sous-tendent les différentes interventions : urgence humanitaire, soutien à des États en difficulté, mais aussi amorçage de véritables circuits économiques et d’échanges équitables.
Sans compter qu’il faut faire apparaître, me semble-t-il, qu’une partie des aides apportées représente de véritables investissements. C’est le cas de toutes les actions qui peuvent contribuer à diminuer les flux migratoires en provenance des pays pauvres, mais aussi d’un bon nombre d’actions conduites en Afrique dont on dit partout qu’elle est le continent en croissance économique pour les prochaines décennies. Je vous remercie pour votre attention.
La parole est à M. Jean-Louis Christ, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans le projet de loi de finances pour 2014, la mission d’aide publique au développement accuse une baisse de 178 millions d’euros. L’examen de ce budget doit nous rappeler qu’un quart de la population mondiale doit compter aujourd’hui encore sur la solidarité internationale.
À travers ce budget, les engagements internationaux de la France ne sont pas respectés, et nous nous éloignons de plus en plus de l’objectif de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l’APD d’ici à 2015. La tendance malheureusement se confirme en 2013 et 2014 car, hors allégement de la dette, la France ne consacre plus que 0,4 % du revenu national brut à l’aide publique au développement.
On peut donc légitiment s’interroger sur le rôle international que la France entend tenir, car il est clair que son influence dépend du respect de ses engagements en matière d’aide au développement et de lutte contre l’extrême pauvreté. C’est aussi une question de crédibilité et de volonté. Ainsi l’Angleterre, comme l’a évoqué André Chassaigne, bien que fortement touchée par la crise financière actuelle, a décidé d’atteindre l’objectif de 0,7 %. N’est-ce pas la preuve qu’une politique de développement ambitieuse est une question de volonté politique ?
Monsieur le ministre, en coupant ainsi dans l’APD, non seulement on ne redressera pas nos finances publiques, car la mission APD ne correspond qu’à seulement 1 % du budget total de la France en 2014, mais ce choix aura des conséquences irréversibles sur les populations les plus vulnérables.
Le Parlement, la Cour des comptes, le CAD et l’OCDE ont souvent évoqué la complexité du système institutionnel d’ensemble de la coopération qui implique une dizaine d’autres ministères et des instances de pilotage peu fonctionnelles, ainsi qu’un budget à la structure éclatée qui rend difficile l’appréhension de l’ensemble des moyens engagés.
Ces questions ont été à l’ordre du jour du dernier CICID en juillet dernier et nous avons hâte de connaître les nouvelles mesures prises pour améliorer la lisibilité de l’APD.
Aujourd’hui, 70 % de l’APD mondiale est déclarée sous le standard de l’Initiative internationale sur la transparence de l’aide dont le but est d’améliorer la transparence de l’aide pour assurer une meilleure compréhension et un contrôle effectif tant de la part des
parlementaires que des citoyens. L’accessibilité de ces données permet d’améliorer la connaissance des actions des bailleurs, la gouvernance et la lutte contre la corruption. Il conviendrait que la France mette rapidement en oeuvre cette norme commune sur l’ensemble de son budget. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez déjà engagé ce dispositif pour le Mali et je vous en remercie.
Le Président de la République s’est engagé à doubler l’APD qui transite par les ONG, sans toutefois en décrire les modalités. Rappelons que la France reste dernière des États membres du CAD en part d’APD transitant par les ONG – 1 % – alors que la moyenne OCDE s’élève à 13 %. Là aussi, il conviendrait d’accélérer la progression des crédits affectés pour mieux soutenir les initiatives des ONG françaises.
Dans ce budget, la taxe sur les transactions financières est à nouveau – je m’exprimerai avec beaucoup de délicatesse – détournée, voire dévoyée, de son objet. Hervé Gaymard a d’ailleurs abordé cette question en évoquant un changement de doctrine sur les financements innovants. Rappelons que l’ambition initiale de cette taxe était de répondre à deux objectifs : une fiscalité internationale dédiée au service des biens publics mondiaux et une limitation de la spéculation financière outrancière. Aujourd’hui, ces deux objectifs sont loin d’être atteints.
En 2013, 10 % de cette taxe étaient reversés au budget de l’APD. En 2014, par un artifice dont Bercy a le secret, vous annoncez son relèvement à 15 % alors que les prévisions de recettes issues de cette taxe sont fortement réduites à la baisse.
Vous tablez à présent sur 700 millions d’euros contre 1,6 milliard initialement prévu.
Cependant, monsieur le ministre, nous reconnaissons vos efforts et votre détermination ; aussi, dans l’attente de la mise en oeuvre d’une loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement et de solidarité internationale convaincante, le groupe UMP s’abstiendra sur le vote de ce budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Nous en arrivons aux questions. Je vous rappelle que la durée des questions, comme des réponses, est fixée à deux minutes.
La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre, ma question concerne la feuille de route de l’aide publique au développement. Les circonstances budgétaires sont exigeantes pour tous les portefeuilles ministériels et l’aide au développement est concernée au même titre que d’autres. La France, pourtant, doit maintenir le cap, pour des raisons morales, et pour des raisons d’intérêt national bien compris.
Le mal-développement est en effet porteur de désordres que nous avons tous à l’esprit. La question est évidente mais sans doute plus difficile à mettre en musique : comment faire mieux avec des moyens stabilisés ? Nous sommes contraints à l’imagination – et je sais que vous n’en manquez pas – et à la bonne gestion. Nous devons exiger de nos partenaires un effort parallèle.
Monsieur le ministre, vous avez deux rendez-vous importants avec l’Afrique comme avec la représentation nationale et les ONG dans les prochaines semaines : le forum Afrique – 100 innovations pour un développement durable, le 5 décembre 2013 et, au premier semestre 2014, un projet de loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement et de solidarité internationale.
Comment ces deux initiatives intègrent-elles l’exigence d’une meilleure gestion des fonds alloués à l’aide publique au développement ? Avez-vous mis en place une méthode pour évaluer l’APD qui pourrait être intégrée dans la future loi d’orientation et de programmation ?
Je vous remercie pour votre question, monsieur le député. J’insisterai sur deux sujets, à commencer par la rénovation en cours de notre politique de développement et de solidarité internationale. C’est vrai, vous aurez l’occasion de débattre dans les toutes prochaines semaines, au début de l’année 2014, du premier projet de loi sur ce sujet de toute l’histoire de la République. Concrètement, cela signifie que nous passons d’une politique opaque, non débattue devant la représentation nationale, à une politique transparente qui vous permettra de décider des grandes orientations et des priorités. C’est un changement profond de notre politique qui aura des conséquences sur nos relations avec le reste du monde. Nous allons tourner vers l’avenir cette politique parfois marquée par l’héritage du passé.
S’agissant par ailleurs de la transparence, j’insisterai beaucoup sur cette exigence car elle est l’une des conditions de l’efficacité de notre action. Or, il m’importe justement que l’aide soit efficace pour les populations. C’est aussi une condition de la légitimité de notre aide car si nous devons cette transparence aux citoyens des pays, nous la devons également aux contribuables français. Pour la première fois, un site met depuis septembre cette transparence absolue en oeuvre, projet par projet, pour le Mali. Nous avons de surcroît pris l’engagement – et nous sommes en train d’y travailler – que ce principe soit appliqué dans les seize pays prioritaires pour notre aide. Nous avons réalisé en dix-huit mois des progrès substantiels jamais vus par le passé, ce dont nous pouvons nous réjouir et être fiers.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre, le quatrième rang mondial de la France pour l’APD ne doit pas faire illusion. Le budget d’aide au développement n’a été maintenu en 2013 que par abondement de 10 % du produit de la taxe sur les transactions financières. Et la France ne doit son deuxième rang pour le Fonds mondial pour le sida qu’à la taxe Chirac créée en 2006. C’est dire l’importance des financements innovants.
Avec la taxe Chirac, on soutient de manière durable une politique innovante qui fait honneur à la France et que la reconduction budgétaire ne permettrait pas.
Dans l’autre cas, ces financements ne sont qu’une béquille budgétaire trahissant les motivations qui rendent acceptable leur création aux yeux de l’opinion publique, motivations pourtant rappelées par le Président Hollande aux Nations unies en septembre 2012.
Je salue votre volonté d’affecter 30 millions de taxes sur les transactions financières sur trois ans à l’initiative I3S mais la France pourrait tellement faire mieux en affectant davantage pour la mise en place d’une couverture sociale universelle en Afrique subsaharienne, ce qui serait une manière efficace de répondre simultanément à plusieurs objectifs du millénaire et plus économe en APD pour l’avenir.
Monsieur le ministre, allez-vous améliorer l’efficacité des financements innovants en augmentant leur rendement et en garantissant leur affectation à des programmes eux-mêmes innovants ?
Vous actualisez le taux de la taxe sur les billets d’avion et vous confirmez son affectation à la lutte contre le Sida. Très bien ! Allez-vous renforcer le montant de la taxe sur les transactions financières et son affectation à des programmes tels que I’I3S ?
Généraliserez-vous les principes des lois Oudin Santini à l’ensemble des budgets déchets et transports des collectivités locales afin d’accroître les financements additionnels dédiés à la solidarité internationale ?
Les collectivités ont pris le relais de l’État dans les projets de proximité, mais s’alarment que l’État cantonne son aide à leur engagement en appui institutionnel et formation, au détriment de leurs capacités à porter des projets sur le terrain.
Encouragerez-vous fiscalement les pratiques de collecte solidaire comme les micro-dons par arrondis de salaire ou de factures ?
Accompagnerez-vous davantage le co-financement des associations de migrants, qui deviennent des acteurs majeurs de l’aide française au développement ? Permettez-moi pour conclure de prendre acte de votre volonté de transparence, comme vous le faites pour le Mali, dans l’utilisation des fonds de l’APD.
Merci pour votre question, monsieur le député. S’agissant tout d’abord des financements innovants, rappelons, puisque M. Mancel et M. Christ l’ont évoqué, que vous avez historiquement mis en place la taxe de solidarité sur les billets d’avion. Mais, pendant les dix années où la droite fut au pouvoir, elle ne l’a pas valorisée ! Que ne l’a-t-elle fait ? Nous, nous l’augmentons dès la deuxième année pour générer 23 millions de recettes supplémentaires.
Vous appelez par ailleurs à faire davantage pour le développement, nous reprochant de n’affecter que 10 % ou 15 %, mais lorsque vous avez vous-même, au cours du premier projet de loi de finances pour 2012, mis en place cette taxe avant les élections présidentielles, combien avez-vous affecté au développement ? Zéro !
Vous pouvez donc nous reprocher de ne pas consentir un effort suffisant en portant à 15 % la part de la taxe affectée à l’aide au développement, mais ne perdez pas pour autant la mémoire : cette part, en votre temps, était nulle.
Nous sommes donc aujourd’hui les seuls au monde – et c’est bien là le problème – à disposer d’une taxe sur les transactions financières et, désormais, à affecter 15 % de son produit au développement.
C’est dire tout l’enjeu du combat européen, qui doit se conclure dans les prochains mois, voire les prochaines semaines : instaurer une taxe européenne dont l’assiette soit assez large pour inclure notamment les produits dérivés, et qui permettra de lever des fonds en quantité importante. La position de la France, que le Président de la République a rappelée à maintes reprises, consiste à ce qu’une part significative du produit de la taxe européenne sur les transactions financières soit affectée à l’aide au développement. Voilà qui représente une perspective d’augmentation importante des crédits.
J’en profite pour répondre à ceux qui ne cessent d’insister sur la part bilatérale des dons. Il y a encore peu de temps, monsieur Mamère, vous apparteniez à un parti politique pro-européen ; n’oublions pas que les deux tiers de nos dons passent par l’Union européenne ! On ne saurait donc se contenter d’examiner le montant des dons bilatéraux pour mesurer l’aide de la France, car une part bien plus grande encore de nos dons emprunte d’autres voies, qu’il s’agisse de l’Union européenne, de la Banque mondiale ou encore du Fonds mondial, qui agit aussi en faveur du Mali. N’induisons pas l’opinion publique en erreur en utilisant le montant, certes faible, de l’aide bilatérale, car il ne reflète pas la réalité de ce que les contribuables français donnent aux Maliens ou aux autres peuples bénéficiaires de notre aide.
Je vous remercie, monsieur Tétart, d’avoir évoqué la transparence, un point sur lequel il me semble que nous pouvons tous nous retrouver. Je conclurai en vous répondant sur la question des collectivités locales : oui, le Gouvernement soutient l’extension de la taxe Oudin-Santini aux déchets. Nous étudions actuellement avec les parlementaires la manière dont nous pourrions intégrer cette mesure dans notre dispositif législatif.
J’appelle les crédits de la mission « Aide publique au développement », inscrits à l’état B.
Sur ces crédits, je suis saisi d’un amendement no 310 . La parole est à M. Noël Mamère pour le soutenir.
Il va de soi, monsieur le ministre, que nous croyons à l’Europe, mais nous pouvons aussi dénoncer un certain nombre de ses attitudes, sur la politique agricole commune, par exemple, comme je l’ai dit tout à l’heure à la tribune. En effet, la PAC subventionne des agricultures d’exportation qui concurrencent des agricultures vivrières dans les pays que nous devons aider, et nuisent à leur souveraineté alimentaire. En clair : oui au renforcement de l’Europe, mais oui aussi à une révision drastique de la PAC afin de préserver un meilleur équilibre entre les pays en voie de développement et nos pays largement subventionnés.
J’en viens à l’amendement no 310 , qui vise à redéployer 30 millions d’euros de l’action no 2 du programme 110 vers l’action no 2 du programme 209, afin de mettre en oeuvre la décision prise par le CICID en juillet 2013 de prioriser notre aide en faveur des seize pays les plus pauvres du monde, dont la plupart se trouvent dans la région sahélienne.
Aujourd’hui, la politique d’aide au développement passe davantage par des prêts que par des dons. Or, les dons, qui vont directement aux États, facilitent la gouvernance financière et contribuent à l’exercice des fonctions régaliennes ; de ce point de vue, il s’agit d’une aide plus directe. Transférer ces 30 millions d’euros d’un chapitre à un autre permettrait de rééquilibrer les parts respectives des prêts et des dons dans notre aide publique au développement. Tel est l’objet de cet amendement, que le Gouvernement devrait approuver.
La commission n’a pas examiné cet amendement, mais à titre personnel je n’y suis pas très favorable, et ce pour deux raisons. Tout d’abord, il serait gênant, s’agissant d’un budget déjà réduit, d’effectuer des transferts internes ; mieux vaudrait abonder ledit budget, comme je l’ai proposé.
D’autre part, monsieur Mamère, votre amendement affecterait les bonifications de prêts de l’AFD. S’il part d’un bon sentiment, il porterait in fine atteinte à une politique efficace et utile de l’AFD.
En effet, cet amendement aurait l’inconvénient de réduire notre capacité à proposer des prêts bonifiés aux pays qui en ont le plus grand besoin. Il repose sur une philosophie selon laquelle les dons seraient plus favorables au développement que les prêts ; ce n’est pas forcément le cas. De nombreux équipements et infrastructures nécessaires au développement économique et à la transition énergétique doivent être financés par des prêts. Pour développer les énergies renouvelables, par exemple, ce sont des prêts que nous proposons à l’Éthiopie, à la Tanzanie, au Kenya et à bien d’autres pays encore, tout simplement parce que cette énergie est vendue et qu’elle rapporte des fonds susceptibles de contribuer au remboursement du prêt. En l’occurrence, le prêt, qu’il n’y a pas lieu d’opposer au don, est l’instrument le plus pertinent. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable à cet amendement.
Il ne s’agit ni d’opposer le don au prêt, ni d’accorder la primauté au premier sur le second, comme cela se fait au Royaume-Uni. En tant que membre du conseil d’administration de l’AFD, je sais bien que les prêts peuvent contribuer à la mise en oeuvre de politiques visant à renforcer l’efficacité énergétique et à développer les énergies renouvelables. Cela étant, je sais aussi que nous nous apprêtions par exemple à accorder un prêt pour l’extension de l’aéroport d’Addis-Abeba, en Éthiopie, extension qui concernait un hangar devant accueillir le produit d’une culture que les écologistes et toute personne attachée au développement durable doivent combattre : les fleurs coupées, fortes consommatrices de pesticides et produites dans un environnement de travail où les conditions sociales sont lamentables. Nous devons donc être particulièrement vigilants sur notre politique d’aide au développement.
C’est ainsi que l’amendement que je présente au nom du groupe écologiste va dans le sens non pas de l’abandon des prêts, mais d’un meilleur équilibre entre les dons et les prêts. Nous savons en effet que les dons doivent, conformément aux objectifs du millénaire pour le développement, être accordés aux pays les plus vulnérables.
L’amendement no 310 n’est pas adopté.
Les crédits de la mission « Aide publique au développement » sont adoptés.
Les crédits qui entraînent l’impact opérationnel le plus important sur une grande cause sont ceux qui ont une origine et une affectation spécifiques, comme l’a montré la taxe sur les billets d’avion. À cet égard, je prends note de l’amendement que présentera le Gouvernement afin d’augmenter cette taxe par actualisation.
On ne saurait donc continuer à n’utiliser le produit de la taxe sur les transactions financières que pour abonder le budget général : ce serait une tromperie eu égard au mobile initial de cette taxe. Pour être certain de rompre avec l’effort que M. le ministre a indiqué tout à l’heure, qui ne correspond pas à la motivation ayant inspiré la création de cette taxe, il est donc proposé d’en augmenter le taux, mais aussi la part qui est affectée à l’aide au développement. Selon nous, le produit de cette taxe ne doit en effet pas être versé au budget général, mais doit faire l’objet d’une affectation spécifique – ce qui permettrait de vérifier les résultats concrets de votre désir d’évaluation et de transparence, monsieur le ministre, et d’éviter toute fongibilité.
Ces deux amendements visent donc à augmenter et le taux de la taxe, et la part qui en est affectée à des opérations spécifiques, comme la couverture sociale universelle, par exemple. L’amendement no 349 apporte justement une précision d’ordre juridique permettant une affectation spéciale à la CSU. Grâce à ces deux amendements, nous espérons lever la contradiction qui caractérise actuellement l’utilisation du produit de la taxe sur les transactions financières.
La commission n’a pas examiné ces amendements. Je remarque qu’ils partent d’un très bon sentiment, mais qu’ils mélangent deux mesures différentes, ce qui pose problème. Autant je serais personnellement favorable à ce qu’une part plus importante de la taxe sur les transactions financières soit affectée à l’aide publique au développement, autant je suis plus réservé quant au doublement du taux de la taxe. Le débat sur la taxe européenne a déjà provoqué une levée de boucliers ; dans ces conditions, je ne crois pas opportun – et je ne pense pas non plus que ce soit l’intention du Gouvernement – de doubler une nouvelle fois le taux de la taxe dès cette année.
Je vous remercie, monsieur Tétart, pour les efforts politiques que vous déployez afin que la part du produit de la taxe sur les transactions financières qui est affectée à l’aide publique au développement augmente, car nous avons besoin de toutes les énergies pour progresser en ce sens. J’espère que l’ensemble de votre groupe soutient cette démarche.
Je le répète : lorsque la droite était aux responsabilités, cette part était nulle ; nous l’avons porté à 10 %, puis désormais à 15 %, et j’espère naturellement que nous pourrons à l’avenir continuer à l’augmenter. D’autre part, à notre arrivée aux responsabilités, nous avons déjà doublé le taux de la taxe tel qu’il avait été fixé par l’ancienne majorité. Sur les deux questions, nous avons donc déjà fait une part importante du travail, même si je souhaite, comme vous, que nous puissions encore aller au-delà. Pour ce faire, il faut avant tout gagner la bataille au niveau européen. Je vous propose donc de retirer vos amendements, faute de quoi je devrais y émettre un avis défavorable.
Je vais retirer ces amendements, car je crois que nous pourrons travailler davantage sur cette question dans les mois qui viennent, et que le Gouvernement pourra, par un effort de clarification budgétaire, tenter d’affecter une plus grande part du produit déjà existant aux programmes spécifiques, comme le recommandait M. Mancel. M. le ministre me félicite pour mes efforts en ce sens ; je pense qu’il déploiera rapidement des efforts analogues, par exemple dans le cadre de la loi de programmation.
Cet amendement avait déjà été présenté à tort en première partie du PLF. Il vise à augmenter de 12,7 % le taux de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, de façon à générer une recette supplémentaire de 23 millions d’euros en 2014.
La parole est M. Noël Mamère, pour soutenir le sous-amendement no 194 .
Ce sous-amendement vise à améliorer l’augmentation de la taxe sur les billets d’avion que vient de proposer le Gouvernement en imposant un niveau de taxation plus élevé en classe « affaires » qu’en classe « économique ». Selon nous, en effet, les passagers qui sont en mesure d’acheter des billets en classe « affaires » doivent consentir un effort supplémentaire. Je rappelle que la taxe sur les billets d’avion a rapporté plus d’un milliard d’euros, une recette qui peut contribuer à lutter contre de grandes pandémies comme le VIH, qui touche de nombreux pays africains.
La commission n’a pas examiné le sous-amendement. En revanche, elle a adopté l’amendement du Gouvernement. En ce qui me concerne, je m’étais abstenu, pour symboliser ce que j’ai déjà dit dans mon intervention.
Tout à l’heure, le ministre a dit à M. Tetart : « Nous, nous avons augmenté pour la première fois la taxe sur les billets d’avion, alors que vous, vous l’avez créée et vous n’y avez pas touché pendant des années ».
Mais si vous y avez touché, monsieur le ministre, vous l’avez dit tout à l’heure à cette tribune, c’est parce que la baisse des crédits vous oblige à aller chercher des taxes de substitution dans les financements innovants. Voilà pourquoi, en réalité, vous augmentez cette taxe !
C’est la raison pour laquelle je me suis abstenu. Je voulais montrer que les financements innovants ne sont plus, comme l’a dit tout à l’heure Hervé Gaymard à cette tribune, des financements additionnels. Ils sont devenus des financements de substitution à la baisse des crédits budgétaires.
Monsieur Mamère, je partage votre souhait de différencier les billets de classe économique de ceux de classe affaires. D’ailleurs, c’est déjà le cas puisqu’un billet de classe affaires contribue dix fois plus à la taxe de solidarité qu’un billet de classe économique.
Cette répartition est le fruit d’un équilibre et le Gouvernement ne souhaite pas, sous la forme d’un amendement, modifier cet équilibre. Par conséquent, si vous ne le retirez pas, il sera contraint d’en demander le rejet.
Compte tenu des explications de M. le ministre, nous retirons notre sous-amendement.
Le sous-amendement no 194 est retiré.
Je voterai très volontiers cette actualisation de 12,7 %. Cela étant, je veux être certain que la taxe sur les billets d’avion n’a pas été pervertie et que son produit reste affecté à un programme spécifique. Je voudrais être rassuré sur le fait que le produit additionnel restera bien affecté à ce programme spécifique et n’ira pas rejoindre le budget général de l’aide au développement.
Je peux vous le garantir, monsieur le député, et vous dire que la totalité du produit supplémentaire de cette taxe sera affectée à la lutte contre les grandes pandémies au travers du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
L’amendement no 103 , deuxième rectification, est adopté.
J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Prêts à des États étrangers », inscrits à l’état D.
Les crédits du compte d’affectation spéciale « Prêts à des États étrangers » sont adoptés.
Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à l’aide publique au développement et du compte spécial relatif aux prêts à des États étrangers.
Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :
Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2014 ;
Crédits relatifs à l’outre-mer.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron