Intervention de Pascal Canfin

Séance en hémicycle du 6 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Sport jeunesse et vie associative

Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voulais présenter ce soir le budget de l’aide publique au développement devant vous avec le logo endeuillé de Radio France International que vous connaissez tous. En effet, la cérémonie rendant hommage, au nom de la République française, aux journalistes assassinés samedi dernier a eu lieu aujourd’hui. Je tenais à mon tour à leur rendre hommage avant de présenter ce budget, qui couvre précisément les sujets qui les préoccupaient en tant que reporters de RFI.

La mission budgétaire de l’aide publique au développement évolue, comme toutes les autres, dans un contexte budgétaire que chacun sait contraint. Néanmoins, grâce à la mobilisation des financements innovants, nous avons préservé notre capacité d’engagement de crédits au service du développement des pays les plus pauvres.

Cette année, la baisse des crédits de la mission sera limitée à 100 millions d’euros. Elle est donc contenue. D’ailleurs, la part du budget de l’État consacrée à l’aide publique au développement, mesurée par l’indicateur transmis à l’OCDE et qui dépasse les seuls crédits de cette mission budgétaire, connaît une augmentation, puisqu’elle passe de 0,45 % en 2013 à 0,47 % du PIB en 2014. Si l’évolution est donc légèrement à la baisse s’agissant strictement des crédits de la mission, elle est légèrement à la hausse si l’on considère l’ensemble des dépenses que la France consacre au développement. Nous pouvons donc affirmer au minimum que nous préservons notre capacité d’engagement, ce qui constitue un choix politique volontariste dans le contexte budgétaire actuel.

Si nous faisons ce choix, c’est parce que c’est à la fois conforme à nos valeurs et dans notre intérêt. Je ne prendrai qu’un exemple : le Mali. Notre stratégie dans ce pays repose sur trois piliers : assurer la sécurité, accompagner la démocratie et la réconciliation politique, promouvoir le développement économique. On le sait : le développement ne peut se faire sans la sécurité, c’est une évidence, mais à l’inverse, la sécurité ne peut être assurée dans la durée que si elle peut s’appuyer sur le développement, en particulier le développement économique. C’est pourquoi, en consacrant des crédits à la solidarité internationale nous agissons conformément aux valeurs de la République, tout en défendant notre intérêt, car cela permet une plus grande stabilité du monde dans lequel nous évoluons.

La préservation des crédits dans un contexte contraint est possible grâce à la mobilisation des financements innovants : la taxe de solidarité sur les billets d’avion est rehaussée pour la première fois depuis sa création en 2006, et les produits de la taxe française sur les transactions financières seront affectés à hauteur non plus de 10 % mais de 15 % à la solidarité internationale. Cela peut paraître insuffisant, mais nous sommes aujourd’hui le seul pays au monde à affecter un pourcentage des produits de cette taxe au développement et à la solidarité internationale.

Dans ce contexte budgétaire, nous avons fait des choix qualitatifs, car un budget résume en effet une politique. Quelles sont nos priorités ?

Nous avons tout d’abord souhaité préserver l’aide projet, qui constitue le coeur des dons effectués dans le cadre de la solidarité internationale vers les pays qui en ont le plus besoin. Pour la deuxième année consécutive, les crédits qui y sont alloués sont ainsi intégralement reconduits, à l’euro près.

Nous avons, comme l’année dernière, augmenté le montant de l’aide qui passe par les ONG. Nous avions en effet un certain retard en la matière. Cette augmentation se poursuivra chaque année afin d’atteindre le doublement à la fin du quinquennat. C’était un engagement du Président de la République et il est tenu.

Nous avons fait le choix, un choix extrêmement fort et ambitieux, de maintenir à l’euro près la contribution de la France au Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, car celui-ci est le meilleur outil au monde pour lutter contre ces trois pandémies. Il est d’ailleurs reconnu comme tel à la fois par les ONG et par la communauté scientifique. Nous sommes du reste la première génération de responsables politiques qui peut mettre fin au sida, à la tuberculose et au paludisme. L’engagement de la France à verser plus d’un milliard d’euros en faveur du Fonds ces trois prochaines années a donc été maintenu.

Nous avons également reconduit, à l’euro près, les montants versés au Fonds africain de développement, détenu par la Banque africaine de développement. Nous avons en effet fait le choix de concentrer notre aide sur les pays qui en ont le plus besoin. Nous avons réussi à obtenir de cette institution multilatérale qu’est la Banque africaine de développement que 25 % de ces crédits soient dorénavant affectés aux pays en crise ; le Mali, la République Centrafricaine et d’autres. Ces pays concentrent en effet les difficultés et doivent être ciblés de manière prioritaire afin d’atteindre les objectifs du millénaire en matière de santé et d’éducation.

Cet engagement montre la capacité de la France à faire levier et à obtenir via les canaux multilatéraux des moyens que nous ne pourrions pas mobiliser seuls. Ces résultats nous confortent ainsi dans la stratégie que j’ai déjà évoquée à de nombreuses reprises devant vous et qui consiste à articuler au mieux les actions bilatérales et multilatérales.

J’évoquerai rapidement plusieurs autres priorités. L’aide alimentaire internationale sera elle aussi préservée, car il est impensable de couper les vivres à ceux qui en ont le plus besoin, l’enjeu étant ici celui de la survie immédiate.

Les montants alloués dans le cadre de la coopération décentralisée, qui permettent à l’État d’accompagner l’action des collectivités locales françaises dans ce domaine, sont également maintenus. Cela rejoint une priorité du Quai d’Orsay : démultiplier la diplomatie française pour que l’influence de la France soit diffusée non pas uniquement par l’État mais par l’ensemble des acteurs publics.

J’ai donc montré comment plusieurs enjeux prioritaires se traduisent sur le plan budgétaire et en termes qualitatifs. À cet égard, je vous renvoie à plusieurs décisions qui ont été prises au Comité interministériel de la coopération internationale et du développement, le CICID, lequel s’est réuni pour la première fois depuis cinq ans en juillet. Il a notamment acté le fait que 85 % de nos engagements financiers seraient destinés à l’Afrique ; nous allons en particulier concentrer notre aide dans les seize pays africains considérés comme prioritaires et qui en ont le plus besoin.

Tous ces engagements traduisent des valeurs et des intérêts qui peuvent faire consensus dans cette assemblée.

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