Intervention de Jean-Louis Christ

Séance en hémicycle du 6 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Sport jeunesse et vie associative

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Christ :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans le projet de loi de finances pour 2014, la mission d’aide publique au développement accuse une baisse de 178 millions d’euros. L’examen de ce budget doit nous rappeler qu’un quart de la population mondiale doit compter aujourd’hui encore sur la solidarité internationale.

À travers ce budget, les engagements internationaux de la France ne sont pas respectés, et nous nous éloignons de plus en plus de l’objectif de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l’APD d’ici à 2015. La tendance malheureusement se confirme en 2013 et 2014 car, hors allégement de la dette, la France ne consacre plus que 0,4 % du revenu national brut à l’aide publique au développement.

On peut donc légitiment s’interroger sur le rôle international que la France entend tenir, car il est clair que son influence dépend du respect de ses engagements en matière d’aide au développement et de lutte contre l’extrême pauvreté. C’est aussi une question de crédibilité et de volonté. Ainsi l’Angleterre, comme l’a évoqué André Chassaigne, bien que fortement touchée par la crise financière actuelle, a décidé d’atteindre l’objectif de 0,7 %. N’est-ce pas la preuve qu’une politique de développement ambitieuse est une question de volonté politique ?

Monsieur le ministre, en coupant ainsi dans l’APD, non seulement on ne redressera pas nos finances publiques, car la mission APD ne correspond qu’à seulement 1 % du budget total de la France en 2014, mais ce choix aura des conséquences irréversibles sur les populations les plus vulnérables.

Le Parlement, la Cour des comptes, le CAD et l’OCDE ont souvent évoqué la complexité du système institutionnel d’ensemble de la coopération qui implique une dizaine d’autres ministères et des instances de pilotage peu fonctionnelles, ainsi qu’un budget à la structure éclatée qui rend difficile l’appréhension de l’ensemble des moyens engagés.

Ces questions ont été à l’ordre du jour du dernier CICID en juillet dernier et nous avons hâte de connaître les nouvelles mesures prises pour améliorer la lisibilité de l’APD.

Aujourd’hui, 70 % de l’APD mondiale est déclarée sous le standard de l’Initiative internationale sur la transparence de l’aide dont le but est d’améliorer la transparence de l’aide pour assurer une meilleure compréhension et un contrôle effectif tant de la part des

parlementaires que des citoyens. L’accessibilité de ces données permet d’améliorer la connaissance des actions des bailleurs, la gouvernance et la lutte contre la corruption. Il conviendrait que la France mette rapidement en oeuvre cette norme commune sur l’ensemble de son budget. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez déjà engagé ce dispositif pour le Mali et je vous en remercie.

Le Président de la République s’est engagé à doubler l’APD qui transite par les ONG, sans toutefois en décrire les modalités. Rappelons que la France reste dernière des États membres du CAD en part d’APD transitant par les ONG – 1 % – alors que la moyenne OCDE s’élève à 13 %. Là aussi, il conviendrait d’accélérer la progression des crédits affectés pour mieux soutenir les initiatives des ONG françaises.

Dans ce budget, la taxe sur les transactions financières est à nouveau – je m’exprimerai avec beaucoup de délicatesse – détournée, voire dévoyée, de son objet. Hervé Gaymard a d’ailleurs abordé cette question en évoquant un changement de doctrine sur les financements innovants. Rappelons que l’ambition initiale de cette taxe était de répondre à deux objectifs : une fiscalité internationale dédiée au service des biens publics mondiaux et une limitation de la spéculation financière outrancière. Aujourd’hui, ces deux objectifs sont loin d’être atteints.

En 2013, 10 % de cette taxe étaient reversés au budget de l’APD. En 2014, par un artifice dont Bercy a le secret, vous annoncez son relèvement à 15 % alors que les prévisions de recettes issues de cette taxe sont fortement réduites à la baisse.

Vous tablez à présent sur 700 millions d’euros contre 1,6 milliard initialement prévu.

Cependant, monsieur le ministre, nous reconnaissons vos efforts et votre détermination ; aussi, dans l’attente de la mise en oeuvre d’une loi d’orientation et de programmation sur la politique de développement et de solidarité internationale convaincante, le groupe UMP s’abstiendra sur le vote de ce budget.

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