Intervention de Jean-Philippe Nilor

Séance en hémicycle du 6 novembre 2013 à 22h00
Loi de finances pour 2014 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Philippe Nilor :

Pour ces motifs, le groupe GDR votera en faveur de ce budget, mais entendez bien, monsieur le ministre, qu’il s’agit là d’un vote de raison, et non d’un vote de pleine satisfaction. Car la lutte est loin d’être terminée, en tout cas pour la Martinique. Si je me réjouis de l’augmentation des sommes allouées à la Guadeloupe et à la Guyane – en hausse, respectivement, de 1 % et de 3,4 %, ce qui est pleinement justifié –, je déplore fermement la baisse notoire des crédits alloués à la Martinique, qui baissent de 2 %.

Les chiffres sont particulièrement éloquents. Le programme 138, « Emploi outre-mer », connaît une diminution de près de 2 %, soit environ 5,3 millions d’euros perdus pour les Martiniquais, sur un territoire où le taux de chômage dépasse 21 %, et plus de 47 % chez les jeunes. Les crédits du programme 123, « Conditions de vie outre-mer », se voient diminués d’environ 3 %, soit une nouvelle perte de près de 1,8 million d’euros, qui seraient pourtant si nécessaires au développement économique et social de la Martinique. Monsieur le ministre, pour 2014, sur l’ensemble des missions, l’effort budgétaire et financier de l’État en faveur de la Martinique diminue d’environ 15 millions d’euros. Voilà notre réalité !

Comment se satisfaire de telles coupes sombres, à l’heure où les difficultés économiques, sociales et sociétales s’aggravent si durement sur le terrain ? Comment se satisfaire du recentrage des exonérations de cotisations sociales patronales en direction des bas salaires, quand nos entreprises sont en déficit d’encadrement et que nos jeunes diplômés quittent le territoire ? L’effet d’aubaine les condamne alors à être sous-payés, et ce n’est pas là leur vocation !

Certes, la ligne budgétaire unique augmente de 8 % pour atteindre 244 millions d’euros et prévoit des crédits pour lutter contre l’habitat insalubre et l’habitat indigne au bénéfice des populations les plus précaires, notamment les personnes âgées. Mais dans nos pays, où tout est plus cher, les retraites sont indignes, indécentes. La situation est particulièrement critique pour les pensions des marins pêcheurs et des agriculteurs. Or ce gouvernement vient de rejeter d’un revers de main toute perspective d’amélioration de la situation de ces derniers. Nos aînés sont encore davantage mis au ban et exclus pour ce qui concerne les aides à l’amélioration de l’habitat : faute d’avaliseur et de garantie bancaire, ils se retrouvent dans l’incapacité d’amener l’apport personnel exigé. En fait, les montages financiers pour accéder à ces aides sont si longs, si complexes et si inadaptés que les bénéficiaires potentiels ne deviennent quasiment jamais des bénéficiaires réels.

Monsieur le ministre, comment se satisfaire de la baisse des crédits affectés à l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, LADOM ? N’avons-nous pas raté l’occasion salutaire de donner un véritable coup de pouce à cette structure, qui joue un rôle majeur, pérenne, notamment auprès des jeunes demandeurs de formation en mobilité ? Veillons plutôt à consolider cette structure en lui permettant de stabiliser ses effectifs, en les sortant de la précarité ! Comment, en effet, demander à ces personnels d’insérer, quand ils souffrent eux-mêmes de précarité ?

Les conditions d’exercice de la mission de LADOM ne sont pas réunies pour satisfaire aux besoins de nos jeunes, et ce n’est pas l’augmentation de 8 % du budget du SMA, certes très appréciable, qui va compenser le déficit en termes d’employabilité, de formation et d’insertion professionnelle de notre jeunesse et constituer une alternative à la marginalisation. Cette jeunesse avait été présentée comme une priorité par le Président François Hollande, mais en Martinique, c’est un véritable sacrifice qui est fait de cette dernière.

Paroxysme de l’incohérence de l’action gouvernementale – même si je sais que cela ne relève pas de cette mission –, le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » passe – tenez-vous bien ! – de 2,3 millions d’euros en 2013 à 363 000 euros en 2014 pour la Martinique, soit une baisse de 84 % des crédits ! On est passé du dérisoire à l’ultra-dérisoire !

Monsieur le ministre, vous qui parlez à juste titre de combat, vous n’ignorez pas que les politiques de promotion du sport, de la jeunesse et de la vie associative sont des armes de destruction massive contre la délinquance et l’oisiveté ! Se priver délibérément de ce potentiel équivaut à s’avouer vaincu d’avance, à déposer les armes face à ces fléaux, bref à condamner notre jeunesse.

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