Intervention de Véronique Louwagie

Séance en hémicycle du 7 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie :

À l’occasion de l’examen des crédits de la présente mission en commission élargie, la semaine passée, j’ai utilisé la métaphore du tunnel pour illustrer la situation de l’emploi de notre pays.

À mon grand regret, et alors que cette semaine est marquée par une avalanche de plans sociaux, j’avoue être plus que sceptique sur l’inversion de la courbe du chômage d’ici la fin de l’année, dans 54 jours seulement.

Le rapport annuel du Secours catholique, publié aujourd’hui même, fait état d’une nette progression du chômage non indemnisé, l’allongement de la durée du chômage allant de pair avec une augmentation des chômeurs en fin de droits.

Je souhaiterais développer trois points qui me paraissent justifier un rejet de ce budget. Ces motifs sont valables, quoi qu’en dise M. Liebgott. L’emploi est un grand malade, mais vous allez l’amputer de dispositifs ayant fait leurs preuves. Vous voulez traiter le malade, pas la maladie. J’y reviendrai.

Le premier point concerne l’amputation du dispositif de l’apprentissage. La relégation au second plan de l’apprentissage est regrettable. Non seulement la suppression des indemnités compensatrices forfaitaires compensée par une nouvelle aide ciblée sur les très petites entreprises pose de nombreuses questions, mais elle s’accompagne également d’une considérable restriction de l’accès au crédit d’impôt.

Outre des modalités de compensation aléatoires, la lecture des projets annuels de performances et les différents amendements adoptés nous montrent que les chiffres qui nous sont donnés sont soit dépassés, soit peu clairs, ce qui pose la question de la lisibilité.

En effet, le Gouvernement a déclaré que la réforme, c’est-à-dire la nouvelle prime à l’apprentissage et le dispositif transitoire de compensation, serait financée à hauteur de 264 millions par redéploiement des crédits de la mission « Travail et emploi ». Pouvez-vous nous dire précisément, monsieur le ministre, sur quels dispositifs ces crédits vont être prélevés ?

Se pose aussi la question de la taille des entreprises concernées par la nouvelle prime à l’apprentissage. Nous avons demandé en commission élargie des éclaircissements sur ce seuil des entreprises de moins de 11 salariés, qui est un seuil inédit. Il semble peu clair dans l’esprit du Gouvernement, puisque l’exposé des motifs de l’article 77 retient le seuil de 10 salariés quand le texte, lui, évoque 11 salariés. L’impact de cette disposition sur les PME employant plus de 11 salariés risque d’être défavorable, alors qu’il est communément admis que les entreprises de 11 à 20 salariés sont les principaux viviers en matière d’apprentissage.

Alors que les entreprises constituent le moteur de la création d’emplois, il convient de regretter qu’aucune incitation ne soit prévue dans ce PLF pour les y encourager. Du reste, elles seules peuvent contribuer à donner une image positive de l’apprentissage. L’épineuse question des charges, qui ne les incitent aucunement à embaucher, devrait également être posée. Dès lors, il apparaît que la volonté du Président de la République de porter à 500 000 le nombre d’apprentis d’ici 2017 semble difficilement tenable.

Le deuxième point concerne l’amputation des moyens des maisons de l’emploi, cela a déjà été évoqué. Le renforcement des effectifs de Pôle emploi ne se justifie que par l’anticipation de mauvais chiffres et de la prochaine gestion administrative du nombre de demandeurs d’emploi. Toutefois, vous faites preuve d’un certain esprit de contradiction car vous amputez le budget des maisons de l’emploi de 50 %, dont les crédits sont ramenés à 40 millions contre 63 millions en 2013.

Ce dispositif, créé en 2005, a fait la preuve de son efficacité dans nombre de territoires, notamment en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Nous avons pris bonne note de vos réponses en commission élargie, monsieur le ministre, sur une affectation ciblée d’une partie des crédits de la GPEC, la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, vers les maisons de l’emploi efficaces. Nous serons vigilants sur ce critère.

Le troisième point concerne cette politique de l’emploi qui accompagne plutôt qu’elle n’anticipe. Le reproche majeur qui peut vous être fait est de succéder aux événements au lieu de les anticiper, ou plutôt de panser les plaies du malade avec des pansements provisoires.

Finalement, force est de constater que le seul levier à votre disposition reste celui des contrats aidés dans le secteur non marchand. Or, le coût de ces dispositifs reste élevé : 7 milliards d’euros en 2014, dont 2,5 milliards pour le financement des contrats aidés.

En matière de chômage, les chiffres de septembre sont mauvais. Avec une hausse de 1,9 %, le nombre de demandeurs d’emploi s’élève à 5 473 000. Les jeunes de moins de 25 ans sont les premières victimes de cette dégradation du marché du travail…

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