La preuve en est apportée par la dernière enquête de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, fruit d’une comparaison entre deux périodes triennales – 2007-2009 et 2010-2012 –, qui dresse trois constats principaux : une forte augmentation du nombre de personnes déclarant se sentir en insécurité à leur domicile, un basculement de ce sentiment des classes populaires vers les classes moyennes et une augmentation du nombre de cambriolages déclarés, passé de 150 000 par an à plus de 200 000. C’est pourquoi il est aujourd’hui de notre devoir d’offrir les ressources humaines nécessaires et les moyens de fonctionnement adaptés, afin de lutter contre la délinquance sur l’ensemble du territoire. De fait, dans un contexte de forte contrainte budgétaire, le budget la mission « Sécurité » pour 2014 connaît, hors personnels, une légère hausse de 0,6 %.
Monsieur le ministre, lors de votre audition en commission élargie, vous avez annoncé la décision du Premier ministre d’opérer un dégel de 111 millions d’euros pour faire face aux difficultés croissantes que connaissent la police et la gendarmerie nationales, concernant notamment les véhicules et le renouvellement informatique. Cette décision constitue une nouveauté : pour la première fois depuis 2007, il faut le rappeler, les crédits exécutés par la police et la gendarmerie nationales seront en augmentation par rapport à l’année précédente : cette hausse de 2 % correspond à un montant de 40 millions d’euros. Ce dégel permettra d’assurer le renouvellement du parc automobile, qui ne doit plus être une variable d’ajustement dans la gestion budgétaire du ministère de l’intérieur.
Pendant dix ans, l’ancienne majorité, en développant les partenariats public-privé, a plombé le budget du ministère dans le domaine de l’immobilier, car les loyers connaissent bien évidemment une évolution exponentielle. Fort heureusement, nous avons abandonné cette politique, ce qui n’empêche pas de dresser le constat de l’impossibilité d’assurer, dans des conditions acceptables, l’exercice des fonctions et les conditions de logement de nos forces de l’ordre. Le parc domanial, notamment celui de la gendarmerie, est en souffrance. Les besoins sont énormes : pour la gendarmerie, il faudrait 2 milliards d’euros, sur les dix ans qui viennent, pour les constructions et plus de 100 millions d’euros par an pour le gros entretien. Pour la police nationale, les besoins dépassent 600 millions d’euros, dont près de 320 millions pour les constructions neuves. J’ai voulu, dans mon rapport, porter une attention particulière à cette question majeure.
Certes, le dégel de 10 millions d’euros pour répondre aux besoins immobiliers les plus pressants de la gendarmerie nationale, en particulier pour assurer le logement des familles, est le bienvenu. Mais il est clair qu’en la matière, les crédits budgétaires restent et resteront insuffisants. C’est pourquoi – je l’ai dit en commission élargie – je souhaite la mise en place d’une mission d’expertise sur la faisabilité d’une décentralisation de l’immobilier, même si j’en connais les difficultés de conception. Je crois qu’il faut innover dans la recherche de véritables solutions pour régler ces problèmes immobiliers structurels, qui sont source de difficultés inacceptables, tant pour les forces de l’ordre que pour l’accueil de nos concitoyens dans les commissariats et les gendarmeries.
La mutualisation des garages et des laboratoires reste une solution qui facilitera le travail de la police technique et scientifique. Je pense que nous allons progresser sur ces questions.
S’agissant des mesures propres aux personnels, vous avez indiqué que 2014 serait une année de nette amélioration catégorielle pour les policiers et les gendarmes. En revanche, vous le savez, je persiste à regretter – comme vous, je pense, monsieur le ministre – la diminution de l’indemnité de sujétions spéciales de police, dont le coût s’élèvera à seulement 12 millions d’euros.
Voyez, chers collègues de l’opposition, les efforts que nous déployons pour réparer ce que vous avez mis à mal… Et permettez-moi de vous dire que la tâche est forcément rude ! Qui plus est, la politique du chiffre que vous aviez menée a par ailleurs affaibli la relation de confiance entre les forces de l’ordre et la population. C’est pour y remédier, monsieur le ministre, que vous souhaitez réinstaurer un travail de proximité, grâce au dispositif des zones de sécurité prioritaire. Nous en voyons les premiers résultats ; les chiffres figurent dans le rapport. En relançant la coproduction de sécurité, les zones de sécurité prioritaire doivent également permettre de relancer les politiques publiques de prévention de la délinquance. Par ailleurs, la commission des lois a créé une mission d’information, dont j’ai l’honneur d’être président et rapporteur, qui devra analyser, évaluer et formuler des propositions pour lutter contre l’insécurité sur tout le territoire.
En conclusion, nous voilà en présence d’un budget prioritaire, dans un contexte budgétaire difficile : parce qu’elle est la priorité des Français, la sécurité reste bien la priorité du Gouvernement. C’est pourquoi, monsieur le ministre, la commission des lois apporte son soutien à votre projet de budget pour 2014. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)