Intervention de Laurent Grandguillaume

Séance en hémicycle du 8 novembre 2013 à 9h30
Loi de finances pour 2014 — Sécurités

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Grandguillaume, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

Une des mesures fortes de la stratégie visant à maîtriser les dépenses d’asile sans sacrifier ce devoir humanitaire consiste à créer de nouvelles places en centres d’accueil de demandeurs d’asile. La loi de finances pour 2013 prévoyait déjà d’en créer 1 000 en cours d’exercice ; ce sont finalement 2 000 places qui seront ouvertes d’ici la fin de l’année, et 2 000 places supplémentaires en 2014 – à raison de 1 000 en avril et de 1 000 autres en décembre – pour atteindre un total de 25 410 places en CADA.

Le deuxième levier de la stratégie de maîtrise des dépenses d’asile consiste en un nouveau renforcement des capacités d’instruction de l’OFPRA afin d’amplifier la réduction des délais de traitement des demandes d’asile, laquelle est un objectif que le Gouvernement a choisi de poursuivre au regard des conséquences humaines pour les demandeurs d’asile d’une part et, de l’autre, pour des raisons budgétaires. De ce point de vue, la prochaine réforme de l’asile sera essentielle pour réduire ces délais et rendre plus humaine la politique menée à l’égard des demandeurs d’asile.

En tout état de cause, au-delà des variables exogènes que représentent les futurs besoins de prise en charge, plusieurs réformes à venir pourraient avoir un impact sur les dépenses de l’asile : la réorganisation de la gestion de l’ATA, qui est un sujet important, et la transposition de la directive européenne « Procédures » à compter de 2015. Enfin, à la suite des travaux du député Matthias Fekl sur la création de nouveaux titres de séjour pluriannuels, le Gouvernement devrait présenter un nouveau projet de loi sur l’immigration, qui contiendrait des dispositions sur les autorisations délivrées aux demandeurs d’asile au cours du traitement de leurs démarches.

L’amélioration de l’accueil en préfecture fait également partie des orientations prioritaires du ministre. Une mission d’appui a été créée auprès de l’administration centrale et des plans d’action ont été réalisés par chaque préfecture. Une amélioration est perceptible au titre de l’année 2013, mais ne pourra être consolidée qu’avec la mise en oeuvre du titre de séjour pluriannuel.

Concernant la lutte contre l’immigration irrégulière, qui constitue l’un des piliers de la politique française de l’immigration, les crédits de la mission diminuent de 5,9 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2013. Cela traduit surtout une révision du réseau de centres de rétention administrative visant à réduire la voilure dans les territoires où les besoins sont moindres, dans un souci d’optimisation des dépenses et de saine gestion des deniers publics. Le ministère a tiré les enseignements de la sous-occupation des CRA : si certains sont certes sous tension, la moyenne nationale s’établit néanmoins à 46 % au premier semestre 2013 et excède rarement 40 % en dehors de Paris. La direction générale des étrangers en France escompte en 2013 une économie liée aux CRA de 3,5 à 4 millions d’euros.

Enfin, le Gouvernement a lancé une réflexion sur les politiques d’intégration françaises. Le projet annuel de performances pour 2014 affiche l’ambition suivante : « 2014 verra la refondation de la politique d’intégration ». Le rapport du conseiller d’État Thierry Tuot sur ce sujet en a constitué la première étape, et les groupes de travail mis en place par le Premier ministre devraient rendre leurs conclusions à la fin de l’année. Ces réformes en cours auront donc un impact budgétaire non négligeable et traduisent la politique de la majorité visant à un équilibre entre fermeté, rationalisation des dépenses publiques et humanité.

Pour conclure, je voudrais élargir mon propos aux tensions qui traversent notre société. Deux forces s’affrontent aujourd’hui : la haine et les peurs d’un côté, l’espoir de l’autre. Cependant, la force des préjugés vis-à-vis de l’étranger ne se combat pas que par l’affirmation de valeurs ou par de simples déclarations. Il faut lutter contre cette loi du mensonge triomphant qui passe et qui se diffuse désormais par le numérique, par les réseaux sociaux ou par des courriels de propagande. Aujourd’hui, en effet, la haine a un miroir avec Internet.

Ainsi, un citoyen m’a interpellé la semaine dernière en me renvoyant un courriel apparemment diffusé par la chef de bureau d’une administration, qui appelait à la diffusion de mensonges concernant les immigrés et les prétendues largesses de l’État dont ils bénéficieraient, notamment l’aide médicale d’État. J’ai contacté cette fonctionnaire ce matin : elle est victime depuis trois ans d’une usurpation d’identité. Quand l’administration est bafouée, c’est la République qui est souillée. Il nous appartient de faire respecter le droit, de dire la vérité et de traquer les mensonges et les propos racistes qui sont le carburant de la haine. Certains responsables politiques ont légitimé la parole raciste ; il nous appartient plus que jamais de mener ce combat politique pour la France !

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