...illustre encore cette démission qui nous ramène en une sorte d’affermage fiscal au temps des gabelous et des fermiers généraux.
En fait depuis 1973, notre État s’est séparé de ce qui faisait de lui un État : la possibilité de s’autofinancer par la création de monnaie ou en passant par des institutions dédiées. L’État ne peut aujourd’hui plus s’approvisionner en devises auprès de la banque centrale. L’État est devenu un simple agent économique dépendant des marchés financiers et des organismes prêteurs.
Le débat sur le taux d’endettement de l’État, que les principaux partis considèrent comme excessif, fait l’impasse sur cette réalité historique : l’endettement de l’État vis-à-vis des marchés a été organisé de longue main. Ce circuit est profondément contre-productif, comme en atteste la situation économique actuelle qui est la conséquence des politiques d’austérité menées au nom du désendettement !
Dans un article publié il y a quelques semaines par le quotidien La Tribune, on pouvait lire : « Les pays qui ont appliqué l’austérité ont vu leurs dettes publiques exploser ». De fait, les données publiées par l’Institut européen des statistiques Eurostat montrent que les pays qui ont appliqué les mesures de restrictions budgétaires les plus drastiques ont vu leurs dettes publiques augmenter.
En Grèce, elle a explosé, pour passer de 136 % du PIB au premier trimestre 2012 à 160 % du PIB aujourd’hui, son niveau d’avant restructuration. Elle est passée en Espagne de 73 % à 88 % du PIB, sur la même période, et, au Portugal, de 112 % à 127 % du PIB en un an. L’Irlande ne fait pas mieux : sa dette publique atteint désormais 125 % du PIB alors qu’elle ne représentait « que » 106 % de la richesse nationale un an plus tôt. Quant à l’Italie, qui vient de sortir, après avoir rempli ses objectifs, de la procédure de surveillance pour déficit excessif, elle n’est pas non plus en reste puisque sa dette publique est passée en un an de 123 % à 130 % du PIB.
« Le modèle du tout austérité s’effrite », reconnaît La Tribune. En décembre dernier, le FMI lui-même, l’un des artisans de la cure d’austérité dans le sud de la zone euro, avait reconnu avoir mal évalué l’impact de l’austérité sur la croissance. En conséquence, les restrictions budgétaires ont pesé plus que prévu sur les économies « sous programme ». L’institution de Washington avait fait son mea culpa a minima sur la gestion de la crise grecque. Selon elle, la dette du pays aurait dû être restructurée plus tôt et de manière plus importante.
Face à ces constats, le présent budget ne rompt pas avec l’austérité. Il s’enfonce au contraire dans le mur avec le budget le plus rigoriste de la période récente, tous gouvernements confondus.
Le peuple ne comprend plus, c’est pourquoi il se révolte. On le trompe aussi en ne lui disant pas quel est le projet européen, où est le cap et quel est le leadership.
Si certains se félicitent du recul des intérêts de la dette, qui baissent de 200 millions d’euros, nous pointons, nous, les destructions désastreuses qui ont été mises en oeuvre pour obtenir ce résultat comptable. Tant d’emplois supprimés, tant d’activités économiques sacrifiées ! Tout le monde a assez payé cette dette idéologique.
En effet, si les 46 milliards d’euros d’intérêt de la dette font pousser des cris d’orfraie aux gardiens de l’orthodoxie budgétaire, il n’en est pas de même des 20 milliards du cadeau fiscal du CICE ou encore des 60 milliards que nous coûte l’évasion fiscale. Ces deux dernières sommes représentent pourtant des montants dont l’État se prive volontairement, à l’heure où le Gouvernement impose une réforme destructrice de notre système de retraites pour un montant d’environ 25 milliards !
C’est pourquoi nous contestons la logique de fond qui prévaut en matière de désendettement. Les députés d’outre-mer associés au groupe GDR souhaitent, au contraire, briser les contraintes imposées par l’Europe néo-libérale. C’est la raison pour laquelle, tout en respectant la diversité au sein de notre groupe parlementaire démocratique, nous voterons, globalement, contre ce budget.