Intervention de Jean-Marie Le Guen

Séance en hémicycle du 12 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Le Guen, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Madame la présidente, messieurs les ministres, dans le cadre de l’avis budgétaire, j’ai retenu deux questions essentielles sur lesquelles je souhaiterais recueillir votre point de vue, monsieur le ministre de l’écologie.

La première question concerne l’Europe de l’énergie et du climat, mise en difficulté par les modalités de la transition énergétique en Allemagne.

L’Europe de l’énergie n’est pas structurée, comme nous le savons tous, avec trois logiques successives et cumulatives : le marché, le climat et, à présent, la compétitivité.

Par ailleurs, le prix du quota de CO2, qui est le seul instrument de long terme qu’elle s’était donné, s’est effondré, oscillant entre 4 et 5 euros la tonne, et les mesures correctrices de refonte du mécanisme ne sont encore qu’en cours d’élaboration.

Il faut certes se féliciter du retrait de 900 millions de tonnes de quotas, enfin décidé par le Comité des représentants permanents, le COREPER, vendredi dernier presque à l’unanimité puisque seuls deux États membres, la Pologne et Chypre, s’y sont opposés. Il ne s’agit cependant que d’une amélioration temporaire que des mesures structurelles devront compléter.

Surtout, l’Europe de l’énergie et du climat est mise en difficulté par les limites des modalités de la transition énergétique en Allemagne, fondée sur l’électricité d’origine renouvelable et plus précisément sur un tarif préférentiel pour vingt ans et un accès privilégié au réseau.

Tout d’abord, le coût tel qu’il est comptabilisé sur le compte EEG – ce que paient les consommateurs allemands – est croissant et prohibitif. Il a d’ailleurs conduit l’Allemagne à mettre en place pour son industrie, notamment ses électro-intensifs, des mécanismes d’exonération de charges à la limite de la légalité européenne. Répercuté sur les seuls ménages, il fait l’objet de vifs débats publics.

Par ailleurs, l’électricité issue des sources renouvelables met à l’épreuve les réseaux en raison de son intermittence, qui varie plusieurs fois dans la journée et non seulement selon les périodes de l’année, nous en avons parlé en commission. Elle implique ainsi des transferts très fréquents d’importantes quantités d’électricité, en raison des excédents à écouler aux heures de vent et de soleil, alors que ces réseaux n’ont pas été pas été conçus pour cela. Par ailleurs, les corridors verts de transport de cette électricité ne coïncident pas avec les interconnexions historiques entre les réseaux nationaux, créés pour des raisons de sécurité ou de marché intra-européens. L’Allemagne est donc obligée de prévoir une mise à niveau de son réseau pour amener l’électricité éolienne du Nord et de l’Est vers l’Ouest et le Sud. Le coût en est tel qu’elle essaie d’ailleurs de le faire cofinancer par l’Union européenne.

Il y a donc entre-temps des risques sur la continuité et la sécurité de l’approvisionnement, ce qui pose des problèmes notamment aux pays voisins de l’Allemagne.

La question est d’ailleurs loin d’être théorique puisque les énergéticiens européens l’ont rappelée à plusieurs reprises, évoquant une éventuelle rupture de l’approvisionnement cet hiver.

De surcroît, cette électricité d’origine renouvelable perturbe également le marché de gros en provoquant un effondrement des prix.

Enfin, le choix de la sortie du nucléaire tel qu’il a été fait conduit à réguler la production par un recours accru au charbon et au lignite, ce qui est parfaitement incompatible avec les limites que l’Allemagne s’était elle-même fixées en matière d’émissions de CO2.

En résumé, la voie allemande, adoptée dans un contexte purement national, n’est pas imitable par les autres pays de l’Union européenne, et n’atteint pas les objectifs de sécurité et de décarbonation de la transition énergétique, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes pour un pays qui nous avait à juste titre expliqué les enjeux climatiques.

Nous devrons donc suivre avec attention les pourparlers en cours entre la CDU et le SPD.

Dans ce contexte, où il est facile de battre la coulpe de différents pays, dont le nôtre, comment envisagez, monsieur le ministre, de relancer la dynamique européenne ?

Le second sujet que j’évoque dans le rapport concerne la préparation de la COP 21, dont l’organisation est prévue à Paris en 2015.

C’est à cette occasion que devra être défini l’instrument international universel et contraignant pour la limitation des émissions de gaz à effet de serre dans l’après-2020. L’expérience de Copenhague reste présente dans nos esprits : monsieur le ministre, pouvez-vous faire un point sur la préparation de la conférence de Paris ? Je veux insister particulièrement sur nos capacités de faire un effort et de mettre sur la table, à l’occasion de cette conférence, le dossier spécifique de l’Afrique.

Peut-être nous direz-vous également, monsieur le ministre, quelques mots sur le COP 19 qui se tient actuellement à Varsovie. Quelles sont vos impressions et votre vision d’avenir sur la préparation de cette très grande rencontre internationale ?

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