Le débat ouvert par l’amendement du Gouvernement et poursuivi par l’amendement présenté par Mme Delga est tout à fait passionnant. Je conseille à l’ensemble de nos collègues, quel que soit le banc sur lequel ils siègent, de lire l’ouvrage très court de Laurent Davezies intitulé La crise qui vient : la nouvelle fracture territoriale, proprement passionnant. Je suggère en particulier à M. le président de l’assemblée des départements de France d’en prendre connaissance. Je vous en cite quelques passages :
« On parle beaucoup plus de solidarité qu’on ne travaille à la mesurer. C’est pourtant de ce côté-là que se trouve la réponse à l’énigme des décennies passées. Malgré la dureté de la restructuration de l’économie française, les inégalités de revenus par habitant entre les régions, les départements ou les zones d’emploi n’ont cessé de se réduire. Un arbre a caché la forêt. Les enjeux les plus visibles, à propos des dépenses publiques et des prélèvements sociaux, portent sur la part explicite des politiques territoriales, là où l’action publique exprime une volonté stratégique. C’est le cas de la politique de la ville, de la DATAR, des contrats territoriaux ou encore des grands chantiers.
« Ce sont ces politiques qui focalisent toutes les analyses et les controverses, tous les discours, articles de presse et travaux de chercheurs, alors que ces dépenses ne sont qu’une goutte d’eau à côté des transferts de revenus liés aux politiques territoriales implicites. Ces dernières sont le résultat, plus inerte que piloté, de l’ensemble des mécanismes de prélèvement et de dépense des budgets publics et sociaux. C’est moins la stratégie géographique volontaire de quelques programmes qui fabrique la solidarité entre les territoires que la circulation involontaire et ignorée de l’ensemble des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques.
« Les effets territoriaux les plus puissants des politiques publiques tiennent curieusement à leur caractère non territorialisé. En dépit de demandes réitérées des parlementaires, l’administration n’a jamais produit de comptabilité territoriale, au moins au niveau régional, des prélèvements et des dépenses publics et sociaux. L’INSEE n’est toujours pas parvenu à produire des comptes régionalisés des administrations centrales qui puissent compléter les comptes régionalisés des administrations locales. »