Il ne paraît pas satisfaisant que des textes qui ont fait l’objet d’une révision constitutionnelle depuis de nombreuses années – puisqu’elle remonte en l’occurrence à juillet 2008 et, pour ce qui est de l’article 68 de la Constitution, à février 2007 – ne soient pas entrés en vigueur et que les lois organiques sans lesquelles ils ne peuvent pas être appliqués ne soient toujours pas adoptées. Il est temps d’achever le cheminement de ces textes qui ont connu un trop long parcours puisqu’ils ont été déposés en décembre 2010 et ont été adoptés par votre assemblée en première lecture un an plus tard, le 21 décembre 2011.
Si les nouvelles dispositions de l’article 11 sont en elles-mêmes précises, elles prévoient toutefois qu’une loi organique détermine les conditions de présentation de la proposition de loi et celles dans lesquelles le Conseil constitutionnel assure le contrôle du respect des règles fixées par la Constitution. C’est sur ce dernier point que d’ultimes ajustements sont intervenus entre les chambres et le Gouvernement afin de s’assurer de la meilleure rédaction possible. Vous conviendrez, en effet, qu’il serait surprenant que le législateur puisse voir ses dispositions relatives au rôle du Conseil constitutionnel être censurées pour inconstitutionnalité.
Mon propos sera donc bref, car il ne me paraît plus nécessaire, à ce stade, de revenir sur les discussions et échanges intéressants que les chambres ont pu connaître sur la notion de référendum, longtemps associé au recours au plébiscite propre aux deux Empires, ou au sujet de la démocratie représentative. L’article 11 institue ce que l’on a laissé appeler à tort – le rapporteur l’a souligné – le référendum d’initiative populaire alors qu’il s’agit, en fait, même si le débat sur la sémantique peut se poursuivre, d’un référendum d’initiative partagée.
Il n’existe aucune contradiction à vouloir revaloriser le rôle du Parlement et à achever l’entrée en vigueur de cette disposition afin de mieux associer les citoyens à la vie publique. C’était déjà, je veux le rappeler, le sens des travaux du Comité consultatif pour la révision de la Constitution, institué en décembre 1992 par François Mitterrand, qui fut le premier à proposer l’instauration d’un « référendum d’initiative minoritaire ». Il s’agissait de combiner « le voeu d’une minorité parlementaire et celle d’une minorité de pétitionnaires dont le cumul pouvait conduire à l’arbitrage de la nation elle-même ».
Le président Jean-Jacques Urvoas s’en souvient, j’en suis sûr : le texte, tel qu’il figure aujourd’hui à l’article 11, est issu d’un débat qui s’est déroulé à une heure tardive, dans la nuit du 22 au 23 mai 2008. Il résulte, on peut le dire, d’un compromis obtenu à partir d’amendements déposés par plusieurs groupes politiques qui visaient, alors, à créer un véritable référendum d’initiative populaire. C’était, du moins, le titre qu’on lui donnait.
Vous êtes parvenus à des propositions convergentes, qui conservent les apports de l’Assemblée nationale et du Sénat et, surtout, respectent la lettre et l’esprit de la Constitution. M. le rapporteur vous a présenté dans le détail les avancées obtenues sur les questions de recueil des soutiens, sur les modalités de transmission de la proposition de loi entre les deux assemblées, sur la question de la consultation du Conseil d’État ou sur celle des délais impartis au Président de la République pour organiser le référendum.
Le Gouvernement a déposé un amendement destiné à sécuriser l’accord intervenu entre les deux assemblées. Je peux vous indiquer, même si celles-ci sont souveraines, qu’il l’a fait après avoir obtenu l’accord de leurs deux rapporteurs pour obtenir un vote conforme. Sous réserve de l’adoption de cet amendement, je le dis d’emblée, le Gouvernement approuvera le texte issu du travail de la CMP.
Nous serons ainsi au rendez-vous de ce que le Président de la République – après un autre Président, compte tenu de l’histoire de ce texte – a souhaité le 4 octobre dernier, lors de la célébration des cinquante-cinq ans de la Constitution, en nous demandant de bien vouloir achever la procédure parlementaire pour que l’article 11 entre enfin dans les faits au service de nos concitoyens.