Aujourd’hui, c’est l’inverse. La moitié des interpellations pour racolage sont classées sans suite et font rarement l’objet de poursuites devant le tribunal correctionnel. Il s’agit le plus souvent d’un simple rappel à la loi non dissuasif. Le problème, c’est qu’il en résulte un fort sentiment d’impunité parmi ceux qui exploitent la misère humaine, non pas les prostituées mais les souteneurs, les proxénètes et les réseaux. La brigade de répression du proxénétisme, qui d’ailleurs n’a pas été entendue dans le cadre de la commission, qui a travaillé très vite, considère qu’un tiers des procédures de répression du proxénétisme ont pour point de départ des informations recueillies pendant la garde à vue pour racolage.
Il s’agit donc d’un outil que la police souhaite conserver, comme nous l’a d’ailleurs dit le chef de l’OCRIEST. Il permet aux prostituées d’entrer en contact avec la police et ce, sans être soupçonnées par leurs proxénètes d’avoir volontairement engagé une telle démarche, partant sans risque de représailles. Tel est l’un des intérêts réels du délit de racolage. D’ailleurs, M. le ministre de l’intérieur lui-même a fait part de son embarras à la perspective de sa suppression car il permet aux services de police de proposer, en cours de garde à vue, de coopérer à l’arrestation des exploiteurs.
Il a même indiqué qu’en pratique les services de police recourent à ce délit avec discernement et sont souvent sollicités par les prostituées indépendantes qui leur signalent les nouvelles arrivées fraîchement livrées par les réseaux. Il y a donc une entraide tout à fait utile. En outre, le placement en garde à vue ouvre des droits, dont celui d’être examinée par un médecin. Il s’agit souvent du premier contact avec un professionnel de santé depuis l’arrivée de la prostituée en France. Celle-ci peut être informée de ses droits et orientée vers une association ou une structure de soins. Voilà pourquoi il faut maintenir le dispositif, en complément bien entendu des mesures de protection des victimes de la prostitution.