Cette avalanche de nouvelles taxes ne parvient pas même à conférer une véritable ambition de maîtrise à votre texte, puisque vous créez 3,4 milliards d'euros de taxes nouvelles mais réalisez seulement 2,6 milliards d'économies !
Troisième remarque : le texte que nous examinons en séance est le même que celui qui nous a été soumis en commission des affaires sociales. Nous allons donc réexaminer les mêmes amendements. À en juger par le rejet systématique de toute proposition du groupe UMP depuis le début de cette législature, nous risquons d'avoir les mêmes débats… mais aussi les mêmes refus opposés à nos amendements. Que l'opinion publique le sache : nos nombreuses propositions visent par exemple à ne pas alourdir les charges qui pèsent sur les entreprises ; à ne pas pénaliser des classes moyennes déjà largement victimes de votre politique ; à ne pas condamner l'intéressement et la participation ; à rapprocher autant que faire se peut les différents régimes de retraite, par souci d'équité ; à lutter efficacement contre les déserts médicaux ; à ne pas reporter la mise en place de la tarification à l'acte dans les hôpitaux ; à agir avec discernement et à rationaliser les doublons entre les agences intervenant dans le secteur de la santé et le médico-social.
Tout au long de l'examen en commission, nous avons recherché les signes d'une volonté de poursuivre les réformes structurelles engagées courageusement ces dernières années. La crise ne s'est pas évanouie avec l'élection de François Hollande. Les déficits du régime général et du fonds de solidarité vieillesse n'ont pas disparu ; ils avoisineront bientôt les 14 milliards d'euros. Des objectifs de maîtrise des dépenses sont certes affichés… mais bien modestes, voire homéopathiques. Vous annoncez vouloir ramener le déficit du régime général à 11 milliards d'euros, mais vous tablez sur une croissance à 0,8 % : hallucination, monsieur le ministre du budget !
Ce que nous avons surtout constaté une nouvelle fois, c'est l'acharnement à étouffer ce qui avait été engagé et allait porter ses fruits à terme. Je pense tout particulièrement à l'abrogation de la TVA antidélocalisation ou TVA sociale, qui aurait donné des marges de manoeuvre réelles et durables. Madame la ministre, parviendrez-vous dans les cinq ans qui viennent à reconnaître ce qui a été fait de positif avant vous et à ne pas rejeter tout ce qui ne vient pas de vous, surtout lorsque l'intérêt général est en jeu ?
Quatrième remarque : les députés de la commission des affaires sociales ont auditionné un certain nombre d'institutions, d'organisations et d'associations, dans le but de recueillir leurs attentes. Nous avons par exemple été questionnés par la Mutualité au sujet de la promesse du candidat Hollande de revoir la taxe supplémentaire sur les complémentaires santé : nous n'avons pas entendu votre réponse, madame la ministre ; à moins que nous ne l'ayons que trop bien entendue…
Nous aurions apprécié d'auditionner aussi les représentants des départements et des communautés de France, des maires de France et des agences régionales de santé. Cela nous aurait permis d'établir un diagnostic partagé de la situation. Cela nous aurait surtout permis de mesurer à quel point le souhait d'une meilleure coordination entre les multiples intervenants est immense. N'oublions pas que les lois que nous votons s'appliquent ensuite sur le terrain. En matière d'action sociale, les collectivités locales, et désormais les ARS, jouent un rôle majeur. Elles peuvent être force de proposition.
Il aurait été ainsi particulièrement éclairant d'entendre les représentants des conseils généraux, puisque le Président de la République vient d'annoncer que les départements se verraient confier l'ensemble des politiques du handicap et de la dépendance, hors du champ de l'assurance maladie, provoquant déjà l'inquiétude des acteurs de la politique du handicap.
Il aurait été également utile d'entendre les agences régionales de santé, nées de la loi HPST, Hôpital, patients, santé et territoires. Ce sont en effet les ARS qui annoncent aux hôpitaux – et je pense en particulier aux hôpitaux de proximité – s'ils pourront bénéficier ou non de financements pour réaliser les investissements nécessaires. Or, aujourd'hui, nombre d'établissements sont dans l'attente.
J'entends déjà votre réponse, madame la ministre : les promesses de l'ancien gouvernement ! (« Eh oui ! sur les bancs du groupe SRC.) Mais vous pourrez également y ajouter l'engagement pris ce week-end par le président de la République de mettre chaque Français à moins de trente minutes d'un service d'urgences ! Et chacun de mesurer la difficulté de votre tâche… Bonne chance, madame la ministre !
Pourriez-vous à tout le moins annoncer un calendrier des plans de financement des nouveaux investissements hospitaliers, puisque vous prévoyez, à l'article 57, une augmentation substantielle de 370 millions d'euros de la participation des régimes obligatoires d'assurance maladie au Fonds pour la modernisation des établissements publics ?
Cinquième remarque : nous avons repéré dans ce texte plusieurs dispositions qui nous ont fait dire que le Gouvernement administrait un remède sans diagnostic préalable. Ainsi en est-il de la décision de faire évoluer le dispositif d'exonérations de charges patronales sans attendre les conclusions du Haut conseil sur le financement de la protection sociale, saisi par le Gouvernement. Imaginez un seul instant qu'à l'instar du rapport commandé à M. Gallois ses conclusions conduisent à une ordonnance où figureraient baisse des dépenses, recours à la CSG, recours à la TVA, avec la précision « non substituable » rédigée à la main !
Ainsi en est-il également des mesures relatives au financement de la dépendance et à l'amendement visant à affecter à la CNSA 95 % du produit de la contribution additionnelle, alors que la réforme de la dépendance ou de la perte d'autonomie ne nous a toujours pas été présentée.
Ainsi en est-il encore de la décision de rembourser l'IVG à 100 %, alors même qu'il conviendrait d'évaluer, pour mieux les renforcer, l'information, l'accès à la contraception et l'accompagnement des femmes sur un sujet aussi sensible.
Ainsi en est-il de la disposition de l'article 57, qui prévoit le recrutement de 4 000 emplois d'avenir non qualifiés dans les hôpitaux publics, alors que nous ne disposons pas de l'évolution des effectifs dans les hôpitaux ni de la répartition entre personnel de soins et personnel administratif.
Ainsi en est-il enfin de la décision de ne pas attendre la fin de l'expérimentation sur les visites médicales collectives à l'hôpital pour certains produits de santé. Pour bien légiférer, il nous faut bien évaluer, et éviter ainsi les effets indésirables.
Sixième remarque : j'ai été frappée par les réflexions de certains collègues de la majorité, qui s'apparentent pour moi à du dogmatisme. Je prendrai deux exemples. Le premier concerne la remise en cause de la convergence tarifaire.