Intervention de Jean-Paul Tuaiva

Séance en hémicycle du 5 décembre 2013 à 15h00
Lutte contre l'ambroisie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Tuaiva :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui, dans le cadre de la journée d’initiative parlementaire du groupe UMP, cette proposition de loi visant à lutter contre l’ambroisie à feuilles d’armoise, l’ambroisie trifide et l’ambroisie à épis lisses.

Rappelons que, sur ce sujet, la représentation nationale n’en est pas à son coup d’essai puisque, sous la précédente législature, deux propositions de loi visant le même objectif avaient été déposées sur le bureau de notre assemblée, sans toutefois être inscrites à l’ordre du jour.

La présente proposition s’inscrit dans un processus de protection de la santé publique, de l’environnement et de la biodiversité, tant la prolifération de cette plante est importante et rapide.

Elle répond à une attente de nombre de nos concitoyens, notamment des agriculteurs, à qui l’ambroisie à feuille d’armoise pose de véritables problèmes sanitaires et financiers.

Je tiens à saluer ici l’action des organismes de lutte et de veille existants, qui oeuvrent quotidiennement pour limiter la propagation de cette espèce invasive.

Si cette plante possède une capacité de dissémination importante, il ne faut pas non plus oublier que son expansion s’effectue majoritairement par les activités humaines, avec les impacts négatifs que nous connaissons : baisse des rendements des cultures céréalières de 20 %, voire de 30 %, mise en danger de la biodiversité à l’échelle locale et nationale, risque sanitaire prépondérant du fait de la multiplication des populations sensibles aux allergènes au cours des dernières années.

Le changement des pratiques agricoles, l’importance de la jachère, le développement des échanges commerciaux et donc du transport, la périurbanisation, mais aussi le changement climatique et la hausse des températures, sont autant de facteurs conduisant à l’invasion galopante de cette plante.

Au-delà de l’objet volontairement limité du texte, il est essentiel de s’attaquer aux causes de la prolifération de cette plante, en adoptant des comportements écologiquement plus vertueux. Les modes de production, notamment agricoles, doivent évoluer vers une plus grande durabilité, mais nous devons également favoriser la transition énergétique et mobiliser tous les acteurs en faveur d’une véritable croissance verte.

Le groupe UDI ne peut que déplorer le manque de volontarisme du Gouvernement, depuis plus de dix-huit mois, dans ce domaine pourtant essentiel.

Nous l’avons dit, cette proposition de loi répond en premier lieu à des enjeux de santé publique puisque, dans la moitié des cas, l’allergie à l’ambroisie peut provoquer ou aggraver l’asthme. Selon le réseau national de surveillance aérobiologique, plus d’un million de Français seraient allergiques aux pollens d’ambroisie, et une croissance exponentielle du phénomène serait à redouter dans les prochaines années. Les pollens d’ambroisie doivent donc être considérés comme des polluants particulaires de l’air ambiant et faire l’objet de mesures d’éradication.

Dans un contexte économique et budgétaire tendu, rappelons également le coût financier conséquent pour l’assurance-maladie de la dissémination de cette plante invasive.

L’heure n’est plus au constat, mais à l’action, car la propagation de l’ambroisie est désormais telle que son éradication pure et simple est devenue impossible. Les mesures de lutte que nous devons ainsi déployer doivent répondre à des enjeux de permanence et de suivi attentif.

Nous soutenons par conséquent le dispositif proposé, notamment en ce qu’il organise la nécessaire coordination des acteurs tant au niveau interministériel que territorial. Celle-ci est évidemment un élément indispensable au succès de la lutte contre la dissémination des pollens d’ambroisie. Toutefois, comme notre collègue écologiste l’a souligné, c’est à l’échelon local que la lutte contre cette plante hautement invasive serait la plus efficace.

En outre, nous nous félicitons des amendements adoptés en commission, qui enrichissent ce texte, notamment en élargissant à tout occupant quel qu’il soit l’obligation d’éradication pesant sur les propriétaires de parcelles envahies.

Il demeure que nous nous interrogeons sur l’applicabilité de certains articles. Aussi souhaitons-nous que le Gouvernement nous éclaire sur les points suivants.

La plupart des articles du texte n’auraient-ils leur place au sein du code de la santé publique ou celui de l’environnement ? Ne devrait-on pas codifier cette proposition de loi ?

Les entreprises concernées pourront-elles supporter les contraintes nouvelles qui pèseront sur les maîtres d’ouvrage et les maîtres d’oeuvre ?

Le texte nécessite la mobilisation de moyens importants : les agences concernées auront-elles les moyens d’assurer une application efficiente de cette proposition de loi ?

Des dispositions de nature réglementaire ne pourraient-elles atteindre les objectifs que s’assigne cette proposition de loi, et ce de façon plus rapide ?

Le groupe socialiste critiquant l’objet « limité » du texte, le Gouvernement envisage-t-il de prendre des dispositions législatives qui concerneraient toutes les plantes invasives posant problème ?

Par ailleurs, si nous devons impulser une réelle dynamique, la France ne peut agir seule. La lutte contre l’ambroisie ne peut se mener que dans le cadre international, et d’abord dans celui de l’Europe, qui a déjà été saisie de la question à plusieurs reprises. Il serait donc utile de développer une réelle coordination au niveau supranational. Le Gouvernement oeuvre-t-il en ce sens ?

Je conclurai mon intervention en évoquant nos territoires ultramarins, extrêmement vulnérables aux invasions de ce type, qui pourraient y avoir des effets considérables sur la biodiversité. Aussi, même si ces territoires sont pour l’heure épargnés par l’intrusion de l’ambroisie, notre vigilance doit-elle demeurer sans faille.

Madame la ministre, nous connaissons malheureusement tous ici le parcours parlementaire chaotique qui attend les propositions de loi de l’opposition, quand bien même elles sont votées en première lecture. L’adoption définitive de ce texte n’est donc pas pour demain.

Je vous demande donc, madame la ministre, au nom du groupe UDI, si le Gouvernement entend se saisir prochainement de cette question, et par quels véhicules normatifs. J’ai bien entendu, cependant, l’appel que vous avez lancé ici dans l’hémicycle.

Cette plante est un fléau pour les populations et leur santé, ainsi que pour la biodiversité de nos territoires. La question de la lutte contre l’ambroisie n’est pas anecdotique : elle est essentielle et appelle une action claire, rapide et efficace.

Pour toutes ces raisons, et en espérant que nos interrogations soient levées, le groupe UDI apportera pour la troisième fois aujourd’hui tout son soutien à cette excellente initiative de nos amis de l’UMP. Je vous remercie.

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