Intervention de Noël Mamère

Réunion du 4 décembre 2013 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Ce projet de loi constitue un progrès très net par rapport à la loi de 2010. Le dispositif de protection du secret des sources des journalistes mis en place par cette loi était en effet très inférieur à celui qui avait été voté en 2005 par le Parlement belge et qui est une référence pour tous les journalistes et tous ceux qui sont attachés à la protection de ce secret.

Le texte que vous nous soumettez s'en rapproche, mais n'est pas encore à la hauteur de ce que nos collègues belges ont été capables de mettre en oeuvre. Nous nous inquiétons notamment de l'exception au secret des sources en cas d'atteinte aux « intérêts fondamentaux de la nation », notion dont le flou absolu constituerait une brèche où tous ceux qui sont gênés par des enquêtes journalistiques pourraient s'engouffrer. Il y a déjà d'ailleurs des précédents d'entrave à la liberté d'informer justifiés par un tel prétexte, avec la complicité de la justice. L'inscription dans la loi d'une telle notion tuerait l'économie d'un projet qui doit permettre aux journalistes d'exercer leur profession dans des conditions dignes d'un pays comme le nôtre. C'est la raison pour laquelle je me félicite que le rapporteur pour avis ait exprimé son désaccord avec cette exception.

Ce projet est cependant un progrès car il étend le principe de protection du secret, aux pigistes notamment, mais il faudrait l'étendre également aux documentaristes et aux blogueurs. D'une façon générale, les progrès fulgurants de l'Internet rendent difficile une délimitation nette du champ du journalisme : il n'est pas rare désormais que les journalistes professionnels exploitent des informations diffusées par les réseaux sociaux et les blogueurs.

Ce texte devrait également mettre l'accent sur la prévention plutôt que sur la répression : c'est l'objectif d'un amendement déposé par le groupe SRC et nous-mêmes, que nous avions déjà déposé en 2010, notamment avec Mme Filippetti. Il faudrait également que le texte institue, conformément à une demande de l'association Reporters sans frontières et des syndicats de journalistes, un délit spécial au cas où l'atteinte au secret des sources serait le fait d'une personne investie de l'autorité publique.

En dépit de ces réserves, le groupe écologiste votera ce texte, considérant qu'il constitue un progrès incontestable.

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