Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Réunion du 5 décembre 2013 à 11h00
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson, rapporteur :

Pour vous convaincre de la nécessité d'optimiser, de simplifier et de clarifier le système actuel, il vous suffit, mes chers collègues, de consulter le schéma extrêmement complexe de la gouvernance des politiques d'emploi et d'insertion qui figure dans notre rapport.

Nous proposons de conforter l'échelon régional, selon une démarche déjà entamée et par contractualisation avec l'État, les missions locales et d'autres partenaires – la liste que nous dressons n'étant pas exhaustive. Car tant qu'il n'y aura pas un seul pilote dans l'avion, nous ne sortirons pas de cette organisation, si incompréhensible que l'on ne peut que douter de son efficacité.

Nous souhaitons pousser le plus loin possible la contractualisation permise par le code général des collectivités territoriales, en encourageant les régions à passer des conventions d'objectifs avec l'État et les missions locales – associées à notre travail dès l'origine, notamment par l'intermédiaire de Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationle des missions locales.

J'en viens à l'orientation et à l'offre de formation, objet de la deuxième partie du rapport. Il nous est apparu nécessaire d'abord d'accompagner les jeunes, ensuite de renforcer les filières professionnelles, en particulier l'apprentissage, enfin de renforcer les dispositifs de seconde chance et de lutte contre le décrochage scolaire.

Quelle que soit la difficulté à laquelle sont confrontés les jeunes, quels que soient le lieu où ils vivent, leur âge, leurs intentions, il est absolument nécessaire de les accompagner pour développer leur autonomie. L'accompagnement individualisé – par exemple par l'intermédiaire du maître d'apprentissage, ou de l'enseignant qui aide les lycéens à s'acclimater à l'Université pour faciliter la transition entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur – n'est qu'une modalité parmi d'autres de cette démarche. Elle peut débuter très tôt, par l'élaboration dès la sixième d'un parcours individualisé de découverte des métiers et des formations (PDMF). En effet, plus tôt les collégiens sont familiarisés avec l'environnement économique, la diversité des métiers, le fonctionnement des entreprises, plus ils feront preuve de discernement dans leur orientation.

Nous souhaitons également diversifier l'offre scolaire en faveur des élèves en difficulté ou dont le projet personnel requiert une attention particulière. Cela confirme la nécessité, sur laquelle s'accordent nos interlocuteurs, d'introduire de la souplesse dans le fonctionnement actuel des collèges.

Nous proposons enfin de favoriser l'articulation entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur, sur le modèle de l'expérience menée dans un lycée de Rennes, où les élèves de terminale peuvent suivre, pendant le temps d'accompagnement scolaire, des cours en première année de faculté de sciences et commencer à valider des crédits ECTS (european credits transfer system). Sans bouleverser l'ordre pédagogique, un élève de terminale scientifique peut par exemple suivre un cours d'histoire de la cosmologie à l'Université. Les lycéens prennent ainsi de l'avance sur leur cursus, se familiarisent avec un nouvel environnement et trouvent les moyens de s'y adapter.

Pour faciliter ensuite le parcours universitaire, il faut que tous ceux qui doivent être accompagnés puissent l'être, que ce soit par les « Cordées de la réussite » – tutorat assuré par des établissements d'enseignement supérieur et destiné à des collégiens issus de milieux modestes ou de quartiers prioritaires –, par des dispositifs destinés aux étudiants titulaires d'un bac professionnel ou en renforçant les bureaux d'aide à l'insertion professionnelles (BAIP) des universités, notamment par le biais, là encore, d'une contractualisation entre l'État et les établissements d'enseignement supérieur sur ces sujets d'intérêt général.

S'agissant des filières professionnelles, nous n'avons évidemment rien contre l'apprentissage mais il y a manifestement beaucoup à faire dans ce domaine. L'objectif affiché de 500 000 apprentis en 2017 doit être atteint. Il faut favoriser les passerelles entre les lycées professionnels et les CFA, toujours par la voie de l'expérimentation et de la contractualisation car les situations sont très variables d'un département ou d'une ville à l'autre. Il importe enfin de lever les freins objectifs à l'apprentissage, circonstanciels, sociaux, structurels ou éducatifs, qui résultent des difficultés à se loger, à obtenir le permis de conduire et de l'insuffisante maîtrise des fondamentaux scolaires.

Le décrochage scolaire, dont nous avons notamment débattu dans l'hémicycle à propos du projet de loi de refondation de l'école, concerne 120 000 à 150 000 jeunes, ce qui est de toute façon beaucoup trop. Nous préconisons d'accroître les moyens alloués à la lutte contre ce phénomène, et notamment aux plateformes d'aide et de suivi aux décrocheurs, en travaillant avec les acteurs de terrain et dans le cadre de partenariats, car à la terrible complexité du système s'ajoute un cloisonnement néfaste entre les opérateurs. Nous suggérons également d'utiliser les ressources de l'éducation nationale, dont les places vacantes dans les lycées professionnels, et d'améliorer la couverture du territoire par les écoles de la deuxième chance. D'une manière générale, nous invitons les pouvoirs publics à poursuivre de manière plus offensive l'objectif de « raccrochage », de retour des décrocheurs en formation.

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