Intervention de Fanélie Carrey-Conte

Séance en hémicycle du 23 octobre 2012 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFanélie Carrey-Conte :

Madame la présidente, mesdames les ministres, chers collègues, je vais centrer mon propos sur la politique du médicament, en essayant de compléter les interventions précédentes de mes collègues spécialistes de la question, Mme la présidente Catherine Lemorton et M. le rapporteur Gérard Bapt.

Alors que les PLFSS précédents invoquaient les déficits sociaux pour justifier le détricotage de notre système de protection collective, ce gouvernement s'emploie à l'inverse à garantir la pérennisation de ce système, en allant chercher les marges de manoeuvre là où elles se trouvent.

Ainsi, 876 millions d'euros d'économies vont être effectuées sur les produits de santé, dont 605 millions d'euros de baisses tarifaires sur les médicaments princeps et génériques ainsi que sur les dispositifs médicaux. Le niveau des prix sur les médicaments génériques dans les autres pays européens, notamment en Allemagne, est un argument en faveur de cette mesure.

D'autres mesures importantes et sur lesquelles je souhaite insister visent à casser des stratégies industrielles et commerciales permettant à certains laboratoires de conserver des situations de rente injustifiées, au détriment des objectifs de santé publique et des comptes de l'assurance maladie.

Ainsi, certains laboratoires refusent parfois de demander une extension d'autorisation de mise sur le marché pour un produit dont l'efficacité est avérée mais qui pourrait concurrencer une autre molécule qu'ils commercialisent à un prix plus élevé. Face à cette pratique monopolistique, des patients ne peuvent avoir accès à un médicament d'un moindre coût.

Afin de prévenir ces situations tout en sécurisant les prescriptions hors AMM, il est proposé d'élargir, dans des conditions très encadrées, le champ des recommandations temporaires d'utilisation des médicaments à des cas où il existe une alternative thérapeutique.

Le PLFSS prévoit également de renforcer l'encadrement de la publicité sur les produits de santé, avec l'appui de sanctions financières pour faire respecter les règles édictées. Un amendement de la présidente Catherine Lemorton, qui a été accepté par la commission, renforce d'ailleurs cet encadrement en intégrant à la contribution due au titre des dépenses de promotion les réclames des laboratoires qui font dans la presse grand public leur promotion sur leur seul nom, cherchant ainsi à imprimer leur marque dans les esprits et à augmenter leurs ventes.

Dans le même esprit, le PLFSS prévoit enfin la mise en place d'actions en faveur d'une meilleure maîtrise des prescriptions, avec la recherche d'une augmentation de la prescription dans le répertoire générique et une amélioration des pratiques, le tout pour un montant de 605 millions d'euros. La pérennisation des visites médicales collectives à l'hôpital est également un levier pour freiner la croissance des prescriptions.

Ces différentes mesures constituent bien une action structurelle visant à lutter contre la surconsommation des médicaments en France. Celle-ci est un éternel serpent de mer que nous devons combattre comme le ferait Poséidon (Sourires sur les bancs du groupe SRC), car on en connaît les conséquences en matière de iatrogénie médicamenteuse et de coût pour la collectivité.

L'ensemble de ces mesures a comme toujours suscité de nombreuses réactions, par exemple celle de Mme Le Callennec. Vous voulez ruiner l'industrie pharmaceutique, nous dit-on, évoquant aussi l'amendement adopté en commission qui prolonge la majoration du taux de la contribution sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques.

Il est temps de sortir des caricatures. Nul ne s'oppose ici au développement de ces entreprises à condition qu'il ne se fasse pas au détriment des objectifs de santé publique ou de l'accès aux soins pour tous, et en creusant le déficit de l'assurance maladie. Autre condition : que l'industrie pharmaceutique, qui réalise ses bénéfices notamment grâce à la vente de médicaments remboursés par la sécurité sociale et donc grâce à la solidarité nationale, participe à un juste niveau à l'effort collectif.

Les chiffres des profits réalisés par plusieurs groupes ces dernières années montrent, quoi que l'on en dise, qu'il y a des marges de manoeuvre. S'il faut encore être plus précis, on peut rappeler que Sanofi, qui prévoit en France la suppression de 914 postes, a réalisé 4,4 milliards d'euros de bénéfice net pour un chiffre d'affaires de 17,4 milliards d'euros au premier semestre 2012. Ces chiffres parlent d'eux-mêmes.

Les différentes mesures proposées et les économies réalisées dans ce secteur visent un double objectif.

Premièrement, il s'agit de dégager des recettes supplémentaires pour le redressement des comptes de la sécurité sociale, sans recourir à des dispositifs qui pénalisent nos concitoyens comme les franchises ou les déremboursements.

Deuxièmement, il s'agit de mettre en place des mesures structurelles en matière de politique du médicament, dans le but de produire des changements à long terme auxquels devront s'adapter l'ensemble des acteurs : usagers, professionnels de santé et laboratoires. Il s'agit d'améliorer encore les prescriptions en génériques, de sortir de la culture du « tout-médicament », de garantir à tous et non pas à quelques privilégiés l'accès aux innovations thérapeutiques.

Telles sont les mesures sur lesquelles je souhaitais insister. À l'image de ce PLFSS, ce sont des mesures de justice et de solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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