Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 12 décembre 2013 à 9h30
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Article 31

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

Nous abordons enfin l’article 31 de ce projet de loi, qui me paraît plutôt ambigu car mal placé dans le texte. Il définit le transfert autoritaire des compétences intercommunales et communales aux métropoles.

Cet article ressemble ainsi à un « effeuillage » – dans l’acception agricole du terme – qui serait réalisé feuille à feuille, compétence par compétence. Toutes les communes de notre pays seront mises à nu au profit de métropoles centralisées.

Ambigu et mal placé, car la logique aurait voulu que le statut, le périmètre, et les compétences des métropoles dites de droit commun soient abordés en début de texte, pour ensuite examiner les cas particuliers. C’est exactement l’inverse qui aura été fait.

Ambigu également, car il concerne toutes les métropoles, sauf Paris et Lyon. Il concerne donc Marseille, qui par ailleurs faisait l’objet de dispositions spécifiques à l’article 30, qui a été sciemment bloqué en première lecture.

Cela ajoute de l’illisibilité à un texte contesté, peu démocratique, fort peu clair, et à la limite de notre droit constitutionnel – cela fait beaucoup. Cela dit, cet article marque la fin des communes, au plan national et dans une douzaine de métropoles en France.

En effet, chers collègues, quel peut bien être le rôle des communes et de leurs élus, quand elles se voient ôter les compétences de la distribution de l’eau, de l’assainissement, des déchets, de la gestion des parkings, de la réfection de voirie, et même de la gestion des cimetières, des offices de tourisme, du PLU, du plan de déplacements urbains, du programme local de l’habitat, des conseils locaux de prévention – la liste peut-être encore très longue ?

L’article 30 sacralise une recentralisation, guidée par le seul souci de la réduction de la dépense publique – c’est-à-dire la réduction du service public local.

Vous savez, madame la ministre, combien est forte notre opposition à ce texte. À Paris, à Lyon, à Marseille, et sur l’ensemble du territoire, vous provoquez une forme de big bang institutionnel, dont personne ne mesure la réelle portée, et qui, en l’état, ne va pas créer les conditions d’une meilleure action publique locale, va faire reculer la démocratie, et sacrifie les fondements de la décentralisation – je veux parler de la subsidiarité.

Mon collègue Marc Dolez a déposé un amendement de suppression de cet article, sur lequel nous aurons à nous prononcer dans un instant. Il s’agit, non pas d’un amendement d’obstruction, mais d’un dernier appel à remettre l’ouvrage sur le métier et à lancer un vrai débat sur les contours de la décentralisation, dont nos citoyens ont besoin aujourd’hui, et qui s’appuie sur ce qui doit être l’ADN de la gauche : la démocratie, la justice et l’égalité.

Les métropoles que l’on nous propose de créer ne vont pas tout à fait dans ce sens. Elles créent de la concurrence entre les territoires et, effet pervers, sacrifient les territoires qui ne seront pas concernés par la concentration des moyens dans les métropoles, au risque de produire un nouveau désert français.

Puisque cet article – notamment ses dispositions sur le transfert des compétences des communes – concerne évidemment le département des Bouches-du-Rhône et la métropole d’Aix-Marseille-Provence, permettez-moi de vous rappeler, au nom des cent neuf maires sur cent dix-neuf et des cinq présidents d’EPCI concernés sur six, que le refus de la métropole marseillaise est toujours aussi fort dans le département. Vous pourrez d’ailleurs le constater à l’occasion de la conférence métropolitaine qui aura lieu très bientôt.

Permettez-moi de vous rappeler également, madame la ministre, que les propos de M. le Premier ministre tenus à Marseille le 8 novembre dernier appellent à une clarification forte concernant toutes les métropoles. Il a en effet déclaré que les métropoles n’avaient pas vocation à s’occuper de ce qui marche et que, seuls, trois domaines intéressaient leur action – le Premier ministre évoquant alors Marseille – et relevaient de compétences stratégiques : les transports, le développement économique et l’environnement. M. le Premier ministre remet ainsi en cause l’ensemble de ce texte, notamment son article 31.

Il me semble donc sage de le retirer pour mettre en cohérence la parole de M. le chef du Gouvernement avec ce projet de loi.

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