Merci, monsieur le rapporteur, au nom du groupe RRDP, pour la qualité de votre exposé.
J'aimerais revenir sur un point contenu dans l'article 4. En l'état actuel de la législation, la vente à distance de lentilles de contact correctrices n'est pas explicitement interdite sans être non plus clairement autorisée. Or la jurisprudence européenne a indiqué que l'interdiction de cette vente à distance était contraire au droit communautaire.
L'article 4 prévoit donc à la fois d'affirmer la légalité de celle-ci et d'encadrer cette pratique pour assurer la protection des patients. Toutefois, force est de constater que les conditions de première délivrance ne sont pas précisées par le projet et que leur définition est renvoyée à un décret en Conseil d'État.
Je regrette que l'étude d'impact soit le seul document où l'on puisse trouver une référence au contenu envisagé pour ce décret en Conseil d'État. Si cette étude évoque ce contenu au point nommé « Textes d'application » en parlant bien d'une obligation de prescription médicale en cours de validité pour les patients de moins de seize ans, elle ne précise pas ce qu'il doit en être pour les patients plus âgés. Ceux-ci pourraient donc se faire délivrer des lentilles avec une ordonnance datant par exemple de dix ans.
La difficulté est que cette disposition ne peut être précisée par amendement, mais uniquement dans le projet de décret en Conseil d'État.
Le projet de loi sur la consommation prévoit déjà d'étendre les ordonnances de trois à cinq ans, ce qui posera un problème de santé publique, en particulier pour la prévention des maladies ophtalmologiques. À cet égard, il est surprenant que des dispositions ayant des répercussions non négligeables sur la santé des Français soient introduites dans ce texte et soient examinées par la seule Commission des affaires économiques. Je salue à ce sujet les propos tenus hier par la présidente de notre commission.
Pour le dépistage des principales maladies chroniques ophtalmologiques, souvent asymptomatiques au début, la fréquence de trois ans choisie par le législateur en 2007 est clairement appropriée. On sait que plus d'un tiers des patients se voient diagnostiquer une autre pathologie que celle pour laquelle ils sont venus ou un problème de réfraction.
Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé récemment à soutenir les délégations des ophtalmologues envers les orthoptistes. Les expérimentations en cours dans ce domaine sont à mon avis très prometteuses et règleront certainement une grande part des problèmes, en permettant une meilleure fluidité des rendez-vous. Dans le cadre de ces délégations, il est prévu des renouvellements pour des patients vus depuis moins de cinq ans, mais avec des conditions très strictes à respecter, énoncées par la Haute autorité de santé.
Dans le même esprit, le fait qu'aucune mention ne soit explicitée dans l'article 4 de ce projet de loi risque de créer des problèmes majeurs : la vente de lentilles de contact n'est pas un produit de consommation banal, mais un produit médical qui, s'il est mal utilisé, peut entraîner des risques dangereux pour l'oeil, tels que des infections – dont certaines peuvent conduire à la cécité. Il y aurait aujourd'hui environ 600 patients hospitalisés par an pour des problèmes d'abcès de cornée, dus à des lentilles mal adaptées.
Il faut donc s'assurer que les patients ne puissent se faire délivrer des lentilles de contact avec des ordonnances de plus de trois ans, trouver un moyen pour que ce délai soit pris en compte dans le décret en Conseil d'État, mais aussi que la prescription initiale soit respectée et qu'il n'y ait pas de modification des paramètres des lentilles de contact lors de ventes promotionnelles par exemple.