Intervention de David Appia

Réunion du 11 décembre 2013 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

David Appia, président de l'Agence française pour les investissements internationaux, AFII :

Tout à fait. Notre agence dispose de 150 agents et d'un petit réseau à l'étranger, au sein de nos ambassades. Nous oeuvrons en faveur de la politique d'égalité des territoires, et, plus largement, à la création d'emplois, au travers de l'accueil des investissements étrangers. Nous concentrons tous nos efforts sur la valeur ajoutée qui peut être créée dans les territoires, au moyen de l'accompagnement de projets d'investissement.

Pour quelle raison ? Principalement parce que les enjeux économiques sont élevés : dans notre pays, 20 000 entreprises sous contrôle étranger emploient 2 millions de personnes et contribuent – dans la proportion d'un tiers – à nos exportations ainsi que, de façon non négligeable, aux activités de recherche & développement. Ces entreprises se caractérisent par une forte proportion de très grandes entreprises – de plus de 5 000 salariés – et d'entreprises de taille intermédiaire (ETI), qui comptent entre 250 et 5 000 salariés. Cela explique leur forte contribution à nos exportations et à notre effort de recherche, bref, leur contribution au renforcement du tissu d'entreprises de notre pays. Il s'agit de structures aguerries à l'international : leur implantation en France en témoigne.

Un point sur la diversité des territoires : ces projets d'implantation émanant d'entreprises étrangères se répartissent sur tout le territoire, avec un phénomène de concentration que vous connaissez. Bien que deux régions – Île-de-France et Rhône-Alpes – accueillent la moitié des nouveaux investissements créateurs d'emplois, les autres sont capables, année par année, d'accueillir de tels projets. Durant les cinq dernières années, les études que nous avons menées montrent une relative stabilité de ce phénomène de concentration autour des trois principales régions d'accueil.

Prenons l'emploi : les entreprises étrangères y contribuent, de façon plus élevée que la moyenne nationale, mais la situation reste contrastée selon les territoires. Dans certains d'entre eux, comme l'Alsace, 25 % des emplois – et 60 % des exportations – restent assurées par ces entreprises implantées. La présence de ces investissements y joue donc un rôle extrêmement important.

Les agents de l'AFII en poste au sein de nos ambassades et de notre réseau consulaire ont pour mission d'entrer au contact avec ces entreprises étrangères susceptibles de s'implanter en France et en Europe, et de rester à leur écoute. Nous ne disposons en revanche d'aucun moyen humain dans l'hexagone, où nous nous appuyons sur les Agences régionales de développement économique (ARDE), avec lesquelles nous avons noué au fil des ans un partenariat très étroit. Ces agences nous permettent d'avoir des relations avec les autres agences de niveau infra-régional, c'est-à-dire les agences de développement économique des grandes métropoles ou des départements.

Ce dispositif public très intégré contribue à la politique d'égalité des territoires de deux manières. Il nous permet d'abord d'apporter à tous les territoires quels qu'ils soient une information pertinente sur les possibilités ou les opportunités d'investissement en France que nous détectons à l'étranger. Nos équipes se trouvent en contact régulier avec plus de 5 000 entreprises, ce qui nous permet d'identifier environ 1 000 projets d'investissement, créateurs d'emplois et susceptibles de s'installer un jour en France, par an.

Dans un environnement concurrentiel, nous mettons ensuite tout en oeuvre pour convaincre l'investisseur d'opter pour le site France, et avec le territoire concerné nous organisons l'accompagnement du projet, et ce jusqu'à la décision finale. Ce partenariat s'avère nécessaire, car l'investisseur en question ayant reçu, en réponse à la marque d'intérêt qu'il a manifestée auprès de nous, des offres territoriales françaises, il va décider de venir un jour visiter les sites potentiels et rencontrer les responsables au niveau local ou national. Ce partage d'information est organisé de façon extrêmement construite, car nous disposons d'une base de données partagée, accessible aux territoires. Nous procédons chaque semaine à une mise à jour de l'information sur les nouveaux projets : ainsi chaque région, chaque territoire peut déterminer s'il souhaite soumettre une offre territoriale au bénéfice de l'investisseur potentiel.

Nous faisons plus que cela : nous avons ouvert il y a plusieurs années le réseau de l'AFII à l'étranger aux collectivités locales qui souhaitent réaliser elles-mêmes des actions de prospection afin de rencontrer à l'étranger des investisseurs potentiels. Chaque année, nous organisons hors de nos frontières une cinquantaine de missions de prospection qui réunissent, dans la phase de préparation et de réalisation, les agents des agences territoriales de développement économique, ainsi que ceux de l'AFII.

Nous avons également décidé de procéder, depuis – et avec – les territoires à un travail d'identification des entreprises étrangères non encore implantées en France. Cela permet à tel ou tel territoire de cibler l'entreprise qu'il souhaiterait convaincre de venir s'implanter, en raison du caractère jugé stratégique de son activité, dans son espace. C'est un chantier que nous menons avec les différentes régions françaises, afin d'identifier plusieurs centaines d'entreprises, qui, à partir de ce moment-là, feront l'objet d'une action de prospection, préparée avec les territoires. De cette façon, lors de notre premier contact avec ces entreprises, nous sommes déjà en mesure de lui proposer une ou plusieurs offres territoriales déjà prêtes.

Nous avons également, avec le soutien de la DATAR et en collaboration avec les agences régionales de développement économique, récemment publié un annuaire qui présente un double intérêt. Il offre d'abord une information extrêmement précieuse sur l'attractivité de chacune des régions françaises, avec des éléments très précis sur les atouts de chaque région, en particulier la présence d'entreprises d'excellence et de pôles de compétitivité, et sur les priorités stratégiques du développement économique. Il s'agit d'un outil d'information que nos équipes à l'étranger utilisent, mais qui illustre cette politique d'égalité des territoires, puisque chaque région y dispose de deux pages pour se présenter. Nous y voyons là un symbole.

Nous travaillons donc de façon extrêmement étroite et coordonnée avec les territoires.

Pour terminer, je voudrais partager avec vous quelques axes de réflexion relatifs à l'environnement très concurrentiel dans lequel nous évoluons. Nous sommes bien évidemment conscients des enjeux, en termes d'emploi, de notre action. Il faut garder à l'esprit que ces enjeux revêtent une importance comparable dans d'autres pays européens, ce qui explique qu'ils aient mis en place des moyens publics importants pour attirer les investissements créateurs d'emplois.

Nous considérons aujourd'hui qu'il n'y a plus de projets « captifs ». Un projet d'extension d'une capacité productive existante en France était auparavant appréhendé comme captif, et ne requérant donc guère de mobilisation de notre part. Cette situation appartient au passé. Qu'il s'agisse de création d'activités nouvelles ou d'extension de capacités existantes, tous les projets sont aujourd'hui discutés et nous les considérons tous comme sous forte concurrence. Nous en voulons pour preuve le fait que, dans les phases de restructuration, les groupes sont amenés à prendre leurs décisions concernant les pays où ils fermeront des unités, ou simplement « réduiront la voilure ». Instruits par l'expérience, nous sommes maintenant convaincus que nous devons être mobilisés, à l'échelle territoriale comme à l'échelle nationale, sur tous les projets, y compris les simples extensions.

Les investissements de pérennisation et de modernisation, qui conduisent à consolider l'existant, sont également extrêmement importants, et nous accentuons, avec les territoires, le suivi des groupes déjà implantés de façon à anticiper les difficultés et à les accompagner dans ces phases éventuelles d'incertitude.

Pour finir, nous accordons, ensemble, avec les territoires, une attention nouvelle aux projets à forte valeur ajoutée. Nous ne délaissons pas les projets dans les secteurs traditionnels, mais nous considérons que dans certains domaines les enjeux sont stratégiques, c'est le cas en particulier de l'innovation et de la recherche et développement. La France a accru son attractivité en cette matière dans la période récente, pour les entreprises qui veulent développer leurs activités de R&D en Europe, et donc dans notre pays. Le crédit impôt recherche et la dynamique des pôles de compétitivité n'y sont pas étrangers.

Autre enjeu stratégique, l'attraction etou le maintien en France des centres de décision, et singulièrement des quartiers généraux. En période de crise économique et de restructurations, il est essentiel que les centres de décision en Europe soient positionnés en France et que ceux qui y sont y demeurent.

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