Je remercie nos intervenants de ce jour pour leur éclairage très intéressant sur la vision de l'attractivité de la France et l'impact de la mondialisation sur les territoires. Lorsque l'on mentionne ce sujet, on pense immédiatement mondialisation et métropoles. Certes, nous avons besoin d'agglomérations de taille critique pour peser dans le concert international. La loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, en cours de discussion dans notre assemblée, donne un statut particulier à Paris, Lyon et Marseille, et un statut de métropole aux autres grandes villes, et propose une réponse institutionnelle prenant en compte certes diversité. Certes, elle brise le tabou de l'organisation uniforme des territoires, mais elle permet à ces métropoles de trouver leurs forces dans la compétition mondiale, plutôt que dans le seul territoire national.
Il n'y a que quelques villes capables en France de jouer dans ce concert, peut-être une dizaine ; se pose alors la question de savoir que faire du territoire par rapport à cette compétition. Le raisonnement classique, et dominant aujourd'hui, c'est celui qui repose, à partir de l'affirmation des métropoles, sur un « scénario d'entraînement », tant du pays en général que des territoires interstitiels. C'est la thèse de Laurent Davezies, dont le nom a d'ailleurs été cité, qui nous dit que les 6 plus grandes métropoles contribuent à 41 % du PIB et donc entraînent le reste du pays.
Je crois pour ma part que ce scénario n'est pas vérifié pour l'instant. Les inégalités territoriales non seulement persistent mais s'aggravent, en raison de la concentration des financements sur quelques pôles, de la compétition entre les territoires comme moteur de la compétitivité nationale, et du retrait de l'État des enjeux de solidarité territoriale, qui fait des collectivités territoriales des prestataires des politiques nationales.
Comment enrayer ce processus qui a pour conséquence que la mondialisation creuse les inégalités territoriales, au lieu de les réduire? Les politiques publiques doivent profiter des effets bénéfiques de la mondialisation pour en répartir les fruits de la meilleure façon possible. À cet égard, une « politique des liens » rendant systématique la coopération entre les territoires et incitant au partage des stratégies d'aménagement et de développement portées autour de chaque agglomération, pourrait être une proposition.
Le Gouvernement propose un cadre de négociation, qui pourrait être les conférences territoriales de l'action publique, débouchant sur des conventions territoriales pour expérimenter des coopérations ville-campagne pour des actions concrètes de réciprocité territoriale, tout en reconnaissant les spécificités du monde rural avec sa faible densité, sa vocation productive et agricole, ses enjeux paysagers et environnementaux. La capacité à construire des accords stratégiques entre territoires, sous le pilotage de l'État, me semble être l'un des moteurs possibles de l'égalité des territoires, et en tout cas l'un des outils de redistribution territoriale des richesses induites par la mondialisation.
Je ne crois pas, vous l'aurez compris, au scénario de l'entraînement de l'ensemble du pays par le développement des métropoles. Quelle est la position de la DATAR sur ce scénario, qui semble partagé par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective dans sa vision de la France à 10 ans ? Des politiques publiques ambitieuses de répartition territoriale des richesses induites par la mondialisation me semblent être un scénario préférable.