Je répondrai en deux points : d’abord sur le sujet en tant que tel, ensuite pour l’élargir et peut-être même interpeller le Gouvernement.
Premièrement, votre raisonnement, monsieur Abad, repose sur le constat suivant : il y a aujourd’hui un rétrécissement du marché du poker, il faut donc apporter des liquidités supplémentaires. Développer le marché implique d’accroître le niveau de liquidités. La spécificité de ce modèle économique est que l’attractivité du secteur est liée à l’accroissement de la liquidité.
Cela étant, il y a deux façon de comprendre le rétrécissement du marché. On peut se borner à constater qu’après des investissements faramineux en publicité et en développement, la mode du poker, après tout, est un peu passée. Mais on peut également considérer que le besoin de toujours plus de liquidité est intrinsèque à la structure économique du poker en ligne. En tant que rapporteur, je m’y oppose, car cela fait penser à l’idée d’un ogre devenant incontrôlable et qui, pour continuer à grossir, doit être nourri de liquidités et de marchés en quantités toujours plus importantes, quelles que soient les conditions de régulation que cela exige.
Deuxièmement, vous avez évoqué, à juste titre, la position de l’Autorité de régulation des jeux en ligne, l’ARJEL, et c’est précisément là-dessus que je souhaiterais interpeller le Gouvernement. Lors des auditions, l’ARJEL nous a exposé l’ensemble des reconnaissances réciproques, la situation de certaines tables de poker internationales, la nécessité de mutualiser au plus vite dans certains domaines et dans certaines variantes pour éviter de voir s’installer des marchés fonctionnant sur des sites alternatifs non reconnus. Le travail de régulation dans ce domaine est mené par l’ARJEL et le ministère – il est d’ailleurs très symbolique que nous terminions notre débat en évoquant le rôle d’une agence ; les agence sont du reste souvent été citées tout au long de l’examen de ce projet de loi relatif à la consommation.
Disons les choses très franchement devant la représentation nationale : l’ARJEL nous a dit, lors des auditions publiques que nous avons menées, qu’elle était prête à jouer ce rôle et que nous avions quasiment atteint le niveau de faisabilité avec Bercy. Malheureusement, lorsque nous avons consulté le Gouvernement, nous nous sommes aperçus que le compte n’y était pas.
Le législateur interpelle donc le Gouvernement sur le rôle des agences, sur la tonalité de leurs discours, sur la manière dont elles interviennent dans le débat public. Il y a une grande différence entre une direction – nous avons pu le voir notamment avec le rapport réalisé par la DGCCRF dans le cadre du travail sur cette loi – et les agences. La question est posée.
En tout état de cause, sur l’amendement no 262 , la commission a émis un avis défavorable. Il reste que, sur le principe, les agences abordent souvent, dans le cadre des auditions, des questions auxquelles l’exécutif n’a pas forcément réfléchi, et dont les parlementaires peuvent aussi se saisir. Pour cela, une clarification est en tout cas nécessaire.