La situation de Chambord est unique en France, puisqu'il s'y trouve sur un même territoire une commune et un établissement public industriel et commercial – le château de Chambord. Cela impose de définir précisément la domanialité de chacune des parties du territoire. Or, l'amendement qui a introduit l'article 84 ter, adopté par le Sénat contre l'avis du Gouvernement, a remis en cause diverses règles dans un sens défavorable à ce territoire. Le Conseil d'État avait déjà tranché la question de la domanialité l'an dernier dans un avis rendu en assemblée générale. Selon lui, « sous la seule réserve de la forêt, qui relève du domaine privé par détermination de la loi, le domaine national de Chambord appartient dans sa globalité au domaine public de l'État ».
Le dispositif adopté par le Sénat aboutirait à tout faire relever du domaine privé : il est en effet prévu que fassent partie du domaine privé de l'État les biens lui appartenant situés sur le territoire de la commune de Chambord, à l'exclusion du château, de ses dépendances attenantes et de son parc. Or il paraît curieux d'affirmer un principe et, dans le même temps, de prévoir des exclusions réduisant ce principe à néant. C'est un peu comme un couteau sans manche qui n'aurait plus de lame… Contrairement aux affirmations de ses auteurs, cet amendement ne résout en rien les rapports difficiles entre la commune et l'établissement public, qui partagent le même territoire. Il a pour unique effet, fort nuisible, d'empêcher le retour à la normale de la situation des commerçants devant prochainement renoncer aux baux commerciaux dont ils jouissent depuis quatre-vingt-dix ans pour pouvoir bénéficier d'autorisations d'occupation du domaine public – ce régime devenant désormais la norme applicable aux commerces situés sur le territoire du château et de la commune. Ces commerces sont aussi censés être prochainement indemnisés par l'État, pour sortir d'une situation de bail qui n'est plus juridiquement possible aujourd'hui.
C'est donc dans l'intérêt du château de Chambord, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, qu'il nous faut supprimer l'article adopté par le Sénat et en revenir aux dispositions en vigueur. Le président Brottes a d'ailleurs déposé un amendement identique.