Intervention de Nicole Ameline

Séance en hémicycle du 8 janvier 2014 à 15h00
Agriculture alimentation et forêt — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Ameline :

Deuxième question essentielle, la terre. C’est l’outil de base, dont la disparition trop rapide risque de constituer la première atteinte à l’environnement, en particulier à des régions comme la mienne, la Normandie et le Pays d’Auge, où les conflits d’usage sont poussés à l’extrême. Personnellement, je n’oppose pas l’environnement et la production agricole. La disparition des exploitations serait la première atteinte à l’environnement.

Or force malheureusement est de constater que les efforts et les cadres de référence pour préserver l’outil agricole ne suffisent pas. L’Irlande et le Canada ont pris des mesures drastiques. Dans les zones de production à haute valeur ajoutée, pas uniquement les AOP ou les AOC, mais dans les zones où il y a véritablement un enjeu agricole d’intérêt national, il faut que nous ayons des mesures de classement, à l’image de ce que nous faisons pour les territoires naturels ou littoraux.

Il y a un intérêt national, un enjeu d’intérêt général. Les commissions départementales doivent avoir des compétences renforcées, mais plus encore, il faut créer une véritable gouvernance territoriale au niveau départemental, qui associe toutes les administrations de l’État. La simple référence à l’agriculture ne suffit pas : comme l’a dit à l’instant Mme Le Callennec, il faut que les administrations en charge de l’environnement travaillent beaucoup plus avec l’agriculture sur le terrain pour préserver l’outil agricole.

Je souhaiterais également que les SAFER puissent bénéficier de pouvoirs renforcés, notamment vis-à-vis des agrandissements hors de contrôle afin que leur action soit véritablement efficace, notamment en faveur des jeunes agriculteurs, qui doivent dorénavant être les premiers bénéficiaires des politiques publiques.

J’insiste sur le caractère irréversible de l’artificialisation des terres : lorsque des territoires entiers sont artificialisés, il n’y aura pas de retour possible. Nous ne savons pas ce que l’avenir nous réserve ni ce que sera l’agriculture dans cinquante ans ; ce que nous savons en revanche, c’est qu’elle dépendra de ce que nous déciderons aujourd’hui ensemble.

Troisième élément sur lequel je souhaite intervenir, le revenu agricole. Dans les régions d’élevage, la contractualisation est certes le modèle de référence, mais il faut impérativement veiller à ce que l’équilibre soit bien respecté, et qu’il n’y ait pas de distorsion au détriment des producteurs. Or c’est précisément là qu’il peut y avoir un risque, monsieur le ministre ; j’aimerais que vous nous précisiez les mécanismes de surveillance qui permettront de garantir ce respect de la contractualisation et des intérêts des producteurs.

Enfin, je voudrais tout simplement insister sur la reconnaissance et la considération que nous devons à l’agriculture. Nous qui sommes particulièrement sensibilisés sur ces bancs, nous répétons que l’agriculture est une force pour la France. Il s’agit d’hommes et de femmes particulièrement dévoués et attachés à leurs exploitations. Il faut, comme tous les secteurs économiques l’exigent, baisser les charges et faire en sorte que les conditions d’exploitation deviennent acceptables, vivables.

Quelles que soient nos carrières ou notre situation sociale, nous avons souvent des origines agricoles. Je peux attester qu’aujourd’hui, une foule de jeunes sont parfaitement capables de prendre la relève, de faire de la France le pays de référence, et probablement l’un des pays les plus compétitifs dans le monde. Aidez-les, écoutez-les, et faites en sorte que cette loi soit une véritable opportunité. Les amendements que nous défendrons y concourront ; je vous demande de leur accorder toute l’attention qu’ils méritent. La situation est grave pour beaucoup d’agriculteurs en France ; ils nous écoutent.

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