Intervention de Nicolas Dhuicq

Séance en hémicycle du 10 janvier 2014 à 15h00
Agriculture alimentation et forêt — Après l'article 18

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dhuicq :

Il s’agit d’un amendement de repli.

Comme vous l’avez fort justement dit, monsieur le rapporteur, la Convention de Berne a été signée il y a presque quarante ans. Dans l’intervalle, l’espèce de mammifère homéotherme dont nous parlons, extrêmement futée et adaptative, a progressé, comme il se devait, y compris parfois avec l’aide de l’homme, en particulier en Italie du Nord. Là-bas, l’adaptation de l’animal semble à peu près correcte, mais il suffit, pour mesurer l’ampleur du problème, de voir le nombre de départements français touchés et, surtout, la désespérance des éleveurs, le drame que représente pour eux le fait de voir leurs brebis égorgées ; ils voient mourir leurs bêtes dont la chair pend en lambeaux et sont parfois obligés de les achever.

On parle du bien-être animal, mais – je suis désolé de le dire – je pense que notre devoir est de nous occuper d’abord de l’homme et ensuite de nos animaux domestiques et de compagnie. Accessoirement, dans les attaques du loup, il y a aussi une atteinte à la propriété privée – en l’occurrence, celle des éleveurs. C’est pour eux un choc terrible, surtout quand on connaît les conditions dans lesquelles se pratique l’élevage. On l’a vu, nous essayons, d’un côté comme de l’autre de cet hémicycle, de faire en sorte que nos éleveurs continuent à vivre de leur travail, malgré le prix des intrants qui augmente et celui des animaux à la vente qui est extrêmement faible.

Cet amendement a été cosigné par plusieurs de mes collègues : Mme Genevard, M. Myard, Mme Fort, M. Hetzel, Mme Duby-Muller, M. Le Fur – les Bretons se souviennent, comme l’Est de la France, qu’au XVIIe siècle c’était là qu’étaient les concentrations les plus fortes de ces canidés sauvages –, Mme Poletti, Mme Louwagie, M. Morel-A-L’Huissier, M. Gosselin, M. Voisin, M. Saddier, Mme Zimmermann et M. Nicolin.

Je les ai cités parce que je tiens à les remercier : il n’est pas facile, à notre époque, de rappeler ce qu’est un animal sauvage. Nous avons parlé de chasse tout à l’heure, notamment des cervidés – grandes pattes ou chevreuils –, mais aussi de cochons, comme le sanglier – animal fort subtil au demeurant. Eh bien, ces animaux sont les proies du loup, car il s’agit bien d’un prédateur. Cet animal est infiniment respectable, mais ce n’est pas un chien sauvage ; c’est bien un prédateur.

À travers cet amendement, nous vous proposons de donner aux préfets la possibilité à l’éleveur concerné, dès la première attaque de loup constatée sur un troupeau, une autorisation de tir de prélèvement valable pour une durée de six mois. En effet, les tirs d’effarouchement ne servent à rien, car on est face à un animal intelligent.

Je finirai en parlant d’un des maires de ma circonscription, en charge de la commune la plus à l’est de mon département, juste avant le mémorial du général de Gaulle à Colombey-les-Deux-Églises. Le maire de Lignol-le-Château est aussi lieutenant de louveterie. Souvenez-vous, mes chers collègues, du sens de ce terme qui n’a pas été choisi par hasard. Souvenez-vous de tous les lieux-dits qui rappellent, sur notre territoire, la présence du loup. Souvenez-vous de tous les contes populaires.

Eh bien, voilà plusieurs nuits que cet homme, excellent chasseur, voit une, deux ou trois brebis égorgées à chaque fois. Il veille parfois jusqu’à quatre ou cinq heures du matin. S’il se couche à quatre heures et demie du matin, le loup attaque à cinq heures. Je vous invite d’ailleurs, mes chers collègues, à venir visiter nos régions de l’Est, car il y a beaucoup de choses à y voir. Les chasseurs sont les bienvenus, mais aussi ceux qui adorent le champagne. Néanmoins, il n’y fait pas très chaud ; ce n’est pas tout à fait la Côte d’Azur.

Pour en revenir au chasseur dont je vous parle, si expérimenté qu’il soit, il n’arrive pas à tirer cet animal – ou, plus probablement, ces cinq ou six animaux, car il ne s’agit sans doute pas d’un animal isolé. Pendant ce temps-là – nos collègues le rappelaient –, au cours de l’année 2013, entre quatre et huit agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage ont passé leurs journées à essayer de les photographier. Grâce à Dieu, ou à qui vous voulez, nous avons obtenu, au bout de trois mois, une photo permettant d’identifier au moins l’un des animaux qui a des oreilles courtes et un museau allongé. Bref, donnons au moins la possibilité à nos bergers de se défendre.

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