Ce texte, loin d'être anecdotique, vise à consolider un dispositif de solidarité intergénérationnelle à la fois innovant et adapté à l'emploi saisonnier. Il répond à la question essentielle de l'insertion des jeunes dans une activité professionnelle qui est l'une des modalités de l'emploi pluriactif propre à la montagne. En tant que législateurs, nous avons la responsabilité de tout mettre en oeuvre pour gagner la bataille pour l'emploi. Nous devons à ce titre saluer les différentes initiatives spontanées prises par cette profession qui doit l'absence de chômage chez les moniteurs à son organisation spécifique et innovante, et non à la taille des flocons.
Les moniteurs étant des travailleurs indépendants, leur activité n'est soumise à aucune limite d'âge : plus de 50 % de ceux de plus de soixante-dix ans et 10 % de ceux de plus de quatre-vingts ans sont toujours en activité ! Après avoir très longuement négocié, 94,86 % des « pulls rouges » ont pris la courageuse décision d'instaurer le pacte intergénérationnel lors de leur assemblée générale de novembre 2012. On saluera la double ambition de favoriser l'insertion des jeunes et de mieux accompagner la cessation d'activité de leurs aînés, cela dans le même esprit, du reste, que les contrats de génération mis en oeuvre par le Gouvernement quelques semaines plus tard.
Innover, c'est aussi prendre le risque de se heurter à des résistances, comme celle des « papys en pull rouge », peu nombreux, invoquant une discrimination fondée sur l'âge. Le tribunal de grande instance de Grenoble leur a donné raison avant que sa décision ne soit annulée par la cour d'appel, celle-ci ayant jugé « légitime » l'objectif d'intégrer des jeunes moniteurs diplômés au sein des ESF. C'est à ce stade que nous intervenons. Le texte prévoit que les moniteurs seniors appelés en renfort bénéficient d'une distribution d'activité leur permettant de valider au minimum deux trimestres de cotisation retraite au titre de chaque saison. Ils ont de surcroît la liberté d'exercer en dehors des ESF avec leur propre clientèle – souvent constituée au cours de leur carrière au sein des mêmes ESF –, avantage dont les jeunes moniteurs ne bénéficient pas.
Nous savons tous que l'insertion dans l'emploi et la cessation d'activité sont des moments clés et qu'à travers les dispositions proposées, c'est le renouvellement des générations qui est en jeu et la pérennisation d'un métier qui renforce l'attractivité des territoires de montagne. Les moniteurs, les guides, les accompagnateurs, les moniteurs de kayak ou d'escalade sont des acteurs indissociables de nos massifs : sans eux, pas d'apprentissage, pas de découverte. En tant que président de la commission permanente du Conseil national de la montagne, je suis très sensible à tous ces métiers de passion qui sont aussi des métiers d'avenir.
Le présent texte vise à sécuriser juridiquement le dispositif de solidarité intergénérationnelle. Il s'agit, j'y insiste, d'un texte équilibré et c'est pourquoi je l'ai cosigné. Un moniteur me disait hier que le pacte intergénérationnel était une mesure de bon sens et qu'il avait d'ailleurs de lui-même commencé à réduire son activité à quelques années de la retraite – ne serait-ce que pour des raisons fiscales ! Ouvrir la porte des ESF aux jeunes moniteurs, bâtir des équipes pluri-générationnelles, les apprentis skieurs de nos stations, petites ou grandes, ont tout à y gagner ! Les moniteurs et le ski français ont une belle histoire. Émile Allais, premier moniteur et premier médaillé olympique n'est malheureusement plus là pour nous le rappeler – il est mort il y a deux ans à l'âge de 100 ans ! C'est aux jeunes générations de continuer d'écrire cette histoire sur les pages blanches de la montagne avec la complicité des anciennes générations qui connaissent bien le sens de l'expression « se passer le flambeau ».