Pour la première fois, une loi cadre affirme l’ambition d’une approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes portant sur l’ensemble des politiques menées par l’État et les collectivités territoriales. C’est en agissant avec force et dans tous les domaines que l’on fera avancer les droits des femmes pour toutes les femmes, car il existe des inégalités entre elles et les stéréotypes sexistes aggravent les inégalités sociales. La délégation aux droits des femmes adhère pleinement aux objectifs du projet de loi. Dès le printemps dernier, nous avons commencé à travailler pour enrichir le texte.
Je remercie tous ses membres de leur investissement, en particulier les quatre qui ont été nommées rapporteures : Brigitte Bourguignon pour la parité, Edith Gueugneau et Monique Orphé pour la lutte contre les violences et Barbara Romagnan pour l’égalité professionnelle. Chacune insistera sur les titres dont elle a la charge. J’ai coordonné le travail collectif qui se conclut par une centaine de recommandations.
Vous vouliez un texte vivant, madame la ministre, il l’est : il a connu des modifications au Sénat et arrive à l’Assemblée, assorti de soixante-dix dispositions. Son architecture et sa construction demeurent symboliquement fortes : le titre I est relatif à l’égalité professionnelle, dont découlent toutes les autres formes d’égalité. Il permettra notamment aux femmes de rattraper enfin leur retard salarial
Par ailleurs, le projet de loi comporte la réforme phare du congé parental. Même si la délégation aux droits des femmes appelle de ses voeux un congé plus court et mieux rémunéré, l’approche est intéressante car, pour la première fois, les pères seront invités à s’impliquer. En s’attaquant à des stéréotypes tenaces, on agit véritablement pour changer la vie quotidienne.
Deux amendements ont fait l’actualité du week-end : ils sont, disons-le avec force, particulièrement bienvenus pour sécuriser le droit à l’avortement. Le gouvernement conservateur espagnol nous fait prendre conscience que les droits ne sont jamais définitivement acquis, que nous devons rester vigilantes et vigilants et que la France doit être le fer de lance du combat pour les droits des femmes sur la scène internationale, en particulier au sein de l’Union européenne, ce à quoi vous savez travailler, madame la ministre.
Je laisse aux rapporteurs le soin de détailler les titres de ce projet de loi et je terminerai mon propos en appelant l’attention sur un sujet évoqué par le rapport de la délégation, mais qui ne peut figurer dans la loi car il est d’ordre réglementaire : la féminisation des titres et des noms de métiers et de fonctions. Yvette Roudy avait jadis mis en place une commission qui a travaillé pendant trois ans sous la direction de Benoîte Groult pour aboutir à une circulaire ; mais les résistances sont fortes, y compris chez certaines femmes qui ont des responsabilités. Le masculin, considéré comme l’ordre universel, assure-t-il mieux l’autorité ? La langue est le fondement du symbolique et le miroir de nos rapports de force. L’usage du masculin rend invisible l’accession des femmes aux nouvelles fonctions. Comment les filles peuvent-elles se projeter dans ce qui n’est pas nommé ?
En conclusion, mes chers collègue, je veux souligner à nouveau l’importance de ce texte et de notre débat. L’attente et le soutien dont font l’objet dans l’opinion publique les grands enjeux d’égalité, de parité et de lutte contre toutes les violences ne se démentent pas.
La loi renforcera l’effectivité des droits. Cependant, nous savons toutes et tous, comme le rappelait Simone de Beauvoir, que « rien n’est jamais définitivement acquis » et qu’« il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question ». « Votre vie durant », concluait-elle, « vous devrez rester vigilantes ». Des bastilles psychologiques restent à abattre. C’est par l’éducation, la lutte contre les stéréotypes et le changement des comportements que tomberont les forteresses ; la loi constituera un point d’appui solide pour continuer le combat.