Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du 20 janvier 2014 à 16h00
Égalité entre les femmes et les hommes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mesdames et monsieur les rapporteurs, chers collègues, le combat pour l’égalité des droits connaît en France des avancées notables, dont nous pouvons être fiers. Le mariage pour tous, bien sûr, mais aussi, concernant les femmes, un ministère de plein exercice, un gouvernement paritaire et, aujourd’hui, cette loi-cadre. Ce volontarisme gouvernemental va dans le bon sens et fait écho aux attentes des courants féministes, qui demeurent mobilisés. Car cette égalité tant de fois proclamée est encore loin d’être atteinte, en France comme ailleurs.

Nous, les femmes, représentons 52 % de la population mondiale, effectuons 66 % des heures de travail et produisons 50 % des richesses nationales. Mais nous ne possédons que 2 % des terres, recevons moins de 5 % des prêts bancaires, et 70 % des pauvres sont des femmes. La sous-représentation aux postes de décision économique ou dans les institutions est tout aussi alarmante. Les combats à mener sont encore nombreux, d’autant que certains de nos droits semblent fragiles. En France, par exemple, si, grâce à notre majorité, l’IVG est prise en charge à 100 %, en pratique, permettre aux femmes de faire une IVG sans s’expatrier n’est pas toujours facile : délais des consultations, manque de praticiens, fermetures de centres IVG.

Renforcer la protection des femmes qui souhaitent recourir à une IVG – comme cela est proposé dans le projet de loi – est certes important, mais il faut aller plus loin et permettre réellement aux centres IVG de fonctionner sur l’ensemble du territoire. Pour qu’avorter puisse être réellement un droit accessible à toutes celles qui le souhaitent, beaucoup reste à faire, en France comme ailleurs.

En Espagne, les récentes annonces gouvernementales sont d’ailleurs d’une gravité sans précédent. Remettre en question le droit à l’avortement – droit fondamental conquis de haute lutte comme une reconnaissance du droit de disposer de son corps, de maîtriser sa sexualité et de décider de sa parentalité – est une terrible régression, dont les premières victimes sont les femmes !

Rappelons-le : reculer, en matière d’égalité, n’est pas digne d’un État de droit ! Les mouvements féministes et au-delà, notre société tout entière, doivent sans cesse faire preuve de combativité et de vigilance. Les lois – comme celle-ci – constituent un outil essentiel au combat pour les droits des femmes. C’est pourquoi, si nous nous réjouissons de l’existence de ce texte, nous serons force de propositions pour aller plus loin encore, pour forcer les habitudes, les comportements et les mentalités.

Je pense aux violences faites aux femmes, au renforcement de la parité dans les entreprises, ou aux pénalités à l’encontre des partis politiques, notamment sur la deuxième fraction de leur financement, à la question de l’identité de genre et à la procédure de changement de sexe, ou encore aux enjeux autour de l’égalité professionnelle.

Nous ferons des propositions pour plus de fermeté envers les inégalités salariales ou en matière de parité ou d’accès aux postes à responsabilités. Ces inégalités reposent principalement, on le sait, sur l’ombre de la maternité. Seuls 6 % des hommes effectuent un changement dans leur vie professionnelle après l’arrivée d’un enfant, contre 40 % pour les femmes.

Les conséquences sont connues : temps partiels, carrières morcelées, chômage de longue durée, ou encore faiblesse des retraites et dépendance vis-à-vis du conjoint. Et la réforme des retraites votée il y a peu n’a pas toujours aidé. Avec l’allongement de la durée de cotisation, les femmes vont encore subir une décote plus importante. Nous avons déposé plusieurs amendements pour revenir sur ces injustices.

Mais, pour en revenir au soupçon de maternité qui pèse sur l’ensemble des femmes, une des solutions réside dans la mise en place d’un véritable service public de la petite enfance. Nous y reviendrons au cours des débats. De même, rendre le congé parental paritaire permettra de favoriser l’investissement à part égale des deux parents dans la sphère familiale et de contrer les éventuelles réticences des employeurs à embaucher des jeunes femmes. Mais, pour ce faire, il convient de mieux le rémunérer.

Permettez-moi également de vous faire part de mon inquiétude quant aux intermittentes du spectacle. J’espère que leur situation particulière sera bien prise en compte lors des négociations qui viennent de s’ouvrir. En outre, afin de contribuer à un partage des responsabilités plus paritaire entre les parents, j’ai déposé, avec d’autres, un amendement renforçant la médiation, étape déterminante en faveur de la garde alternée en cas de séparation.

Avant de conclure, je souhaite insister sur la priorité qui doit être donnée à la construction d’une culture de l’égalité entre les genres. Ces stéréotypes sont au fondement de la plupart des inégalités ainsi que des violences symboliques ou réelles qui touchent les femmes, mais aussi les transsexuels ou les homosexuels. L’éducation et l’école ont ici un rôle majeur à jouer. Et nous nous réjouissons du rôle attribué au CSA en la matière car les médias et la culture ont aussi leur part à prendre dans cette lutte contre les stéréotypes.

En conclusion, je souhaite rappeler notre sincère soutien à la politique menée par le Gouvernement en matière d’égalité femmes-hommes, combat que nous partageons et pour lequel nous sommes force de propositions.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion