Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, faire une loi, c’est déjà reconnaître qu’il y a un problème ; c’est reconnaître que l’on doit et que l’on peut le résoudre, ou du moins que l’on doit y contribuer. Ainsi que cela a été rappelé, une femme meurt sous les coups de son conjoint tous les deux jours et demi ; les femmes représentent 82 % des travailleurs à temps partiel, avec les conséquences que l’on sait en termes de précarité et de retraite ; les femmes ont encore des salaires inférieurs de 27 % à ceux des hommes ; elles sont toujours tenues à l’écart des lieux de pouvoir, en politique comme dans l’entreprise, même si des progrès ont été enregistrés dans le domaine politique.
Cette situation n’est ni une fatalité, ni une catastrophe naturelle qui nous tomberait dessus sans que l’on n’y puisse rien : elle est le résultat d’un rapport de forces entre les hommes et les femmes – ce qui ne signifie pas que toutes les femmes sont de pauvres victimes, ni que tous les hommes sont de méchants agresseurs. Ni les femmes, ni les hommes ne peuvent se satisfaire de cette situation. Cette question étant très politique, la représentation nationale se devait donc de s’en saisir. C’est désormais chose faite, et c’est très bien ainsi !
Ce projet de loi est également important parce qu’il s’inscrit dans un contexte politique qui, à mon sens, lui donne de la force et de la crédibilité, car il est proposé par le premier gouvernement paritaire de l’histoire, représenté par une ministre de plein exercice. Cest aussi ce gouvernement qui a mis en place le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, et qui prend en compte la lutte contre les discriminations et les stéréotypes sexistes dans les lois qui s’y prêtent ; et à mon sens, toutes les lois s’y prêtent ! En effet, les inégalités entre les hommes et les femmes sont partout, de façon plus ou moins visible ; elles se renforcent et s’entretiennent les unes les autres.
L’on voit ici une des autres qualités de ce projet de loi, essentielle à mon sens : il prend en compte le caractère systémique et cumulatif de ces discriminations et, en conséquence, adopte une approche transversale.
Adopter une approche transversale, c’est considérer que les violences, la précarité, les inégalités dans la vie personnelle et professionnelle, ainsi que l’exclusion des lieux de pouvoir sont étroitement liées. Le couple n’est pas toujours un havre de paix, pour répondre à ce que disait tout à l’heure Mme Greff : il reproduit très souvent les inégalités existant dans la société et les entretient, très souvent à l’encontre des femmes mais également, je tiens à le souligner, souvent à l’encontre des pères, les hommes n’étant jamais considérés comme tels et n’en ayant souvent pas les droits.
Pour ma part, je m’attacherai aux questions de travail et de précarité. L’un des noeuds des inégalités entre les femmes et les hommes au travail résidant dans la très inégale répartition des tâches et des responsabilités familiales, le texte prévoit la réforme du congé parental, qui passera ainsi de trois ans à deux ans et demi, plus six mois pour le deuxième parent – le plus souvent le père. Cela permet de décharger quelque peu la mère, matériellement et psychologiquement, et de reconnaître un peu plus l’homme dans son rôle de père ; je crois aussi qu’il s’agit d’un progrès très important pour les enfants.
Il s’agit d’une première étape ; mais celle-ci devra rapidement s’orienter vers un congé beaucoup plus court. En effet, l’éloignement prolongé du travail pose problème au moment de retrouver une bonne situation professionnelle, ou tout simplement de retrouver un emploi. Plus court, ce congé devra également être partagé à égalité entre les hommes et les femmes, et être beaucoup mieux indemnisé.
Pour autant, toutes les femmes ne sont pas des mères, et les difficultés auxquelles les femmes, mères ou non, sont confrontées au travail ne se limitent pas à la difficile conciliation entre la vie privée et la vie publique.