Intervention de Axelle Lemaire

Séance en hémicycle du 21 janvier 2014 à 21h30
Égalité entre les femmes et les hommes — Article 5 c

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAxelle Lemaire :

Monsieur la députée (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC), certains de nos collègues proposent de réintroduire le mot « détresse » dans le code de la santé publique. On se souvient de cet épisode tragique, en Irlande, lorsqu’une femme à qui l’IVG avait été refusée est décédée d’une septicémie. La même année, des établissements hospitaliers allemands constataient que les femmes polonaises étaient de plus en plus nombreuses à traverser la frontière pour demander un avortement par crainte de sombrer dans l’illégalité. Cette femme en Irlande, ces femmes polonaises étaient-elles placées dans une situation de détresse ? Peut-être. Mais qui pouvait en juger ? À cette question, le droit français apportait jusqu’à peu une réponse pour le moins paradoxale : seule la femme pouvait juger de son état de détresse, mais cet état devait obligatoirement préexister à une demande d’avortement.

En vérité, le droit d’accès à l’IVG existait sous la forme d’un compromis purement politique, né en 1975, pour permettre l’adoption de la loi Veil. Oui, à condition de sous-entendre que la femme soit victime d’une situation dont elle n’est pas totalement maître puisque son état d’abandon, de solitude morale et d’angoisse l’accable. Cette lecture, qui date, ne répond plus à la réalité vécue par 36 % des femmes en France aujourd’hui, ces femmes qui se sont approprié ce droit pour le transformer en une liberté de choix pleine et entière de disposer de leur corps.

Il était temps que notre droit intègre cette évolution, en l’inscrivant dans ce code rouge qui consacre la rencontre entre un moment, une évolution sociétale et la volonté du peuple. Qu’importe si cette disposition relative à la détresse n’emporte pas d’effet juridique ou pratique dans les faits. Les mots ont un sens,…

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