La liberté de circulation des travailleurs, qui est une des composantes de la liberté de circulation des personnes, trouve un obstacle dans le fait que chaque État conserve le droit de subordonner l'accès d'une profession donnée à une qualification spécifique, en général celle obtenue sur le territoire national.
C'est pourquoi la directive de 2005 sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui s'adresse aux travailleurs migrants, vise à favoriser la reconnaissance des qualifications professionnelles afin d'améliorer la mobilité en Europe, tout en assurant de conditions de formation minimale susceptibles d'assurer la meilleure protection tant des travailleurs que des usagers ou clients de leurs services, notamment dans le domaine de la santé.
Les règles actuellement en vigueur sous l'empire de cette directive sont fonction tant de la durée de l'exercice que de la profession exercée. Les règles relatives à la prestation de service temporaire sont les plus souples, tandis que les professions dites « sectorielles », c'est-à-dire pour lesquelles les exigences minimales de formation ont été harmonisées au niveau communautaire (médecins, infirmiers responsables de soins généraux, dentistes, vétérinaires, sages-femmes, pharmaciens, architectes), bénéficient du régime le plus simple de reconnaissance automatique des diplômes.
Malgré ce système de reconnaissance des qualifications, la mobilité référencée des travailleurs demeure faible.
Les professionnels se déplaçant à l'étranger et bénéficiant de la procédure d'établissement demeurent peu nombreux. Sur la période 1997-2011, on recense en moyenne 15 600 demandes sur chaque exercice. En 2011, les plus mobiles dans le cadre de cette procédure étaient les enseignants dans l'enseignement secondaire- (5 877), les moins mobiles étant les assistants dentaires- (4). Ces professionnels avaient majoritairement obtenu leurs qualifications dans 5 des pays de l'Union : la France – (8 %), la Grèce – (12 %), l'Allemagne – (11 %), le Royaume-Uni – (7 %), et la Roumanie – (10 %). De même, cinq pays attractifs concentraient plus de 70 % des demandes de reconnaissance des qualifications professionnelles, à savoir le Royaume Uni – (24 %), la Belgique – (15 %), Chypre – (15 %), la Suisse – (11 %), et la Suède – (8 %).
Les chiffres attestent aussi d'une faible mobilité temporaire. Sur la période 2007-2001, on enregistre 3 000 déclarations, dont 405 pour la seule année 2011. Les professionnels concernés venaient à 43 % de la République Tchèque, 11 % de Slovaquie, 5 % d'Allemagne, 4 % de Pologne et 4 % d'Irlande ; 40 % d'entre eux se sont rendus en Autriche, 14 % en Pologne, 11 % au Royaume-Uni, 10 % au Danemark, et 6 % en France.
Une analyse rapide de ces chiffres conduit à deux remarques. D'une part, il apparaît évident que ces faibles chiffres ne reflètent qu'une infime partie de la mobilité des travailleurs en Europe, et il conviendra d'en préciser les raisons. Pourquoi tant de travailleurs ne font-ils pas reconnaître leurs qualifications ? Est-ce à dire que cette directive n'est pas vraiment utile ? D'autre part, peut-on réellement, dans ces conditions, se fier à toutes les données sur la provenance des travailleurs ? Y'a-t-il des pays qui ont plus recours que d'autres à la reconnaissance des qualifications ou le faible recours à cette procédure est-il également réparti dans les pays de l'Union ?
Prenant acte de cette situation, la Commission européenne a proposé une simplification des règles de la directive avec pour objectif de renforcer la mobilité professionnelle et le commerce des services, mais aussi de répondre à la pénurie de main d'oeuvre qualifiée dans certains secteurs - santé, éducation, construction, services aux entreprises – et, enfin, d'offrir plus de possibilités aux demandeurs d'emploi, et notamment les jeunes, traditionnellement plus mobiles et actuellement fortement touchés par le chômage.
Pour cela, elle s'est appuyée sur un certain nombre de modifications. Parmi les principales, l'introduction d'une carte professionnelle européenne - c'est en réalité un certificat électronique - a pour objectif de simplifier les procédures permettant la reconnaissance des qualifications dans le cadre d'un établissement dans un autre État membre ou de la prestation temporaire, avec instauration du principe de l'accord tacite en cas d'absence de réponse dans les quatre mois à la demande de carte professionnelle européenne.
La mise en place de cadres de formation communs et d'épreuves communes de formation a pour sa part comme objectif d'introduire une plus grande automaticité dans la reconnaissance des qualifications actuellement couvertes par le système général.
L'introduction, pour les professions réglementées, d'un mécanisme de notification à la Commission et d'un système d'évaluation mutuelle obligerait les États membres à fournir une liste de leurs professions réglementées et de justifier leur nécessité.
La mise à jour des exigences minimales applicables à certaines professions sectorielles permettrait de préciser la durée de formation minimale pour les médecins - réduction de 6 à 5 ans pour le socle de base, les infirmiers responsables de soins généraux : relèvement de la formation générale requise de 10 à 12 ans - études secondaires et post-bac, les sages-femmes : relèvement de la formation générale requise à 12 ans - études secondaires et post-bac, et les architectes : proposition de système double avec des études à temps plein de 5 ans ou 4 ans plus deux ans de stage.
Autre innovation qui n'est pas sans faire débat : l'introduction du principe d'accès partiel, sous réserve que l'activité professionnelle puisse être objectivement séparée des autres activités de la profession réglementée dans l'État membre d'accueil, avec pour exception possible les raisons impérieuses d'intérêt général, notamment dans le cas des professions de santé.
Enfin, la Commission a souhaité inclure la qualification des notaires dans le champ de la directive et permettre la reconnaissance des stages pour les professionnels partiellement qualifiés.