Commission des affaires européennes

Réunion du 12 décembre 2012 à 16h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CSP
  • directive
  • profession
  • qualification
  • reconnaissance

La réunion

Source

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 12 décembre 2012 à 16 h 30

Présidence de M. Jérôme Lambert, Vice-président de la Commission, puis de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 16 h 30

I. Communication de M. Christophe Léonard sur la gestion des fonds structurels par les régions

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Président, mes chers collègues, alors que se dessinent actuellement les contours de l'acte III de la décentralisation et que sont en discussion les modalités de la politique de cohésion 2014-2020, il nous a semblé important de procéder à un point rapide d'information sur la question de la délégation aux collectivités locales, et notamment aux régions, de l'autorité de gestion des fonds européens. Le projet de loi sera adopté en Conseil des ministres courant février 2013.

Rappelons pour mémoire que l'enveloppe sur la programmation 2007-2013 FEDER et le FSE est pour la France de 14 milliards d'euros (dont 4 milliards pour les DOM), celle du FEADER de 7,6 milliards d'euros, et celle du FEP de 4,3 milliards d'euros. Comme vous le savez, ces fonds, FEDER et FSE, qui relèvent de la politique de cohésion, mais aussi le FEADER, qui relève de la PAC, et le FEAMP, qui relève de la PCP et remplace le FEP, sont actuellement gérés, au niveau régional, par le préfet de région. Celui-ci associe toutefois chacun des partenaires - régions et départements -, à la mise en oeuvre des programmes opérationnels définis au niveau de l'État en concertation avec le Comité régional de programmation, organe consultatif qui réunit les services déconcentrés de l'État, et les représentants de la région et du département. Le Comité régional de programmation assure ainsi la sélection des projets après instruction par les services de l'État et avis d'instances techniques partenariales, mais la décision de programmation de chaque opération est prise par le préfet de région.

Le schéma actuellement envisagé est inversé par rapport à la situation actuelle : il s'agit de faire de la région la principale autorité de gestion des fonds européens, en concertation avec les services de l'État.

La gestion directe de ces fonds par les régions a constitué un des engagements de campagne de François Hollande lorsqu'il était candidat. Cet engagement a été rappelé lors de son discours de Châlons-en-Champagne le 31 août dernier, tandis qu'une déclaration commune du Premier ministre et de M. Alain Rousset, président de l'ARF - Association des régions de France -, a réaffirmé, le 12 septembre, que l'acte III de la décentralisation comporterait bien un volet relatif à la gestion directe par les collectivités des fonds européens. L'engagement 14 de cette déclaration précise ainsi : « l'État confiera la gestion des fonds européens de la prochaine génération aux régions, en particulier en matière de développement économique, de formation, d'innovation, d'aménagement du territoire et de développement rural, afin de renforcer l'effet levier de l'intervention publique. Des expérimentations seront possibles dès 2013. Dès à présent, l'État associe pleinement les régions à la préparation de la prochaine programmation. »

De même, à l'issue d'une rencontre à l'Elysée, M. Claudy Lebreton, président de l'ADF - Assemblée des départements de France -, le président de la République et le Premier ministre, sont convenus que, dans le cadre de la programmation 2014-2020, l'État proposera à partir du 1er janvier 2014 la conclusion de conventions globales pluriannuelles de gestion du Fonds social européen avec les départements pour les compétences relevant du département.

M. Michel Destot, président de l'AMGVF - Association des maires des grandes villes de France - souhaite de son côté que l'ensemble des territoires soient associés à la préparation de la prochaine programmation, et appelle à une rénovation de la gouvernance infra-régionale.

Où en est-on actuellement ?

Des travaux ont été engagés au plan interministériel pour déterminer les modalités de cette nouvelle architecture, et notamment le périmètre éventuel du maintien dans le giron de l'État d'une partie de l'enveloppe.

Le scénario actuellement envisagé par les services des ministres concernés est le suivant. Concernant le FSE, sont envisagés le transfert de l'autorité de gestion et d'une large partie des fonds aux régions, une petite partie étant conservée en gestion nationale pour les compétences relevant de l'État - avec délégation de gestion aux départements. Concernant le FEDER, sont envisagés le transfert de l'autorité de gestion et des fonds aux régions, à l'exception d'une part mineure conservée en gestion par l'État pour des enjeux nationaux, tels que la politique de la ville. Concernant le FEADER, la question d'une délégation aux régions pour créer des programmes nationaux n'est pas tranchée, tandis qu'il n'est pas acté que les régions obtiennent l'autorité de gestion déléguée pour le FEAMP.

Cette proposition, soumise ces jours-ci à l'arbitrage du Premier ministre, est fortement contestée par les régions, qui estiment que le transfert des fonds doit être total et qu'il s'agit là d'un « reniement des engagements pris avec le président de la République et le Premier ministre ». Les élus régionaux, et au premier chef le président de l'ARF, M. Alain Rousset, considèrent que l'État, et plus particulièrement les administrations centrales, leur font un mauvais procès en « incompétence économique », sentiment d'autant plus exacerbé que les débats sur la BPI ont montré des réticences à la régionalisation de la banque.

De fait, les services de l'État mettent en avant le risque de mauvaise gestion par les régions et redoutent leur partialité. Cet argument un peu frileux se heurte à la réalité, que ce soit en France ou en Europe.

En France, la gestion expérimentale de ces fonds par la région Alsace a fait ses preuves, comme en atteste un rapport d'audit de gestion d'étape publié en février 2011, tandis qu'en Europe, la gestion décentralisée existe déjà dans les États fédéraux sans poser plus de problèmes que la gestion centralisée.

Pour le reste, comme l'a déclaré Mme la ministre en charge de la décentralisation, Marylise Lebranchu : « il n'y a pas d'un côté un État rationnel et de l'autre des élus irrationnels ».

Un autre argument, plus pertinent sans doute, est celui du transfert des compétences détenues actuellement par les personnels des SGAR - secrétariats généraux pour les affaires régionales -. Dans quelle condition ce transfert pourra-t-il s'opérer sans déperdition de compétences ? Selon les estimations qui nous ont été données, 1 500 équivalents temps plein (ETP) au maximum seraient concernés, ce qui n'est rien à côté du transfert des TOS - personnels techniciens, ouvriers et de services du ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche - que les collectivités locales ont eu à gérer.

En forme de conclusion, je soulignerai que l'acte III de la décentralisation doit viser l'efficience de la consommation des crédits européens, et c'est pourquoi la France doit rechercher la meilleure architecture et donner à chaque échelon les moyens de trouver sa place. Le rôle de l'État au niveau local en sera nécessairement modifié. Notre juge de paix doit être la recherche de la meilleure utilisation possible des crédits européens. Le travail parlementaire devra y contribuer, et c'est pourquoi nous vous proposons que notre commission se saisisse pour avis du futur projet de loi sur cette question.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les fonds structurels ne sont pas complètement utilisés en France. Quel est le montant de cette sous-utilisation et quelles en sont les raisons ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les fonds non programmés se montent à environ 2,6 milliards d'euros. Ils seront intégrés dans le dispositif du Pacte budgétaire et de croissance du 29 juin 2012.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce débat aboutit aux différentes conceptions de centralisation ou de décentralisation et au partage des possibles entre l'État et les Régions.

Je suis étonné, concernant le FEDER, que l'on cite la politique de la ville parmi les enjeux nationaux. Est-on, en effet, le mieux à même d'arbitrer de Paris une politique d'aménagement du territoire en terme de maillage entre villes et métropole par exemple ? Ne serait-ce pas à l'échelle régionale que l'on serait le mieux à même d'organiser ce maillage qui peut descendre, en deçà des villes moyennes, jusqu'aux chefs-lieux de cantons ou aux bourgs ruraux, les mieux à même d'offrir le minimum de services de proximité ?

Je suis très perplexe sur la capacité de l'État à être, de ce point de vue, omniscient et de pouvoir assurer l'égalité entre les territoires. Le moins que l'on puisse dire est qu'on s'en est éloigné depuis longtemps malgré cette prétention du centre à gérer la périphérie.

Enfin, la question de Mme Lebranchu que vous avez rapportée avec justesse comporte beaucoup d'ambiguïté. Au fond, est-ce que cela signifie que c'est la rationalité qui serait partagée entre l'État et les territoires ou l'irrationalité ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je n'ai pas vocation à parler au nom de l'État, compte tenu à la fois du principe de la séparation des pouvoirs et du fait que le projet de loi n'est pas encore élaboré. Il nous a été cependant rapporté que, dans le cadre budgétaire contraint actuel, il y a une tendance de l'administration centrale à garder la maîtrise d'une partie des crédits, notamment dans le cadre de la politique de la ville, ce qui constitue bien entendu des éléments de frein à une volonté de décentraliser davantage. Par contre, un certain nombre de nos collègues estiment, par compensation en quelque sorte, que la consommation des crédits est disparate entre les régions. Face à des régions consommant plus les crédits, car plus expérimentées, l'État pourrait être considéré, du fait de son expertise, plus à même de consommer les crédits sur le territoire. Nous avons surtout souhaité souligner l'importance du travail parlementaire dans ce domaine, notamment dans le cadre de notre commission, ce qui nous amené à proposer qu'elle se saisisse, pour avis, du futur projet de loi de décentralisation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je félicite nos collègues pour ce rapport très clair sur un sujet important.

Je rapporterai d'abord une expérience que j'ai eu en tant que président d'une collectivité territoriale qui a, en quelque sorte, cogéré avec l'État, pendant plus d'une décennie, les fonds structurels européens dans leur ancienne version. Cela a très bien fonctionné dans une véritable symbiose entre les services, départementaux en l'occurrence, et ceux de la Préfecture. Nous avons eu des taux de consommation très élevés des fonds qui ont été très judicieusement utilisés.

A l'heure de la très nécessaire gestion stricte des finances publiques, il ne faut pas consommer pour consommer. Face à la complainte selon laquelle on ne consomme pas assez les fonds européens, j'estime que cela peut-être tout simplement dû au fait qu'il n'y a pas à dépenser. Il ne faut pas s'en émouvoir car cela fait finalement une charge moindre pour le contribuable.

Concernant les crédits de la politique agricole commune avant l'accord budgétaire de 2003, il a été possible de prolonger ce qu'on appelait les « plafonds de Berlin » simplement car il avait été moins dépensé sur ces crédits. Cela a permis d'absorber les nouveaux pays d'Europe centrale et orientale. On sait qu'il y a structurellement une sous consommation des fonds européens : il ne faut pas s'en alarmer car cela permet de financer d'autres dépenses.

Je partage tout à fait l'avis de M. Michel Piron. S'agissant du FSE et du FEDER et aussi des crédits de la politique de la ville, je pense qu'une décentralisation à destination des Régions semble ressortir au simple bon sens.

En revanche, j'ai une opinion différente pour le FEADER et le Fonds européen de modernisation de la pêche (FEP). Les sommes inscrites à ce dernier ne sont pas très élevées et ne concernent que peu de régions. Il semble donc qu'il faille maintenir une unité d'action dans ce domaine en liaison évidemment avec les collectivités territoriales et régionales concernées.

Concernant le FEADER, il me semble hasardeux d'avoir 22 compartiments de PAC même si on sait que le FEADER ne concerne qu'une partie de la politique agricole. Je considère qu'on doit laisser à l'État, c'est-à-dire au ministre de l'Agriculture, le soin d'orienter, après consultation des Régions, les décisions car on se rend compte que des distorsions de concurrence peuvent très rapidement se manifester d'une région à l'autre.

Même si on avait mis des limites à l'autonomie régionale, on a vu, avec la dernière réforme de la PAC, que les marges d'adaptation et de flexibilité ont entraîné, notamment entre la France et l'Allemagne, des distorsions de concurrence qui ont pu réorienter très profondément les productions. Je souhaiterais donc une expertise complémentaire sur ce sujet.

Enfin, je considère comme très important que notre Commission puisse se prononcer pour avis sur la futur projet de loi de décentralisation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je partage tout à fait ce que vient de dire M. Hervé Gaymard.

Le FEAMP est un vrai enjeu qu'il faut souligner même si cela dépasse le cadre de ce rapport. La vraie difficulté, dans les Régions où il y a de la pêche, est de soutenir concrètement l'installation de jeunes pêcheurs et aussi la construction de nouveaux navires de pêche. Cela importe particulièrement car la flotte de pêche, d'un âge moyen de 20 à 25 ans, vieillit. On peut même penser qu'il n'y aura bientôt plus de pêche en France, tout simplement parce qu'il n'y aura plus de bateaux de pêche.

L'Union européenne permet la modernisation de ces bateaux mais ne donne plus aucune aide pour la construction neuve.

Les régions sont donc confrontées à ce problème, la Bretagne ayant essayé de trouver des solutions mais qui ne sont pas pérennes. Il faudrait donc trouver des possibilités dans le cadre de la nouvelle politique des pêches et du FEAMP.

Il faut, en s'appuyant sur le FEAMP et avec l'aide des régions et des collectivités territoriales, pouvoir enfin aider la construction de nouveaux navires plus économes en carburant, plus sûrs et permettant de meilleures conditions de vie et de travail. C'est donc un enjeu économique et social.

L'Union européenne ne permet pas la construction neuve pour éviter la surpêche. On aboutit en réalité au résultat diamétralement opposé car les navires vieillissant consomment de plus en plus de carburant, de plus en plus coûteux, ce qui incite à pêcher plus pour équilibrer économiquement les exploitations.

Il faut que les Régions puissent soutenir des projets innovants comme le navire de pêche à moteur hybride en expérimentation à Etaples et à Boulogne sur Mer. De tels projets sont encore trop rares et mériteraient d'être soutenus par l'Union européenne, l'État et les Régions.

Je souhaitais intervenir sur ce point qui constitue un enjeu majeur, les Régions étant prisonnières des règles européennes. Elles voudraient pouvoir agir mais en sont malheureusement empêchées.

Jérôme Lambert. S'agissant de la pêche, je vous rappelle que notre commission a mis en place un groupe de travail conjoint avec la commission des affaires économiques.

II. Communication de MM. Philip Cordery et Michel Piron sur la proposition de directive relative aux qualifications professionnelles (COM(2011) 0883 final – document E 6967)

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Président, mes cher collègues, nous avons souhaité, Michel Piron et moi-même, vous présenter un point d'étape sur notre rapport relatif à la révision de la directive de 2005 sur les qualifications professionnelles. Ce sujet est essentiel, car il recoupe un grand nombre de problématiques relatives à la mobilité des travailleurs, telles que le droit du travail ou encore la protection des consommateurs et des patients des professions de santé. Je laisse à Michel Piron le soin de vous présenter en quelques mots les principaux points de révision de la directive, avant de vous faire part de l'état de la négociation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La liberté de circulation des travailleurs, qui est une des composantes de la liberté de circulation des personnes, trouve un obstacle dans le fait que chaque État conserve le droit de subordonner l'accès d'une profession donnée à une qualification spécifique, en général celle obtenue sur le territoire national.

C'est pourquoi la directive de 2005 sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui s'adresse aux travailleurs migrants, vise à favoriser la reconnaissance des qualifications professionnelles afin d'améliorer la mobilité en Europe, tout en assurant de conditions de formation minimale susceptibles d'assurer la meilleure protection tant des travailleurs que des usagers ou clients de leurs services, notamment dans le domaine de la santé.

Les règles actuellement en vigueur sous l'empire de cette directive sont fonction tant de la durée de l'exercice que de la profession exercée. Les règles relatives à la prestation de service temporaire sont les plus souples, tandis que les professions dites « sectorielles », c'est-à-dire pour lesquelles les exigences minimales de formation ont été harmonisées au niveau communautaire (médecins, infirmiers responsables de soins généraux, dentistes, vétérinaires, sages-femmes, pharmaciens, architectes), bénéficient du régime le plus simple de reconnaissance automatique des diplômes.

Malgré ce système de reconnaissance des qualifications, la mobilité référencée des travailleurs demeure faible.

Les professionnels se déplaçant à l'étranger et bénéficiant de la procédure d'établissement demeurent peu nombreux. Sur la période 1997-2011, on recense en moyenne 15 600 demandes sur chaque exercice. En 2011, les plus mobiles dans le cadre de cette procédure étaient les enseignants dans l'enseignement secondaire- (5 877), les moins mobiles étant les assistants dentaires- (4). Ces professionnels avaient majoritairement obtenu leurs qualifications dans 5 des pays de l'Union : la France – (8 %), la Grèce – (12 %), l'Allemagne – (11 %), le Royaume-Uni – (7 %), et la Roumanie – (10 %). De même, cinq pays attractifs concentraient plus de 70 % des demandes de reconnaissance des qualifications professionnelles, à savoir le Royaume Uni – (24 %), la Belgique – (15 %), Chypre – (15 %), la Suisse – (11 %), et la Suède – (8 %).

Les chiffres attestent aussi d'une faible mobilité temporaire. Sur la période 2007-2001, on enregistre 3 000 déclarations, dont 405 pour la seule année 2011. Les professionnels concernés venaient à 43 % de la République Tchèque, 11 % de Slovaquie, 5 % d'Allemagne, 4 % de Pologne et 4 % d'Irlande ; 40 % d'entre eux se sont rendus en Autriche, 14 % en Pologne, 11 % au Royaume-Uni, 10 % au Danemark, et 6 % en France.

Une analyse rapide de ces chiffres conduit à deux remarques. D'une part, il apparaît évident que ces faibles chiffres ne reflètent qu'une infime partie de la mobilité des travailleurs en Europe, et il conviendra d'en préciser les raisons. Pourquoi tant de travailleurs ne font-ils pas reconnaître leurs qualifications ? Est-ce à dire que cette directive n'est pas vraiment utile ? D'autre part, peut-on réellement, dans ces conditions, se fier à toutes les données sur la provenance des travailleurs ? Y'a-t-il des pays qui ont plus recours que d'autres à la reconnaissance des qualifications ou le faible recours à cette procédure est-il également réparti dans les pays de l'Union ?

Prenant acte de cette situation, la Commission européenne a proposé une simplification des règles de la directive avec pour objectif de renforcer la mobilité professionnelle et le commerce des services, mais aussi de répondre à la pénurie de main d'oeuvre qualifiée dans certains secteurs - santé, éducation, construction, services aux entreprises – et, enfin, d'offrir plus de possibilités aux demandeurs d'emploi, et notamment les jeunes, traditionnellement plus mobiles et actuellement fortement touchés par le chômage.

Pour cela, elle s'est appuyée sur un certain nombre de modifications. Parmi les principales, l'introduction d'une carte professionnelle européenne - c'est en réalité un certificat électronique - a pour objectif de simplifier les procédures permettant la reconnaissance des qualifications dans le cadre d'un établissement dans un autre État membre ou de la prestation temporaire, avec instauration du principe de l'accord tacite en cas d'absence de réponse dans les quatre mois à la demande de carte professionnelle européenne.

La mise en place de cadres de formation communs et d'épreuves communes de formation a pour sa part comme objectif d'introduire une plus grande automaticité dans la reconnaissance des qualifications actuellement couvertes par le système général.

L'introduction, pour les professions réglementées, d'un mécanisme de notification à la Commission et d'un système d'évaluation mutuelle obligerait les États membres à fournir une liste de leurs professions réglementées et de justifier leur nécessité.

La mise à jour des exigences minimales applicables à certaines professions sectorielles permettrait de préciser la durée de formation minimale pour les médecins - réduction de 6 à 5 ans pour le socle de base, les infirmiers responsables de soins généraux : relèvement de la formation générale requise de 10 à 12 ans - études secondaires et post-bac, les sages-femmes : relèvement de la formation générale requise à 12 ans - études secondaires et post-bac, et les architectes : proposition de système double avec des études à temps plein de 5 ans ou 4 ans plus deux ans de stage.

Autre innovation qui n'est pas sans faire débat : l'introduction du principe d'accès partiel, sous réserve que l'activité professionnelle puisse être objectivement séparée des autres activités de la profession réglementée dans l'État membre d'accueil, avec pour exception possible les raisons impérieuses d'intérêt général, notamment dans le cas des professions de santé.

Enfin, la Commission a souhaité inclure la qualification des notaires dans le champ de la directive et permettre la reconnaissance des stages pour les professionnels partiellement qualifiés.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quels sont actuellement les enjeux de la négociation ?

Les positions des États membres sont variables en fonction des différents aspects de la directive, et un certain nombre de points restent en cours de négociation.

Le principe de la carte professionnelle est aujourd'hui accepté alors qu'il ne faisait pas consensus, mais la question des modalités de sa mise en place demeure. L'autorisation tacite prévue par le texte ainsi que la question des délais cristallisent toutefois les oppositions. La France, tout comme onze autres pays (dont l'Italie, le Royaume-Uni, la Pologne ou encore la Belgique) est contre la reconnaissance tacite, promue par la Commission qui souhaite inciter les États à se prononcer dans des délais rapides. La rapporteure du texte, Mme Vergnaud, ainsi que la « shadow » rapporteure, Mme Constance Le Grip, sont favorables à ce principe. Vos rapporteurs estiment pour leur part nécessaire de maintenir ce principe d'accord tacite, quitte à en porter le délai, actuellement prévu à 4 mois, à 6 mois.

Concernant l'extension du champ de la directive aux stages rémunérés, il convient de noter qu'un certain nombre d'États dont l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Espagne ou encore l'Autriche, sont réservés. C'est le cas aussi de la France, qui considère que les stages ne rentrent pas dans le champ de la directive car relevant de la formation. Il semblerait aussi que les craintes face à cette extension soient fortes chez les professionnels de santé. La Commission et le Parlement européen y sont de leur côté très attachés, et considèrent qu'il s'agit là d'un outil supplémentaire pour permettre la mobilité des jeunes et de lutter contre le chômage qui frappe cette classe d'âge. Vos Rapporteurs souhaitent creuser plus avant la question et réservent leur position.

Le Gouvernement français est réservé sur la question de l'accès partiel à une profession, du fait des risques de perte de lisibilité pour les consommateurs et de morcellisation des professions, notamment pour les professions de santé. L'Allemagne partage cette position, mais d'autres pays comme le Royaume-Uni ou la Pologne sont en faveur de l'accès partiel. Vos rapporteurs partagent les réserves du Gouvernement.

La question de l'harmonisation des conditions de formation minimales pour les professions sectorielles, du fait de la diversité de l'existant et des intérêts en jeu, est loin de faire consensus. Comme cela nous a été indiqué, alors que les pays du Sud font le maximum d'efforts pour essayer d'harmoniser vers le haut, l'Allemagne et les Pays-Bas, au contraire, s'accrochent plus fortement à leurs positions. La Rapporteure du texte, Mme Vergnaud, a demandé un délai supplémentaire pour pouvoir aboutir à un consensus sur ces questions.

Concernant les architectes, la Commission a souhaité actualiser la durée minimale de la formation d'architecte, qui ne correspond plus à la réalité, et proposé de la porter à six ans : quatre années d'études et deux années de stage rémunéré. L'Espagne, qui voit son secteur du bâtiment sinistré, souhaite que cette durée soit de 5 ans, et redoute de ne pas être en mesure de pourvoir à l'éventuelle exigence de stage. La France, l'Allemagne, la Roumanie ou encore le Royaume-Uni se montrent réservés. Vos Rapporteurs partagent la position du Gouvernement.

Les sages-femmes et infirmiers responsables de soins généraux étant deux professions très mobiles, notamment dans les zones frontalières, les enjeux d'harmonisation des formations sont importants pour certains pays, dont l'Allemagne. La proposition de directive prévoit, conformément aux évolution de ces métiers, que les États membres mettent à niveau le critère d'accès aux formations de ces professions en le faisant passer de dix années d'enseignement scolaire général à douze années, ce qui est déjà le cas dans vingt-quatre États membres. La profession elle-même, au niveau européen, est favorable à cette évolution, qui consacrerait un enrichissement de ses compétences. Il s'agit là d'un grand changement pour les pays de l'Est, ce qui explique que la Pologne et la Roumanie demandent la régularisation de leurs infirmières déjà formées. L'Allemagne, de son côté, est fortement opposée à ce changement, de crainte de voir se créer des pénuries dans un secteur qui connaît déjà problèmes de recrutement. Une autre raison est sans doute à chercher dans une répartition différente des tâches entre médecins et infirmiers par rapport à ce qui se pratique dans d'autres pays comme le nôtre, ainsi que des philosophies différentes en matière de reconnaissance académique et professionnelle des métiers. Vos Rapporteurs estiment pour leur part que la prise en considération des nouvelles exigences de cette profession est souhaitable pour la sécurité des patients, mais doit s'accompagner d'une réflexion d'ensemble sur la filière santé, avec une redéfinition de la profession d'aide-soignant.

Concernant les médecins, autre profession très mobile, la France tout comme l'Italie, la Belgique ou encore les Pays-Bas sont opposés à la réduction de 6 à 5 ans du socle de base de formation, qui est la durée actuellement en cours au Royaume-Uni et en Irlande. La directive actuelle est ambiguë, puisqu'elle indique la nécessité de 6 années de formation de base ou 5 500 heures de formation. Pour la France, ces deux conditions ne sont pas alternatives, mais cumulatives. Le Royaume-Uni est la première nation « importatrice » de médecins, sans doute du fait de rémunérations attractives. En outre, la question du numerus clausus ne peut être évacuée. Vos Rapporteurs estiment pour leur part légitime de laisser aux pays le choix de répartir le même volume horaire de 5 500 heures de formation sur 5 ou 6 années.

La question de l'inclusion des notaires dans le champ de la directive est pour l'instant évacuée. En mai 2001, la CJCE a décidé qu'une condition de nationalité ne peut être imposée aux notaires et estimé, en ce qui concerne l'application de la directive, qu'il n'était pas exclu qu'il puisse exister une obligation de mise en oeuvre de la directive, mais que cette obligation n'était pas suffisamment claire au moment de la procédure d'infraction. Dans sa proposition initiale, la Commission a donc voulu inclure les notaires dans le champ de la directive. Suite à des négociations assez tendues entre la Commission, le Parlement et les États opposés à cette inclusion (France, Italie, Belgique, Allemagne, Pologne notamment) il a été décidé d'exclure explicitement les notaires du champ de la directive et de proposer une clause de rendez-vous dans 3 ou 4 ans. Il s'agit là en réalité d'un conflit qui oppose les États de tradition « de droit continental », où existe une organisation notariale comparable à l'organisation française, et ceux de « common law », où la profession de notaire n'existe pas. Vos Rapporteurs partagent la position du Gouvernement.

En conclusion, bien qu'il convienne de rester prudents sur certains points qui demeurent à ce jour en négociation, cette proposition de révision apparaît comme équilibrée et conforme à un objectif que nous ne pouvons que partager : celui de créer, tout en garantissant tant la protection des travailleurs que celle des usagers ou clients des professions exercées, de la croissance et des opportunités d'emploi pour tous les citoyens de l'Union, et notamment les jeunes.

Or, renforcer les conditions de la mobilité des jeunes, c'est faciliter leur emploi, mais aussi l'intégration européenne de demain. Il ne faut toutefois pas sous-estimer le risque subséquent de concentrations mégapolistiques et de désertification, avec un phénomène de fuite des cerveaux organisée à l'intérieur de l'Europe, des pays en difficultés - Espagne, Grèce - vers les pays attractifs - Allemagne ou Royaume-Uni.

Enfin, la réflexion sur les qualifications professionnelles ne saurait faire l'économie d'une réflexion plus globale sur l'ensemble du parcours du travailleur européen mobile, que ce soit avant ou après l'obtention de sa qualification, la reconnaissance de sa qualification professionnelle n'étant qu'un moment de ce parcours.

En amont de cette reconnaissance, d'une part, s'impose sans doute au niveau européen une réflexion sur les contenus des enseignements menant aux ces diplômes et qualifications, dans un contexte où coexistent des traditions éducatives différentes, marquées par la centralisation ou la décentralisation, le primat du système académique ou la valorisation des formations en alternance, ce qui n'est pas sans conséquence sur la possibilité de reconnaître les qualifications dans les meilleures conditions de transparence et de lisibilité.

En aval, d'autre part, se pose la question de l'accès aux systèmes de sécurité sociale et notamment d'assurance retraite. Même s'ils sont encore peu nombreux, de plus en plus de citoyens européens ont une carrière dans plusieurs pays de l'Union et se retrouvent avec des carrières incomplètes, le droit européen ne garantissant actuellement que la portabilité des droits relatifs à la retraite de base.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie pour cette communication d'étape qui est déjà fort complète.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Permettez-moi d'être un peu dubitatif sur l'intérêt d'un tel texte, même si on sait bien que certaines professions sont des chasses gardées. Il n'en demeure pas moins, qu'en l'absence de tout texte de reconnaissance des qualifications, nos compatriotes se sont de tout temps expatriés. Réciproquement, la France a accueilli des architectes, des médecins ou des avocats étrangers. Ne va-t-on pas monter une usine à gaz pour accompagner en définitive un mouvement qui se fait naturellement et qui dépend en fait de la qualité de la formation donnée dans certains pays ? Dans la presse du soir, un article montre que les ingénieurs français sont recrutés à prix d'or, sans qu'il soit besoin d'une quelconque directive. Indépendamment de toute querelle liée à la défense d'intérêts particuliers, je m'interroge sur la nécessité de tout harmoniser et tout encadrer alors que les qualifications sont de fait reconnues sur le marché.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le marché n'est pas un mot tabou à condition qu'il soit régulé.

L'exemple des professions médicales est le plus parlant. Notre intérêt est bien sûr d'assurer la mobilité professionnelle mais surtout de protéger les patients. En Europe, nombre d'étudiants des professions médicales ou paramédicales sont formés en Belgique et reviennent en France afin de s'installer. Il est normal d'exiger un contrôle de cette formation qui, si elle était insuffisante, comporterait un risque pour la santé publique. Il importe donc d'avoir à la fois cette facilitation et cette sécurisation pour les patients ou pour les consommateurs.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'objet de cette directive n'est pas de complexifier mais s'inscrit dans une démarche générale de simplification de la directive de 2005 qui est la synthèse de multiples textes et qui pose des difficultés d'application. Il s'agit donc de simplifier mais non de standardiser des formations dont on sait qu'elles sont très diverses. Il faut admettre que certaines reconnaissances ne vont pas de soi, s'agissant par exemple des professions médicales dont on nous a signalé des insuffisances dans certains pays, ce qui présente des risques de santé publique. Mais je précise encore une fois que cette directive vise plus à simplifier qu'à accentuer les contraintes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je constate que Jacques Myard est favorable à plus de liberté de circulation au sein de l'espace européen !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je rappelle que la directive de 2005 constitue la synthèse de réglementations antérieures, dont les premières remontent à 1975 en matière de professions médicales, mais aussi de la jurisprudence de la Cour de justice européenne dans la mesure où certains articles du Traité étaient d'applicabilité directe.

Je ne suis pas d'accord avec Jacques Myard quand il conteste l'utilité de cette directive. Nous avons tous en tête des exemples de personnes qui ont été formées à un très haut niveau dans des pays extérieurs à l'Union et qui ne peuvent pas faire reconnaître leurs qualifications. On voit bien là toute la différence avec les ressortissants de l'Union européenne pour lesquels les démarches sont plus faciles.

La directive de 2005 regroupe trois directives générales, une dizaine de textes sectoriels et la jurisprudence, ce qui constitue un ensemble difficile à appréhender ; il est donc nécessaire de la retravailler.

Si je suis globalement d'accord avec cette directive, je voudrais tout de même faire un certain nombre de remarques et souligner certains risques. Le premier est celui de détournement. En effet, certains étudiants français vont se former à l'étranger, pour les professions médicales ou paramédicales, et notamment en Belgique. Aller à l'étranger est une bonne chose mais il ne faudrait pas que cela fasse l'objet d'une stratégie. Ainsi en Roumanie, certains établissements se sont organisés pour accueillir des étudiants français. Cela pose d'ailleurs la question de notre capacité à accueillir nos étudiants. La directive aborde-t-elle cette question ?

D'autres risques de détournement, plus graves, existent comme en matière de transports routiers. Il y a danger, pour la santé ou pour la protection des consommateurs, à permettre la mobilité alors que l'on a pas harmonisé les formations et quand en arrière-plan, les règles d'organisation des métiers et d'accès aux professions n'ont pas convergé. Cela peut déstabiliser des professions, comme par exemple celle des transporteurs routiers qui ont perdu beaucoup de parts de marché en France.

Je suis aussi très réservé à l'égard de l'accès partiel aux professions. Cela représente un danger de déstabilisation pour certaines professions réglementées dont les activités s'équilibrent selon leur rentabilité. Le risque est grand de voir certains pans d'activité les plus rentables concurrencés par des professionnels étrangers. Ainsi dans le domaine juridique, de grands cabinets anglo-saxons très bien organisés pourraient se charger des dossiers les plus intéressants financièrement.

S'agissant de la profession des notaires, pour laquelle on a supprimé la condition de nationalité - et sur ce point, il est légitime de s'interroger sur la nécessité de conserver la condition de nationalité prévue par l'article 45 du traité pour d'autres professions - , ne pourrait-on pas plaider pour une directive spécifique plutôt que l'application du régime général ? Des régimes spécifiques existent pour les infirmiers, les architectes et les médecins. Pour les avocats, il existe même deux directives , celle de 1977 sur la prestation de service et celle de 1998 sur la liberté d'établissement ; il peut donc y avoir coexistence d'une réglementation générale avec des réglementations spécifiques. Compte tenu des particularités de la profession de notaire, une directive spécifique serait une solution.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nos réserves sont grandes sur la segmentation des métiers et les risques de dérives ; concernant la carte professionnelle, si nous attendons une réponse des États, il ne se passera rien : il faut les mettre au pied du mur, et les obliger à se prononcer sur les dossiers de reconnaissance. Il faut comprendre en outre que notre système diffère de celui d'autres pays, telle l'Allemagne, qui accorde plus de poids à l'expérience professionnelle. Le secteur de la santé fait partie des difficultés principales de la négociation, notamment du fait de la place prépondérante qu'occupent les médecins dans la relations avec les infirmières en Allemagne. Concernant les notaires, il est évident qu'on est là en présence d'un conflit entre deux traditions juridiques, celle de « common law », où le notaire n'existe pas, et celle de droit dit « continental ». N'oublions pas que se profile aussi, derrière, deux types d'exercice professionnel : celui de l'avocat, qui vit du conflit, et celui du notaire, qui recherche de son côté le consensus.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La question est d'identifier la bonne démarche pour protéger ces professions. Le fait que la France ait obtenu l'exclusion explicite des notaires de la directive services n'a pas empêché la jurisprudence de 2011, qui a fait échec à la condition de nationalité. J'aurais préféré une position plus offensive, mieux à même de défendre nos intérêts, et je me demande si les notaires n'auraient pas mieux fait de négocier dans le cadre de cette directive, plutôt que de prendre le risque de faire l'objet d'une directive sectorielle.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne suis pas sur qu'il y ait plus de risques à avoir une directive spécifique et je pense qu'il faut rester ferme sur les notaires. S'agissant de la carte professionnelle, elle permettra de mettre une pression sur les États, en particulier dans les zones frontalières. La question des médecins est par ailleurs étroitement liée au numerus clausus français.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La jurisprudence de 2011 ne me semble pas fondamentale au regard de la nationalité car un notaire allemand installé dans notre pays appliquera le droit français. Je maintiens qu'un bon médecin sera accepté partout, même en l'absence de texte.

III. Examen du rapport d'information de MM. Yves Fromion et Joaquim Pueyo sur l'Europe de la défense

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

« L'Europe de la défense » est un terme utilisé en France : nos voisins européens lui préfèrent en général celui, sans doute plus explicite de « politique de sécurité et de défense commune » – PSDC – consacré par le Traité de Lisbonne en 2007. Il s'agit en effet non pas tant d'assurer la « défense de l'Europe », rôle dévolu en principe à l'OTAN, que de préserver les intérêts de l'Europe en matière de sécurité, où qu'ils soient menacés dans le monde.

La publication du nouveau Livre blanc étant prévue en janvier 2013, il nous a semblé primordial de rappeler, avant cette échéance, que les choix qui seront effectués pour l'avenir de la défense française devront impérativement prendre en compte sa dimension européenne.

Pourquoi une relance de « l'Europe de la défense » ? Cela signifie-t-il que celle-ci serait inexistante? Une certaine inertie jusqu'à présent, un échec récent, celui de la fusion entre EADS et BAE Systems, les restrictions budgétaires actuelles, qui affectent aussi la défense, pourraient conforter cette idée. Incontestablement pourtant ce constat est exagéré et nous espérons que le contenu du présent rapport contribuera à le démontrer. Il est vrai cependant que les potentialités de l'Europe de la défense sont, de l'avis de vos Rapporteurs largement sous-utilisées.

Pourquoi « l'Europe de la défense » et non « la défense de l'Europe » ? Parce que la seconde est déjà assumée par l'OTAN. La première, même si elle est tout à fait complémentaire de la seconde, doit être entendue sous l'angle plus large de la préservation des intérêts européens dans le monde, qui peut notamment exiger la stabilisation de certaines régions. Tel est bien le sens de plusieurs missions civiles ou militaires déjà menées au titre de la PSDC (politique de sécurité et de défense commune).

Etabli à mi-parcours (le rapport définitif devrait être publié au printemps 2013, avant l'examen de la loi de programmation militaire) ce rapport d'étape ne prend pas en compte tous les aspects de la question. Néanmoins ce rapport vise à présenter de façon assez complète l'état des lieux de la PSDC, en mettant en exergue les avancées du Traité de Lisbonne, encore largement sous-exploitées, quand elles ne restent pas lettre morte : tel est le cas notamment de la Coopération structurée permanente (CSP). Je laisserai le soin à mon Co-Rapporteur, Monsieur FROMION, de nous présenter ce dispositif.

Gardant toujours à l'esprit la volonté de démontrer pourquoi la relance de l'Europe de la défense n'est pas une utopie, nous espérons que le prochain Livre blanc saura enfin véritablement prendre en compte la dimension européenne de la défense française.

Notre bilan insiste d'abord sur les avancées permises ou facilitées par le Traité de Lisbonne, avancées dont l'Europe n'a pas encore pleinement tiré parti. La multiplicité des instances compétentes peut laisser parfois l'impression d'une trop grande complexité, voire créer la confusion. Or, des avancées institutionnelles, comme la création d'un « Haut Représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité » et du « Service européen d'action extérieure », ont amélioré la visibilité de l'Europe de la défense.

La réelle nouveauté tient à la place particulière accordée par le Traité de Lisbonne à l'objectif affirmé de parvenir à la « définition progressive d'une politique de défense commune qui peut conduire à une défense commune ».

Le Traité de Lisbonne a élargi la liste des missions de l'Union dans ce domaine. Elles comportent désormais les « actions conjointes en matière de désarmement », les « missions de prévention des conflits » et les « opérations de stabilisation à la fin des conflits ». Il est par ailleurs précisé que « toutes ces missions peuvent contribuer à la lutte contre le terrorisme, y compris par le soutien apporté à des pays tiers pour combattre le terrorisme sur leur territoire ».

Une autre innovation fondamentale concerne la « clause de défense mutuelle » qui prévoit que, dans le cas où un État membre est l'objet d'une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir. Ce souci doit cependant s'exercer dans le respect de la politique de neutralité de certains États membres et du traité de l'OTAN comme fondement de la défense collective de ses membres. L'Europe de la défense apparaît ainsi intrinsèquement liée à l'OTAN.

Un pas décisif est également franchi avec la possibilité désormais offerte au Conseil de confier la mise en oeuvre d'une mission militaire à un groupe d'États membres qui le souhaitent et qui disposent des moyens adéquats

Notre Rapport présente également le développement des coopérations capacitaires, industrielles et technologiques permises par le Traité de Lisbonne, en partie sous l'égide de l'Agence européenne de défense. De nombreuses missions PSDC, civiles et militaires – une trentaine au total – ont été menées ou sont encore en cours ; l'une devrait débuter au SahelMali en 2013. Ignorées souvent du grand public, ces missions sont pourtant parfois emblématiques de ce que l'Europe peut faire en matière de défense. Selon les indications recueillies par vos Rapporteurs, les missions PSDC, pour beaucoup d'entre elles, manquent à la fois de ressources humaines et techniques. C'est le cas en particulier de la dizaine d'opérations civiles toujours activées en 2012.

La diminution significative de la contribution de la France à des missions PSDC activées depuis un certain temps semble regrettable à vos Rapporteurs, car elle est de nature à entamer la crédibilité de notre pays vis-à-vis de ses partenaires européens.

Si l'implication de la France semble réelle sur des missions récentes (8 Français sur 22 personnels envoyés pour le début de l'opération EUCAP SAHEL Niger) elle devient insignifiante sur certaines missions plus anciennes, comme la Géorgie, avec 2 Français seulement sur un effectif de 320 personnels, ou au Congo où ils ne sont que 10.

Vos Rapporteurs estiment que, à l'heure où elle prône la relance de l'Europe de la défense, la France ne peut plus se permettre ce saupoudrage, si elle veut rester crédible.

La France, dans sa démarche de relance de l'Europe de la défense, ne pourra rester convaincante auprès de ses voisins européens que si elle se donne les moyens de cette ambition. Le présent rapport souhaite le rappeler, à la veille de la publication du Livre blanc sur la défense, qui ouvrira la voie à une nouvelle loi de programmation militaire française pour les années 2014 à 2019.

Nous sommes convaincus, à l'issue de ce bilan d'étape, qu'une véritable « Europe de la défense » pourrait se mettre en marche. L'état des lieux démontre par ailleurs que, contrairement à certaines assertions ou considérations trop pessimistes, les prémices de cette Europe de la défense existent déjà. Puisque la volonté politique, en tout cas française, de relance de l'Europe de la défense est aujourd'hui clairement affirmée, la France se doit d'apporter à la politique européenne de défense les moyens de son ambition.

Cependant nous pouvons constater que les budgets se resserrent dans l'ensemble des États membres de l'Union européenne. En conséquence, la mutualisation capacitaire pourrait être une solution permettant de maintenir à l'échelle européenne la performance de l'outil de défense.

Certes, le pilier européen de l'OTAN est incontestable. Néanmoins, le choix des Américains de porter leur attention davantage vers l'Asie doit conduire les Européens à davantage assumer leurs responsabilités.

Aussi convient-il de souligner qu'avec les soutiens des Ministres de la Défense, l'Agence européenne de défense a proposé une série de projets capacitaires visant à assurer la capacité d'action européenne (moyens de ravitaillement en vol, reconnaissance, surveillance), à combler certaines lacunes récurrentes, et à améliorer la déployabilité des capacités européennes.

Enfin, La Déclaration du 15 novembre 2012 des États « Weimar + » - France, Allemagne, Pologne, Espagne, Italie – est une ouverture très encourageante : la France est suivie dans sa volonté de relance de l'Europe de la défense. A cet égard, le code de conduite sur le partage et la mutualisation capacitaire adopté par les Ministres de la Défense le 19 novembre dernier est un signal fort.

Néanmoins, Il convient de souligner que cette relance de l'Europe de la Défense nécessitera d'ouvrir, conjointement, la porte d'une relance de l'Europe politique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais insister sur les avancées que permettent le Traité de Lisbonne en matière d'Europe de la défense. Tout d'abord, un effort important a été consenti pour incarner la politique étrangère de l'Union, au plus haut niveau avec le président du Conseil européen et au plus près de la gestion quotidienne des politiques avec le Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, actuellement Mme Catherine Ashton.

La création de ce Haut représentant, dans sa configuration issue du Traité de Lisbonne, a pour objectif de rendre l'Europe plus visible sur la scène internationale tout en donnant davantage de cohérence à l'action extérieure de l'Union européenne. A cette fin, le Haut représentant est doté d'une triple casquette : il est en effet à la fois vice-Président de la Commission, Président du Conseil dans sa formation « affaires étrangères » et mandataire du Conseil, ce qui lui donne une position tout à fait stratégique au coeur des institutions. Ses pouvoirs sont importants.

Ensuite, le Traité de Lisbonne a fourni au Haut représentant les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions, en prévoyant la mise en place du SEAE, véritable service diplomatique européen. Il compte environ 3 600 agents, si l'on tient compte également des quelque 2 000 agents en poste dans les délégations. Ces personnels sont placés sous l'autorité de la Haute représentante.

D'autre part, l'Agence européenne de défense, formellement instituée depuis 2004, a été dotée d'une base légale et renforcée. Elle a pour objectif l'harmonisation progressive des efforts de défense des États membres et doit aider l'Union à gagner une autonomie stratégique sur le plan militaire. Son action se décline en quatre volets : développement des capacités de défense des États membres dans le domaine de la gestion des crises, mise en place d'un marché européen des équipements de défense et renforcement de la compétitivité de l'industrie de défense européenne, promotion de la recherche pour répondre aux besoins futurs en matière de défense et renforcement de la coopération en matière d'armement par le lancement de projets bi – ou multinationaux.

L'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne a notamment permis d'étendre les compétences de l'AED aux aspects industriels et commerciaux des questions d'armement. Le défi majeur est que l'AED devienne une pépinière des programmes d'armement, réalisés en coopération européenne afin de mettre à la disposition des forces armées européennes des équipements interopérables et correspondant à leur besoin opérationnel. Dans cette perspective, la France est intéressée par de nombreux thèmes de coopération, en particulier dans les domaines de l'espace, de la surveillance maritime, du déminage maritime, du transport stratégique, des drones et des communications.

Je voudrais souligner particulièrement l'existence de la CSP, la Coopération structurée permanente, en insistant sur le fait qu'il s'agit d'une option : sa mise en place serait possible à partir d'un groupe d'États « pionniers » en quelque sorte. C'est un instrument très souple, utilisable par les seuls volontaires, à l'image de certaines possibilités de coopérations offertes par nos structures intercommunales, si l'on voulait faire une comparaison.

Les articles du Traité et le Protocole relatifs à la CSP offrent la possibilité de mettre en place une coopération structurée permanente entre « les États membres qui remplissent des critères plus élevés de capacités militaires et qui ont souscrit des engagements plus contraignants en la matière en vue des missions les plus exigeantes ». La procédure est considérablement assouplie par rapport aux autres coopérations renforcées puisqu'elle n'est pas soumise à un nombre minimal de participants.

Les débats qui ont eu lieu précédemment au sujet de la CSP montrent à quel point les textes ont été mal interprétés. Souvent ils ont donné l'impression d'engager les Européens à dépenser davantage pour leur défense et c'est la première des critiques portées à l'encontre de la CSP.

Pourtant, une approche rigoureuse et pragmatique des textes relatifs à la CSP permet de dépasser cette incompréhension. « Les engagements plus contraignants » évoqués à l'article 42 et «  le développement des contributions nationales et la participation, le cas échéant – et j'insiste sur le terme « le cas échéant » -, à des forces multinationales, aux principaux programmes européens d'équipement et à l'activité de l'AED … » évoqués comme préalables à la participation à la CSP, ne doivent pas être confondus avec une obligation pour les pays candidats d'accroître leur budget national de défense.

Le critère d'entrée est, en fait, l'accroissement de l'effort consenti par les États membres pour le développement de leurs contributions nationales en faveur de la PSDC et non l'augmentation nette de leur budget de défense. Quel intérêt aurait en effet pour la CSP l'augmentation du budget français de la défense pour moderniser notre dissuasion nucléaire ? Or, c'est pourtant ce que proposent implicitement ceux qui voudraient fonder sur un pourcentage de PIB consacré à la défense le « ticket d'entrée » dans la CSP…

Le seul critère compatible avec l'esprit du Traité, pour fixer les critères d'adhésion à la CSP, est celui du niveau d'effort consenti par chaque État membre pour répondre aux exigences de la CSP. C'est un niveau d'effort qui doit être proportionné à ses moyens. La CSP invite chaque pays à se responsabiliser au regard d'un engagement européen collectif, à dépenser mieux en faveur de la PSDC, sans nécessairement dépenser plus.

Une autre question qui revient dans le débat sur la CSP est le débat entre CSP « sélective » et CSP « inclusive ». Les textes offrent heureusement la solution à cette problématique en différenciant clairement l'adhésion obligatoire à la compétence « génération de forces » et celle facultative à la compétence « programmes d'armement ».

La composante « génération de forces » implique « d'avoir la capacité de fournir (…) soit à titre national, soit comme composante de groupes multinationaux des unités de combat ciblées pour les missions envisagées, configurées sur le plan tactique comme un groupement tactique, avec les éléments de soutien ». De nombreux pays européens sont à même de répondre à cette exigence. Il suffirait que soit individuellement, soit par regroupement, les États apportent une contribution dont l'unité de base serait le groupement tactique. Cette « capacité à fournir » des unités de combat n'implique pas a priori que ces forces soient dédiées uniquement à la CSP.

La composante « programmes d'armement », quant à elle, je le rappelle, n'a pas de caractère obligatoire, puisqu'elle repose sur la participation, le cas échéant, aux principaux programmes européens d'équipement et à l'activité de l'agence européenne de défense (AED) dans le domaine du développement, des capacités de défense, de la recherche, de l'acquisition et de l'armement.

La CSP ne fait par ailleurs obstacle ni à l'appartenance à l'OTAN des pays de l'Union européenne, ni au libre exercice de la souveraineté et des politiques nationales. Elle est également totalement compatible avec les coopérations multilatérales ou bilatérales du type « Lancaster House ». Elle peut être vue comme un stimulant de la base industrielle et technologique de la défense européenne.

La seule faiblesse de la CSP pourrait résider dans son financement, puisque cette question n'est pas explicitement évoquée dans les textes. Toutefois, le TUE ouvre la porte à un financement communautaire pour « les actions préparatoires » nécessaires à l'exécution des missions PSDC qui peuvent être financées par le budget de l'Union européenne.

Or, l'expression « activités préparatoires » peut être interprétée plus ou moins largement, selon que l'on s'en tient aux seules mesures à caractère logistique précédant le déclenchement d'une opération, ou que l'on prend en compte la réalisation ou l'acquisition d'équipements indispensables à l'exécution de la mission (équipements satellitaires, chaînes logistiques, équipements de combat etc.). Il existe incontestablement des marges de manoeuvre dans ce domaine. Les « activités préparatoires » peuvent par exemple être menées dans le cadre d'une coopération industrielle ou technologique préalable à une opération militaire ou civile.

En résumé, la CSP est un outil extraordinaire, une pépinière dont pourraient sortir de véritables coopérations, une forme d'autogestion car ce sont les États qui sont dans la CSP qui peuvent la mener. C'est un stimulant fort pour la base industrielle de technologie et de défense. Y aura-t-il la volonté politique pour la lancer ? Je suis optimiste, car je suis ce dossier depuis1998 – époque à laquelle personne ne savait ce dont il s'agit – et je constate qu'il y a eu des évolutions à cet égard.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ajouterais qu'aujourd'hui aucun pays ne peut prétendre avoir à lui seul un dispositif complet de défense. Des progrès ont déjà été accomplis. Notre rapport doit avoir pour plus-value de contribuer à faire avancer les mentalités !

La Président Danielle Auroi remplace M. Jérôme Lambert.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai bien peur de devoir refroidir un peu l'enthousiasme des rapporteurs. En premier lieu, nous disposons certes d'une nouvelle boîte à outil avec le traité de Lisbonne, mais elle est loin d'être facile à ouvrir. Je rappelle en effet que l'article 238 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose que la coopération structurelle renforcée ne pourra être lancée que si une majorité qualifiée d'États y consent, ce qui est loin d'être acquis. En deuxième lieu, l'article 42 du traité sur l'Union européenne subordonne clairement toute décision européenne à l'OTAN qui demeure le « fondement » de la politique de défense de ses participants et l'« instrument de sa mise en oeuvre ». En dernier lieu, même les coopérations dans le domaine industriel restent obérées par les efforts financiers très insuffisants consentis par l'immense majorité de nos partenaires, qui ont dans les faits remis leur défense dans les mains des États-Unis.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il importe aussi de trancher une question importante, d'ailleurs rappelée par M. Jacques Delors au cours de son audition ce matin : de quelle défense voulons-nous ? Je pense en particulier aux nécessaires efforts dans la prévention des conflits, dans laquelle l'Union me semble devoir avoir un rôle décisif à jouer.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est vrai que les obstacles sont nombreux, et imposants, mais je veux noter une vraie prise de conscience, dans toute l'Europe, à la fois des dangers qui nous menacent : je pense notamment à l'exemple du Mali, sur lequel une réelle communauté de pensée et d'intérêt se noue dans l'Union et de l'ampleur de nos responsabilités communes, au moment où chacun s'interroge sur la pérennité de l'engagement américain. Le fait que le Conseil européen de décembre 2013 devrait être consacré à l'Europe de la défense témoigne de cette prise de conscience.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'optimisme peut aussi trouver des fondements solides dans l'examen détaillé auquel nous nous sommes livrés dans le rapport d'étape. Nos forces armées travaillent parfois ensemble et il existe des missions concrètes dans lesquelles la solidarité européenne montre son efficacité : je peux notamment citer la mise en commun des transports aériens, très avancée, grâce à laquelle désormais nos forces peuvent s'entraîner avec des avions mis à disposition très rapidement par nos partenaires, à partir du centre d'Eindhoven. L'intervention en Libye est un autre exemple : certains de nos alliés européens y ont contribué de façon discrète. L'Europe de la défense peut très bien avancer sans conflit avec l'OTAN. En outre, les innovations du traité de Lisbonne sont sur la table, à nous de nous en saisir.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je veux d'ailleurs signaler que l'OTAN a précisément intérêt au développement d'une défense européenne pour relayer l'intervention des États-Unis face aux périls communs.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cela m'amène toutefois à préciser une confusion sémantique. Il me paraît erroné de parler de « défense commune », qui représente à mes yeux une chimère, et il serait plus judicieux de se limiter aux termes « d'Europe de la défense », qui couvre mieux la nécessaire modestie de nos ambitions, mais aussi l'évidente et naturelle solidarité qui nous lie désormais, car nous savons bien que toute agression à l'égard de l'un de nos partenaires est aujourd'hui une agression contre l'Union toute entière. Je veux par ailleurs rappeler que l'Union n'est pas le seul champ de la coopération industrielle, ni même le plus pertinent. Par exemple, près de la moitié des avions civils dans le monde sont équipés d'un moteur produit par un partenariat associant la SNECMA à General Electric, son homologue américain… L'échelle pertinente de l'industrie de la défense est souvent bien plus la planète que notre seul continent.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'agissant de la coopération structurée permanente, s'il est vrai qu'elle ne peut être lancée que si une majorité qualifiée des États l'approuvent, cela ne signifie pas pour autant qu'une telle majorité doive y participer. L'obstacle est donc beaucoup moins dirimant qu'on l'imagine. En ce qui concerne le domaine industriel, c'est là que la « mécanique » de coopération est sans doute la plus adaptée. Ensuite, je veux à mon tour insister sur l'ampleur des solidarités qui nous lient, et nous imposent une vraie politique commune de défense. Imaginons par exemple que la Turquie soit membre de l'Union, nous mettant aux portes d'un des conflits les plus dangereux du monde. Ne serions-nous pas nécessairement portés à nous entendre, et à assumer nos responsabilités ? On ne peut s'en remettre uniquement à l'OTAN.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je remercie vivement les rapporteurs pour ce travail très important, dont la présente réunion ne constitue qu'une étape. La dimension « prévention des conflits » mérite une attention particulière. Nous reparlerons donc prochainement de ce sujet.

IV. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Commerce extérieur

- Proposition de Décision du Conseil concernant la conclusion de l'accord entre l'Union européenne et la République de Moldavie relatif à la protection des indications géographiques des produits agricoles et des denrées alimentaires (COM(2012) 0138 final – E 7262).

Ø Consommation

- Règlement (UE) de la Commission portant modalités d'application du règlement (CE) no 249495 du Conseil relatif aux indices des prix à la consommation harmonisés, en ce qui concerne l'établissement d'indices des prix des logements occupés par leur propriétaire (D02105402 – E 7824) ;

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) no 221496 relatif aux indices des prix à la consommation harmonisés (IPCH): transmission et diffusion des sous-indices des IPCH, en ce qui concerne l'établissement d'indices des prix à la consommation harmonisés à taux de taxation constants (D02267902 – E 7826).

Ø Droit privé

- Proposition de règlement du Parlement Européen et du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (COM(2010) 0748 final – E 5911).

Ø Énergie et changement climatique

- Décision de la Commission relative à la détermination des allocations annuelles de quotas d'émission des États membres pour la période 2013-2020 conformément à la décision no 4062009CE (D02344201 – E 7854).

Ø Fiscalité

- Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 2009790CE autorisant la Pologne à prolonger l'application d'une mesure dérogatoire particulière à l'article 287 de la directive 2006112CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2012) 567 final – E 7758) ;

- Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 201039UE autorisant la République portugaise à continuer d'appliquer une mesure dérogatoire aux articles 168, 193 et 250 de la directive 2006112CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (COM(2012) 661 final – E 7889).

Ø Sécurité alimentaire

- Proposition de décision du Conseil concernant la position de l'Union Européenne au sujet de la décision no 12012 du Comité mixte vétérinaire institué par l'accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux échanges de produits agricoles, concernant la modification des appendices 1, 2, 3, 5, 6 et 10 de l'annexe 11 (COM(2012) 696 final – E 7900) ;

- Projet de règlement (UE) de la Commission relatif aux exigences en matière de certification pour l'importation dans l'Union de germes et de graines destinées à la production de germes (D01880508 – E 7901).

Ø Transports

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil Règlement (UE) no ...2010 du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à deux ou trois roues et des quadricycles (COM(2010) 0542 final – E 5708) ;

- Proposition de règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception des tracteurs agricoles ou forestiers (COM(2010) 0395 final – E 5568) ;

- Projet de directive UE de la Commission modifiant l'annexe III de la directive 200857CE du Parlement européen et du Conseil relative à l'interopérabilité du système ferroviaire au sein de la Communauté (D02335601 – E 7878) ;

- Projet de règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) no 622006 relatif à la spécification technique d'interopérabilité concernant le sous-système "Applications télématiques au service du fret" du système ferroviaire transeuropéen conventionnel (D0233570 – E 7879).

l Point B

La Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Énergie

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant des orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes et abrogeant la décision no 13642006CE (COM(2011) 0658 final – E 6751).

Ø Environnement

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative au mécanisme de protection civile de l'Union (COM(2011) 0934 final – E 7038).

Ø Pêche

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 13422008 du Conseil du 18 décembre 2008 établissant un plan à long terme pour les stocks de cabillaud et les pêcheries exploitant ces stocks (COM(2012) 0498 final – E 7681) ;

- Proposition de Règlement du Conseil établissant, pour 2013, les possibilités de pêche applicables en mer Noire pour certains stocks halieutiques et groupes de stocks halieutiques (COM(2012) 720 final – E 7928).

l Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), et 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d'ajustement à la mondialisation), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- Projet de décision du Conseil portant mise à jour de la liste des personnes, groupes et entités auxquels s'appliquent les articles 2, 3 et 4 de la position commune 2001931PESC relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme, et abrogeant la décision 2012333PESC (SN 440812 – E 7912) ;

- Règlement d'exécution du Conseil mettant en oeuvre l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) no 25802001 concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, et abrogeant le règlement d'exécution (UE) no 5422012 (SN 440912 – E 7913) ;

- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail. Nomination de Mme Dolores LIMÓN TAMÉS, membre espagnol, en remplacement de Mme Concepción PASCUAL LIZANA, démissionnaire (1662812 – E 7915) ;

- Conseil de direction de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail. Nomination de Mme Dolores LIMÓN TAMÉS, membre espagnol, en remplacement de Mme Concepción PASCUAL LIZANA, membre démissionnaire (1662912 – E 7916) ;

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre néerlandais et d'un suppléant néerlandais du Comité des régions (1695612 – E 7917) ;

- Virement de crédits no DEC 552012 à l'intérieur de la section III – Commission – du budget général pour l'exercice 2012 (DEC 552012 – E 7924) ;

- Conseil d'administration de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Nomination de Mme Renate AUGSTEIN, membre titulaire allemand, en remplacement de Mme Eva Maria WELSKOP-DEFFAA, membre démissionnaire (1689212 – E 7925) ;

- Conseil d'administration de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Nomination de Mme Antje WUNDERLICH, membre suppléant allemand, en remplacement de Mme Renate AUGSTEIN, membre démissionnaire (1689312 – E 7926).

La séance est levée à 18 h 25