Je partage sans réserve l'analyse de Mme Karamanli. Il nous faut toujours rappeler que la culture n'est pas une marchandise comme une autre, et aussi que « culture » ne signifie pas seulement « subventions ». Nombreux sont ceux qui ne considèrent la culture que comme une dépense, une activité ne servant qu'à ceux qui la pratiquent. Ce faisant, ils ignorent l'apport des secteurs culturels à l'économie. Et pourtant ! Si les collectivités locales s'attachent à mettre en oeuvre une politique culturelle, c'est qu'elle renforce l'attrait des territoires et se traduit par des retombées économiques et des emplois. Nous devons convaincre que l'Europe a besoin d'un projet politique et que sa cohésion sociale passe par la culture, elle-même facteur de relance économique. Je compte donc sur vous tous pour mobiliser vos collègues du Parlement européen. La France est souvent considérée avec méfiance quand elle aborde ces questions, comme si l'exception culturelle la concernait seule. C'est inexact, bien sûr, et d'autres États, dont la Belgique et l'Italie, ont également mis au point des mécanismes de financement de la création. Notre pays porte depuis longtemps ce concept, mais il bénéficie à tous. Comme l'a justement observé M. Rudy Salles, la France est de tous les États celui a passé des accords de co-production cinématographique avec le plus grand nombre d'autres pays – 52. Notre conception de l'exception culturelle est loin d'être uniquement centrée sur les intérêts français.
J'ai éprouvé, lors de ma visite à la DG Concurrence, la même surprise que vous. Il est stupéfiant de constater à quel point notre approche de la culture intéresse peu. On ressent même un rejet, qu'explique une certaine vision économique dont je réfute la pertinence. C'est même se tirer une balle dans le pied, puisque l'Europe a des atouts économiques à faire valoir en matière culturelle. Cette position est extrêmement dommageable pour l'Union.
Le principe de la chronologie des médias doit être maintenu, mais des évolutions peuvent être proposées ; ainsi, le délai obligatoire de 36 mois avant que l'on puisse avoir accès à une vidéo à la demande par abonnement semble un peu long. Sans doute le rapport Lescure contiendra-t-il des recommandations à ce sujet.
Je suis, monsieur Dumas, favorable à la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Cependant, le Conseil d'État a exprimé un avis défavorable sur notre proposition de rédaction, estimant que le texte poserait un problème de cohérence avec la décision rendue par le Conseil constitutionnel en 1999. Pour que la ratification soit possible, il faudrait modifier l'article 2 de la Constitution. Cela suppose une majorité des trois cinquièmes que nous ne sommes pas sûrs de rassembler, même si les alliances à ce sujet ne sont pas les mêmes que celles qui se forment pour d'autres questions. Cela ne signifie pas que nous abandonnions toute ambition en cette matière, et c'est pourquoi j'ai installé, le 7 mars, le Comité consultatif pour la promotion des langues régionales et de la pluralité linguistique interne. Il est chargé de me faire des propositions permettant d'appliquer, sans attendre une révision constitutionnelle, les 39 engagements – sur 98 – destinés à valoriser les langues régionales ou minoritaires qui avaient été retenus par le gouvernement Jospin lorsqu'il a signé la charte, en 1999, et qui ont été à l'époque déclarés compatibles avec la Constitution. Cela permettrait des progrès notables.
Monsieur Herbillon, la culture s'incarne bien en Europe en matière cinématographique - on l'a vu avec Amour, le film de Michael Haneke, présenté alternativement comme un film autrichien ou comme un film français. Les coproductions forgent une identité européenne, comme le font les capitales européennes de la culture – et je me félicite du bon démarrage de Marseille Provence 2013, dont le lancement a eu lieu en présence de M. Manuel Barroso. Dans le cadre de l'éducation artistique et culturelle, il faut donner aux enfants une liste de films européens ; j'ai évoqué la question avec Wim Wenders. En matière de spectacle vivant, outre le festival franco-allemand Transfabrik, le nombre de coproductions augmente – ainsi, à Rennes, le projet Prospero associe six compagnies théâtrales européennes.
J'ajoute enfin que je me m'étais opposée au changement d'appellation du programme Erasmus au bénéfice de YES EUROPE alors même que le nom d'Erasme a un sens pour tous et que l'Europe pâtit du manque d'incarnation par de grandes figures.