Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 28 novembre 2012 à 18h45
Commission des affaires européennes

Bernard Cazeneuve, Ministre délégué chargé des affaires européennes :

Je vous remercie pour ces questions auxquelles je vais m'efforcer de répondre le plus précisément possible.

Il y a deux manières de répondre à votre question concernant la Grèce, Monsieur Lambert.

D'une part, la politique d'aide nous coûte moins cher qu'une éventuelle inaction. Si ce pays quittait la zone euro, les conséquences économiques et politiques surviendraient en cascades et les coûts seraient beaucoup plus élevés pour les comptes publics européens en raison du surcroît de récession qui en résulterait et de la réaction des marchés : la parole publique des États européens n'aurait en effet aucune valeur puisque nous abandonnerions la Grèce après avoir martelé que nous ne le ferions pas. Nous ne savons donc pas combien nous coûterait d'abandonner la Grèce à elle-même mais nous savons que cela nous coûterait bien plus cher que ce que nous avons décidé de mobiliser à son profit.

D'autre part, et plus précisément, deux plans d'aide à la Grèce ont été décidés : celui de 2010, de 110 milliards, et celui du mois de février 2012, de 130 milliards. Ce dernier devait être débloqué de manière fractionnée, à travers plusieurs enveloppes, en fonction de la capacité de la Grèce à tenir ses engagements. Les 34 milliards que j'ai évoqués constituent une tranche du financement global de 130 milliards, sur lequel notre Parlement a délibéré. Nous débloquons les différentes enveloppes au fur et à mesure des vérifications que nous exerçons avec le concours de la troïka – UE, BCE, FMI – quant au respect, par la Grèce, de ses obligations. Au terme d'élections tumultueuses, elle a d'ailleurs pris des dispositions devant son Parlement visant à réaliser 18 milliards d'économie, dont 9 milliards dès 2013, et à engager des privatisations à hauteur de 9,5 milliards. Nous avons donc constaté que nous pouvions enclencher le déblocage de la nouvelle tranche du programme et nous tenons nos engagements.

Par-delà le programme, la restitution sous séquestre de liquidités engrangées par les banques centrales suite à l'achat de la dette grecque permet d'alléger les charges d'emprunt de ce pays. L'inverse aurait été évidemment choquant.

Par ailleurs, j'entends souvent dire qu'il n'est pas très heureux de défendre les enveloppes de la PAC sans la faire évoluer. Certes, mais pour qu'elle évolue dans le sens de la convergence et d'une répartition plus équitable des aides entre les grandes exploitations, il faut qu'elle dispose d'un bon niveau d'enveloppes. Je note, d'ailleurs, que dans un certain nombre de pays, les aides sont déplafonnées. Dans le cadre de la discussion du budget de l'UE, nous nous sommes battus pour que M. Van Rompuy n'inclue pas dans sa proposition le déplafonnement des aides d'un certain nombre de céréaliers allemands ou d'autres pays, dont la France. Comme le disait M. Lambert, il n'y a pas de raison pour que les petits exploitants laitiers d'une région chère à mon coeur souffrent de la fin des quotas et de la crise de la surproduction laitière quand d'autres commencent à gagner de l'argent avant même d'avoir commencé à travailler.

En Italie, l'aide directe s'élève à 400 euros par hectare contre 300 environ pour la France, les pays de l'est de l'Europe bénéficiant d'une aide au-dessous de la moyenne, de l'ordre de 250 euros. A enveloppe constante, la convergence suppose que les pays profitant des aides les plus importantes acceptent de les voir baisser au profit des pays qui se situent au-dessous de la moyenne. Si cela se produit alors que les enveloppes baissent, l'effet de décrochage sera dramatique pour nos agriculteurs. Plus le niveau de l'enveloppe est garanti, plus la convergence souhaitée sera envisageable.

Il en est de même s'agissant du verdissement de la PAC. Tous ceux qui le demandent en même temps qu'ils demandent la diminution des enveloppes de la PAC commettent une grave erreur d'analyse. Atteindre 30 % de verdissement avec des enveloppes en baisse, c'est rendre ce dernier impossible pour les agriculteurs les plus vulnérables, qui sont d'ailleurs parfois ceux qui ont pratiqué l'agriculture la plus intensive et qui se sont considérablement endettés.

Voici comment les choses se sont passées dans mon département : fin des quotas pour les exploitants laitiers ; l'UE stocke 450 000 tonnes de beurre et de lait en poudre ; effondrement des prix ; faute de régulation par les quantités puisque nous y avons renoncé, les agriculteurs décident de produire en espérant compenser la baisse des prix par la quantité produite ; pour ce faire, ils s'endettent, pratiquent une agriculture plus intensive, augmentent les surplus et contribuent ainsi à faire baisser les prix. C'est ainsi que l'on entretient un cercle vicieux d'appauvrissement dramatique des agriculteurs. Si l'on souhaite donc que l'agriculture intensive soit moins massive, il ne faut pas diminuer de façon drastique la contribution européenne pour cette petite agriculture. Si tel était le cas, je le répète, l'effet de décrochage serait important et l'adaptation de ces exploitations à une agriculture plus extensive et plus respectueuse de l'environnement ne serait pas possible.

Vous avez donc raison, Monsieur Lambert, mais je n'oppose pas le niveau des enveloppes de la PAC à l'évolution de la PAC : je défends des enveloppes importantes pour la PAC afin de rendre cette évolution possible.

S'agissant de la qualité de la dépense dans la politique de cohésion, oui, il faut l'améliorer. Il n'est pas normal que la destination des fonds de cohésion s'éloigne trop des objectifs de l'Europe tels que nous les avons définis dans le cadre de la stratégie « Europe 2020 ». Il n'est pas normal non plus que, dans certains pays, le taux de consommation des enveloppes dédiées à la cohésion soit de 10 % faute de savoir construire des projets et de savoir dépenser ces sommes dans le cadre des règlements adoptés par le Conseil et le Parlement européen. De surcroît, la mobilisation de ces fonds est si désordonnée que les pays s'en trouvent pénalisés.

Mais il faut trouver un équilibre. Nous avons adopté un « paquet cohésion » qui comporte trois éléments : la concentration thématique – nous faisons en sorte que les fonds européens soient davantage concentrés autour d'objectifs et de thématiques davantage lisibles –, la conditionnalité macroéconomique – qui consiste à attribuer des fonds à des pays qui respectent les règles de bonne gestion budgétaire, ce qui n'est pas mal mais il ne faut pas pousser la logique jusqu'à refuser à des pays qui connaissent des difficultés la possibilité de bénéficier de moyens qui leur permettraient, précisément, d'en sortir ; et il faut se montrer rigoureux et exigeant sans enfermer les dynamiques de développement des territoires dans des logiques toujours plus disciplinaires qui consistent à les achever plutôt qu'à les guérir –, et, enfin, la conditionnalité ex ante. C'est entre ces trois éléments qu'il convient de trouver un équilibre.

S'agissant des fonds propres et de la taxe sur les transactions financières (TTF), Monsieur Léonard, nous avons adressé à la Commission une lettre signée par douze États, ou plus exactement, onze plus un, qui reste encore à convaincre (les Pays-Bas). L'opération est possible à partir de neuf États. Nous allons donc mettre la taxe en place, comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, alors que cela paraissait impossible. Il fallait en effet tenir compte de la dynamique dans laquelle nous étions au moment où nous adoptions certaines dispositions européennes que nous n'avions pas inspirées. Oui, la TTF se fera mais ce n'est pas parce qu'il en sera ainsi que les fondements juridiques de la taxe seront effectifs avant la fin de l'année. Ce n'est pas pour cela non plus qu'elle sera affectée en tant que ressource propre.

Madame Lemaire, les Britanniques ne peuvent pas en effet à eux seuls bloquer la TTF puisque la procédure relève de la majorité qualifiée. Nous ne croyons pas, en outre, que la taxe génèrerait une distorsion de concurrence. Le cas échéant, ce ne serait d'ailleurs pas nécessairement au détriment des Britanniques. Les Parlementaires du Royaume-Uni que vous avez rencontrés ne doivent pas s'inquiéter. En même temps, je comprends qu'il soit très difficile d'affecter la TTF en ressource propre de l'UE si les ressources de douze États contribuent à financer un budget au bénéfice des Vingt-Sept. Il conviendra donc de trouver une modalité technique, peut-être en alimentant un fonds dédié bénéficiant à ces pays. Ce ne serait pas toutefois une formule très communautaire et je doute qu'elle susciterait beaucoup d'enthousiasme au sein du Parlement européen. Une autre stratégie consisterait à attendre que s'enclenche une dynamique plus large que celle initiée par les douze États visant à affecter la TTF à l'Union en déduction de la contribution Revenu national brut (RNB) des États. Cela permettrait d'engager une dynamique de ressources propres sans tomber dans la difficulté proportionnelle « douze-vingt-Sept ». Des solutions techniques au problème que vous évoquez existent donc, comme il en existe à la question de la supervision bancaire dans la zone euro, laquelle doit nous conduire à articuler l'action de la BCE avec celle de l'Autorité bancaire européenne.

D'aucuns expliquent parfois, Monsieur Léonard, que nous ne disposerons pas de fonds dédiés à l'innovation et à la croissance, que ce budget serait de récession et que le plan de 120 milliards relèverait quant à lui de l'ornementation. Non ! Ce n'est pas ce que disent les chiffres. Entre ce qu'étaient les précédentes perspectives budgétaires et ce qu'elles sont aujourd'hui, les budgets consacrés à la croissance augmentent de 55 %. Pas un budget national n'évolue de cette manière ! Le programme « Connecting Europe » qui doit contribuer à la numérisation des territoires, au développement des transports et de l'interconnexion dans les politiques énergétiques – donc, à la transition énergétique –, augmente de 400 % et passe de 8 à 40 milliards. Le programme COSME est quant à lui doté de 2,5 milliards et le budget consacré à la recherche de 50 à 80 milliards. Tous ceux qui, parfois dans la majorité, répètent l'antienne de la récession budgétaire, racontent de vastes blagues. Qu'ils regardent les chiffres ! Ce budget est un budget de croissance à condition qu'il ne connaisse pas de coupes supplémentaires. J'ajoute que ces chiffres sont ceux du budget lui-même et que mon cabinet communiquera à votre commission les tableaux d'évolution des différents budgets, rubrique par rubrique, entre les dernières et les actuelles perspectives financières.

Nous ne sommes donc pas confrontés à des difficultés sur ces budgets-là. Les problèmes concernent les budgets de la PAC et de la politique de cohésion dont la Commission considère, à tort, qu'ils ne créent pas de la croissance. Or, je le répète, tous les budgets contribuent à créer de la croissance. C'est pour cela qu'il convient de procéder à un rééquilibrage entre les rubriques, même s'il est difficile. En effet, même si les rubriques « croissance » ont augmenté dans les proportions très importantes que je vous ai indiquées, la PAC et la politique de cohésion représentent 70 % du budget de l'Union. Des taux de progression très importants s'appliquent donc à des bases qui ne sont pas aussi significatives.

S'agissant des initiatives autour de la politique industrielle européenne, Monsieur Léonard, je veux surtout souligner la détermination du Gouvernement. Le ministre du redressement productif a demandé que nous portions au sein de l'Union une lettre signée par sept ministres européens de l'industrie demandant la mise en oeuvre d'une nouvelle politique industrielle : identification de nos filières d'excellence, mise en place d'une stratégie de transfert de technologie et d'innovation dans ces filières avec la constitution de clusters européens, mise en place du juste échange – de la réciprocité – avec la volonté de défendre nos industries en faisant en sorte qu'elles puissent accéder aux marchés publics des pays dont les industries ont accès aux nôtres. Tel est le sens de la politique industrielle que nous portons avec, évidemment, les parlementaires européens qui prennent en effet des initiatives souvent convergentes avec les nôtres.

Quelles leçons tirons-nous de ce qui s'est passé en Grèce et de la façon dont l'Europe s'est comportée, Madame Karamanli ? Elles sont en adéquation avec notre discours. L'Europe ne peut pas être une machine à ajouter des disciplines budgétaires aux disciplines budgétaires en évacuant totalement la question de la solidarité. L'Europe ne peut pas être une machine se fondant exclusivement sur des logiques punitives sans que nous allions au bout des dispositifs dont elle a besoin pour organiser en son sein la solidarité. L'Europe ne peut pas être une machine qui consiste à prendre les décisions le plus tard possible au prétexte que le marché finirait pas faire son oeuvre. Le temps perdu, c'est de l'argent dépensé en pure perte, de la désespérance, des peuples qui s'éloignent du projet européen, du populisme, lequel se manifeste rarement par son attachement aux valeurs démocratiques et se caractérise plutôt par une défiance à l'endroit de la tolérance, de l'écoute et de la solidarité.

Madame Fort, d'autres pays connaissent en effet des situations difficiles, comme Chypre, par exemple. La troïka s'en préoccupe, des accords sont en voie d'élaboration, nous faisons en sorte que ce pays soit aidé et il le sera.

En politique, Monsieur Cordery, les propos peuvent parfois varier en fonction des lieux, même si le Gouvernement ne procède pas ainsi. La fermeté et l'euro-scepticisme britanniques sont en effet patents mais, en même temps, les responsables sont conscients de l'apport du marché intérieur européen. Ils tiennent parfois des discours qu'ils ne voudraient pas tenir mais qui sont ceux attendus par leur base. C'est complexe ! Nous souhaitons quant à nous que la Grande-Bretagne demeure au sein de l'Union européenne. Nous considérons que la contribution de ce pays au marché intérieur est importante et utile et que le marché intérieur a beaucoup apporté au Royaume-Uni. Même si la singularité britannique s'exprime parfois sur un mode qui peut nous inquiéter au point de nous laisser penser que l'Angleterre pourrait s'éloigner de nous, nous savons aussi que cette singularité est une chance, qu'elle apporte une couleur particulière à l'Union européenne. Dans la vie politique comme dans la vie tout court, il faut parfois vouloir rester avec l'autre « pour deux », parce que son désir n'est pas toujours partagé. Les efforts que l'on déploie alors sont parfois payés de retour. Nous dialoguons constamment avec les Anglais. Souvenons-nous que la politique est un art de la subtilité plutôt que de nous attarder sur des déclarations sommaires et brutales. N'alimentons pas de polémiques inutiles. Le rôle de la France est de rassembler, de coaliser, de favoriser l'union du plus grand nombre des acteurs en présence.

Le PEAD, Madame Guittet, n'est pas négociable. Nous y travaillons beaucoup, avec Mme la Ministre Carlotti et M. le Ministre Le Foll, en essayant de faire en sorte qu'il soit doté, de même que le fonds d'adaptation à la mondialisation et le FSE. Nous ne « jouons » pas avec ces dispositifs. Les associations sont venues manifester devant l'Assemblée nationale et nous sommes allés à leur rencontre. Nous y avons même retrouvé des acteurs politiques qui avaient accepté, il y a dix-huit mois, que l'Allemagne et la France abandonnent ce programme. Ils ont dû se rendre compte qu'ils avaient eu tort, ce qui a conforté notre motivation… Nous continuerons à nous battre avec force sur cette question et nous rendrons compte au Parlement de notre action.

En ce qui concerne les agro-carburants, je vous communiquerai par écrit une réponse précise et exhaustive.

S'agissant du plan de croissance, nous respectons nos engagements – 120 milliards, 55 milliards de fonds structurels – et notre calendrier. Nous avons saisi la DATAR. En France, au titre des fonds structurels, 2,5 à 3 milliards sont disponibles. Nous attendons 7 à 8 milliards de retour de la part de la Banque européenne d'investissement (BEI) au titre des prêts de 60 milliards consentis au terme de sa recapitalisation à hauteur de 10 milliards. Enfin, nous présentons nos projets de telles manière qu'ils soient éligibles aux project bonds. Ce plan ne comporte aucune dimension artificielle : il existe ! D'ailleurs, confirmez-le à Jean-Louis Borloo – comme j'ai eu l'occasion de le faire moi-même ! Je lui communiquerai d'ailleurs l'ensemble des documents qui en témoignent. Le Pacte fait l'objet d'un travail précis et extrêmement sérieux de la Commission, y compris sur le plan règlementaire. La France en attend un retour spécifique. Je poursuis mes tournées dans les régions pour expliquer la façon dont il se décline et mobiliser tous les acteurs. Ce que nous voulons sur le plan budgétaire n'est d'ailleurs rien d'autre que le prolongement de ce que nous avons voulu avec le plan de croissance. Je le répète : nous ne demandons pas des coupes budgétaires supplémentaires parce que cela n'aurait pas de sens alors que nous nous sommes battus pour débloquer 120 milliards pour la croissance.

Le ministère des affaires européennes s'engagera dans la promotion de la « résolution Caresche » dès lors qu'il n'encourra pas le reproche de s'ingérer dans le périmètre législatif des différents parlements. Si j'étais parlementaire, je demanderais quant à moi au Gouvernement de ne surtout pas s'occuper de l'organisation d'une conférence interparlementaire. L'article 13 du TSCG prévoit que les parlements nationaux et européen doivent s'organiser pour organiser entre eux le contrôle de l'action de la Commission et des exécutifs au titre du « Semestre européen ». Si je m'occupais trop de cette question, une fronde ne manquerait pas de voir le jour de la part des parlementaires les plus jaloux de leurs prérogatives. D'un autre côté, si je ne m'en préoccupe pas, on me reprochera de rester inactif. Nous ferons donc les deux à la fois : nous allons promouvoir la « résolution Caresche » parce qu'elle est bonne pour la démocratisation de l'Europe, parce que nous voulons davantage de démocratie au sein de l'Union européenne dans le cadre de la feuille de route de M. Van Rompuy – et que nous entendons le dire –, et parce qu'à chaque fois que les Parlements décident d'exercer leurs prérogatives souveraines, ils contribuent à une telle démocratisation. Mais notre communication sur la résolution ne sera en rien assimilable à une substitution du Gouvernement au Parlement dans la mise en oeuvre des dispositifs qu'elle prévoit.

Au mois de novembre 2011, le précédent Gouvernement a décidé de sous-budgétiser les crédits de paiement nécessaires au financement d'ERASMUS et d'autres dispositifs. Nous avons été confrontés à une impasse de 9 milliards, 8,3 milliards au titre des fonds structurels, 90 millions au titre d'ERASMUS auxquels s'ajoute le budget du programme dédié à l'éducation et à la formation tout au long de la vie. Nous avons pris toutes les dispositions nécessaires pour qu'ERASMUS soit financé. Si les conditions avaient été réunies au Parlement européen pour que nous puissions bénéficier d'un consensus sur les budgets rectificatifs (BR) 5 et 6, nous l'aurions obtenu. Cela n'a pas été souhaité et je ne ferai pas de commentaire. Nous étions quant à nous prêts à réaliser les efforts qui ne l'avaient pas été. Je gage toutefois qu'il n'y aura pas de problème de financement. Dans le cadre du prochain budget, la dotation sera plus significative avec le programme ERASMUS pour tous résultant de la fusion d'ERASMUS et d'autres programmes à destination de la jeunesse.

La meilleure façon de nous libérer de cette interrogation lancinante sur le regard que les autres Européens portent sur nous, Monsieur Daniel, c'est de faire en sorte d'être forts en Europe. A cette fin, il faut être sérieux et ne pas nous mettre à expliquer que nous pourrions ne pas tenir les engagements que nous avons pris. Nous devons apparaître comme des gens budgétairement sérieux, déterminés à réaliser les réformes qui doivent l'être. Telle est la ligne du Gouvernement. En même temps, et pour cette raison même, celui-ci doit pouvoir s'autoriser à décrire les orientations de l'Union auxquelles il aspire. En effet, nous n'avons pas de raison de considérer que la juxtaposition des disciplines et des logiques d'austérité permettront à l'Europe de conforter sa relation avec les peuples qui la composent. Il faut que l'Union soit à la fois disciplinée, et ambitieuse pour la croissance et l'emploi. Si tel est le cas, nous changerons le regard que les Français et les peuples portent sur l'Europe et nous changerons le regard que celle-ci porte sur la France.

Monsieur Cordery, les Britanniques ont demandé des coupes à hauteur de 200 milliards, ce qui est beaucoup, et un rabais dont le montant n'est pas neutre. Mais si l'on répond à ces deux demandes, le budget européen n'existe plus. Nous leur avons donc clairement dit que, pour nous, ce n'était pas possible. Il faudra trouver un compromis. Comme nous n'avons pas senti les Britanniques désireux d'éviter un compromis à vingt-sept, on peut imaginer en l'occurrence qu'ils envisagent d'en trouver un dont ils seraient partie prenante. C'est ce que nous essayons de construire mais, comme toujours, lorsque les crispations sont nombreuses, il faut oeuvrer à la décrispation en se plaçant au barycentre de la négociation, sans s'en déporter jamais, là où le compromis est possible. Telle est la stratégie française. Vous connaissez la personnalité du Président de la République, ses talents pour faire avancer les dossiers lorsque la situation est tendue, son sens du compromis et des intérêts de l'Europe car il a été très à l'avant-garde du sentiment européen pendant cette négociation, tout en étant soucieux de nos intérêts nationaux. Par son positionnement barycentrique, la France jouera un rôle très important dans l'élaboration du compromis dont l'Europe a besoin. Avec les Britanniques, nous voulons une relation apaisée et, avec les Allemands, une relation confiante parce que nos deux pays jouent un rôle particulier en vue de la réalisation de ce compromis.

Je vous remercie.

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