Intervention de Philippe Dorge

Réunion du 16 mai 2013 à 11h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Philippe Dorge, directeur des ressources humaines du groupe PSA :

Je commencerai par votre dernière question en répondant par l'affirmative, même si un peu plus de marges de manoeuvre seraient souhaitables – ce qui nous ramène au problème du cadre légal. La question du bon support juridique se pose par exemple pour le congé d'un senior dans le cadre d'une mesure de maintien dans l'emploi. Nos interlocuteurs me paraissent mobilisés et de bonne volonté pour trouver des solutions équilibrées – leur culture économique, d'ailleurs, s'est visiblement développée : peut-être la crise a-t-elle permis une prise de conscience –, même si les conseils qu'ils nous donnent peuvent s'apparenter à des injonctions paradoxales, compte tenu des contraintes financières qui empêchent des aides plus concrètes ; au moins pourrait-on, à défaut de ces aides, nous laisser davantage de souplesse pour innover. Nos interlocuteurs y semblent d'ailleurs disposés, mais nous butons vite sur des contraintes légales, de sorte que le risque juridique tend à « gripper » le système. Le contrôle par le juge est bien entendu normal, mais ce dernier ne se prononce que sur la base des textes votés par le législateur. Quoi qu'il en soit, je reste optimiste sur de futures améliorations.

Quant à votre question sur l'anticipation, les grandes entreprises comme PSA ont vraiment besoin d'outils complexes – on pourrait prendre l'image d'une boîte de vitesses, où l'on passe la première, la deuxième, la troisième. Or, dans notre cadre législatif, on a souvent l'impression d'entrer dans une procédure de licenciement économique dès la première ou deuxième vitesse, quand cela ne devrait concerner en réalité que la cinquième.

Au premier niveau, il y a la gestion courante de l'emploi et de la mobilité dans l'entreprise : il n'y a alors aucune baisse globale de l'emploi, mais des mouvements dus au fait que les besoins se modifient en permanence. On est alors tout à fait dans le champ de la GPEC, même si certains voient déjà là des licenciements économiques.

Au deuxième niveau, on redéploie l'emploi et les compétences de façon collective : un site qui ferme, des métiers qui périclitent ou, au contraire, qui prennent de l'ampleur. La GPEC permet alors d'éclairer les salariés ; tout repose encore sur le volontariat, on ne parle pas encore nécessairement de PSE, mais il y a déjà, légalement, deux réunions du CE. Il nous faut apprendre à gérer les transformations collectives de façon banale : le monde change, l'environnement économique change, l'entreprise doit être très agile, très réactive.

Le troisième niveau commence lorsqu'il y a une baisse globale de l'emploi, mais sans qu'il soit encore nécessaire de prendre des mesures contraignantes. Légalement, on est déjà dans le cadre d'un PSE, mais les mesures fondées sur le volontariat suffisent en général. Jusqu'à présent, nous avions toujours réussi à en rester là, et à éviter les licenciements.

Enfin, un jour, il faut fermer un site, arrêter complètement une activité. C'est ce qui se passe à Aulnay. Nous avons bon espoir, aujourd'hui, d'avoir trouvé une solution de reclassement pour tous les salariés de ce site au 31 décembre prochain ; mais, sinon, il faudra bien engager une phase de mesures de contrainte. C'est le dernier niveau.

Vous le voyez, mon approche est pragmatique : il y a différents niveaux d'action. Nous attendons des dispositifs légaux qu'ils nous permettent de régler toutes les situations qui se présentent sans recourir, sauf nécessité absolue, au licenciement économique.

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