Nous sommes heureux de vous recevoir pour la première fois devant notre commission, monsieur le ministre, afin de vous entendre sur les aspects européens de la politique du développement.
Officiellement, l'Europe est fidèle aux engagements des États membres visant à consacrer au moins 0,7 % de leur PNB à l'aide publique au développement (APD) mais nous n'en sommes pas moins inquiets.
En effet, les conclusions du Conseil européen des 7 et 8 février sur le cadre financier pluriannuel délivrent un signal très négatif puisque les montants alloués à l'APD diminuent de 13 % et ceux de l'enveloppe du Fonds européen de développement (FED) de 11 % alors qu'ils constituent une contribution essentielle à la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et qu'ils ont permis, au cours des cinq dernières années, la scolarisation de plus de dix millions d'enfants et l'accès à l'eau potable de 32 millions de personnes. Nous avons donc pris acte avec attention, sinon avec plaisir, du rejet de ces décisions par le Parlement européen, la politique du développement ayant été grandement sacrifiée. J'ajoute que notre commission a réalisé un travail spécifique à ce propos que nous aurons vraisemblablement l'occasion d'évoquer.
De surcroît, les réductions de crédits envisagées risquent d'altérer la relation que l'Union européenne entretient avec les pays du sud alors même qu'elle se trouve sur ce plan-là en concurrence avec des États qui ne partagent pas son approche des critères de conditionnalité et de bonne gouvernance quant à la délivrance de l'aide publique. Partagez-vous notre inquiétude à ce propos ?
Par ailleurs, le Parlement européen et la Cour des comptes européenne se sont montrés très critiques s'agissant de l'efficacité de la politique de développement européenne à laquelle ils reprochent d'être à la fois peu visible, aveugle – dès lors qu'elle ne fixe pas d'objectifs politiques – mais aussi peu cohérente et peu efficace, ce qui fait beaucoup. Le programme pour le changement de la politique de développement, qui propose une concentration de l'aide sur les secteurs et les pays qui en ont le plus besoin, a également été critiqué par les pays d'Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP). Sur quels points, si nécessaire, conviendrait-il de rectifier le tir ?
Pensez-vous que l'affectation d'une partie de la future taxe sur les transactions financières (TTF) à la politique de développement permettrait d'améliorer les relations avec les pays du sud ? Après tout, la taxe Tobin tendait bien originellement à favoriser leur développement et à renforcer notre solidarité avec eux.
Les technologies liées à l'énergie solaire et à la lutte contre le changement climatique – lequel affectera gravement les pays du sud – pourraient être autant d'occasions pour oeuvrer en faveur du développement. L'Europe participe-t-elle suffisamment à de tels projets ?
Comment analysez-vous la décision de la Commission européenne visant à présenter au titre du FED un budget séparé pour chaque pays ACP et à réserver 20 % de l'enveloppe du Fonds à la fourniture de services sociaux de base – santé, éducation primaire – avec une attention particulière portée aux femmes et aux enfants ?
Le Parlement européen regrettant de ne pas avoir de droit de regard sur le FED, considérez-vous que, sur un plan démocratique, il doit en être autrement ?
Le groupe de travail sur la politique agricole commune, dont je fais partie, étudie la question des restitutions à l'exportation, lesquelles déstabilisent les filières agricoles ou vivrières des pays du sud. Les politiques de l'Union européenne manquant de cohérence, ne serait-il pas à l'honneur de cette dernière de mettre en cohérence sa politique de développement avec ses politiques agricole et commerciale, et inversement ?
A ce propos, je vous remercie de bien vouloir faire un point sur les négociations des accords de partenariat économique (APE). Le délai de négociation sera-t-il rallongé jusqu'en 2016, comme le Parlement européen l'a souhaité ? Quelle est la position du Gouvernement à ce sujet, ainsi que sur le degré d'asymétrie d'ouverture des marchés des pays ACP, lequel doit leur être laissé ?