Je vous remercie de ces questions.
Je vous invite, monsieur Hammadi, à me communiquer les éléments dont vous disposez concernant l'ORTM. La réhabilitation des studios, dont la plupart a été saccagée, et les problèmes liés aux réseaux de télécommunication font partie des priorités d'action des « six mois » et constituent l'un des piliers de notre stratégie partagée et coordonnée avec l'ensemble des acteurs.
Outre la grande conférence franco-européenne du 15 mai, à Bruxelles, et notre action avec l'ensemble de la communauté internationale, les collectivités territoriales et les diasporas maliennes constituent deux autres fers de lance de notre politique. Ainsi organiserons-nous à Montreuil, le 10 avril, une réunion dédiée aux versants politique et économique de cette crise. Comment les migrants et les 120 000 franco-maliens peuvent-ils contribuer encore davantage au développement économique et à la reconstruction du Mali, étant entendu que les enjeux sont nombreux ? Les flux financiers sont plus importants que l'aide publique mais sont-ils bien répartis géographiquement ? Quelles en sont les conditions ? Ce sont là autant de sujets qui pourront être abordés.
Les collectivités territoriales, quant à elles, constituent évidemment l'un des éléments centraux de notre action. Le 19 mars, j'ouvrirai une réunion, que Laurent Fabius clôturera, visant à mobiliser les cent collectivités françaises qui travaillent avec leurs homologues maliennes – ce qui représente environ une collectivité sur six au Mali – dans le cadre des coopérations décentralisées. Nous sommes donc à même d'agir dans la quasi-totalité de ce pays, en tenant compte naturellement des enjeux de sécurité inhérents à sa situation. M. le ministre des Affaires étrangères et moi-même ferons à cette occasion un certain nombre d'annonces.
Parallèlement, nous voulons que l'ensemble de l'aide internationale passe en partie et davantage qu'auparavant par des canaux locaux. Non seulement il s'agit là d'un gage d'efficacité et de proximité vis-à-vis des populations mais cette forme de décentralisation plus structurée, plus forte et plus affirmée nous semble contribuer à la solution politique du conflit, qui appartient certes d'abord aux Maliens.
Avec l'ensemble de nos partenaires, nous réfléchissons de surcroît à des aides budgétaires sectorielles décentralisées. Il existe en effet deux grands types d'aides publiques : l'aide sur des projets – réalisation d'une route, d'un pont, d'une centrale, d'une station de pompage etc. – et l'aide budgétaire – tant d'argent est attribué au ministère de l'éducation, de la santé ou de l'aménagement du territoire pour réaliser tel ou tel projet. Nous souhaitons donc que ce dernier type d'aide soit décentralisé de façon à ce qu'elle soit mise en oeuvre au Mali directement et avec cohérence par les collectivités locales.
Nous approfondirons ce questionnement le 19 mars mais, également, dans les semaines et les mois à venir, cette aide budgétaire étant d'abord européenne – la Commission a déjà annoncé le déblocage de 250 millions, somme qui pourrait être revue à la hausse si des besoins n'étaient pas satisfaits –, une partie pouvant aussi passer par les collectivités locales.
La question de la conditionnalité de l'aide au respect des droits de l'homme, des droits humains et, donc, du droit des femmes, particulièrement sujets à caution dans certains pays, est évidemment complexe. À titre personnel, je n'y suis pas hostile mais j'ai posé directement la question aux représentants des ONG et de la société civile des États concernés, lesquels ont tous répondu par la négative, jugeant que cela serait contre-productif. Annuler l'aide reviendrait en effet à céder la place à d'autres, à accroître la déstructuration et, en un sens, à imposer une double peine. Ce n'est pas parce que tel gouvernement ne respecte pas les droits de l'homme que les enfants qui sont scolarisés grâce à l'aide internationale ne doivent plus l'être. Nous devons donc trouver un équilibre subtil entre le silence, qui n'est conforme ni à nos valeurs, ni à nos intérêts, ni à l'intérêt des personnes concernées, et la conditionnalité.
Nous avons réfléchi à cette question en France, dans le cadre des Assises du développement, mais aussi sur un plan européen. Au mois de mai dernier, quelques jours avant le changement de Gouvernement, l'Union européenne, et donc la France, se sont mises d'accord sur une grille de lecture commune permettant de dire ensemble, comme nous l'avons fait pour le Mali : « Nous arrêtons de verser des aides si la démocratie n'est pas respectée ; nous la reprenons parce que tel ou tel acte politique va dans le bon sens. » Cette réflexion étant permanente et non encore aboutie, je souhaite que l'on continue à avancer, un certain nombre d'actions menées ces derniers mois nous permettant d'affirmer que cela sera possible.
S'agissant des 0,7 %, la situation varie selon les pays. Dans son dernier PLF, la France a stabilisé son effort budgétaire grâce à l'affectation d'une partie de la taxe française sur les transactions financières au développement. D'autres États sont parvenus à l'augmenter, dont le Royaume-Uni qui, malgré un contexte budgétaire identique au nôtre, accomplit un effort conséquent.