Le sujet est complexe de par son objet et de par la multitude d'initiatives dans ce domaine. La réglementation trouve rapidement ses limites dans un cadre national ; le mieux c'est d'intervenir à l'échelon européen et, mieux encore, au niveau mondial. Il y a nécessité aujourd'hui pour la Commission européenne de traduire cette union bancaire, mais cela ne va pas de soi. Plusieurs propositions ont déjà été formulées.
La proposition CRD 4 a pour objet principal de traduire les règles de Bâle III, avec notamment la mise en place de nouveaux ratios prudentiels. Cet texte n'a pu être adopté l'été dernier pour des raisons conjoncturelles, mais on peut penser qu'il sera adopté d'ici à la fin de l'année.
S'agissant de la résolution, la plupart des pays ont dû réagir aux crises bancaires survenues depuis 2008 dans l'urgence. Faute de disposer de mécanisme de résolution, ce sont les États, et donc in fine les contribuables, qui ont dû financer ces défaillances. Il est donc essentiel de se doter de mécanismes de résolution. Au niveau européen, la première étape est d'harmoniser les régimes existants, la deuxième sera, compte tenu de la mise en place de l'union bancaire, de mettre en place un mécanisme unique de résolution avec une autorité de résolution européenne. En juin dernier, le Conseil européen a fait le choix de casser le cercle vicieux entre les dettes souveraines et les dettes des banques. Cela suppose la mise en place d'un mécanisme qui évite l'intervention de l'Etat pour renflouer les banques défaillantes. Dès lors que le MES, alimenté par des fonds provenant des États, est chargé de financer des banques en difficulté, il faut pouvoir disposer d'un minimum de garantie sur l'activité des banques, leur histoire.
Autre sujet essentiel : celui de la séparation des activités bancaires. L'origine des réflexions actuelles vient de la règle de Volcker qui a été adoptée aux États-Unis et a pour objet d'interdire aux banques de réaliser certaines opérations. Elle écarte ainsi la piste du cantonnement. Le problème est toutefois que les activités interdites risquent, en réalité, d'être finalement exercées par des acteurs non régulés, ce qui soulève la question de l'encadrement du shadow banking. Ensuite, il y a la proposition formulée par Sir John Vickers qui nous a reçus à Oxford en compagnie de son chien Alfie. Vickers suggère de cantonner les activités des banques de détail. Son objectif n'est pas de protéger les banques d'investissement mais uniquement les banques de détail, et avec une échéance lointaine puisque la mise en oeuvre de la réforme devrait être effective en 2019. Dans sa proposition, il revient aux banques de décider du cantonnement ou non des activités figurant dans la zone grise . Les députés anglais souhaitent, pour leur part, imposer une électrification entre les deux types d'activité. Le projet de loi présenté hier par le ministre des finances George Osborne affirme bien que le régulateur a le pouvoir d'imposer la séparation. A cet égard, le projet de loi français va dans le même sens. La troisième proposition résulte du groupe d'experts de haut niveau présidé par Erkki Liikanen mandaté par Michel Barnier. Il démontre que la banque universelle n'est pas plus dangereuse que les autres banques – son modèle est viable –, et prône le cantonnement des activités les plus spéculatives dans une filiale tout en conservant le modèle de la banque universelle. Si le projet de loi français s'inspire de cette proposition, il demeure quelques différences, notamment s'agissant du cantonnement ou non des activités de tenue de marché. Sur ce sujet, Michel Barnier pense soumettre une proposition d'ici à la fin de l'année. Douze à dix-huit mois sont ensuite nécessaire pour l'adoption d'un texte. Par conséquent, le risque est élevé que rien ne soit adopté avant 2014-2015 et ensuite tant le Parlement européen que la Commission européenne auront été renouvelés. La France a donc raison d'anticiper sur ce sujet.
Le grand intérêt des propositions du groupe d'experts mené par Erkki Liikanen réside dans le lien qu'il établit entre séparation des activités et résolution. La séparation des activités doit en effet faciliter la résolution.
Dans cette logique, le projet de loi français prévoit que les banques doivent élaborer leur testament, destiné à faciliter la résolution, et prévoyant les activités dont elles devront se séparer. L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution se voit confier des pouvoirs forts comme le droit d'écarter un dirigeant ou de procéder au renflouement interne.
Il est également prévu de transformer l'actuel Fonds de garantie des dépôts en Fonds de garantie des dépôts et de résolution. On obtient ainsi une architecture solide où si le renflouement interne ne suffit pas, le Fonds de garantie des dépôts et de résolution intervient, puis le recours à la mutualisation des fonds au niveau européen et, enfin, le MES.