Si ne nous sommes pas intervenus plus tôt, monsieur Marsaud, c'est n'est pas en raison de l'insuffisance de nos effectifs ; c'est parce que nous avons attendu la décision du Conseil de sécurité des Nations unies. Plus de 3 000 soldats français, je le rappelle, restent mobilisés au Sahel. Nous réfléchissons au redéploiement de nos forces en Afrique, afin de les rendre plus rapidement opérationnelles : au Mali comme en Centrafrique, la préposition de certaines troupes s'est révélée très utile à cet égard.
Les groupes de l'ex-Séléka sont plus organisés que ceux des anti-balaka. Les premiers sont davantage présents en ville ; les seconds ont généralement trouvé refuge à l'extérieur des villes ou dans la forêt. Dans le cadre des mesures de confiance, nos troupes organisent le cantonnement des unités organisées dans des lieux identifiés où elles déposent leurs armes. C'est l'objet de l'opération en cours à Bangui pour l'ex-Séléka. Par ailleurs, lorsque nos patrouilles croisent des personnes armées en ville, elles leur demandent de rendre les armes, en utilisant au besoin la force.
Des opérations de pénétration dans les quartiers ont également eu lieu : j'en ai pris deux exemples tout à l'heure. Le désarmement impartial concerne tous les quartiers, qu'ils soient à dominante musulmane ou catholique, et l'ensemble du territoire ; c'est pourquoi nos troupes se déploient à Bossangoa et le feront à Bozoum, Ndélé et ailleurs, à mesure de l'arrivée des forces africaines, qui elles-mêmes participent à ce dispositif.
Nous tentons d'obtenir des chefs militaires le cantonnement des pick-up eux-mêmes : ce point est évoqué lors des réunions, autour du général Soriano, des partenaires africains et des représentants du Gouvernement centrafricain. Ce travail de longue haleine est indispensable, car les populations déplacées n'accepteront de rentrer chez elles que lorsqu'elles seront sûres de ne pas s'exposer aux représailles qu'elles avaient déjà subies, de la part de l'un ou l'autre camp, jusqu'au 5 décembre inclus.
La situation des seize autres préfectures, en dehors de Bangui, est, d'après la description qu'on m'en a faite, similaire à celle de Bossangoa. En d'autres termes, la présence de l'État se résume à celle du préfet seul, lequel s'estime heureux si son bureau n'a pas été incendié.
Les dignitaires religieux parlent d'une même voix ; ce sont les extrémistes qui attisent les antagonismes. Pour des raisons de sécurité, l'imam habite même chez l'archevêque. Nous réfléchissons aux moyens d'étendre la diffusion par radio – car la télévision est quasi inexistante –, afin de relayer la parole de la plateforme religieuse jusque dans les quartiers.
Les milices de l'ex-Séléka sont estimées à 2 000 à 3 000 hommes sur le grand Bangui. Nous avons identifié plusieurs lieux de cantonnement, dont certains ont disparu. Certains des combattants ont regagné le Soudan du Nord, d'où ils venaient ; d'autres sont des Tchadiens du Sud, et d'autres encore des Centrafricains qui ont pu se disperser. Mais ces événements ne datent que d'une semaine : cela permet de mesurer l'ampleur de la tâche déjà accomplie. À cette heure, la situation est déjà plus apaisée que mardi, même si elle demeure précaire.