La séance est ouverte à dix-sept heures.
Merci, monsieur le ministre des affaires étrangères, monsieur le ministre de la défense, d'avoir répondu à l'invitation de nos deux commissions pour cette audition, dont je rappelle qu'elle est fermée à la presse, consacrée à la situation en République centrafricaine.
Je veux tout d'abord rendre hommage à nos soldats, et saluer la mémoire d'Antoine Le Quinio et Nicolas Vokaer, militaires du 8e régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa), qui ont sacrifié leur vie pour notre sécurité.
Le Président de la République a engagé nos troupes pour sauver des vies, éviter des massacres et des viols, et tenter d'empêcher le chaos en Centrafrique. Cette intervention a toute la légitimité requise, puisqu'elle s'inscrit dans le cadre d'une résolution adoptée à l'unanimité du Conseil de sécurité des Nations unies le 5 décembre dernier.
Sans doute conviendrait-il d'abord de rappeler, messieurs les ministres, ce qui a rendu cette intervention absolument nécessaire, avant d'évoquer la gestion de la situation humanitaire et le problème de la transition politique.
Pourriez-vous également faire le point sur les soutiens dont la France bénéficie ? On annonce en particulier des crédits supplémentaires de la part de l'Union européenne, au titre des opérations humanitaires et de l'aide à la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (MISCA). Quel est le calendrier, s'agissant de la transformation de la MISCA en opération de maintien de la paix ?
Sur le plan militaire, les milices sont-elles désarmées ? Est-on désormais en mesure d'enrayer la spirale de la vengeance entre chrétiens et musulmans ?
Qu'en est-il de la formation des unités africaines et de leur contribution dans le cadre de la MISCA ?
Puisque nous sommes à l'avant-veille du Conseil européen de défense, quelles sont les contributions européennes sur le plan de l'aide humanitaire comme sur d'autres plans ? Le Président de la République a annoncé qu'il évoquerait le partage du fardeau par l'intermédiaire d'un fonds volontaire, conformément à ce que préconisait un rapport que j'avais présenté, et qui avait donné lieu à des contributions des différents groupes politiques. Une évolution des conditions d'utilisation des groupements tactiques européens est-elle envisageable ?
Je vous prie de bien vouloir excuser Mme Patricia Adam, actuellement en déplacement au Tchad pour le compte de la commission de la défense, qu'elle préside. Je salue également, au nom de notre commission, la mémoire des deux soldats du 8e RPIMa morts pour la France.
Bien qu'un débat sur la situation en Centrafrique ait eu lieu en séance publique mardi dernier, des échanges plus approfondis en commission étaient nécessaires. La situation est en effet particulièrement complexe, entre un État quasi inexistant, une population en danger et les prémices d'affrontements interconfessionnels. La Centrafrique est aussi un refuge pour des rebelles armés des pays limitrophes, sans oublier la menace de l'extrémisme radical.
Je fais miennes les questions de Mme Guigou sur cette opération qui, comme elle l'a rappelé, est placée sous mandat de l'ONU.
Cette audition, comme celles menées au cours de l'opération Serval, n'est pas ouverte à la presse, et le compte rendu, messieurs les ministres, vous en sera soumis au préalable, comme c'est l'usage.
M. Le Drian et moi-même sommes heureux de répondre à l'invitation de vos deux commissions.
La situation en Centrafrique vous étant largement connue, je me bornerai à un point sur son état actuel, au moment où nous nous exprimons, en laissant à M. Le Drian le soin d'insister sur les questions spécifiquement militaires.
L'opération Sangaris, qui s'inscrit dans le cadre d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, est menée suite aux demandes de l'Union africaine et des autorités centrafricaines. Elle recouvre trois domaines principaux, liés les uns aux autres, mais que l'on peut distinguer pour la clarté du propos : la sécurité, l'aide humanitaire et la transition démocratique, à laquelle on peut ajouter le développement.
S'agissant de l'aspect sécuritaire, notre objectif est le désarmement impartial. Les armes sont nombreuses sur place : certaines, d'un calibre modeste, sont détenues par les ex-Séléka, et d'autres plus simples, telles que des machettes, sont en la possession des anti-balaka, entre autres. De façon schématique, on peut dire que les musulmans et les chrétiens sont respectivement plus nombreux chez les premiers et les seconds.
Notre tâche, avec les 3 500 soldats de l'Union africaine – qui seront bientôt 6 000 – est en premier lieu le désarmement impartial : le désarmement est indispensable pour rétablir le calme et la sécurité ; il doit être impartial, afin de ne pas encourir les reproches de l'un ou l'autre camp. Cette tâche difficile, dont nos troupes s'acquittent remarquablement, donne déjà des résultats appréciables, à Bangui comme dans le reste du pays.
Ce sont désormais 1 600 soldats français qui sont engagés, et nous n'avons pas l'intention de dépasser ce nombre. S'y ajouteront, à terme, 6 000 soldats africains, avec un passage, aussi vite que possible, de la Mission de consolidation de la paix en Centrafrique (MICOPAX) – remplacée le 15 décembre par la MISCA – à une opération de maintien de la paix (OMP). Cet objectif, justifié par différentes raisons, a été unanimement réaffirmé, la semaine dernière, lors d'une réunion, autour du Président de la République, des principaux dirigeants africains, du secrétaire général des Nations unies et de responsables européens.
Au niveau européen, le recours au groupement tactique, actuellement piloté par les Britanniques, est théoriquement possible même si une telle procédure n'a jamais été utilisée ; pour ce faire, l'accord du pays pilote ainsi que des pays membres, qui financent alors l'opération, est nécessaire. Nous n'avons pas cet accord actuellement. Le pays pilote change néanmoins tous les six mois : la Bulgarie et la Grèce prendront le relais de la Grande-Bretagne.
Cependant, l'Union européenne, du moins certains de ses pays membres ont déjà décidé de s'engager ou sont prêts à le faire, sous une forme ou une autre. L'Union prend déjà partiellement à sa charge, à hauteur de 50 millions d'euros, les coûts liés au déploiement de la MISCA, au titre de la Facilité de paix pour l'Afrique. Elle a aussi décidé de débloquer des crédits, en deux fois – 20 millions d'euros, puis 18,5 millions –, pour la coopération humanitaire. En outre, une dizaine de pays de l'Union, parmi lesquels la Grande-Bretagne, la Belgique et l'Allemagne, ont par ailleurs décidé d'apporter un soutien logistique.
Il est par ailleurs envisageable que l'Union européenne assure, au moins en partie, la formation des futures forces armées centrafricaines, comme elle l'a fait au Mali.
Si l'on veut aller plus loin, il faudra envisager que d'autres pays européens, au-delà de leur soutien logistique, engagent des troupes au sol. Nous le leur avons demandé. Les discussions se poursuivent.
Nous souhaitons enfin que l'Union prenne à sa charge une partie des coûts actuellement assumés par la France. Pour ce faire, l'opération doit être qualifiée « PSDC » - Politique de sécurité et de défense commune - ; aussi le communiqué publié hier à l'issue de la réunion des ministres européens des affaires étrangères suggère-t-il, à la demande de la France, qu'elle pourrait l'être. Pour l'heure, aucune décision n'est cependant intervenue en ce sens. La difficulté est qu'un tel engagement a bien entendu un coût, et qu'il suppose que l'Union reconnaisse que l'opération n'est pas seulement française, mais qu'elle est européenne. D'aucuns pourraient nous faire le mauvais procès de n'avoir pas demandé que l'opération soit qualifiée PSDC avant d'intervenir ; mais, si nous l'avions fait, compte tenu des délais opérationnels, ce sont plusieurs dizaines de milliers de morts qui seraient à déplorer, et non pas 600.
Deux idées seront sur la table du Conseil européen de défense de jeudi et vendredi. D'une part, certains crédits de la Facilité de paix pour l'Afrique pourraient permettre la prise en charge de l'équipement : bien que cette aide ne soit pas, a priori, dans leur périmètre, elle serait particulièrement utile.
D'autre part, comme je l'ai expliqué à mes homologues, et comme le Président de la République le fera à son tour, nous devons avoir une vision à plus long terme : certes, la France est intervenue car elle était seule à pouvoir le faire ; mais si l'on veut éviter la répétition de ce genre de crises, il faut une force interafricaine opérationnelle, dont l'action pourrait au besoin être relayée par des forces de l'ONU, de l'Europe, du Japon ou des pays du Golfe. Cette proposition émane de l'Union africaine elle-même, et elle a été reformulée il y a quelques jours à l'occasion du sommet de l'Élysée. Certaines lourdeurs s'y opposent, certes ; mais plusieurs pays s'y sont montrés favorables, pour peu que l'Union africaine manifeste une réelle volonté en ce domaine. Dès lors, un soutien de l'Europe serait à notre sens justifié.
Sur le plan humanitaire, la situation est déplorable et même effrayante. Hier, Mme Georgieva, commissaire européenne à la coopération internationale, à l'aide humanitaire et à la réaction aux crises, a fait un point sur le sujet. Sur les 4,5 millions d'habitants que compte la République centrafricaine, de 1,5 à 2 millions de personnes sont en situation de « pré-famine ». Et même si nous parvenons à rétablir la paix, la situation ne s'améliorera sans doute pas à court terme, car les agriculteurs sont conduits à vendre leur bétail ou à utiliser leurs graines pour se nourrir, de sorte que des pénuries sont à prévoir l'année prochaine. Les organisations non gouvernementales (ONG), l'ONU et l'Union européenne ont réagi, mais cette crise nécessitera des fonds. Une conférence des donateurs devrait se tenir en janvier prochain.
Quant à la transition démocratique, la situation est également complexe. M. Djotodia, Président de transition, dispose encore de quelques moyens d'action sur l'ex-Séléka, dont il était le chef et est beaucoup contesté. Le pays, de fait, n'a plus d'administration, les salaires n'étant au demeurant plus versés, sinon par des pays voisins.
Les Nations unies, représentées sur place par un homme de qualité, le général Gaye, du Sénégal, ont demandé des renforts pour mettre en place des structures administratives pérennes. Cette opération, bien entendu difficile, est en cours.
Aux termes de la résolution 2127 du Conseil de sécurité de l'ONU, les élections doivent avoir lieu en février 2015 ; mais l'ONU, dont une mission se rendra prochainement sur place, va faire en sorte d'accélérer le calendrier. Cela paraît effectivement nécessaire, même si la tâche ne s'annonce pas simple, car beaucoup de registres d'état-civil ont été détruits.
Hier a été installée l'autorité électorale, qui devait l'être avant fin décembre : reste à vérifier que sa composition est conforme à ce que nous pouvons souhaiter. Il faudra bien, à un moment ou à un autre, qu'une autorité légale de ce genre voie le jour. La France, fidèle à la neutralité qu'elle avait observée au Mali, a évité toute intervention en ce domaine.
Le premier objectif, je le répète, est le désarmement impartial, à Bangui, Bossangoa et jusqu'au Nord-Est ; le deuxième est une action humanitaire immédiate et massive ; le troisième, la transition démocratique.
Je veux commencer par rendre hommage aux caporaux Vokaer et Le Quinio. La mission confiée à nos forces en République centrafricaine est extrêmement difficile : très différente de celle accomplie au Mali, elle exige de la clairvoyance et de la minutie, car toute maladresse peut avoir des conséquences dramatiques, y compris pour nos hommes eux-mêmes. Le général Soriano et ses hommes font à cet égard un travail remarquable.
La FOMAC, la Force multinationale de l'Afrique centrale, a été mise en place en 2003 à la suite du coup d'État du Président Bozizé. Différents partenaires africains s'y étaient associés, dans le but d'assurer la sécurité du pays et le bon fonctionnement des institutions, mais cela n'a malheureusement pas empêché le coup d'État du Président Djotodia. Nos troupes, avec 250 hommes, étaient en appui de cette force africaine à travers l'opération BOALI.
Jeudi, la FOMAC, émanation militaire de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC), sera remplacée par la MISCA, placée sous l'autorité de l'Union africaine. Le général gabonais Akaga, commandant de la FOMAC, va donc céder la place au général camerounais Tumenta, officier de grande qualité qui commandera les forces de la MISCA. Celles-ci verront rapidement leurs effectifs portés à 4 000 hommes – contre 2 500 il y a seulement quelques jours –, et à 6 000 au cours des premières semaines de 2014, conformément à la décision annoncée par les chefs d'État africains lors du sommet de l'Élysée la semaine dernière.
Les forces engagées à ce jour viennent du Tchad, du Gabon, du Congo, de la Guinée équatoriale, du Cameroun et du Burundi. Chacune des composantes est amenée à augmenter, et d'autres participations sont attendues dans les jours qui viennent. Nous nous employons à assurer la cohérence entre la MISCA et nos troupes engagées dans le cadre de l'opération Sangaris. Les deux états-majors sont d'ailleurs établis dans le même bâtiment et, en accord avec le futur commandement de la MISCA, des officiers français ont intégré l'état-major de cette dernière.
Certains ont parfois tendance à déplorer les faiblesses des forces africaines ; mais, pour les avoir vues à l'oeuvre – avec les Congolais à Bossangoa, notamment –, je puis témoigner qu'elles sont très structurées, malgré les problèmes de financement qu'évoquait Laurent Fabius.
Les forces tchadiennes ont une histoire particulière dans ce pays: outre les éléments « loyalistes » membres de la MISCA, diligentés par le Président Déby, des hommes, en rupture de ban avec celui-ci, ont rejoint la Séléka, sans oublier les Tchadiens établis depuis longtemps en Centrafrique. Tous ces hommes se connaissent bien, parfois même depuis l'enfance. Cela explique certaines incompréhensions entre une partie de la population centrafricaine et les forces tchadiennes. J'ai échangé à ce sujet avec le Président Déby, samedi dernier, qui est pleinement conscient de ces difficultés. Depuis, le commandant en chef des forces tchadiennes en République centrafricaine a été changé.
Aussitôt après le vote de la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU et la décision du Président de la République, certaines de nos troupes, positionnées à Libreville, se sont projetées vers Bangui ; d'autres hommes, acheminés par anticipation sur le Dixmude, sont entrés dans le pays via le Cameroun, après une escale à Douala. D'autres troupes enfin sont arrivées à partir du Tchad, par le Nord. Ce sont au total 1 600 soldats français qui sont mobilisés : nous n'avons pas, à ce stade, l'intention de faire évoluer ce format. Un accompagnement aérien est assuré, essentiellement par hélicoptère, mais des vols de dissuasion ont été effectués, dès le début de l'opération, par des Rafale.
Aujourd'hui, 1 200 soldats, installés sur l'aéroport de M'Poko, sont présents à Bangui. L'envoi de nos forces y a fait baisser la tension de façon significative, de même qu'à Bossangoa, qui fut le théâtre de beaucoup d'exactions à caractère confessionnel. Dans cette dernière ville, une communauté de musulmans s'est réfugiée au sein de l'école coranique ; les catholiques, eux, ont trouvé refuge dans l'église. Des forces congolaises et françaises sont interposées entre les deux, et l'agressivité est retombée – j'ai d'ailleurs pu constater les premiers effets du désarmement. Les armes en présence vont de la machette ou des flèches empoisonnées au lance-roquettes.
J'ai également eu l'occasion de rencontrer la préfète de Bossangoa : elle était absolument seule, sans bureau ni maison, car les deux ont brûlé. On a beaucoup parlé des massacres du 5 décembre, mais de nombreuses exactions les avaient précédés : les populations réfugiées à Bossangoa viennent de la campagne, et ne veulent pas y retourner tant que la sécurité n'est pas assurée, par crainte de représailles.
À Bangui, la sécurité a beaucoup progressé aussi, du fait du désarmement impartial. Celui-ci consiste non seulement à récupérer des armes, mais aussi à contenir les milices armées dans certains lieux, afin qu'elles ne fassent pas usage de leurs armes en ville. Les ex-Séléka sont relativement bien contrôlés, bien que certains d'entre eux se soient dispersés dans la population, en cachant leurs armes : leur repérage est alors difficile.
Les anti-balaka sont beaucoup moins visibles, que ce soit à Bangui ou dans les autres villes, mais les risques demeurent. Le désarmement impartial fait que nos forces peuvent être prises à partie par les uns comme par les autres. Cet après-midi ont été menées deux opérations, dans deux quartiers qui constituent des bases secrètes pour les ex-Séléka et les anti-balaka. Des deux côtés, on assiste à une radicalisation attisée par les extrémismes. Une plateforme religieuse a été créée à l'initiative de l'archevêque de Bangui, de l'imam président de la communauté islamique et du président de la Conférence évangélique : tous trois lancent des appels au calme, et agissent dans les quartiers pour éviter la radicalisation et les risques d'affrontement confessionnel, qui sont d'ailleurs nouveaux dans ce pays.
Un comité réunissant nos forces, celles de la FOMAC et nos interlocuteurs auprès de M. Djotodia a été mis en place : il a permis l'engagement des mesures de confiance, l'organisation du cantonnement et l'identification des personnels ayant le droit de circuler armés dans la ville – comme la garde personnelle du Président Djotodia. Grâce à la baisse des tensions, des commerces et des banques ont pu rouvrir ; mais la situation reste bien entendu précaire.
Certaines de nos troupes se dirigent à présent vers Bozoum, qui a également connu de fortes tensions. L'arrivée progressive des forces africaines permettra un redéploiement de l'aéroport de M'Poko vers l'ensemble du territoire centrafricain.
Les gens se craignent les uns les autres, et viennent donc se réfugier dans des lieux où ils estiment être protégés. Autour de l'aéroport de M'Poko, 30 000 personnes vivent ainsi dans des conditions dramatiques. L'aide humanitaire et médicale commence à arriver, mais il faut l'accélérer. Reste que la situation ne pourra s'améliorer que si la sécurité devient visible pour tous. À cet égard, l'opération se déroule convenablement, malgré sa difficulté.
Comment se déroule concrètement le désarmement impartial ? Ne pensez-vous pas qu'une fois cette opération terminée à Bangui, une partie des rebelles se disperseront ailleurs sur le territoire ?
M. Fabius a évoqué le désarmement impartial, la défense européenne – que l'on cherche toujours – et la transition démocratique – qui s'apparente à une mission impossible.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les risques de contagion, auxquels vous avez seulement fait allusion ?
La procédure de tutelle, prévue par la Charte des Nations unies, n'est-elle pas envisageable pour des États réduits à néant, comme le sont ceux de la Somalie, de la Centrafrique et de la Libye ?
Par deux fois, j'avais posé une question au Gouvernement sur la situation en Centrafrique : président d'un groupe d'amitié qui ne peut plus fonctionner depuis longtemps, j'avais été interpellé lors d'un déplacement dans ce pays. La diaspora centrafricaine, affolée, m'a aussi régulièrement interrogé.
Vos exposés, messieurs les ministres, donnent une vision plus claire des perspectives, même si vous n'avez pas caché la difficulté de la mission. Certaines informations, que nous ne divulguerons pas, répondent néanmoins à quelques interrogations. Nous pourrions envisager, dans le courant du mois de février prochain, une réunion de notre groupe d'amitié.
Je veux enfin saluer le sacrifice de nos deux soldats, qui ont payé de leur vie leur engagement pour la paix et la sécurité dans cette partie si importante de l'Afrique.
Tout n'est pas clair, messieurs les ministres, qu'il s'agisse des objectifs, que nous partageons, ou du calendrier. La transition démocratique, en particulier, est évidemment du ressort non pas de la France mais des Nations unies, qui disposent d'organes spécialisés. Dans votre exposé, qui a mêlé tous les objectifs, on perçoit mal qui est en charge de quoi.
Quant au calendrier, nous savons bien qu'il est impossible de remettre en marche l'État centrafricain en six mois : le Président de la République a-t-il voulu parler de la présence française, qui serait ensuite relayée par l'Union africaine et les forces de l'ONU, ou de la durée de l'ensemble de la mission ?
La situation humanitaire est catastrophique : la population est démunie et affamée. Les médias évoquent même de possibles émeutes de la faim. Quels dispositifs de coopération européenne peut-on envisager pour répondre à cette urgence ?
Pourriez-vous nous en dire plus, monsieur le ministre de la défense, sur les affrontements confessionnels et la plateforme religieuse ? Les religions sont en effet l'une des clés du problème.
Quelle part approximative de la population a-t-elle été désarmée à ce jour ?
Je veux aussi rendre hommage à nos deux soldats tués en Centrafrique. Le 10 décembre dernier, en séance, André Chassaigne avait indiqué la position du groupe GDR sur l'opération Sangaris. Il y avait urgence, et l'ONU devait envoyer des troupes, mais la France n'avait pas à se porter volontaire.
La Centrafrique fut une colonie française jusqu'en 1960 ; depuis cette date se sont succédé, à sa tête, plusieurs dictateurs, parmi lesquels l'empereur Bokassa, que la France avait soutenu jusqu'au bout.
La France n'a pas vocation à être le gendarme de l'Afrique ; au reste, ses intérêts économiques ne sont sans doute pas étrangers à sa position. Elle est aussi le premier investisseur dans ce pays – je pense aux groupes Bolloré, Total, France Télécom, Air France ou Castel. Le temps n'est-il pas venu de mettre fin aux ingérences, qu'elles soient politiques, militaires ou économiques ?
Selon la résolution 2127, la MISCA doit se transformer en opération de maintien de la paix sous tutelle de l'ONU quand les « conditions » le permettront. Quelles sont ces conditions ? Quand seront-elles remplies ?
Il est presque amusant de vous entendre parler d'une union européenne de la défense, monsieur le ministre, alors que vous ne parvenez même pas à mobiliser le groupement tactique.
Pourquoi, en mars 2013, la France a-t-elle laissé la Séléka prendre Bangui, alors qu'elle avait, sur le terrain, les moyens militaires de l'en empêcher ? Par trois fois, en 2006, 2007 et 2012, nous avions repoussé les groupes armés du Nord, aujourd'hui réunis sous l'appellation de « Séléka ». Nous avons laissé le pouvoir à un groupe qui ne représente que 3 à 4 % de la population, et qui est détesté par la communauté musulmane. Des coupeurs de routes venus de la zone frontalière avec le Soudan et le Tchad ont pu s'installer à Bangui. Comme nous l'ont confirmé d'anciens militaires et des personnels du renseignement, les troupes combattantes de l'ex-Séléka sont des supplétives de celles du Nord Soudan, qui pour certaines d'entre elles ont participé aux massacres du Darfour.
Selon nos informations, les miliciens de l'ex-Séléka, désarmés le jour, sont les maîtres de la nuit, pendant laquelle ils font régner la terreur à bord de leurs pick-up. Les repousser vers le Nord ne réglera rien, car ils trouveront des bases arrière au Soudan.
Enfin, comment comptez-vous empêcher les incessantes tentatives d'incursion des miliciens soudanais ?
Comment se coordonnera l'aide humanitaire venue de l'étranger, tant sur le plan de l'alimentation que pour le secours porté aux enfants, dont plusieurs centaines sont abandonnés dans les rues de Bangui ? La France mènera-t-elle des actions décisives en la matière ?
D'après certaines informations, des trafics de diamants et d'ivoire permettent à l'ex-Séléka de se financer : y a-t-il des moyens de les enrayer ?
Enfin, que reste-t-il des dix-sept préfets centrafricains ? Sont-ils encore présents sur le terrain ? Peut-on espérer voir ressurgir à court terme un embryon d'État, sans lequel tous les efforts actuellement consentis risqueraient d'être vains ?
En tant que député de Castres, je ne puis que m'associer à l'hommage rendu à nos deux marsouins parachutistes. Je salue également l'action exemplaire menée par l'ensemble de nos troupes, et tout particulièrement par le 8e RPIMa.
La situation actuelle en Centrafrique n'est pas apparue ex nihilo : ce pays est régulièrement soumis à des troubles, à des exactions et à des crises humanitaires, même si elles ont pris récemment une ampleur particulière.
La France avait la possibilité d'intervenir il y a quelques mois, mais elle ne l'a pas fait : je n'y reviens pas. Pour pacifier l'Afghanistan, pays comparable à la Centrafrique en termes de superficie, on nous avait dit qu'il fallait 300 000 hommes. Certes, la géographie, la population et les forces en présence sont différentes ; mais est-il crédible de prétendre « tenir » le pays avec 200 fois moins d'hommes ? On est en droit d'en douter.
Fixer une limite de l'intervention dans le temps me semble de surcroît une erreur. Pourquoi ne pas dire que nous partirons quand les objectifs seront atteints, quitte à les préciser ? En tout état de cause, nous devrons certainement rester beaucoup plus longtemps que prévu.
Le Premier ministre centrafricain a fait part de sa réprobation quant à la révocation de trois ministres : ne pourrait-il être un recours à l'avenir ?
Plus de 150 000 personnes sont déplacées, ce qui est considérable pour un pays de cette taille. Qu'en est-il de la situation des civils musulmans et chrétiens ? La concorde est-elle envisageable ? Les chrétiens représentent 85 % de la population, et il existe des musulmans modérés.
Vous avez évoqué une situation humanitaire effroyable, près du tiers de la population se trouvant dans le dénuement le plus total. Quelle est la situation de nos ressortissants dans le pays ?
Mardi dernier, en séance, j'avais déjà évoqué le partage du « fardeau financier ». J'y reviens, car la question du financement des opérations militaires françaises en Afrique me paraît fondamentale : elle se pose pour la Centrafrique comme elle s'était posée pour le Mali, et se posera d'autant plus que l'intervention sera longue. On peut d'ailleurs s'attendre à ce qu'elle se pose à nouveau, à l'avenir, pour d'autres interventions en Afrique. Il faudrait que les États européens, ou l'Union européenne elle-même, participent au financement de nos opérations extérieures. « Nous ne sommes pas des mercenaires », objecte-t-on. De fait, nos troupes ont été envoyées sur place pour défendre des intérêts français, et pas seulement européens, mais il n'est pas moins évident que l'Europe a intérêt à empêcher une désintégration de l'Afrique.
Le Président de la République a évoqué la création d'un fonds permanent, dont vous ne parlez plus guère, monsieur le ministre des affaires étrangères, si j'en crois votre réponse à une question au Gouvernement cet après-midi. La mise en place d'un tel instrument prendra certainement du temps, mais je le crois indispensable, car il y va aussi des principes : l'Europe a-t-elle la volonté d'exister sur la scène internationale ? Les autres États membres se sentent-ils concernés par ce qui se passe en Afrique ?
Je m'associe bien entendu à l'hommage rendu aux deux caporaux du 8e RPIMa.
J'ai l'honneur de représenter les Français établis en Centrafrique – ou du moins le peu qui y sont restés. Tous, sans exception, ont été victimes de pillages, voire d'exactions. Après l'échec de l'accord de Libreville, je vous avais alerté, messieurs les ministres, ainsi que le chef d'état-major des armées, sur cette situation. Si la France n'est pas intervenue plus tôt, est-ce parce qu'elle ne l'a pas voulu ou parce qu'elle ne l'a pas pu, en raison de sa mobilisation au Mali ? Plus généralement, le temps du retour de la présence militaire française en Afrique n'est-il pas venu ? Les États africains eux-mêmes le demandent, comme me l'a confirmé M. Bongo il y a quelques jours à Libreville. Sans cette présence, tous les groupes djihadistes risquent en effet de descendre vers le Sud.
Votre description de la situation, messieurs les ministres, est plus inquiétante que ce que l'on pouvait imaginer. Il n'est d'ailleurs plus question de délais, alors que l'on envisageait initialement un retrait rapide. La situation étant plus grave que prévu, ces délais seront-ils plus longs ?
Les réfugiés sont dans une situation dramatique ; n'oublions pas, d'ailleurs, qu'il en existe aussi, venus de Syrie, en Jordanie et au Liban. Ils méritent au moins autant d'attention.
Quid, enfin, du fonds européen évoqué par M. de La Verpillière ?
Si ne nous sommes pas intervenus plus tôt, monsieur Marsaud, c'est n'est pas en raison de l'insuffisance de nos effectifs ; c'est parce que nous avons attendu la décision du Conseil de sécurité des Nations unies. Plus de 3 000 soldats français, je le rappelle, restent mobilisés au Sahel. Nous réfléchissons au redéploiement de nos forces en Afrique, afin de les rendre plus rapidement opérationnelles : au Mali comme en Centrafrique, la préposition de certaines troupes s'est révélée très utile à cet égard.
Les groupes de l'ex-Séléka sont plus organisés que ceux des anti-balaka. Les premiers sont davantage présents en ville ; les seconds ont généralement trouvé refuge à l'extérieur des villes ou dans la forêt. Dans le cadre des mesures de confiance, nos troupes organisent le cantonnement des unités organisées dans des lieux identifiés où elles déposent leurs armes. C'est l'objet de l'opération en cours à Bangui pour l'ex-Séléka. Par ailleurs, lorsque nos patrouilles croisent des personnes armées en ville, elles leur demandent de rendre les armes, en utilisant au besoin la force.
Des opérations de pénétration dans les quartiers ont également eu lieu : j'en ai pris deux exemples tout à l'heure. Le désarmement impartial concerne tous les quartiers, qu'ils soient à dominante musulmane ou catholique, et l'ensemble du territoire ; c'est pourquoi nos troupes se déploient à Bossangoa et le feront à Bozoum, Ndélé et ailleurs, à mesure de l'arrivée des forces africaines, qui elles-mêmes participent à ce dispositif.
Nous tentons d'obtenir des chefs militaires le cantonnement des pick-up eux-mêmes : ce point est évoqué lors des réunions, autour du général Soriano, des partenaires africains et des représentants du Gouvernement centrafricain. Ce travail de longue haleine est indispensable, car les populations déplacées n'accepteront de rentrer chez elles que lorsqu'elles seront sûres de ne pas s'exposer aux représailles qu'elles avaient déjà subies, de la part de l'un ou l'autre camp, jusqu'au 5 décembre inclus.
La situation des seize autres préfectures, en dehors de Bangui, est, d'après la description qu'on m'en a faite, similaire à celle de Bossangoa. En d'autres termes, la présence de l'État se résume à celle du préfet seul, lequel s'estime heureux si son bureau n'a pas été incendié.
Les dignitaires religieux parlent d'une même voix ; ce sont les extrémistes qui attisent les antagonismes. Pour des raisons de sécurité, l'imam habite même chez l'archevêque. Nous réfléchissons aux moyens d'étendre la diffusion par radio – car la télévision est quasi inexistante –, afin de relayer la parole de la plateforme religieuse jusque dans les quartiers.
Les milices de l'ex-Séléka sont estimées à 2 000 à 3 000 hommes sur le grand Bangui. Nous avons identifié plusieurs lieux de cantonnement, dont certains ont disparu. Certains des combattants ont regagné le Soudan du Nord, d'où ils venaient ; d'autres sont des Tchadiens du Sud, et d'autres encore des Centrafricains qui ont pu se disperser. Mais ces événements ne datent que d'une semaine : cela permet de mesurer l'ampleur de la tâche déjà accomplie. À cette heure, la situation est déjà plus apaisée que mardi, même si elle demeure précaire.
M. Myard a posé une question pertinente. Si la tutelle est tombée en désuétude, d'autres mécanismes s'en rapprochent, à commencer par celui dit « Kosovo » ou celui d'assistance technique renforcée. C'est ce dernier modèle que nous préconisons, dans au moins quatre domaines : la police et la sécurité, les finances publiques, l'assistance humanitaire et l'administration locale – état-civil et élections.
Il n'y a pour ainsi dire plus d'administration en Centrafrique. Les préfets, de surcroît, ont presque tous été nommés par M. Djotodia. Celui-ci occupe pour l'instant le pouvoir avec M. Tiangaye, mais, si la situation n'était plus stabilisée, il faudrait un étai ; d'où notre proposition aux Nations unies.
Les ressortissants français sur place, madame Imbert, sont au nombre de 642, dont 350 binationaux ; 23 familles ont sollicité une aide financière pour rentrer en France, et 54 personnes sont sous protection dans le site dit des « dix-sept villas ». Beaucoup de ces ressortissants ont subi des exactions, mais ils sont souvent très attachés à leur terre d'accueil : les services du ministère sont bien entendu à leur disposition et très mobilisés pour les aider ou faciliter leur retour.
J'ai rappelé les trois objectifs de l'intervention pour la clarté de l'exposé, monsieur Poniatowski, mais il va de soi que la France n'est pas chargée de les mener tous à bien. Elle agit au demeurant dans le cadre de l'ONU, et son rôle est d'abord de contribuer à la sécurisation. À terme, la MISCA devra prendre le relais : c'est le sens du délai de six mois qui a été fixé. Au Mali, par exemple, les soldats français ne seront bientôt plus que 1 000, après avoir été 5 000.
Pour l'heure, la France joue un rôle important avec l'ONU, mais elle n'a nullement l'intention de se substituer à celle-ci pour assurer la transition politique. Quant à l'aide humanitaire, nous y contribuons également, mais aux côtés de l'ONU, de l'Union européenne et des ONG.
S'agissant de la situation humanitaire, un habitant sur dix a quitté son foyer et, selon nos estimations, 2,3 millions de personnes ont besoin d'une assistance d'urgence. Je rappelle qu'il n'existe que sept chirurgiens pour 4,5 millions d'habitants.
La France a augmenté son aide financière à la République centrafricaine : 2,5 millions d'euros ont été versés au cours du premier semestre de 2013 au titre de l'aide alimentaire d'urgence, et environ 10 millions, sur quinze mois, via l'Agence française de développement (AFD). Enfin, la France contribue à l'aide humanitaire engagée par l'Union européenne – j'en ai indiqué les montants.
Monsieur Candelier, je ne partage pas votre raisonnement selon lequel l'ONU devait envoyer des troupes, mais pas la France. La France est membre de l'ONU, et même membre permanent de son Conseil de sécurité qu'elle fut la première à saisir du problème. Comment, dans ces conditions et après le vote unanime de la résolution 2127 par les quinze pays membres, aurait-elle pu inviter ces derniers à s'engager sans le faire elle-même ?
Quant aux intérêts économiques, il n'y en a aucun.
M. Candelier a cependant raison de souligner la nécessité de mettre un terme aux ingérences. Plusieurs orateurs se sont étonnés que la France n'ait pas soutenu M. Bozizé. Je veux à cet égard réaffirmer une position de principe : la France ne soutient pas, ou plus, tel ou tel gouvernement ; elle soutient les Africains. Les membres de l'Union africaine et de la CEEAC ont pris acte de l'arrivée au pouvoir de M. Djotodia, auquel ils ont rappelé les termes de la légalité. Je rappelle aussi qu'en vertu d'une décision de l'Union africaine et de la CEEAC, entérinée par l'ONU, ni M. Djotodia, ni M. Tiangaye, ni aucun membre du Gouvernement ou du bureau de l'Assemblée nationale n'auront le droit de se présenter aux futures élections. L'Union africaine a sur ce point une position très claire : les dirigeants installés suite à un coup d'État ne peuvent légitimer celui-ci en se faisant élire a posteriori. Ainsi M. Traoré, homme par ailleurs très estimable, n'a pu se présenter aux élections maliennes.
L'activité économique étant à l'arrêt, monsieur Baumel, la Centrafrique n'a plus de ressources. Le trafic routier vers le Cameroun et le Tchad sera prochainement rétabli, mais pour l'approvisionnement en ressources, l'effet restera très limité.
La comparaison avec l'Afghanistan n'est pas fondée, monsieur Folliot. En tout état de cause, nous n'avons pas l'intention de « tenir » le pays. Ce matin, un journaliste américain félicitait la France d'être devenu un « faucon » : il se trompe. La France veut seulement contribuer à la paix et à la sécurité.
Beaucoup de chrétiens et de musulmans, monsieur Pueyo, sont paisibles et modérés, il faut leur permettre de le rester. À cet égard, les responsables religieux font un travail particulièrement utile.
Quant au partage du problème, monsieur de La Verpillière, la France défendra, au cours du Conseil européen de jeudi et vendredi, l'idée d'un fonds financier permanent. Un tel instrument ne réglerait certes pas rétroactivement la question financière, mais, comme on l'a plusieurs fois rappelé, la situation en Centrafrique concerne l'Europe et l'Afrique dans leur ensemble. Il n'y a donc pas de raison que la France, qui sacrifie déjà beaucoup d'hommes, assume seule la charge financière de l'opération. Nous souhaitons la création d'une force panafricaine ; si, d'ici là, d'autres opérations ont lieu, il serait normal que la France ne soit pas la seule à les financer.
Nous avons voulu décrire la situation telle qu'elle est, monsieur Bacquet. Nous pensons, au regard des moyens déployés, qu'il devrait être possible de résoudre les difficultés, qui sont considérables. La France assume sa part, et même davantage, aux côtés des États africains. L'Europe reste à ce jour insuffisamment mobilisée. Les États-Unis apportent une aide logistique et financière. Quant à l'ONU et à son secrétaire général, ils sont très mobilisés.
Comme l'a souligné le Président de la République, c'est la tâche et l'honneur de la France de contribuer au règlement de cette crise, même si nous n'avons pas vocation à rester durablement sur place. Lorsque l'on voit un homme se noyer, et que l'on est l'un des seuls à pouvoir lui porter secours, il est difficile de passer son chemin en sifflotant.
La séance est levée à dix-huit heures trente.