Intervention de Pierre Morange

Réunion du 23 janvier 2014 à 11h30
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morange, rapporteur :

Nous nous sommes donc interrogés sur les raisons qui expliquent ces mauvais résultats et appellent des changements en profondeur. Notre réflexion s'est articulée autour de trois axes.

S'agissant du financement du paritarisme, d'abord, 60 millions d'euros sont reversés chaque année aux organisations syndicales et patronales par le Fongeforn au travers d'un préciput. Dans ces conditions, les Opca, qui ont vocation à drainer les financements, sont fortement incités à maximiser leur collecte au détriment d'autres considérations comme la mutualisation réelle des sommes collectées. Cette question du financement est abordée dans le projet de loi présenté hier devant la commission des Affaires sociales, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. La réforme du système « former ou payer », source d'inefficacité majeure, doit nous conduire à réfléchir sur les modalités de prélèvement les mieux adaptées au financement de la formation professionnelle.

La nature de l'offre, ensuite. La formation professionnelle fait l'objet d'une offre abondante, pour ne pas dire pléthorique, marquée toutefois par une diminution de la durée des formations. Or les formations qualifiantes sont, le plus souvent, des formations longues, ce qui explique que le projet de loi qui vient de nous être présenté vise à porter de 120 à 150 heures le nombre d'heures cumulables sur le compte personnel de formation, car c'est le minimum requis pour les formations qualifiantes.

Le manque d'information, enfin. Face à cette offre de formation foisonnante, les demandeurs ont le plus grand mal à s'orienter. Il n'existe pas, à ce jour, de base de données nationale consolidée de l'offre de formation ; il y a plusieurs bases, selon les territoires, alimentées et organisées différemment. Quant aux labels qualité, qui permettraient de choisir les meilleures formations, ils sont trop nombreux et peu visibles.

Dans ce contexte, nos préconisations ont pour ambition de permettre à chacun de se réapproprier la formation professionnelle. Elles sont guidées par le pragmatisme et le bon sens et visent moins à reconstruire une nouvelle cathédrale qu'à nous doter d'un dispositif opérationnel.

Nous proposons, en premier lieu, de simplifier et de renforcer la gouvernance. On le sait, la complexité de notre système de formation n'a d'égale que son inefficience, du fait notamment de la lenteur et de l'inertie qu'elle génère. La simplification passe par le rapprochement des instances de gouvernance de l'emploi et de la formation professionnelle ; par la suppression de la juxtaposition systématique du paritarisme et du quadripartisme ; enfin par l'achèvement de la décentralisation, avec le transfert aux régions de certaines compétences.

Il est donc proposé de fusionner le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, le Conseil national de l'emploi et le Comité paritaire national de la formation professionnelle ; d'associer les organismes représentatifs des activités dite du « hors champ » – économie sociale, agriculture, professions libérales – à la gouvernance de la formation professionnelle continue ; de fusionner le Centre d'études sur l'emploi et le Centre d'études et de recherches sur les qualifications ; de fusionner les comités de coordination régionale de l'emploi et de la formation professionnelle et les commissions paritaires interprofessionnelles régionales de l'emploi ; d'associer enfin les partenaires sociaux à la genèse et à la signature des contrats de plan régionaux de développement de la formation professionnelle.

Il importe également de réformer le financement de la formation professionnelle. La proposition n° 11 – partiellement reprise dans le projet de loi qui nous a été présenté hier – suggère d'adopter un nouveau système de financement des organisations syndicales et patronales, déconnecté de la collecte des fonds de la formation professionnelle. La proposition n° 13 vise, pour une meilleure information du Parlement sur le suivi des conventions d'objectifs et de moyens, à intégrer dans les annexes budgétaires au projet de loi de finances un bilan détaillé de la politique de contractualisation avec les Opca, politique que la proposition n° 12 recommande de poursuivre pour réorienter leurs missions vers le conseil et l'ingénierie, ce qui est fondamentalement leur coeur de métier. Quant à la proposition n° 14, elle suggère la réalisation d'une étude d'impact permettant d'apprécier les conséquences du transfert de la collecte des contributions des entreprises au titre de la formation professionnelle aux Urssaf. En effet, le système « former ou payer » aboli, la problématique de l'imputabilité des dépenses de formation disparaît et la contribution des entreprises devient comparable aux cotisations sociales. Pourquoi, dès lors, ne pas la faire collecter par les Urssaf ?

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